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Un magnifique double CD « Antonio Vivaldi – Concerti per una vita », du violon jubilatoire et sensible de Théotime Langlois de Swarte et son véloce et fruité Ensemble Le Consort…

24fév

Ainsi qu’il l’avait récemment annoncé,

Théotime Langlois de Swarte _ avec son excellent ensemble fruité, véloce et sensible, Le Consort _, nous propose un magnifique double CD (de 148′) de « Violin Concertos » dAntonio Vivaldi _ le double album Harmonia Mundi HMM 902373.74 _,

comportant un très significatif _ et très réussi _ choix de 12 Concerti complets _ les Concertos RV 37a, 171, 237, 250, 252, 256, 267a, 278, 315, 356, 569, 813 _ accompagné d’un riche choix d’autres mouvements empruntés à d’autres Concerti pour violon _ et même d’autres instruments _, d’autres œuvres de Vivaldi _  principalement et surtout lui… _,

afin de nous faire bien ressentir, en un très judicieux programme, la très intéressante évolution des styles infiniment variés, toujours renouvelés, issus de l’invention jaillissante si merveilleusement féconde de ce compositeur génial tout au long de sa vie (Venise, 4 mars 1678 – Vienne, 28 juillet 1741)…

Le génie musical d’Antonio Vivaldi (Venise, 4 mars 1678 – Vienne, 28 juillet 1741) est à entendre entre, en amont, celui de Claudio Monteverdi (Crémone, 15 janvier 1567 – Venise, 19 novembre 1643) _ et le chainon proprement vénitien que constitue Giovanni Legrenzi (Clusone, près de Bergame, 12 août 1626 – Venise, 27 mai 1690)et, en aval, celui de Joseph Haydn (Rohrau, 31 mars 1732 – Vienne, 31 mai 1802) _ ainsi, si l’on veut, que celui de Mozart (Salzbourg, 27 janvier 1756 – Vienne, 5 décembre 1791).

Avec entretemps le génie musical de ses exacts contemporains, eux, Johann-Sebastian Bach (Eisenach, 21 mars 1685 – Leipzig, 28 juillet 1750) et Jan-Dismas Zelenka (Lomovice, 16 octobre 1679 – Dresde, 23 décembre 1745) _ lesquels, s’ils n’ont physiquement pas fait le voyage de Venise, non plus que celui de Vienne, étaient parfaitement informés, et même imbibés, de ce qui s’y faisait de musicalement génial…

Auxquels j’ajouterai, un peu en amont, le génie musical _ violonistique _ d’Heinrich-Ignaz-Franz Biber (Wartemberg, 12 août 1644 – Salzbourg, 3 mai 1704), et, plus tard, un peu en aval, celui _ zelenkien, si l’on veut… _ de Frantisek Tuma (Kostelec, 2 octobre 1704 – Vienne, 3 février 1774)…

Quant au travail de Théotime ici, et avec Le Consort,

il s’agissait pour lui, après ses précédents abords discographiques de l’œuvre (de concertos pour violon) vivaldien _ le Concerto « Madrilesco«  RV 129  dans le CD « 7 Particules » du label B Records LBM 014, enregistré live à Deauville le 21 avril 2018 à Deauville avec, déjà, Le Consort ; et puis les Concerti RV 179a et RV 384, cette fois avec Les Ombres de son frère Sylvain Sartre et Margaux Blanchard, dans le CD « Vivaldi – Leclair – Locatelli – Violin Concertos » du label Harmonia Mundi HMM 902 649, enrefistré à l’Arsenal de Metz en avril-mai 2021 _, d’apporter au public mélomane un panorama consistant et profond qui soit le sien ;

avec, aussi, les enregistrements des ultimes Concertos pour violon de Vivaldi qui étaient encore jusqu’ici demeurés inédits au disque (!) :

soient les RV 37a (tout juste redécouvert en 2022), 250, 252, 267a et 315 (pour la version de Gênes), ainsi que le Recitativo du RV 212, la Ciaconna du RV 370, et l’Adagio du RV 768 _ et j’ignore pour quelles raisons précises ces 3 Concertos-là ne sont pas donnés ici en leur intégralité : n’en demeure-t-il donc que ces seuls fragments ? Ou bien s’agit-il d’un choix esthétique de la part de nos interprètes ? Ou bien encore d’une question de durée de disponibilité  de ce double album Harmonia Mundi ? Je ne le sais pas…

Ensuite,

pour les Concerti pour violon seul non inédits au disque, que sont les RV 171, 237, 256, 278, 356, 569 et 813,

il reste à éventuellement confronter à l’oreille cette interprétation-ci de Théotime Langlois de Swarte et Le Consort avec de précédentes interprétations, et notamment et surtout celle du magnifique Giuliano Carmignola, avec divers orchestres.

Il va me falloir m’y atteler, en recherchant ces CDs en ma discothèque vivaldienne personnelle…

Et nous verrons bien alors ce qui en résultera.

Mais ce que je peux déjà avancer, c’est que l’approche jubilatoirement vivaldienne jusqu’en la bouleversante tendresse, mâtinée d’une ombre douce, voilée, de tragique, des sublimes Adagios de Vivaldi _ un des traits capitaux des souffles idiosyncrasiques de sa géniale musique _, de Théotime et du Consort, m’emballe ! Dès la première écoute. Et c’est déjà beaucoup…

Ce samedi 24 février 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

De 1994 à 2023, Gunar Letzbor, toujours à 6 musiciens de son « Ars Antiqua Austria », revient ultra brillamment à ce chef d’oeuvre que sont les « Violinsonaten » de 1881 de Heinrich-Ignaz-Franz Biber : c’est magistral et somptueux !

05fév

De 1994 _ le double CD « Heinrich I. Biber – Sonatae, Violino solo, 1681 » Symphonia SY 94D28, enregistré à Bologne _

à 2023 _ le double CD « Heinrich Ignaz Franz Biber – Violinsonaten – 1681 » Pan Classics PC 10454, enregistré à Saint Florian du 23 au 27 janvier 2023 _,

et toujours avec son ensemble « Ars Antiqua Austria« ,

le violoniste et chef Gunar Letzbor revient ultra brillamment _ mazette !!! _ à ce chef d’œuvre de très haute altitude musicale que sont les « Violinsonaten » de 1881, de l’immense Heinrich-Ignaz-Franz Biber (1644 – 1704).

En 1994,

lors de l’enregistrement à Bologne,

les musiciens d' »Ars Antiqua Austria » étaient au nombre de 6 :

Gunar Letzbor, violino ; Lorenz Duftscmid, viole da gamba, violone in sol ; Michael Oman, viola da gamba ; Roberto Sensi, violone ; Axel Wolf, tiorba, liuto ; Wolfgang Zerer, cimbalo, organo.

Et en 2023,

lors de l’enregistrement à Saint Florian,

les musiciens d' »Ars Antiqua Austria » et du « Salzburg Lute Consort »  sont à nouveau au nombre de 6 :

Gunar Letzbor, baroque violin ; Jan Krigovsky, violone ; Hubert Hoffmann, theorbo ; Erich Traxler, organ & harpsichord ;

Hubert Hoffmann, lute ; Jakob Mitrik, chitarra attiorbata ; Daniel Oman, colazione. 

Écoutez donc ceci


Ce lundi 5 février 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Et écouter aussi la rayonnante musique religieuse de Georg Muffat (1653 – 1704) : le CD « Missa In Labore Requies a 24″, du Banquet Céleste & La guilde des Mercenaires, dirigés par Damien Guillon…

16jan

L’œuvre instrumental magnifique (!!!) de Georg Muffat (Megève, 1er juin 1653 – Passau, 23 février 1704) est splendide  _ par exemple l’« Armonico Tributo« , de 1682 ; cf mon article « «  du 9 avril 2022… _,

et relativement bien servi jusqu’ici par la discographie…

Le volet religieux de son œuvre est, lui, un peu moins bien connu, et un peu moins couru par les interprètes,

même si l’on compte tout de même 3 précédentes interprétations discographiques de cette splendide messe salzbourgeoise « In Labore Requies » (composée pour le prince-évêque Maximilian Gandolph von Kuenburg entre 1678 et  1687) de Georg Muffat :

_ celle, jubilatoire et solaire _ écouter ici les 51′ 34 du podcast de ce lumineux CD… _, parue en 1999, du CD « H.I. Biber Litaniae Sancto Joseph – G. Muffat Missa In Labore Requies » Harmonia Mundi HMC 901667, par Konrad Junghänel dirigeant le Concentus Cölln et le Concerto Palatino _ enregistré en l’abbaye de Melk (Autriche) au mois de mai 1998…

_ celle, plus solennelle, parue en 2014, du CD « Georg Muffat – Missa in labore requies » Pan Classics PC 10301, par Gunar Letzbor dirigeant les St Florianer Sängerknaben et Ars Antiqua Austria _ enregistré en la cathédrale de Gurk (Autriche) du 19 au 22 août 2013…

_ celle, assez solennelle aussi, parue en 2016, du CD « Georg Muffat Missa In Labore Requies » Audite 97.539, par Johann Strobl dirigeant la Cappella Murensis et Les Cornets Noirs _ enregistré en l’église abbatiale de Muri (Suisse) du 2 au 5 août 2015…

D’où la sortie bienvenue du beau CD « Missa In Labore Requies«  _ le CD Château de Versailles Spectacles CVS 106 _, de Damien Guillon dirigeant son Ensemble Le Banquet Céleste, ainsi que celui d’Adrien Mabire, La Guilde des Mercenaires _ l’enregistrement a eu lieu en la chapelle royale du château de Versailles du 26 au 29 novembre 2022…

Sur cette nouvelle réalisation discographique de la « Missa » de Muffat,

voir par exemple l’article « De Salzbourg à Versailles, les fastes de la Messe de Muffat« , de Cécile Glaenzer, paru le 3 décembre dernier, 2023, sur le site de ResMusica :

De Salzbourg à Versailles, les fastes de la Messe de Muffat

Instagram

Sous la direction de Damien Guillon, Le Banquet Céleste et La Guilde des Mercenairess’associent pour faire résonner les cinq chœurs de la Missa in labores requies de Georg Muffat sous les ors de la chapelle royale de Versailles.

Écrite en 1690 _ ou plutôt très probablement pour le prince-évêque Maximilian Gandolph von Kuenburg, décédé le 3 mars 1687… _ pour la cathédrale de Salzbourg, haut lieu de la Contre-Réforme catholique du Saint-Empire, cette messe monumentale _ oui _ devait subjuguer les sens des auditeurs. Le faste déployé est inédit en Autriche : vingt-quatre voix réparties en deux chœurs vocaux et trois chœurs instrumentaux, dans une spatialisation que permettaient les quatre tribunes de la croisée du transept, selon la polychoralité développée à Venise à la fin de la Renaissance. Il s’agit là d’un véritable monument musical élevé à la gloire de l’Église catholique. Et qui mieux que Muffat _ voir cependant aussi la « Missa Salisburgensis«  de Heinrich Ignaz Franz Biber (1644 –  1704), composée peut-être, celle-là, vers 1680... _ pouvait mener cette entreprise, lui qui, après ses années de formation auprès de Lully à Paris, avait complété son apprentissage à Rome auprès de Corelli ? Musicien européen par excellence _ en effet _, Muffat réalise la synthèse des styles français et italiens, et son éclectisme fait de lui le meilleur avocat des goûts réunis _ ou du moins un de ses plus brillants et émouvants représentants…

Pour restituer cette grande fresque musicale, Le Banquet Céleste de Damien Guillon et La Guilde des Mercenaires du cornettiste Adrien Mabire ont réuni leurs effectifs, faisant dialoguer petit et grand chœurs vocaux, ensemble de cordes et deux chœurs de vents, reliés entre eux par un continuo fourni. Les contrastes d’écriture sont permanents, et l’alternance entre les différents chœurs en un très virtuose jeu d’échanges donne une grande légèreté à cet ensemble pourtant monumental. Les épisodes chantés par les solistes alternent avec les sections en tutti pour coller au plus près du texte, avec une inventivité remarquable. Dans un _ excellent _ texte de présentation très riche, Peter Wollny décrit très justement « une étourdissante mosaïque d’images sonores variées ». Muffat se révèle être en effet un subtil coloriste. Le Crucifixus du Credo _ regarder ici la vidéo du « Ressurexit«  _ est un moment particulièrement poignant : d’abord un dialogue de trois solistes à l’expressivité parfaite, puis les trompettes en sourdine pour accompagner le Passus, où il nous semble ressentir physiquement la mise au tombeau.

Deux _ superbes ! _ intermèdes instrumentaux ponctuent la messe : une Sonate à 13 pour cuivres de Stadlmayer, avec de beaux effets d’écho, et une Canzone de Valentini jouée à l’orgue par Jean-Luc Ho. Surprise : le livret nous annonce une sonate de Schmelzer qui _ hélas ! _ n’apparait pas au programme _ en effet ! Quitte à avoir une pièce d’orgue à la place, on aurait aimé entendre une des superbes toccatas de l’Apparatus musico-organisticus de Muffat _ publié en 1690 ; un chef d’œuvre, oui !.. Écouter ici le podcast du magistral double CD « Georg Muffat – Apparatus Musico-Organisticus 1690«  de Michael Radulescu (Bucarest, 19 juin 1943 – Vienne, 23 décembre 2023), le CD Ars Musici AM 1108-2, enregistré à la Michaelskirsche de Vienne du 25 au 28 mai 1989 et paru en 1994 : un enregistrement superbe, et qui m’avait marqué, d’une musique magistrale ! En guise d’offertoire, Damien Guillon nous propose un Dixit Dominus de Biber (1644 – 1704), qui fut le rival de Muffat (1653 – 1704) à Salzbourg _ en 1690, ayant quitté Salzbourg, Georg Muffat devient le maître de chapelle de Johann-Philipp von Lamberg, à Passau, en Bavière, où Muffat décèdera le 23 février 1704… Tout au long de ce programme, les interprètes font preuve d’une belle sensibilité et d’une grande virtuosité. Répondant aux cornets et aux trombones, les trompettes naturelles aux attaques précises nous offrent leurs couleurs cuivrées qui donnent beaucoup de relief aux chœurs vocaux magnifiquement timbrés. Le résultat est d’une superbe plénitude sonore _ oui _, dont Damien Guillon et Adrien Mabire nous disent très justement qu’elle rappelle « le grand plenum d’un orgue ». Reste la question de la spatialisation : comment rendre au disque ces effets propres à la polychoralité ? Il faut à l’auditeur un peu d’imagination, porté par la magnificence de la musique. Et pour cela, le choix de la monumentalité de la chapelle royale était le bon.

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Georg Muffat (1653-1704) : Missa in labore requies.

Giovanni Valentini (ca. 1582-1649) : Canzon.

Johann Stadlmayr (ca. 1575-1648) : Sonata a 13.

Heinrich Ignaz Franz Biber (1644-1704) : Dixit Dominus.

Le Banquet Céleste, direction : Damien Guillon ; La Guilde des Mercenaires, direction : Adrien Mabire.

1 CD Château de Versailles Spectacles. Enregistré en novembre 2022 à la chapelle royale de Versailles.

Notice de présentation en français, anglais et allemand.

Durée : 58:53

Muffat est un merveilleux compositeur !

Ce mardi 16 janvier 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Quelle musique donc écouter pour supporter de succéder, avec tant soit peu de succès, à l’enchantement jouissif d’un pur chef d’oeuvre ?..

03nov

Il est bien difficile, pour une œuvre à choisir d’écouter, de succéder, avec suffisamment de succès, au degré d’enchantement qui vient d’être éprouvé à la jouissance extatique voire orgasmique… _ d’un pur chef d’œuvre

_ et d’interprétation aussi…

Ou encore :

comment réussir à composer _ pour un concert ou pour un disque _ un programme d’œuvres dans lequel ne soit pas éprouvée une trop forte dépressurisation _ vraiment trop déceptive… _ de l’auditeur ?..

Telle est la question que je me suis posée à la suite de mes écoutes successives de l’enchanteur Mozart de Francesco Piemontesi,

d’une part _ cf mon article «  » du 31 octobre dernier… _ ;

et, d’autre part, du superlatif Vivaldi en 3 CDs de Giuliano Carmignola _ cf mes deux articles «  » et «   » des 1er et 2 novembre, avant-hier et hier 31 octobre derniers… _ qui ne cesse de me combler…

Quelle solution ai-je donc pu trouver à pareille nécessité de niveau de programme, ce jour ?..

Quel CD me suis-je proposé à écouter, face à tel danger/risque de dépressurisation de plaisir musical ?..

J’ai donc choisi d’une interprète violoniste elle aussi brillantissime, Isabelle Faust (), le CD « Solo » (Harmonia Mundi HMM 902678, enregistré à Berlin au mois d’avril 2020),

recommandé à la fois par ce très fin mélomane qu’est mon gendre Sébastien,

ainsi que par un Diapason d’Or du magazine Diapason n°727 de ce mois de novembre 2023, avec un article assez élogieux, à la page 98 de Jean-Christophe Pucek, qui a pris soin de comparer 5 des 6 morceaux choisis par Isabelle Faust avec des interprétations _ parues en des CDs de 1991, 2004, 2009, 2013 et 2023 _ d’autres violonistes :

 

_ de la « Fantasia » en la mineur (vers 1719) de Nicola Matteis le fils (ca. 1670 – 1737), une interprétation de Leila Schayegh, pour Glossa en 2023 _ Faust s’y montre « moins extravertie« , juge Pucek… _ ;

_ d’un choix d »Ayres for the violin » (de 1676) de Nicola Matteis le père (ca. 1650 – après 1713), une interprétation d’Hélène  Schmitt, pour Alpha en 2009 _ Faust s’y montre « moins contemplative« , juge Pucek... _ ;

_ de la « Sonate » en la mineur (vers 1725) de Johann-Georg Pisendel (1687 – 1755), une interprétation de Rachel Podger, pour Channel Classics en 2013 _ Faust s’y montre cette fois « plus solaire« , selon Pucek… _ ;

_ de la « Partita » n°5 en sol mineur (en 1715) de Johann-Joseph Vilsmayr (1663 – 1722), une interprétation de Gunar Letzbor, pour Arcana en 2004 _ et Faust s’y montre « plus flamboyante et relevée« , indique Pucek… _ ;

_ de la « Passacaille« en sol mineur dite « l’ange gardien« , extraite des fameuses « Sonates du Rosaire » (en 1684-1685) de Heinrich-Ignaz-Franz Biber (1644 – 1704), une interprétation de Reinhard Goebel, pour Archiv en 1991 _ Faust la joue « alla Goebel« , et y montre « un souffle et une ardeur invincibles« , pour Jean-Christophe Pucek, dans cet article de Diapason.

En revanche,

Jean-Christophe Pucek ne dit rien des « Amusements pour violon seul« , Op. 18 (de 1762)  de Louis-Gabriel Guillemain (Paris, 15 novembre 1705 – Chaville, 1er octobre 1770), telles qu’elles ont été interprétées et enregistrées _ « en première mondiale«  _ en 2002 par Gilles Colliard, en un CD EMEC E-054 _ un CD que je possède :  en effet, c’est depuis bien longtemps que je m’intéresse aux violonistes français contemporains de Jean-Marie Leclair (Lyon, 1697 – Paris, 1764), dont fait partie Louis-Gabriel Guillemain, éléve comme Leclair, à Turin, de Giambattista Somis (Turin, 1686 –  Turin, 1763) ; et si Guillemain a peut-être été aussi des élèves de Jean-Marie Leclair, il en a été en tout cas un rival ; de même que fut aussi un rival de Leclar le turinois de naissance Jean-Pierre Guignon (Turin, 1702 – Versailles, 1774)… ; et ne perdons jamais de vue que le violon est bien une invention italienne !.. _, un CD que Pucek semble ignorer…

Alors, pour ce qu’il en est du passage du CD Mozart-Piemontesi de mon article du 31 octobre et des trois CDs Vivaldi-Carmignola de mes articles des 1er et 2 novembre derniers, à ce récital-ci « Solo » d’Isabelle Faust,

disons que la redescente musicale se fait en très satisfaisant confort…

Quelle surprise discographique va donc bien pouvoir suivre ?…

Ce vendredi 3 novembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

A propos de deux récentes interprétations discographique de ce chef d’oeuvre du Baroque musical que sont les « Sonates de Rosaire » de Heinrich-Ignaz-Franz-Biber, un très intéressant article bien détaillé du magazine Crescendo…

24mar

En forme de commentaire détaillé à mon bref article du 24 février dernier, il y a exactement un moix : « « ,

voici de ce jour même l’intéressant article détaillé de Christophe Steyne, sur le site de Crescendo, très simplement intitulé, lui, « Sonates du Rosaire de Biber : deux nouvelles parutions » :


Sonates du Rosaire de Biber : deux nouvelles parutions

LE 24 MARS 2023 par Christophe Steyne

Heinrich Ignaz Franz Biber
(1644-1704) : Sonates du Mystère / du Rosaire. Mayumi Hirasaki, violon. Jan Freiheit, viole de gambe. Michael Freimuth, archiluth, théorbe. Johannes Loescher, violone. Christine Schornsheim, clavecin, orgue. Septembre 2020, avril 2021. Livret en anglais, allemand, français. TT 74’09 + 55’30. Passacaille 1088

Heinrich Ignaz Franz Biber (1644-1704) : Sonates du Mystère / du Rosaire. Amandine Beyer, violon. Baldomero Barciela, viole de gambe, violone. Francesco Romano, archiluth. Nacho Laguna, théorbe. Anna Fontana, clavecin, orgue. Septembre 2022. Livret en français, anglais, allemand. TT 52’04 + 53’26. Harmonia Mundi HMM 902712.13

L’actualité discographique nous amène deux esthétiques très dissemblables pour ces sonates. Du Mystère ? Du Rosaire ? Le titre manque dans le manuscrit, dépourvu de frontispice. Elles procèdent d’ailleurs plutôt du genre de la Suite que de la Sonate, dans la mesure où elles incluent des assemblages de danse (allemande, courante, gigue, sarabande, gavotte…). Quelle que soit l’appellation, elles n’en constituent pas moins un sommet _ sans conteste ! _du répertoire baroque pour violon, voire l’acmé de la polyphonie pour instrument à cordes au XVIIe siècle dans l’aire germanique. Malgré les conjectures, on les date communément de 1678, l’année où le Prince-Archevêque Max Gandolph éleva Biber au rang de vice-Maître de Chapelle à Salzbourg _ oui. Elles lui sont dédiées, en tant qu’une « harmonie consacrée au Soleil de Justice et à la Lune Immaculée », justifiant la pertinente iconographie de la pochette. L’amphithéâtre de l’Université de Salzbourg, où se réunissait la confrérie du Rosaire, s’ornait de tableaux représentant chacun des quinze Saints Mystères.

Le compositeur s’inspira de ce cycle liturgique qu’il déclina en autant de sonates, assemblées en trois séries (joie, douleur, gloire) correspondant à la Nativité, à la Passion, et à un ensemble groupant la Résurrection, l’Ascension, la Pentecôte, l’Assomption, le Couronnement de la Vierge. Une seizième sonate, pour violon soliste, se présente comme passacaille et se nomme « L’Ange gardien » que l’on célébrait le 2 octobre, associée à une effigie peinte sur la porte de l’Aula Academica. Même si certaines sonates endossent un langage figuratif, exprimant le sens des images sacrées, et relèvent même du procédé symbolique (croisement de cordes pour traduire la crucifixion), leur composition préexiste pour certaines d’entre-elles à leur mise en recueil. D’un point de vue harmonique, ces sonates se singularisent par l’accord en scordatura _ voilà ! _ (« j’ai réglé les quatre cordes de ma lyre de quinze manières différentes », précise l’auteur dans la préface en latin), que le livret de l’album Passacaille apostille par des clés en vignette.

Cette technique, Mayumi Hirasaki l’avait déjà magnifiée dans un album de 2019 (L’Arte della scordatura, chez le même éditeur _ Passacaille). Malgré la virtuosité que requiert l’exécution, la musicienne se distingue par son interprétation intérieure et réfléchie, volontiers mystique qui, dans le calme des premières scènes (son Annonciation tout en sfumato) semble hésiter entre tendresse et velléité. Cette propension méditative culmine toutefois en des étapes comme Le Christ au Mont des Oliviers, ou les variations autour de la Flagellation. Les pages extraverties, comme le praeludium de la Crucifixion, l’aria tubicinum de L’Ascension ou L’effusion du Saint Esprit, montrent une soliste vaillante, sans qu’on accède à ce suprême degré d’ardeur qu’enflammait un Reinhard Goebel (Archiv Produktion) dans son enregistrement qui globalement fait toujours référence pour son intense rudesse illustrative. Un continuo attentif sertit la vision sereine et raffinée de la violoniste nipponne, qui emploie cinq instruments différents, d’époque (c1700, c1750, fin XVIIIe) ou de facture récente. Sa lecture toute résiliente de l’ultime passacaille signe une version dont la palette de nuances se voue au regard contemplatif, épousant intimement les courbes du chapelet de prière, qui n’est pas sans rappeler le témoignage de Fabien Roussel (Bayard).

Une plage par sonate chez Passacaille, là où Harmonia Mundi permet un accès plus détaillé. Nul besoin de vérifier le tracklisting (vingt-cinq minutes de moins ! _ oui… _) pour que l’oreille saisisse combien Amandine Bayer nous emmène dans une expédition autrement pressée, dès ses guillerettes évocations autour de la crèche et l’enfantement. Empressée voire désacralisée _ voilà _, ce qui semblerait accréditer que ces pages furent conçues pour le divertissement du prince. La musica representativa, la dévotion mariale deviennent prétextes à des incantations vertigineuses, souvent parcourues bride abattue, repoussant les précédents exploits de Reinhard Goebel ou Patrick Bismuth (Zig Zag). Une ivresse toute chorégraphique dissiperait-elle la ferveur du sentiment ?, à l’instar de ce corps vacillant sur la couverture.

« Il y a des projets de disque qui naissent de la musique. Et puis il y en a d’autres qui naissent de la danse ! Cet enregistrement a pu prendre forme dans ma tête, mes doigts et mon cœur grâce à l’impulsion de la compagnie de danse Rosas, et de sa chorégraphe, Anne Theresa de Keersmaeker » _ voilà ! _ prévient l’exergue de la notice. Cette théâtralité imprègne la vision de la violoniste : « je ne peux pas jouer une seule note de cette musique sans voir un corps tourner, deux têtes se rapprocher, une poitrine s’ouvrir et s’abandonner, une main se tendre vers le ciel ou l’obscurité et faire un geste léger, aussi subtil qu’une diminution musicale ». Cette intrépidité vire-t-elle à l’exaltation du mouvement ou s’enferre-t-elle dans l’hypotypose ? Quitte à succomber à des effets bruitistes dans l’aria tubicinum de L’Ascension qui, en guise de troupe guerrière, processionne sur une sorte de claquement de nacaires. En tout cas, on chercherait en vain une valorisation plus cinématique du texte, presque une antithèse aux équilibrages prudents d’Hélène Schmitt (Aeolus) et aux divine fluidités de Monica Huggett (Gaudeamus).

Au crédit de cette nerveuse incarnation, on avoue reconnaitre une constante sensibilité à la partition, scrutée jusqu’au maniérisme, surclassant la veine pictorialiste de Lina Tur Bonet (Pan Classics). Brio, suggestivité épidermique placent Amandine Beyer au premier plan d’une vigoureuse prestation où le continuo se plie docilement à la démonstration. Le substrat s’efface derrière une leçon d’archet qui, en flagrance de glossolalie, parle les langues de ces vignettes avec une aisance déconcertante -sans toujours en épuiser le sens, ici survolé, diront les contempteurs. La rhétorique n’est pas appariée à celle du contraste signifiant. On en apprécie d’autant certains moments de grâce où Amandine Beyer, si prompte à éblouir ou émoustiller dans les instances spectaculaires et les turbidités en stylus phantasticus, nous émeut par ses touchantes intuitions, ainsi l’allamanda de la Visitation ou la sarabande de la Pentecôte.

Cette incandescente lucidité digne d’un « renouveau charismatique » s’assigne ses propres limites, mais rappelle surtout que Biber, outre la dimension spirituelle que l’on prête à son chef-d’œuvre, fut _ en effet ! _ un des grands virtuoses de l’époque. Par ses rythmes drus, sa sensitivité à fleur de peau, sa diction segmentée, son procès vériste jusqu’à la bambochade, son coloris piailleur (à l’inverse des bas-reliefs d’Andrew Manze sous la même étiquette Harmonia Mundi), cette version des Sonates du Mystère ne sera pas du goût de tous, d’où notre évaluation qui rechigne à l’enthousiasme _ ce qui n’étaits pas mon cas. Résumerait-on en disant qu’elle privilégie le frémissement de l’instant sur la condensation parabolique, qu’elle signalise un graphisme entre naïveté et expressionnisme, -une galerie telle que par-delà les siècles aurait pu la peindre un Max Beckmann ?

Passacaille : Son : 8,5 – Livret : 9,5 – Répertoire : 10 – Interprétation : 9

Harmonia Mundi : Son : 8,5 – Livret : 8,5 – Répertoire : 10 – Interprétation : 8

Christophe Steyne

Intéressant.

Ce vendredi 24 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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