Rue de Tournon et découvertes discographiques du dernier « Baroque »…
Sur « L’Heure de la fermeture dans les jardins d’Occident » de Bruno de Cessole (aux Éditions de la Différence)
ainsi que 3 nouveautés discographiques :
« Missæ breves« BWV 234 & 235, de Johann Sebastian Bach, par l’Ensemble Pygmalion : CD Alpha 130 ;
« Missa votiva » ZWV 18, de Jan Dismas Zelenka, par les Collegium 1704 & Collegium Vocale 1704, sous la direction de Václav Luks : CD Zig-Zag Territoires ZZT 080801 ;
et « La Primavera _ Cantate per una prima donna« , de Joseph-Martin Kraus, par Simone Kermes, et L’Arte del Mondo, sous la direction de Werner Ehrhard : CD Phœnix Edition 101
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T’ai-je dit que j’étais en train de lire « L’Heure de la fermeture dans les jardins d’Occident«
de Bruno de Cessole (à la Différence) ?
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dont l’action (des conversations-déambulations _ philosophiques sur ce qui « s’annonce » dans « l’air du temps » _, pour l’essentiel) se déroule
du côté de la rue de Tournon
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_ lequel, « Tournon » _ Camille, comte de Tournon (1778-1833) _, fut préfet de Rome (= du « département du Tibre« ) de 1809 à 1814
_ une expo (« Camille de Tournon : le préfet de la Rome napoléonienne (1809-1814)« ) lui fut consacré à la Bibliothèque Marmottan de Boulogne-Billancourt en 2001-2002 : avec de notables transformations urbaines romaines
_ que constata Granet (en bons termes avec Tournon à Rome ;
cf mon article « François-Marius Granet, admirable tremblement du temps, Aix, Paris, Rome » _ ;
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dont celle, « transformation », par l’architecte-urbaniste Valadier, de la Piazza del Popolo : l’entrée
_ et Porte (d’apparat ! depuis l’arrivée somptueuse de la reine Christine : le 20 septembre 1655 ! Alexandre VII Chigi ayant chargé le Bernin de nouvelles décorations en cet honneur-là : d’une reine s’établissant à Rome, convertie du luthérianisme au catholicisme…) _ ;
et Porte, donc, du « chemin de France »…) _ ;
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puis préfet _ l’institution ayant demeuré sous la Restauration _ de la Gironde (du 25 juillet 1815 au 4 février 1822, très exactement…)
_ existe un « Cours Tournon » à Bordeaux (dans le prolongement vers la « Place des Quinconces » de la « Place Tourny ») _,
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et enfin préfet du Rhône, à Lyon (jusqu’au 22 janvier 1823) ; puis « Pair de France« ) ;
fin, ici, de l’incise « Tournon » _ ;
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du côté de la rue de Tournon, donc, et du côté du Jardin du Luxembourg ;
enfin dans ton quartier de la rue Crébillon
( le siège et la boutique d’Alpha sont 3 rue Crébillon, à proximité de l’Odéon) :
je peux « suivre » leurs déambulations sur un plan déplié de Paris…
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Un livre assurément intéressant
_ et significatif de ce qui peut « se creuser », en ce moment, dans quelques « recoins » de consciences contemporaines : ce serait-là un « signe » éditorial, en quelque sorte… _
que cette « Heure de la fermeture dans les jardins d’Occident« ;
même si je trouve le passage _ le chapitre XVI, de la page 235 à la page 256 _ sur Rome
(avec « passage obligé », dès l’arrivée du voyageur, au Caffe Greco, via Condotti)
_ il y en a donc un aussi, de « passage » (sur Rome)… _
un peu convenu :
un peu trop « à la touriste pressé »…
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_ je pense ici à ce mot d’Yves Michaud : « on est toujours le « touriste » d’ « un autre »… ;
« un autre » qui se pense, lui, un peu moins empêtré
dans les « clichés » « courant les rues » ;
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Gœthe, lui-même, n’a-t-il pas mis plus de six mois
_ arrivé le 1er novembre 1786 (et parti pour Naples le 21 février de l’année suivante),
c’est à partir de son second séjour romain (du 8 juin 1787 au 14 avril 1788) qu’il commence à vraiment « voir » et comprendre (au-delà des clichés « importés ») Rome ! _ ;
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Gœthe n’a-t-il pas mis plus de six mois, donc,
à « découvrir vraiment » Rome ? on s’en rend assez bien compte quand on lit un peu « attentivement intensivement » son très, très riche (en détail passionnant, pour si peu qu’on s’y penche) Journal de « Voyage en Italie » ;
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et c’est là une des grandes raisons du séjour prolongé
(trois ans ; puis deux ; combien de mois aujourd’hui ?)
des artistes « pensionnaires » de l’Académie de France à Rome ;
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Granet, non « pensionnaire », a vécu vingt-sept ans à Rome ; Poussin, et Claude (le Lorrain) ont choisi, eux, de n’en plus partir… ;
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à comparer à l’heure des week-ends (forfait « tout compris » !) par avion !!!
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Fin de l’incise sur le « passage romain » de « L’Heure de la fermeture « …
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Intéressant surtout pour l’excellent « portrait » du philosophe _ baptisé « Frédéric-Émile Stauff » ; et son angle de « vision » sur cette « heure de fermeture » des « jardins« demeurant encore un peu,
tels des îlots que menace l’assez peu résistible « montée des eaux »
des océans du « réchauffement climatique »,
au cœur de nos cités d' »Occident« …
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Ou ce qui change dans notre « air du temps« …
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A part cela, j’ai écouté hier après-midi une première fois
3 disques :
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_ les 2 messes brèves (« Missæ breves » BWV 234 & 235, par l’Ensemble Pygmalion : CD Alpha 130) de Johann Sebastian Bach ;
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_ une messe votive (« Missa votiva » ZWV 18, par les Collegium 1704 & Collegium Vocale 1704, sous la direction de Václav Luks : CD Zig-Zag Territoires ZZT 080801) de Jan Dismas Zelenka ;
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_ et un récital de cantates italiennes (de Métastase : « La Primavera _ Cantate per una prima donna« , par Simone Kermes, et L’Arte del Mondo, sous la direction de Werner Ehrhard : CD Phoenix Edition 101) de Joseph-Martin Kraus ;
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ma curiosité s’étant d’abord portée sur le génie, trop chichement « servi » au disque, de Zelenka ;
dont tant d’œuvres (dont une collection de splendides messes, à Dresde) demeurent _ si étonnamment ! _ encore inédites discographiquement ! ;
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si bien que je me suis dit (à part moi…), à propos du CD Alpha : « pourquoi encore Bach ?.. » ;
« et ne pas _ bien plutôt _ donner à découvrir les chefs d’œuvre de Zelenka ?!… »
_ ici, chez Zig-zag _ par d’excellents tchèques
enregistrés à l’église du Prytanée de La Flèche : telle était donc mon interrogation : je te la livre ici « telle quelle »…
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Cela dit, si le CD Zelenka tient ses promesses (de splendeur) : quel immense musicien, catholique _ tchèque (= du royaume de Bohème) _ pour la cour du fastueux roi de Pologne
_ converti au catholicisme, lui, pour raison de condition sine qua non d’accession (par élection !) au trône polonais !… _,
à Dresde
_ capitale de l’électeur saxon (que le roi _ élu _ de Pologne demeurait aussi)… _
quel immense musicien que ce Zelenka ! Que de chefs d’œuvre (baroques) encore à « découvrir » de lui !.. ;
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si le CD Zelenka tient ses promesses (de splendeur) _ je reprends l’élan de ma phrase _, le CD Bach ne lui cède rien en « beauté » :
lui aussi est « splendide » : en l’intimité même, toute de ferveur, de son interprétation _ intense _
par ces tout jeunes interprètes : on sent le souffle de leur passion…
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Une très grande chose, à nouveau, cher maître d’œuvre !..
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Et en plus, la notice, par le jeune chef (de Pygmalion), Raphaël Pichon, est passionnante,
à propos des pratiques de « parodies » de Bach…
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Quelqu’un, ce jeune Raphaël Pichon, à suivre ; un nouveau, donc, de tes excellents « poulains », mon cher Jean-Paul… Bon boulot d’édition, donc ! aussi ; en plus du régal de cette interprétation-ci de pareille si belle musique !..
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Et combien le jeune librettiste-et-surtout-chef (de son Ensemble : « Pygmalion ») est fondé à « reprendre », page 12 du livret, le mot malheureux du vieux « médecin, théologien, organiste et musicologue Albert Schweitzer » _ c’est à ce genre de « décalage » temporel « culturel » que nous mesurons mieux, cher Jean-Paul, combien le temps (de l’Histoire) passe (pour tous…) ; et combien nous avons besoin de voir nos propres sens _ notre æsthesis _ toujours « ra-fraîchis » par de nouveaux enthousiasmes autrement (et, si possible, mieux) lucides !!! _ ;
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est fondé à « reprendre », donc,
le mot qui qualifiait ces messes-là de « superficielles et dénuées de tout sens« , parce que « parodiques », et constituées de pièces empruntées à droite et à gauche (ou « de bric et de broc » : à telle ou telle de ses cantates : BWV 72, 102, 179, 187…) : comme quoi même une oreille aussi avisée que celle du vénérable « sage » de Lambaréné _ et auteur de « »Jean-Sébastien Bach, le musicien poète » (publié aux Éditions Fœtisch, en 1904) _ pouvait avoir ses propres « tâches aveugles » (en l’occurrence « sourdes« ) _ selon le cliché « romantique », lui (et impropre au « Baroque »), des « chefs d’œuvre » (au compte-gouttes)… : la ferveur connaissant alors, surtout avec un Bach (ou avec un Zelenka), d’autres rythmes qu’un peu plus tard ; quand il faut, bientôt, même l' »enseigner », aux « Nathanaël » (des « Nourritures terrestres » : en 1897, dans le cas d’André Gide, alors âgé de vingt-huit ans _ 1869 – 1951)…
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Mais tu m’avais prévenu, que ces jeunes-là _ « Pygmalion » et Raphaël Pichon devraient très vite se faire un nom… _ avaient un talent fou !..
En effet !
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Une excellente découverte
_ et pour Alpha !
et pour la joie des oreilles (et un peu, voire beaucoup, plus que cela) des mélomanes !..
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Enfin, le CD Joseph-Martin Kraus est lui aussi _ mais nous ne sommes plus « à l’église » _ très beau ;
mais là, nous sortons
_ en plus de l’église, au « profit » du « concert » _ qui se « développe » au XVIIIème siècle (depuis l’ouverture, à Paris, du « Concert spirituel« , dans les années 20 de ce siècle : le privilège royal est du 22 janvier 1725, très précisément…) ;
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mais là, nous « sortons », donc, aussi, du « dernier baroque » du XVIIIème siècle ;
et entrons (et nous trouvons) dans quelque chose d’assez proche _ en beauté aussi !!!
(et virtuosité : pour le gosier d’une rare agilité et hauteur _ « de vue », aussi : le livret, page 10, parle de « difficulté inouïe des parties de soprano« _ d’une « prima donna » (à la brève existence, elle aussi : Louisa Sofia Augusti (1756-1790 !) _ ;
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nous nous trouvons, donc, dans quelque chose d’assez proche _ et en beauté d’abord ! _ de Mozart
_ dont Joseph-Martin Kraus (de vie tout aussi « brève » : Miltenberg am Main, en Bavière, 1756 – Stockholm, 1792, pour celui-ci) est le quasi contemporain (Salzbourg, 1756 – Vienne, 1791, pour celui-là, Mozart…).
Pour comparer :
Johann Sebastian Bach : Eisenach, en Thuringe, 1685 – Leipzig, 1750 ;
et Jan Dismas Zelenka : Louňovice pod Blaníkem en Bohême, 1679 – Dresde, 1745 : quasi contemporains l’un de l’autre, eux aussi (et qui se sont connus _ et appréciés _ à Dresde)…
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Le livret de ce CD de cantates (italiennes) de Kraus rapporte (page 11) ce mot du compositeur, dans une lettre du « 2 août 1790 au secrétaire royal et directeur de théâtre, Abraham-Niclas Clewberg-Edelcranz à Paris, s’exprimant ainsi sur la perte de ce talent exceptionnel : « Si seulement notre pauvre Augusti _ « morte le 25 juin 1790 à Stockholm » (nous informe le livret, page 10) _ avait voulu nous laisser là ses cordes vocales, je m’en lamenterais moins : mais _ Mon Dieu ! Mes pauvres arias et toutes les superbes colorations !!!« …
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Bref de bien belles musiques, en cette fin de vacances d’été
et de « rentrée » pré-automnale : le temps est devenu splendide _ lui aussi… _ à Bordeaux et dans le Sud-Ouest…
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Bien à toi,
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Titus
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Ps : la Belgique a-t-elle « précisé » la date de sortie du DVD de « Cadmus et Hermione » ?
L’extrait accessible sur Internet est superbe : Vincent Dumestre est, comme il nous y a habitués, en merveilleuse forme… Et cette « première » de la toute première « tragédie en musique » du « Surintendant » Lully (représentée sur scène, dans la salle du jeu de paume du Béquet, en mars ou avril 1673) suscite mon impatience…
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Enfin une scandaleuse absence discographique (du fondateur de la tradition française de chant : pas moins ! dont les « rejetons » sont Rameau, Berlioz, Debussy, et bien d’autres…) « réparée » ! Et par un musicien, Vincent Dumestre (théorbiste merveilleusement fin et subtil : ce n’est pas pour rien qu’il a donné pour nom à son ensemble « Le Poème harmonique » !) particulièrement attentif à la finesse des sources _ idiomatiques _ de ce génie-ci, qui n’est ni italien, ni allemand ; et pas un « dix-huitiémiste », comme jusqu’ici ; et tant d’autres interprètes pas aussi « soigneux » _ ni aussi fins, ni aussi justes _, encore aujourd’hui…
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La réponse, aux dernières nouvelles, à cette dernière question (sur la date de parution du DVD de « Cadmus« ) serait le 16 octobre prochain…
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Titus Curiosus, ce 29 août 2008
Tags: air du temps, beauté, brièveté, esprit du temps, finesse, Paris, parodies, Rome, splendeur, tragédie en musique, virtuosité