Une excellente surprise discographique ramiste : « Les Paladins », par Valentin Tournet et La Chapelle harmonique : un enregistrement enfin intégral (et parfaitement réussi) …

— Ecrit le samedi 26 février 2022 dans la rubriqueHistoire, Musiques”.

C’est avec assez forte _ et excellente ! _ surprise que le public mélomane baroque français vient de découvrir la parution d’un enregistrement discographique enfin complet (!) des « Paladins » de Jean-Philippe Rameau,

une « comédie lyrique » en trois actes créée au Théâtre du Palais-Royal à Paris en 1760.

Le précédent enregistrement _ au Théâtre municipal de Tourcoing en date du mois d’octobre 1990 ; publié en un double CD (ARN 263660, d’une durée de 112′ 16) par Arion en 2006 _ des « Paladins » dont je disposais en ma discothèque, est celui de Jean-Claude Malgoire et la Grande Ecurie et la Chambre du Roy…

Or, voici que, ce mois de février 2022, le très actif label Château de Versailles – Spectacles publie un enthousiasmant triple CD (CVS 054, d’une durée de 160′ 47 ; enregistré dans la Galerie des Batailles du Château de Versailles au mois de décembre 2020) de ces « Paladins » de Rameau, par Valentin Tournet et La Chapelle Harmonique…

Voici l’article simplement intitulé « Les Paladins » par lequel avant-hier 25 février Jean-Charles Hoffelé s’en est fait l’écho sur son riche _ et décidément nécessaire _ site Discophilia :

LES PALADINS

Lorsque Les Paladins déboulèrent en 2004 sur la scène du Châtelet, avec force hip hop, rames de métro et bestiaire délirant (!), réinventés par William Christie et sa formidable bande, je ronronnais de contentement. Enfin le temps était venu pour l’autre ultime grand ouvrage lyrique de Rameau, dont la postérité aura été effacée par le destin plus tortueux _ dont la représentation entreprise, l’été 1764, a été brutalement interrompue par le décès de Jean-Philippe Rameau, le 12 septembre 1764 ! _ des Boréades. Las, le disque ne suivit pas, seul le spectacle fut documenté par un réjouissant DVD _ Opus Arte, sur la scène du Châtelet en 2004 _, mais Christie coupait un peu _ hélas ! _, scène oblige. Les Paladins en restèrent donc à l’enregistrement pionnier  _ de 1990, il a 32 ans… _ de Jean-Claude Malgoire, parcellaire _ voilà… _, une version plus complète _ sous la direction de Konrad Junghänel, enregistrée à Duisburg en avril 2010 _, parue récemment _ au label Coviello _, s’avérant décevante, malgré un bel Atis _ d’Anders J. Dahlin. Là encore, tout le texte n’y était pas _ trois fois hélas.

Coup de tonnerre, après de brillantes Indes Galantes (j’y reviendrai), Valentin Tournet entraine cette folle comédie-ballet jusqu’à l’ivresse _ cf cette courte vidéo de 2′ 36 Rameau y est prodigieux de verdeur dans son orchestre _ une facette en effet capitale du génie musical de Rameau ! _, le livret assaisonnant une intrigue toute simple d’humour, la piquant d’un ton souvent ironique, autorisant l’octogénaire à faire sa plume aussi légère que brillante _ voilà : d’après un conte leste du toujours délicieux La Fontaine.

L’orchestre des Paladins, avec ses couleurs poivrées _ oui ! _, n’est pas moins stupéfiant _ voilà ! _ que celui des Boréades, ses nombreuses danses _ un facteur bien entendu fondamental du génie de Rameau _ cumulent de savoureuses musettes (c’est la musique même des Paladins, en déguisement de pèlerin, menés par Atis), d’explosifs bruits de guerre. Il faut entendre comment Valentin Tournet emporte tout cela, quelle flamme _ oui ! _, quelle imagination de timbres, de rythmes, il imprime à ses musiciens, instrumentistes et choristes.

Distribution en or pur, mené par l’ardent Atis de Mathias Vidal dans sa meilleure voix, mais comment résister à l’Argie touchante de Sandrine Piau, à la Nérine mutine d’Anne-Catherine Gillet (qui fait entendre une qualité de diction, une couleur typique d’une certaine école de chant française _ et c’est en effet très important ! _ qui par elle perdure _ sur l’impeccable art du chant français d’Anne-Catherine Gillet, cf mon article du 24 octobre 2011 : ), les méchants formidables de Florian Sempey et Nahuel Di Pierro.

Tout cela sera démêlé par la bonne fée Manto, rôle de travesti que Philipe Talbot assume crânement de son ténor rossinien (même si je garde une petite préférence pour celle plus « queer » de François Piolino _ chez Christie en 2004 _), les ultimes danses pourront s’élancer, la fête ne sera pas finie pour autant, Valentin Tournet ajoutant _ en effet, pour 14′ 12 _ en appendice un air de Nérine et quelques pièces d’orchestre retirés avant les représentations de 1760. Abondant livret, note d’intention du chef, article éclairant de Loïc Chahine, intégralités du conte de La Fontaine et du livret de Duplat de Monticourt, décidément Les Paladins ont eu raison d’attendre si longtemps, les voici enfin, irrésistibles !

LE DISQUE DU JOUR

Jean-Philippe Rameau(1683-1764)


Les Paladins, RCT 51

Sandrine Piau, soprano (Argie)
Anne-Catherine Gillet, soprano (Nérine)
Mathias Vidal, ténor (Atis)
Florian Sempey, baryton (Orcan)
Nahuel Di Pierro, basse (Anselme)
Philippe Talbot (La fée Manto)

La Chapelle Harmonique
Valentin Tournet, direction

Un album de 3 CD du label Château de Versailles Spectacles CVS054

Photo à la une : le chef d’orchestre Valentin Tournet – Photo : © DR

Ainsi, un _ cruel _ manque discographique ramiste vient-il d’être très heureusement comblé !
Merci à Valentin Tournet… 

 

Ce samedi 26 février 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

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