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Le devenir de la « langue littéraire » en France de 1850 à aujourd’hui : un admirable travail pour comprendre ce qui menace de mort l’exception (culturelle) française et les « humanités »

30déc

« La langue littéraire _ Une histoire de la prose en France, de Gustave Flaubert à Claude Simon » est un ouvrage, sous la direction de Gilles Philippe et Julien Piat, aux Éditions Fayard, absolument passionnant, qui explore avec une réjouissante précision d’analyse (dans le détail !) la construction dans la France d’entre 1850 et 1980 d’une langue

_ cette « langue littéraire » d’une prose un peu « artiste« , précisément :

de Flaubert, et des frères Goncourt à Claude Simon, en passant par Émile Zola, Charles Péguy, Marcel Proust, Jean-Paul Sartre & Roland Barthes, pour ne retenir que les plus représentatifs des représentants des divers styles qui, tour à tour, affleurent, règnent, un moment (1860, 1880, 1900, 1920, 1940, 1960, avant la défaillance des années 80), puis laissent la place à d’autres… ;

que révèlent et analysent magnifiquement les six contributeurs à cet ouvrage : Stéphane Chaudier, Michel Murat, Gilles Philippe, Julien Piat, Christelle Reggianni et Stéphanie Smadja… _

langue ayant des fonctions idéologiques cruciales (« artistes« , « culturelles« , apparemment ; mais non sans de subtiles vraies jouissances !..) pour l’imaginaire national,

tout particulièrement sous la III ème République,

mais aussi en ce qui lui succède, jusqu’à aujourd’hui,

sur le déclin, puis face au renouveau, de la rhétorique :

déclin constant de la rhétorique au XIX ème siécle (avec déclin, aussi, concomitant, de l’enseignement du latin) ;

puis renouveau _ actuel _ de la rhétorique, lié au déploiement irrésistible et maintenant mondialisé du marketing au XX ème siècle…

Quid, ici, au passage, de ce « chiffon rouge » de l’« identité nationale » ?..

La rhétorique _ utilitaire : en matière de communication et de pouvoir sur l’autre _ étant l’autre de la « littérature » en matière de « langue » !..

Et la « prose littéraire » se construisant, historiquement, donc, une notable « place » entre la poésie, d’une part, et la prose scientifique _ et d’« essai« , et, encore, de pure information (communication & propagande)… _ d’autre part…

Cela permet de comprendre, en regard, le devenir (historique) de l’école (formatrice des esprits) ;

et plus généralement de la culture (« humaniste«  :

à distinguer, donc _ c’est ma conviction _ de ce que Michel Deguy nomme le « culturel » : pleinement idéologique, lui)…

C’est, alors, de rien moins que de la nature _ essentiellement « plastique » et « flexible » (sur cette différence, cf les travaux de Catherine Malabou : par exemple « Ontologie de l’accident _ essai sur la plasticité destructrice » ; ou « La Plasticité au soir de l’écriture _ dialectique, destruction, déconstruction« …), et donc éminemment fragile _ de l' »humain » lui-même _ cf aussi le radical « Humain, inhumain, trop humain«  d’Yves Michaud, réfléchissant sur l’œuvre de Peter Sloterdijk (dont l’important « Règles pour le parc humain« , aux Éditions Mille et une nuits)… _ qu’il s’agit dans cette histoire des « humanités » et de leur langue,

en partie du moins  :

la partie non strictement positive _ voire « positiviste«  _, préciserai-je, de la formation des personnes (et de ce que Walter Benjamin appelle « l‘expérience« , menacée de « destruction » ! _ jugeait-il, en les passablement inquiétantes, déjà, années 30…

Cf là-dessus le passionnant récent ouvrage de Georges Didi-Huberman : « Survivance des lucioles« , face au « pessimisme« , à mieux « organiser« , selon lui, d’un Giorgio Agamben ; dès « Enfance et histoire _ destruction de l’expérience et origine de l’Histoire« , son premier livre publié, en 1977…) ;

celle qui rivalise, justement, avec la langue « positive » des « sciences« , surtout les plus « dures » _ mais les autres aussi (dites « sciences humaines«  ; cf les positions là-dessus d’un Pierre Bourdieu…) _, pour tenir,

avec un succès assurément fragile et à bien mesurer, aussi, dans ses fluctuations

_ cf par exemple, « sur le terrain«  (éminemment sensible d’un réel assez décisif ! pour l’individu !), la fonction des « Grandes Écoles«  en France ; et la place, minime, pour ne pas dire infime, mais non sans une certaine aura, toutefois, des filières dites « littéraires«  par rapport aux filières dites « scientifiques » (en fait « techno-scientifiques » et même, désormais, carrément « techno-commerciales » : vers où penchent donc, de fait, ces disciplines « ingénériales«  ?.. « polytechniques » ?..) ; et les conséquences qui s’ensuivent dans les hiérarchies sociales qui, en partie assez considérable, en résultent… _

cette langue (« littéraire » ; ou des « humanités« ) en tant que partie non strictement positive de la formation « humaine » des personnes

qui rivalise, donc _ avec ses styles ! jusques et y compris un « style«  authentiquement personnel, singulier ; comme en quelques artistes ! _, avec la langue « positive« 

pour tenir le haut-du-pavé !.. Face au « dés-humain » et « dés-humanisant » de ce qu’affrontent (et deviennent !.. passivement ; à leur corps _ et âme ! _ défendant, même _ quand et si âme il y a…) les personnes dans les applications massives on ne peut plus effectives, et certes bien efficaces, toujours sur le terrain _ en dur ! _ du réel, du concept pragmatique managérial  de « ressources humaines » !


Soit le « dés-humanisé » de l’homme

comme pur et simple « simple moyen« , seulement _ le reste étant sans utilité (dite alors « économique« ) ! _, dans le flux _ seul « intéressant » !.. _ des profits _ comptables _ de ventes _ qui prévalent ! voire seuls « comptent » ! _ de « marchandises » où il _ l’homme, encore _ tente de surnager…

Soit, un enjeu historique rien moins que civilisationnellement _ ou historialement, pour d’autres _ crucial ;

et qui aide, au passage, peut-être à saisir un peu mieux ce qu’a pu être et a effectivement été _ voire résiste un peu encore… _ « l’exception française »

face au rouleau compresseur mondialisé _ globish, en version de « langue«  _ du libéralisme pragmatique anglo-saxon triomphant…

Le détail des analyses, sur 534 pages (d’une très grande richesse), des auteurs de cet ouvrage, « La langue littéraire _ Une histoire de la prose en France, de Gustave Flaubert à Claude Simon« , _ Stéphane Chaudier, Michel Murat, Gilles Philippe, Julien Piat, Christelle Reggianni et Stéphanie Smadja, je rappelle les noms de chacun de ces contributeurs remarquables ! _ est absolument passionnant !

Une mine de culture sensible de la plus haute qualité ! déjà !

Et donc un must pour l’homme cultivé !..

En plus de la grâce gratuite de ses enchantements sans nombre pour l’intelligence de la sensibilité, de l' »aisthesis« …


Un très grand livre que ce « La langue littéraire _ Une histoire de la prose en France, de Gustave Flaubert à Claude Simon« …


Titus Curiosus, ce 30 décembre 2009

Elégance et probité d’Elie During _ penseur du rythme _ en son questionnement « A quoi pense l’art contemporain ? » au CAPC de Bordeaux

17avr

C’est avec grande élégance et probité de penser qu’Elie During nous a donnés à partager ses interrogations et réflexions (de philosophe actif

_ se concentrant tout particulièrement sur l’étrangeté interrogative des complexités du temps et de l’espace)

face au travail (de penser à l’œuvre dans des formes sensibles) des artistes plasticiens contemporains,

pour la sixième et dernière conférence de la (riche et très réussie) saison 2008-2009 de la Société de Philosophie de Bordeaux,

que recevait, en sa très belle salle de conférence du second étage, le CAPC Musée d’Art contemporain de Bordeaux

_ avec une chaleureuse présentation de Yann Chateigné Tytelman (« responsable de la programmation culturelle » du Musée), mardi 7 avril à 19 heures…

Outre

« L’Âme« , anthologie de textes commentés, avec une introduction et un glossaire, aux Éditions GF-Flammarion, collection « Corpus », en 1997 ;

« La Métaphysique« , anthologie de textes commentés, avec une introduction et un glossaire, aux Éditions GF-Flammarion, collection « Corpus », en 1998 ;

et  » La Science et l’Hypothèse : Poincaré« , aux Éditions Ellipses, 2001 ;

le philosophe Elie During a publié

_ en collaboration avec Alain Badiou, Thomas Bénatouïl, Patrice Maniglier, David Rabouin, Jean-Pierre Zarader : « Matrix, Machine philosophique » aux Éditions Ellipses, en 2003 ;

et 

_ en collaboration avec Bernard Stiegler : « Philosopher par accident. Entretiens avec Elie During« , aux Éditions Galilée, en 2004.

C’est en effet à partir des fondamentaux de l’aisthesis,

depuis Baumgarten (1717-1762 : son « Esthétique » fonde la discipline)

et Kant (cf et sa « Critique de la raison pure » et sa « Critique de la faculté de juger« ),

qu’Elie During réfléchit à ce qu’expose (et (se) donne à « penser ») « l’art contemporain » ;

et tout particulièrement eu égard aux cadres a priori de l’expérience que forment pour le sujet _ en l’exercice de ses facultés (de perception et connaissance) _ l’espace et le temps…

L’esthétique kantienne sollicitant, fort judicieusement, en l’exercice même de la faculté de l’imagination _ et pas seulement artistique _, le dynamisme ouvert du « génie« …

Elie During, avec beaucoup de probité ainsi que de précision (et même délicatesse) en son analyse _ mais est-ce séparable, dans l’ordre du qualitatif, tout du moins !? _, a commencé par indiquer « quatre chemins » que ne prendrait pas son exploration (personnelle) de l' »art contemporain » ;

ainsi que les formes de cet « art contemporain » auxquelles il allait consacrer son attentation, sa focalisation, son analyse, donc :

principalement l’œuvre de Marcel Duchamp (28 juillet 1887, Blainville-Crevon en Seine-Maritime – 2 octobre 1968, Neuilly-sur-Seine)

et « l’art conceptuel » ;

sans exclure d’autres artistes _ nous l’allons voir… _ ;

en privilégiant plutôt la « Mariée mise à nu par ses célibataires, même« , ou « Grand Verre« , réalisée sur panneau de verre (1915-1923, exposée au musée de Philadelphie) que les ready-mades,

pour le premier _ Duchamp _ ;

et plutôt l’œuvre _ les séries _ de Sol La Witt que celle de Joseph Kosuth,

pour le second _ « l’art conceptuel » :

pour leur meilleure dynamique.

Ce sont en effet,

ainsi que le formulait le texte de présentation de la conférence,

la « machine artistique« 

et sa « puissance d’invention formelle« 

qui sollicitent l’intérêt, la curiosité, voire la passion d’Elie During à l’égard de (et face à) la production plasticienne des artistes contemporains,

livrés _ ou se livrant _ à la force

(ou faiblesse, pauvreté, se cherchant… ;

je pense ici au concept d' »impouvoir« , de Georges Bataille)

de leur génie singulier en leur rapport

(de concept autant que de sentir

_ mais non « romantique » !)

au réel même ;

et à la tâche,

en conséquence de quoi, ainsi que concomitamment,

de « monstration »

qu’ils (artistes qu’ils sont) se donnent ;

à laquelle ils se « vouent », en quelque sorte (en réponse à quelque « appel » de « formes« …) ;

et dont ils nous proposent,

proprement effectivement,

quelques « monstrations » sensibles ;

en des « dispositifs »,

davantage qu’en des œuvres proprement dites,

closes et arrêtées (voire « achevées »)

_ soit, si l’on y tient, en des « œuvres ouvertes« , si l’on s’autorise à se saisir du concept qu’a proposé, en son temps, le sémioticien Umberto Eco : « L’Opera aperta » _ « L’Œuvre ouverte » _ a été publiée en 1962…

« Il y aurait une plastique du concept« , disait en sa présentation Elie During,

dans la lignée (appliquée ici aux Arts Plastiques) de la conception deleuzienne de la philosophie, comme capacité

(« pouvoir » _ ou « dynamis » _ se mesurant à son effectivité _ et à elle seule ! face au réel, lui-même constitué de « forces », de « dynamiques »…)

de créer, mettre en place, des concepts facteurs d’opérativité…

Le reste n’étant que flatus vocis, ou imposture : tant pour les philosophes (discourant) que pour les plasticiens (exposant), d’ailleurs…

« La pensée a une forme, mais elle doit se comprendre dans toute son extension, de façon à y inclure formats et dispositifs, gestes et procédés«  : c’est là le facteur décisif ; ce qui distingue irrémédiablement une problématique (effective : dynamisante !) d’une thématique (inerte ; et par là stérilisante, plombante : aveugle et sans filiation en aval) ;

problématique où se donne à ressentir (et retentir, pour commencer) la complexité en jeu des modalités actives de l’espace et du temps, tout d’abord.

Et au-delà de Duchamp et Le Witt,

Elie During nous a confrontés à quelques images _ sur l’écran de la salle de conférence obscurcie _

des travaux de Dan Graham

_ passionnants d’inventivité, en ses jeux du temps sur l’espace, et réciproquement _ ;

et de Tatiana Trouvé

_ dont Elie During avait rédigé une approche, « Tatiana Trouvé : la stratégie de l’implicite« , pour l’exposition de 2003 de cette artiste au CAPC : « Aujourd’hui, hier, ou il y a longtemps…« ,

dont le commissaire était François Poisay…

Bien sûr, (bien) d’autres approches de l’art contemporain sont possibles (et compossibles) ;

et il ne fallait certes pas s’attendre, de la part d’un philosophe,

à quelque vademecum de quelque « Art contemporain pour les Nuls« , si j’ose pareille expression,

de la part d’un philosophe qui ne se prête en rien

_ pas davantage que la Philosophie ni que l’Art ! quand ils sont authentiques _

à la réduction à des formules de « résumé »..


Pour ma part,

j’ai été particulièrement sensible à cette mise en relation de l’analyse, du penser, d’Elie During, avec les fondamentaux de l' »aisthesis » ;

afin de rappeler à la curiosité (bienveillante, ouverte, ludique) de l’amateur d’Art

(et d’Art contemporain, en l’occurrence)

toujours fondamentalement ouvert (et accueillant) aux œuvres _ je veux dire à l’œuvre, même, « naturante », avant que d’être que « naturée » _ du « génie » de l’artiste au travail ;

rappeler, donc _ si besoin s’en faisait jamais ressentir… _,

l’exigence radicale de vérité et de nécessité _ tout à la fois _ de l’Art

_ exigence autre que celle du prurit d’une expression narcissique  (« romantique« ) de soi…

La découverte de l’Art est, pour tout un chacun qui vient s’y livrer

_ « Passant _ ainsi parle le Musée selon Paul Valéry _, il dépend de toi que je sois tombe ou trésor ; n’entre pas sans désir !«  _,

une découverte radicale de l’altérité ;


de l’altérité qui vient à passer plus ou moins à proximité de nous-même

(mais non sans distance ! toujours ! déjà que le « soi » n’est pas clos !),

et s’offrir, éphémèrement

_ pour un moment qu’il s’agit pour nous d’étirer ; en un « dialogue » avec l’œuvre rencontrée _,

à quelque accueil de notre part, de « spectateur », à qui consent à s’ouvrir à elle ; à la ressentir ; en sortant de sa propre fermeture, narcissique, à un ego arrêté, déjà fossilisé…

Quand cette rencontre-là a lieu,

avec son cortège d’exigences réciproques (de la part de l’œuvre et du lieu d’exposition _ tel qu’un Musée _ comme, et surtout, de soi),

c’est une chance _ ou une grâce _

qui nous donne _ de manière désintéressée _ de l’expansion…

Titus Curiosus, ce 17 avril 2009

En complément,

voici « Intermondes« , un texte d’Elie During consacré à Tatiana Trouvé

(in Bing, n°7, Galerie Emmanuel Perrotin, 2008, à la page 58 : les pages consacrées à Tatiana Trouvé _ avec photos des œuvres _ allant de la page 54 à la page 65),

à l’occasion de l’exposition « Time Snares » _ « Pièges à temps« , cela peut se traduire… _ de l’artiste à la Galerie Emmanuel Perrotin de Miami, du 4 décembre 2007 au 23 février 2008

_ auquel je me permettrai d’ajouter quelques « commentaires » de mon cru… :

Pour rendre compte de l’espèce de dualité ou de « double bind » qui traverse cette œuvre, il faudrait imiter le geste d’Alighiero Boetti scindant son nom en deux. Il faudrait écrire : « Tatiana et Trouvé : artistes parisiennes d’origine calabraise, nées en 1968 ». Il y a Tatiana qui travaille en solitaire, comme une « sauvage » (Van Gogh disait « comme un bœuf »), maniant la scie à métaux et le fer à souder dans son atelier de Pantin ; et puis il y a Trouvé, absorbée dans l’anamnèse rêveuse de sa propre activité artistique, constamment suspendue entre deux mondes, ou deux dimensions. La face chtonienne et la face lunaire : diurne et nocturne, activité et passivité, frénésie productrice et mélancolie du projet. Peu importe d’ailleurs qui d’elles d’eux est Tatiana ou Trouvé. Les jumelles (T&T, pour faire bref) travaillent de concert. Et l’œuvre témoigne de cette dualité : pour qui sait voir, pour qui sait écouter, ces installations et sculptures qu’un regard distrait nous fait dire désaffectées, désertées, mutiques, frémissent d’une sourde activité. Ici le sable envahit un module qui doucement s’éteint, là une structure tubulaire agencée à une sorte de secrétaire _ en son « Bureau d’activités implicites » (ou BAI) _ est près d’être submergée par une coulée de gravats ; le silence règne, mais en même temps tout est chargé, tout est tendu, tout vit _ voilà ! _ d’une agitation microscopique _ à l’infra-scintillement duquel il faut apprendre (vite) à se prêter... _ sous la lumière vibrante des néons. Le temps _ de la rencontre avec l’œuvre ; et de sa « contemplation » ; celui de l’« acte æsthétique » (cf Baldine Saint-Girons : « L’Acte esthétique« )… _ n’est pas suspendu, mais infiniment ralenti _ et c’est très important. Sous l’apparence glaçante et même spectrale de ce « Bureau sans maître » _ cf le « Marteau sans maître » (René Char, en 1934 ; et Pierre Boulez, en 1955… _, ce sont des durées larvaires, incommensurables aux nôtres _ coutumières, du moins ; mais qui nous sont données à « ressentir«  ici _, tout un monde grouillant de schémas dynamiques _ encore une expression qui vérifie ma propre intuition (vectorielle) _, d’opérations mentales, de devenirs virtuels _ oui ! qui peuvent (et doivent) passer à l’acte : par notre concours…

Ce monde n’a rien de particulièrement opaque ou compliqué, mais il est impliqué, implicite (Valéry aurait dit « implexe » _ dans « Mon Faust«  _), c’est-à-dire plein de plis et de replis _ et que l’œuvrer de l’artiste nous offre à « déplier«  ici… Il faut prendre le temps de le déplier _ voici immédiatement l’opération « invitée » ! _, il faut se faire à ses rythmes _ un concept décidément fondamental de tout exister ! _ : Le « Bureau d’Activité Implicite » était le Cerveau et la Mémoire de l’artiste. Il n’a pas besoin d’être présenté dans son intégralité pour continuer à disséminer _ l’opération se poursuivant… _  ses effets : les polders lovés dans les recoins de l’espace d’exposition ouvrent _ oui : il n’y a d’œuvre vraie qu’ouvrante ! et avec précision… _ de nouvelles dimensions _ inaperçues jusqu’alors _, tandis que les conduits de cuivre connectent _ oui _ les pièces, gagnent (!) le plafond, percent (!!) les cimaises et suggèrent _ donnent à penser _ une circulation _ oui _ perpendiculaire à la déambulation _ bien sûr _ naturelle du « regardeur » _ encore un concept en acte, un modus operandi, fondamental ! Ainsi cet univers qu’on dit volontiers replié sur lui-même et autosuffisant ne cesse de s’étendre, de contaminer l’espace environnant _ un Art ne saurait être anodin : il « inspire«  et « modifie«  _ sous les formes les plus les plus diverses : il cherche _ en se faufilant _ les passes (portes ou grilles d’aération _ quel beau concept que celui de « passes«  ! _), il s’immisce _ voilà ! _ entre les mondes, entre les dimensions. « Intermondes » est l’autre nom des limbes. Ici, il désigne l’équivalent formel d’espaces psychiques : espaces des attentes, des latences, des rémanences et des réminiscences _ qui nous travaillent _, espaces des imminences ou des transformations lentes qui opèrent _ oui, c’est cela, la puissance d’un Art authentique _ en silence _ pour ce qui concerne les Arts (Plastiques, en l’occurrence). Les objets qu’ils renferment sont moins présentés que projetés : même construits en volume, ils sont toujours dessinés. Quoi qu’on en dise, ils offrent peu de prises à la « fiction », si l’on associe ce mot aux vagabondages _ de fuite _ de l’imagination ou au fantasme _ par opposition au « réel » qui intéresse l’artiste courageux ! Maintenus en réserve, en latence, ils ne sont _ certes _ pas en sommeil : ils sont en veille _ oui : et malheur aux un peu trop assoupis et aux congénitalement endormis : il sera bientôt trop tard ! Kairos ne repasse pas… _, comme on le dit des appareils ménagers ou de la « Lampada Annuale » de Boetti. Car le temps perdu _ Proust nous l’a appris : cf la merveille (absolue !) du « Temps retrouvé » !.. _ peut être ranimé à tout instant _ l’étymologie de l’expression « être ranimé » étant mieux que parlante…

La force _ qu’est un art sans conséquences ? _ de T&T tient à la manière dont elle parvient, au-delà de toute « atmosphère », à imposer l’évidence _ plastique : sentie et pensante _ d’un univers autonome, consistant, et néanmoins parfaitement étranger aux coordonnées et aux échelles habituelles _ formant clichés… Cette consistance _ d’une œuvre vraie _ tient avant tout à la temporalité propre du projet _ en avant _ et de la mémoire _ vers l’arrière : d’une culture assumée _ artistiques. T&T a fait de cette trame_ vivante, vibrante _ son matériau. Sans relâche _ un artiste (et un philosophe) vrai(s) se fatigue(n)-t-il(s) jamais ?.. _, de raccord en raccord, elle imagine et construit un espace de concentration _ c’est décisif _ de son activité qui ne serait pas un théâtre _ réduit à un plateau et un décor (plats)…

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