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Le charme absolu, très prenant et très tendre, des « Lieder ohne Worte » de Felix Mendelssohn, en un choix de 14 pièces, par Igor Levit, en un parfait CD, tout fraîchement enregistré à Berlin au mois de décembre dernier…

06fév

Retrouver le charme très prenant et très tendre, voilà, des « Lieder ohne Worte«  de Felix Mendelssohn, en une anthologie de 14 d’entre eux, puisés aux Op. 19, 30, 38, 53, 62 et 102 du maître,

sous les doigts justement délicats d’Igor Levit,

en un CD Sony Classical 19658878982 tout fraîchement enregistré à Berlin les 3 et 4 décembre 2023 pour paraître le 26 janvier 2024

_ en une forme de réponse sienne au massacre du 7 octobre dernier : « And, at some point, it became clear that I had no other tools than to react as an artist. I have the piano, I have my music. And so the idea came to me to record these works, Mendelssohn’s « Songs Without Words » (…)  It is my artistic reaction  – as a person, as a musician, as a Jew – to what I have felt in the past few weeks and months. Or, to put it more precisely, it is one of many reactions that came to mind  » ; écouter et regarder cette brève vidéo de présentation par Igor Levit lui-même…

Je dois immédiatement ajouter cependant ici que rien, rien de rien, surtout, ne s’entend des terrifiantes atroces circonstances (et retentissements) qui ont conduit Igor Levit à ce parfait enregistrement-ci au Teldex Studio de Berlin les 3 et 4 décembre derniers, du sublime classicisme (mozartien ?..) de Felix Mendelssohn à son apogée de poésie (apollinienne ?..) de ces sublimissimes, si parfaitement dénuées du moindre pathos, 14 « Lieder ohne Worte« … Le choix d’une toute simple musique pour l’éternité, très humblement parfaitement servie ici, voilà, par l’interprète, tout simplement, comme il se doit… _,

est un très délicat et modeste délice : écoutez donc…

Qui me rappelle aussi mon affection personnelle pour le jeu magnifique et idéal de Roberto Prosseda, dant tout l’œuvre pour piano de l’immense probe et humble Felix Mendelssohn

_ et en cette occurrence-ci le parfait double CD Decca 476 6796 des 57 « Lieder ohne Worte » (8 x 6 = 48 + 7 restés sans numéro), enregistré à Aci Reale, en Sicile, au pied de l’Etna, aux mois de janvier et mars 2008 ; cf le témoignage-constat de mon bref article du 3 mars 2018 :  « « , et écoutez aussi ceci…

Tout simplement servir la grâce humble et modeste, heureuse et tranquille, intérieure et sereine, toute pure, de Felix Mendelssohn…

Ce mardi 6 février 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Mozart, ou la subjuguante jubilatoire évidence du bonheur absolu, par le piano (de grâce !) de Francesco Piemontesi ; ou le rare miracle de toucher ici aux lumières du paradis musical…

31oct

Le CD « Mozart – Piano Concertos N° 19 & 27 – Rondo K. 386 » de Francesco Piemontesi , avec le Scottish Chamber Orchestra dirigé par Andrew Manze _ soit le CD Linn Records CKD 622, enregistré à Edimbourg les 2-3-4 mars 2019, et paru le 26 août 2020… _, renforce ma conviction jubilatoire que Mozart, à lui seul, pourvoie l’évidence simplissime d’un bonheur absolu…

Du Concerto n°19 en fa majeur K. 459 (du 11 décembre 1784),

voici le podcast de l’Allegro (de 12′ 21) du premier mouvement :

Et du Concerto n° 27 en si bémol majeur K. 595 (du 5 janvier 1791),

voici le podcast de l’Allegro (de 14′ 12) du premier mouvement ;

et le podcast de l’Allegro (de 9′ 27) du troisième mouvement…

Une simple _ subjuguante _ évidence jubilatoire…

Cet article-ci, de ce 31 octobre 2023, se trouve être le neuvième que je consacre sur ce blog à des interprétations _ de Liszt, de Mozart, de Schubert… _ de Francesco Piemontesi _ pour les labels Orfeo, Pentatone, Linn Records…

_ 1° : celui en date du 26 décembre 2018 : «  » ;


_ 2° : celui en date du 6 juin 2019 : «  » ;

_ 3° : celui en date du 27 juin 2019 : «  » ;

_ 4° : celui en date du 25 septembre 2019 : «  » ;

_ 5° : celui en date du 29 octobre 2019 : «  » ;

_ 6° : celui en date du 24 octobre 2020 : «  » ;

_ 7° : celui en date du 19 septembre 2023 : «  » :

_ 8° : celui en date du 26 septembre 2023 : « « …

Mais c’est le stupéfiant miracle d’évidence simplissime de grâce _ voilà ! _ de ce proprement sublime CD des 19e & 27e  Concertos pour piano et orchestre K. 459 & 595 de Mozart sous les doigts de Francesco Piemontesi _ né à Locarno, dans le Tessin, le 7 juillet 1983 : il a maintenant 40 ans… ; lors de l’enregistrement de ce CD à Edimbourg les 2, 3 et 4 mars 2019, Francesco Piemontesi avait 36 ans… _,

qui me fait toucher aux lumières du paradis, au moins, de la musique…

Et voici encore _ manière pour moi d’enfoncer encore un peu mon clou… _ un très significatif _ lucidissime _ compte-rendu de concert donné le 28 avril 2014 au Conservatoire de Bruxelles par Francesco Piemontesi, sous la plume de François Mardirossian,

un compte-rendu découvert à l’instant sur le site de l’excellent Crescendo : « Francesco Piemontesi, l’intelligence musicale« 

_ c’est un jour, possiblement à l’automne 2018, une interview, saisie à la radio (probablement sur France-Musique), d’un chef (je ne me souviens hélas plus qui : Daniel Barenboïm ?…), auquel il était demandé quel interprète de la musique il conseillerait d’écouter en priorité ; celui-ci avait alors cité le nom et parlé très chaleureusement de Francesco Piemontesi, dont le jeu, avec lui, en concert l’avait profondément marqué ; et c’est ce très avisé conseil d’expert qui m’a incité à découvrir alors ce pianiste inconnu jusqu’alors de moi, et qui, depuis, non seulement ne m’a jamais déçu, mais surtout, comme aujourd’ui pour ce sublime CD Mozart des Concertos 19 & 27 du label Linn Records, paru au mois d’août 2020 (je l’avais laissé passer…), me comble… _ :

Francesco Piemontesi, l’intelligence musicale

LE 29 AVRIL 2014 par La Rédaction

Francesco Piemontesi © Marco Borggreve

Wolfgang Amadeus Mozart : Sonate pour piano KV 533/494
Ludwig van Beethoven : Sonate pour piano n° 30, op. 109
György Ligeti : Cordes vides (Etudes pour piano I), Entrelacs (Etudes pour piano II)
Claude Debussy : Des pas sur la neige (12 Préludes, livre I), La Danse de Puck (12 Préludes pour piano, livre I)
Franz Schubert : Sonate pour piano, D 958


Du haut de ses 30 ans _ à cette date du concert bruxellois, le 28 avril 2014, donc _, Francesco Piemontesi vient de nous offrir un récital au programme très exigeant. On se souvient de son éclatant 3e Prix au Concours Reine Elisabeth (2007) et, ce soir, il atteint un niveau de perfection subjuguant _ un adjectif qui vient aussi sous ma plume ! Sa Sonate _ en fa majeur K. 533/494, n°15 _ de Mozart est d’une grande simplicité et d’une confondante évidence _ « simplicité« , « évidence«  : encore de mes mots pour caractériser le miraculeux talent d’interprétation de Francesco Piemontesi… _, son toucher est sans manière, aérien, chantant _ voilà : la grâce même… Un son tout à fait mozartien _ mais oui ! Mais qu’est-ce qu’un son mozartien ? La simplicité de rigueur, la rondeur dans l’attaque de la touche et une grande vocalité dans les lignes mélodiques _ voilà, voilà. Piemontesi ne tombe jamais dans l’affèterie _ certes non… _ et conduit sans cesse _ dynamiquement, mais sans jamais rien de forcé : seulement l’évidence du plus grand naturel… _ la mélodie. L’auditeur comprend parfaitement _ oui _ où le compositeur voulait l’amener. Ce jeune pianiste suisse-italien _ natif, le 7 juillet 1983, de Locarno, dans le Tessin ; et il enregistre souvent à Lugano _ comprend parfaitement _ oh que oui ! _ la musique et la fait comprendre aisément _ et tout est dit là, en cette merveilleuse dynamique de jeu, sans jamais rien de si peu que ce soit forcé. Le mouvement lent est joué dans la tendresse _ oui ! _ et nous fait regretter qu’elle ne soit pas donnée plus souvent. Le récital se poursuit avec la grande Sonate op. 109 de Beethoven. D’emblée, Piemontesi modifie l’approche de l’instrument et offre un son très différent. Dès les premières notes, on saisit le bond dans le temps. L’instrument pour lequel cette œuvre fut écrite n’est plus le même, et la manière de s’exprimer non plus _ en effet. Nous sommes plongés dans les tourments beethovéniens et le deuxième mouvement conjugue poigne et vitalité _ comme il convient pour Beethoven. Le dernier mouvement (thème et variations) est un des moments forts de ce concert : le public est attentif à cette musique qui nous porte à l’état de grâce _ encore un de mes mots, même si la grâce de Beethoven n’est pas la grâce de Mozart… _ quand elle est bien jouée comme ce soir. Francesco Piemontesi chante la vraie virtuosité : science des voix, connaissance approfondie de l’esprit beethovénien et grande générosité dans l’émotion _ oui… Il sait où il va et il donne en permanence l’impression que la musique naît sous ses doigts à l’instant même où il la joue _ comme cela devrait toujours, toujours, être le cas ! Après la pause, deux Études de Ligeti parfaitement maîtrisées, claires, bien construites et d’un grand soin du son. Même chose pour les deux Préludes de Debussy et la tension est à son comble dans Des pas sur la neige _ je possède aussi le CD des Préludes de Debussy par Francesco Piemontesi, enregistré à Lugano en mars et avril 2014 : le CD Naïve V 5415. Piemontesi impose naturellement au public une écoute sereine et silencieuse _ oui, lumineuse ; et c’est aussi le cas à l’écoute de ses magnifiques CDs successifs depuis… En bis, deux autres Préludes de Debussy dont Feux d’artifice, très impressionnants de clarté et de facilité _ des traits éminemment piemontésiens... _, presque sans pédale forte. 
Un récital mémorable et un programme sans complaisance.


François Mardirossian
Bruxelles, Conservatoire Royal, le 28 avril 2014

Et de ce même magnifique écouteur qu’est François Mardirossian, lui-même interprète, et à nouveau à propos et de Mozart et de Francesco Piemontesi,

on peut lire aussi, toujours sur le site de Crescendo, et en date du 12 juillet 2014, cet article-ci intitulé « Piemontesi : l’intelligence même de Mozart« , cette fois à propos du CD « Mozart – Piano Works » par Francesco Piemontesi, le CD Naïve V 5367…

Immense merci à cet exceptionnel passeur de musique qu’est au piano Francesco Piemontesi mozartien absolu !

Et bien sûr merci à ces (et ses) sublimes Mozart !

Ce mardi 31 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Et parution, aussi, d’un CD « Les Concerts royaux » de François Couperin, par Patrick Cohën-Akenine et Les Folies françaises : le terrible défi de réussir à « attraper » la toute simple confondante magie du très discret François Couperin…

28oct

Comme en une suite à la récente parution du très beau CD « François Couperin L’âme en peine – Pièces pour clavecin » de Michèle Dévérité (le CD sonamusica SONA2305)

_ cf mon article «  » d’avant-hier jeudi 26 octobre _,

paraît aussi maintenant, pour le label Château de Versailles Spectacles, un CD « Couperin les Concerts royaux _ Issus du Troisième Livre de pièces de clavecin, 1722« , le CD CVS099, par Les Folies françaises et son chef, Patrick Cohën-Akenine :

quatre « Concerts » qui sont rien moins qu’un des sommets absolus de toute la musique française ;

pas moins !..

Que penser alors de cette nouvelle interprétation de tels chefs d’œuvre de François Couperin ?

_ le CD a été enregistré au Musée instrumental de Provins, où est conservé le somptueux clavecin de Pierre Donzelague (Lyon 1711), du 27 au 29 juillet 2021…

Après une recherche rapide dans l’ordre incertain des rangées et piles de ma discothèque _ quelques autres CDs de ces quatre « Concerts royaux«  ayant probablement échappé à mon regard ; et je ne possède pas l’enregistrement de Christophe Rousset Aparté AP 196 (paru le 19 avril 2019, il a dû échapper à ma vigilance)… _,

j’ai mis la main sur quatre CDs comportant ces quatre « Concerts royaux« -ci de François Couperin :

 

_  enregistré en 1973, le CD Séon – RCA Victor GD 71960, dirigé par Sigiswald Kuijken ;

 

_ enregistré en 1975, le CD Archiv 427 119-2, dirigé par Heinz Holliger ;

_ enregistré en 1986, le CD ASV Gaudeamus CD GAU 101 du Trio Sonnerie, dirigé par Monica Huggett ;

_ et enregistré en 2004 _ du 6 au 10 septembre 2004 à l’abbaye de Saint-Michel-en-Thiérache _, le CD Alia Vox AVSA 9340 du Concert des Nations, dirigé par Jordi Savall, avec Manfredo Kraemer au violon, Marc Hantaï à la flûte traversière, Alfredo Bernardini, au hautbois, Josep Borras au basson, et Bruno Cocset à la basse de violon, Jordi Savall à la basse de viole, Xavier Diaz-Latorre au théorbe et à la guitare, et Guido Morini au clavecin…

 Ce CD Alia Vox de 2004 est tout simplement merveilleux de finesse, grâce et justesse :  nous voicis introduits dans l’intimité même du cabinet de musique du roi Louis XIV, auxquels ces sublimissimes « Concerts royaux » de François Couperin étaient tout spécialement destinés, en 1714 et 1715 :  « Ces pièces étaient exécutées par Messieurs Duval, Philidor, Alarius et Dubois _ respectivement au violon, au hautbois, à la viole de gambe et au basson… _ ; j’y touchais le clavecin« , en a rapporté François Couperin lors de leur publication, en 1722…

En comparaison,

le récent bien tristement poussif CD des Folies françaises, a l’allure d’une première lecture tâtonnante, et pas du tout en place, de déchiffrage…

Et c’est hélas par son absence qu’y brille la resplendissante délicate magie de François Couperin…

Réussir à vraiment « attraper » la stupéfiante toute simple _ absolument dénuée d’artifices _ magie de François Couperin est décidément bien difficile…

 

 Ce samedi 28 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

La très rare délicatesse de François Couperin idéalement saisie par Michèle Dévérité en son parfait et si bien nommé « L’Âme en peine – Pièces pour clavecin »

26oct

La très rare délicatesse de François Couperin _ si difficile à vraiment bien « attraper » et donner… _, est idéalement saisie par Michèle Dévérité en son parfait « L’Âme en peine – Pièces pour clavecin« ,

en un CD sonamusic SONA 2305,

enregistré au mois de juin 2018 à Bra-Sur-Lienne, en Belgique…

Cf le bel article, très juste, « Couperin selonMichèle Dévérité« , d’Olivier Vrins, le 15 octobre dernier, sur le site Crescendo :

Couperin selon Michèle Dévérité

LE 15 OCTOBRE 2023 par Olivier Vrins

François Couperin (1668-1733) : L’âme en peine. Pièces pour clavecin.

Michèle Dévérité, clavecin ; 2018.

Notice en anglais, français, néerlandais et allemand.

80’57’’.

Sonamusica SONA2305.

C’est une jolie surprise que nous réserve le label belge Sonamusica avec ce florilège de pièces pour clavecin de François Couperin, réunies avec goût et transcendées _ voilà _ par Michèle Dévérité, sur un instrument historique de premier choix. Un disque auquel L’âme en peine, dernière pièce du Treizième Ordre, dans la tonalité de si mineur décrite par Marc-Antoine Charpentier comme “solitaire et mélancolique”, donne son titre. Enregistré en 2018, il nous parvient enfin, en dépit du Covid et de la disparition successive de Thierry Bardon, Robert Kohnen et Jean-Pierre Nicolas -respectivement directeur artistique du projet, ancien professeur et mari de l’interprète. De quoi conférer à ce disque attachant une touche _ sans nul doute _ d’émotion supplémentaire.

Les aficionados d’orgue et de clavecin se souviendront sans doute de l’enregistrement entrepris par Michèle Dévérité d’une anthologie de musique italienne pour clavier du 17e siècle (chez Arion) et d’une intégrale de l’œuvre des Forqueray père et fils (chez Harmonia Mundi), encensées par la critique. Cette dernière réalisation dépeignait déjà “Les tourments de l’âme” avec pudeur et sincérité, sans emphase ni dramatisme _ voilà.L’âme en peine” est d’une veine comparable.

Le séduisant instrument sur lequel Michèle Dévérité a jeté son dévolu pour cet enregistrement se prête à merveille au répertoire. Il s’agit d’un clavecin anonyme construit en France aux alentours de 1650, récemment restauré. La sonorité en est d’une rondeur envoûtante dans tous les registres. Le médium est généreux, les basses, charnues. Les aigus sont chatoyants, quoique plus discrets -mais qu’importe, puisque, dans ses pièces de clavecin, Couperin aime particulièrement à s’attarder sur la moitié gauche du clavier _ la plus grave, oui.

“Dans cet enregistrement, nous avons spécialement soigné l’accord en l’adaptant à chaque tonalité”, nous précisait, il y a peu, Michèle Dévérité.

De fait, l’accord de l’instrument bouscule quelque peu nos habitudes d’écoute : au tempérament égal, qui s’est imposé en Occident depuis la fin de la période baroque, la protagoniste de ce disque a, en toute logique, préféré le tempérament “ordinaire”, qui prévalait encore France au 17e siècle et au début du 18e siècle. Ce tempérament, issu du tempérament mésotonique, agrandit inégalement certaines tierces et certaines quintes pour pouvoir jouer dans des tonalités éloignées. L’éloquence, l’expressivité exacerbées qui caractérisent la musique baroque sont rehaussées par ces tempéraments inégaux, à l’aide desquels les compositeurs -au premier rang desquels les clavecinistes français- érigeaient des œuvres chargées d’”affects”. Comme nous l’a judicieusement fait observer l’interprète de ce disque, qu’une pièce telle que La Convalescence soit à ce point “grinçante” n’est donc ni le fruit du hasard ni le résultat de ce que nous aurions trop vite tendance à qualifier aujourd’hui d’ “intonation défectueuse”, mais au contraire un effet recherché _ oui, en toute discrétion _ par Couperin, qui, très malade à l’époque de sa composition, se savait probablement condamné.

Cet enregistrement, dont Les Folies françoises ou les Dominos constituent le plat de consistance, offre un condensé des plus belles pièces pour clavecin de François Couperin, sans s’astreindre à ressasser coûte que coûte les plus connues (exit, donc, Les Baricades Mistérieuses !).

Publiées en quatre recueils entre 1713 et 1730, rassemblées par tonalités en vingt-sept suites ou “ordres”, les pages pour le clavecin du neveu de Louis Couperin sont, pour la plupart, d’une profonde mélancolie _ voilà, mais jamais larmoyante. On ne s’étonnera pas, dès lors, que l’interprète ne hâte pas le pas -pas même lorsque le compositeur l’invite à jouer “sans lenteur”. Encore fallait-il, pour faire une réussite de ce disque, faire davantage que “prendre le temps de l’expression” : traduire, par la délicatesse _ et c’est bien là le mot couperinien par excellence… _du toucher et des ornements, cette intimité, cette tendresse, cette fragilité _ oui, oui, oui _ qui sous-tend l’œuvre entier du compositeur. Et ne pas oublier que, si le clair-obscur règne en maître sur un pan non-négligeable de la production couperinienne, l’art de Couperin Le Grand est avant tout celui d’un coloriste. L’humour et la fantaisie ne faisaient d’ailleurs _ certes _ pas défaut à l’auteur du _ sublimeConcert dans le goût théâtral, comme en témoignent Les Fastes de la grande et ancienne Mxnxstrxndxsx, petite comédie en cinq tableaux qui égaie le programme en son centre, Les Amusemens, ou encore les intitulés évocateurs de nombreuses partitions.

J’avouerai de bonne foi que j’aime beaucoup mieux ce qui me touche que ce qui me surprend”, confessait ce peintre des sentiments qu’était François Couperin. Ce disque ne peut que ravir ceux qui partagent sa pensée. Michèle Dévérité imprègne les trente-trois pages qui défilent sous ses doigts de grâce, rêve et nostalgie _ voilà… Le langage favori de Couperin n’est-il pas, après tout, celui qui n’affirme rien mais insinue, pour reprendre la belle expression de Philippe Beaussant ?

Soulignons, pour finir, la clarté et le relief de la prise de son _ en effet _, ainsi que la beauté de l’objet en lui-même, serti dans une pochette à l’effigie du compositeur _ au regard introspectif _ et accompagné d’une notice quadrilingue, richement illustrée et documentée. Il n’y manque qu’une biographie de l’interprète _ très discrète elle-même.

Son : 10  Notice : 10  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Olivier Vrins

Ce jeudi 26 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Pour approcher d’encore plus près à la vérité de Ravel en son plus intime, le stupéfiant « Ravel – L’OEuvre pour le Piano » du magnifique Philippe Bianconi (suite)…

29sept

Plus j’écoute _ quasiment en continu, quand je suis à ma table de travail _ le double CD la dolce volta LDV 109.0 de Philippe Bianconi « Ravel – L’Œuvre pour le Piano« ,

et après le témoignage déjà émerveillé de mon article d’avant-hier 27 septembre « « ,

plus je pense

que la formidable maîtrise, si pleine _ avec une formidable prise de son, aussi, il faut le préciser, de François Eckert ! _ en son extrême délicatesse (et parfaite naturelle fluidité) de jeu des diverses micro-inflexions si expressives en leur finesse et ultra-délicatesse, dénuées de la moindre volonté _ à l’égard de quelque public que ce soit… _ d’exhibition de virtuosité, du piano de Ravel,

que parvient ici à nous donner avec tellement de toute simple naturelle évidence Philippe Bianconi,

nous offre là un inestimable cadeau _ de grâce ! _ qui approche au plus près la vérité même de Ravel en son plus intime, à son solitaire piano, pour lui seul…

Et c’est bien là aussi le sentiment qu’éprouve, et à son tour, en un justissime article intitulé « Nocturne« , sur son site Discophilia, le bon Jean-Charles Hoffelé, ce vendredi 29 septembre,

je le découvre en ce petit matin du vendredi 29 septembre :

NOCTURNE

Philippe Bianconi revient à son cher Ravel dont il avait déjà gravé l’intégrale de l’œuvre pour piano seul sous l’écoute bienveillante de Suzanne et René Gambini voici bien trente ans _ pour le label Lyrinx, en 1993. Un vaste soleil illuminait alors son jeu, Ravel en lumière, joué assez dandy _ et dandy, Ravel le fut aussi, en sa première jeunesse… _, alliant à une beauté toute classique quelques traits proustiens : on croyait voir le compositeur tiré à quatre épingles _ ainsi qu’en témoignent visuellement quelques photos du jeune Ravel… _ dans chaque note de sa musique.

Il ajoute aujourd’hui, en accord avec _ l’excellent ravélien qu’est lui aussiClément Lefebvre, la suite de Ma mère l’Oye qui manquait à son album Lyrinx. Le dialogue très sombre de La Belle et la Bête signale illico que les portes d’un autre univers se sont ouvertes : ce Ravel-là sera d’abord celui du Gibet, de Scarbo, d’Ondine _ de Gaspard de la nuit, en 1908 _, l’envers _ ou le revers, voilà… _ teinté d’un brin de fantasque du rayonnement solaire que le pianiste y avait jadis entendu.

Les Miroirs _ de 1904-1905 _ sont tendus, sombres, presqu’amers _ mais jamais tout à fait, surtout pas… _ (Une barque sur l’océan avec cette main gauche obstinée avant le retour du ressac), étranges d’atmosphères non seulement pour Oiseaux tristes, pour la fantasmagorie de Noctuelles, pour l’Alborada _ formidable de présence _ mêlant l’ironie à une certaine _ pointe très fine, un soupçon effleurée, de _ tristesse, pour La Vallée des cloches aussi, si nostalgique _ Ravel aimait les reflets des miroirs…

Et si le vrai visage _ voilà ! voilà ! _ de Ravel paraissait dans ce piano qui fut l’instrument _ oui, aux harmoniques orchestrales aussi… _ de son _ solitaire et méditatif _ quotidien ? Inquiet, intranquille _ oui _, splénétique _ oui _ tout au long d’un Gaspard de la nuit _ en 1908 _ où même Ondine a un côté Loreley. Jusqu’au Tombeau de Couperin _ de 1914-1917 _ qui ne renonce pas à l’espressivo, voyant derrière les danses, au travers de l’esseulement de la Fugue les visages des disparus, jusqu’aux Valses nobles et sentimentales _ de 1911 _,vénéneuses, emplies de parfums de tubéreuse : dans l’ultime page, un opium semble rendre immatériels et la musique de Ravel et le jeu du pianiste – onirisme trouble au possible.

Les petites pièces tardives ou pas, Menuets _ de 1895 et 1909 _, Pavane _ de 1899 _, et hommages « dans le style de », le bref Prélude  _ de 1913 _ troublant comme un regret, sont jouées avec un sens de la nuance, du phrasé juste _ oui, oui, oui _ qui les hissent au rang de chefs-d’œuvre. Sommet _ probable, oui… _ de l’ensemble _ ainsi sublimement interprété par un Philippe Bianconi en un (paradoxalement sérénissime de maîtrise !) état de grâce de gravité… _, si je ne devais en choisir qu’un : la _ confondante _  Sonatine _ de 1903-1905 : oui, ainsi insidieusement glaçante, mine de rien en sa terrifiante douceur, elle est proprement sidérante ! Écoutez comment Philippe Bianconi fait sourdre les ombres, ose le cri  _ munchien, en 1893 _ qui saisit soudain au centre du Modéré.

Et maintenant, il faut _ oui ! _ que La Dolce Volta lui offre l’occasion d’enregistrer les deux Concertos.

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)


L’Œuvre pour piano (Intégrale)

Philippe Bianconi, piano
Clément Lefebvre, piano
(Ma mère l’Oye, version à quatre mains)

Un album de 2 CD du label La Dolce Volta LDV 109.0

Photo à la une : le pianiste Philippe Bianconi –
Photo : © William Beaucardet

 

Ce merveilleux transcendant double CD Ravel de Philippe Bianconi

est tout simplement un tranquille _ mais tout sauf placide, cependant… _ sommet _ sans jamais, ni en rien, se pousser si peu que ce soit du col _ de la discographie du singulier _ oxymorique _ et si magnifique Maurice Ravel…

Ce vendredi 29 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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