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« The Invention of Morel », un opera de Stewart Copeland, d’après le roman d’Adolfo Bioy Casares

25juil

L’Invention de Morel, d’Adolfo Bioy Casares (1940),

est une œuvre incroyablement inspiratrice de la modernité.

Après au moins trois films directement inspirés de ce roman :

L’Invention de Morel, de Claude-Jean Bonnardot (en 1967) ;

L’Invenzione di Morel, d’Emidio Greco (en 1974) ;

A Necessary Music, de Beatrice Gibsson (2008) ;

et aussi L’Année dernière à Marienbad, le fim culte d’Alain Resnais et Alain Robbe-Grillet

_ cf ci-dessous cet excellent article de René de Ceccatty : Les Images de la mi-mort ;

cf aussi l’excellente exposition L’Invention de Morel & la machine à images, à la Maison de l’Amérique latine (du 14 mars au 21 juillet 2018)… _ ;

voici l’opéra The Invention of Morel de l’américain Stewart Copeland ,

sur un livret de Jonathan Moore (en 2017).

Sur cet opéra,

cf cette vidéo de 4′ 37.

Et cet article détaillé sur des représentations données aux États-Unis…

Ce mercredi 25 juillet 2018, Titus Curiosus – Francis Lippa

Les Images de la mi-mort

Les images de la mi-mort
Delphine Seyrig dans L’Année dernière à Marienbad

Photographies de Georges Pierre

Par René de Ceccatty

La rétrospective Delphine Seyrig à la Cinémathèque (22 septembre-11 octobre 2010) est l’occasion de découvrir les superbes photographies signées Georges Pierre sur le tournage de L’Année dernière à Marienbad (Alain Resnais, 1961) et, plus particulièrement, de magnifiques portraits de l’actrice.

 

Ce n’est pas seulement la beauté, à la fois hautaine et vibrante, des traits de Delphine Seyrig — beauté dont on sait, désormais, rétrospectivement, que ni l’âge ni la maladie ne devaient les altérer, au long de sa carrière, trop brève, mais riche de rôles pour lesquels ces débuts fracassants exigeaient un niveau égal —, ni la présence introspective de son regard intense et intérieur, ni la qualité exceptionnelle de la lumière (Sacha Vierny), ni l’élégance des robes (Chanel et Bernard Evein), ni la somptuosité du décor (Jacques Saulnier), ni le mystère des poses (avec les subtils déhanchements de la comédienne et sa façon inimitable d’incliner la tête et de lever une épaule), qui rendent les photos de plateau réalisées par Georges Pierre très singulières.

On ne connaît d’exemple similaire de photos de plateau que celles de Marlene Dietrich pour La Femme et le pantin et Shanghai Express. Mais ces dernières étaient promotionnelles, mises en scène par Sternberg lui-même.

Il est impossible que les plumes noires ou blanches qui ornent plusieurs robes de Delphine Seyrig dans L’Année dernière à Marienbad n’aient pas été des références explicites à celles de Marlene dans ces films admirables, dont l’auteur, du reste, allait être fort impressionné par le film de Resnais à sa sortie.

De quoi s’agit-il dans l’intrigue de L’Année dernière à Marienbad ? Un homme erre dans un palace ou château dont les occupants parlent en boucle sur un ton mondain et vide, à la manière de personnages de Nathalie Sarraute. Aucune référence n’est faite à une époque donnée, à un monde extérieur, à une vie personnelle. Cet homme, à l’accent étranger (c’est un Italien), mais en français, décrit, en voix off, le lieu que l’on voit et qui est situé explicitement en Bavière. Il se concentre rapidement sur une jeune femme, Delphine Seyrig, qui l’aborde, l’interroge sur plusieurs scènes qu’ils ont vécues ensemble, peut-être dans le même lieu, en tout cas dans un endroit similaire, l’année précédente. Elle dit n’en avoir aucun souvenir en dépit d’une photo d’elle qu’il lui présente et qu’il dit avoir prise. Il veut la convaincre qu’ils se sont aimés, malgré la présence angoissante du compagnon de la femme (Sacha Pitoëff, présent cette année encore). Et les images qui défilent sont indifféremment les évocations mentales (fausses ou vraies) de l’homme, appartenant soit au passé soit au présent, soit à la réalité soit à ce qu’il voudrait que la réalité fût.

La narration est donc tour à tour onirique ou réaliste (une seule scène entre Seyrig et Pitoëff est tournée sur un mode conventionnel, elle décrit ce qui précède le départ hypothétique de la femme avec l’étranger et devrait donc être située l’année précédente, telle que le voudrait l’homme). Au cours du film, la femme est de plus en plus troublée par l’insistance de l’homme et le spectateur ne doit pas savoir si elle ment et se défend pour finir par admettre la vérité de l’homme, qui serait la vérité objective (en effet, elle lui aurait promis de le revoir un an plus tard et de partir avec lui, comme il le prétend), ou une vérité onirique, ou si elle cède par lassitude aux désirs et aux délires de l’homme.

Au cours des réminiscences de l’homme, sont évoquées et montrées à l’image une scène de soudaine épouvante et une scène de meurtre. La femme est terrifiée par quelque chose qu’on ne voit pas. Et le mari jaloux l’assassine. Si bien que le spectateur peut alors comprendre que cette immobilité, ce mutisme des figurants, cette obstination amnésique de la femme seraient l’expression de la mort, ce que confirmerait une statue d’Orphée et d’Eurydice, sur laquelle l’homme s’attarde, sans désigner le mythe. L’homme est revenu chercher celle qu’il aime dans le royaume des morts. Il lui dit à plusieurs reprises : « C’est vous vivante qu’il me faut», « Je vous ai dit que vous aviez l’air vivante » et « Vous êtes vivante encore, vous êtes là», ce qui sous-entendrait qu’en effet, elle est morte.

On sait ce que le scénario de Robbe-Grillet doit à L’Invention de Morel, la fable fantastique (1940) d’Adolfo Bioy Casares, où un narrateur aborde sur une île et y découvre des personnages qui semblent y devoir vivre pour l’éternité, mais ne sont que des simulacres morts de ceux qu’ils ont été autrefois, et reproduits en trois dimensions animées par un savant fou. On voit également ce qu’il doit à La Belle et la Bête de Cocteau et au conte de Madame Leprince de Beaumont, qui avait imaginé un château dont tous les occupants seraient figés comme des statues vivantes.

Les photos de plateau de Georges Pierre tiennent donc leur mystère du mystère même du film. C’est parce que l’immobilité vivante est au cœur de l’intrigue que ce redoublement d’immobilité est troublant. Mais elles ajoutent une vie différente, en captant chez Delphine Seyrig une autre qualité de regard, en lui dérobant des sourires absents du film même, en saisissant une complicité entre la comédienne et le cinéaste.

La carrière de Seyrig lui permettra de revenir à plusieurs reprises sur ce type de narration onirique, qui crée un doute chez le spectateur. Son personnage est-il vivant, « ici et maintenant », ou représente-t-il une image rémanente du passé ? Ce sera le cas d’Anna Maria Stretter dans India Song de Duras, bien sûr, hommage évident au film de Resnais, même si Duras devait probablement penser que c’était justement son scénario de Hiroshima mon amour qui avait déjà donné le ton. De Muriel, sur le scénario de Jean Cayrol. Du Troisième concerto de François-Régis Bastide, qui joue également sur les incertitudes et les hallucinations de la mémoire. Et de La Bête dans la jungle, que Delphine Seyrig interpréta au théâtre, dans la mise en scène d’Alfredo Arias, captée ensuite à l’écran par Benoît Jacquot. La nouvelle de Henry James semble, du reste, annoncer, selon un schéma symétriquement contraire, le couple de L’Année dernière à Marienbad, puisque, dans ce texte de 1903, c’est la femme qui se souvient d’un épisode du passé, que l’homme semble occulter ou refouler, et qui expliquerait la nature et l’impossibilité de leur relation. Et May, la femme, ne fait cet aveu qu’au moment où demi-morte elle s’apprête à disparaître.

De la musique _ et bonne _ pour changer

11mai

Un peu hors des sentiers battus,

et en tout cas du classique,

deux CDs de qualité un peu originaux :

_ le CD Letters to Marlene (un CD NoMadMusic NMM050), par Guillaume de Chassy, au piano, & Christophe Marguet, à la batterie, et avec Andy Sheppard, aux saxophones :

des compositions originales de Guillaume de Chassy et Christophe Marguet, avec deux classiques du répertoire de Marlene Dietrich : Lili Marleen, et Falling in love again.

_ le CD Sirba Orchestra ! Russian, Klezmer & Gipsy Music (un CD Deutsche Grammophon 4816692), par le Sirba Octet, Nicolas Kedroff à la Balalaïka, et l’Orchestre Philharmonique Royal De lège, dirigé par Chritian Arming :

« un parcours sans frontières (en Europe orientale, Russie et les Balkans) aux accents multiples , festifs, mélancoliques ou passionnés« …

qui vous changeront les idées…


Ce vendredi 11 mai 2018, Titus-Curiosus – Francis Lippa

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