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Les luziens Pascal Bibal et ses fils, François-Ignace, Grégoire et Joseph : poursuite d’enquête (I)

08nov

Certaines données

concernant les luziens

Pascal Bibal

(né à Saint-Jean-de-Luz le 12 juin 1847 _ Grand Rue n° 22 (ou n° 23 : c’est le nombre indiqué pour le lieu de naissance de sa jumelle Marie !!) _, et décédé à Bilbao, le 2 avril 1898 _ je l’ai découvert le 19 avril 2022… _)

et ses enfants,

notamment ses fils François-Ignace _ Ignace-François-Victor Bibal, né à Saint-Jean-de Luz le 17 septembre 1878, Grand Rue n° 39 _,

Grégoire _ Grégoire Bibal, né à Saint-Jean-de Luz le 3 mai 1882, Grand Rue n° 16 _

et Joseph Bibal _ Philippe-Joseph Bibal, né à Saint-Jean-de Luz le 29 décembre 1888, Rue Saint-Jacques _,

continuent, en dépit de mes recherches _ opiniâtres et tous azimuts _ de me manquer…

Je continue donc de les poursuivre,

par recherches sur Internet,

coups de fil à divers interlocuteurs pourvus de diverses compétences,

ou courriels _ dont je dispose des adresses électroniques.

Mon objectif premier concerne

l’obtention de la date et du lieu du décès de Pascal Bibal _ voilà : c’est fait ce 19 avril 2022 : Pascal Bibal est décédé à Bilbao, au n° 6 de la calle Arbolancha, le 2 avril 1898 _,

ainsi, bien sûr !, que le plus possible de renseignements sur sa vie ;

et sur son œuvre de peintre, naturellement !

Sur sa vie,

en plus du document établissant la naissance de Pascal Bibal

(ainsi que de sa jumelle Marie : 3ème et 4ème enfants de Pierre Bibal et Victoire Dupous, après Jean-Baptiste et Annette : Pierre Bibal, maître au cabotage, et Victoire Dupous se sont mariés à Saint-Jean-de-Luz le 26 avril 1843),

le 12 juin 1847 au n° 22 de la Grand Rue _ et non pas au n° 21 de cette Grand Rue, comme les 7 autres frères et sœurs Bibal, ainsi que je l’ai souligné en mes deux articles précédents, du vendredii 1er novembre :  ; et du samedi 2 novembre derniers :  … Mais peut-être est-ce là une effeur de graphie, ou de lecture… _,

je dispose aussi du document d’état-civil, établi à Saint-Jean-de-Luz le 13 juillet 1878,

déclarant le mariage civil, ce jour-là, à Saint-Jean-de-Luz, de Pascal Bibal avec Dorotea Iburuzqueta,

indiquant aussi leur précédent mariage religieux à Zarautz, le 23 janvier 1877 ;

puis les actes d’état-civil par lesquels Pascal Bibal est venu déclarer à la mairie de Saint-Jean-de-Luz

les naissances successives de ses 6 enfants,

entre le 17 septembre 1878,

pour son fils aîné Ignace-François-Victor,

et le 20 décembre 1888,

pour le benjamin de ses enfants, Philippe-Joseph, le 29 décembre 1888  :

soient :

Ignace-François Victor Bibal, né au n° 39 Grand Rue le 17 septembre 1878,

Marie-Micaela-Léonie Bibal, née au n° 16 Grand Rue le 27 novembre 1880,

Grégoire Bibal, né au n° 16 Grand Rue le 3 mai 1882, 

Elise Bibal, né au n° 5 Rue Gambetta le 15 mai 1884,

Jeanne-Ignace-Bernardine Bibal, née au n° 13 Rue Tourasse le 28 juin 1887,

Philippe-Joseph Bibal, né Rue Saint-Jacques _ sans numéro de maison noté _ le 29 décembre 1888,

assortis, ainsi que je viens de l’indiquer, de la mention

des domiciliations successives de Pascal Bibal,

ces onze années 1878-1888 à Saint-Jean-de Luz,

ainsi que de sa profession _ avec des variations intéressantes : peintre, antiquaire, propriétaire _, son âge,

ainsi que celui de son épouse Dorotea :

_ au 39 Grand Rue (le 17 septembre 1878, pour la naissance d’Ignace-François-Victor),

Pascal Bibal, le père, âgé de 30 ans, est indiqué de profession peintre,

et son épouse Dorotea, était dite âgée de 25 ans ;

_ au 16 Grand Rue (du 27 novembre 1880, pour la naissance de Marie-Micaela-Léonie

au 3 mai 1882, pour la naissance de Grégoire),

Pascal Bibal, le père, âgé de 32 ans en 1880, est indiqué de profession antiquaire, et son épouse Dorotea, est alors dite âgée de 27 ans ;

et Pascal Bibal, le père, âgé de 34 ans en 1882, est à nouveau indiqué de profession antiquaire, et son épouse Dorotea, est alors dite âgée de 28 ans ;

_ au 5 Rue Gambetta (le 15 mai 1884, pour la naissance d’Elise),

Pascal Bibal, le père, âgé de 38 ans, est indiqué cette fois propriétaire peintre, et son épouse Dorotea, est dite âgée de 30 ans ;

_ au 13 Rue Tourasse (le 28 juin 1887, pour la naissance de Jeanne-Ignace-Bernardine),

Pascal Bibal, le père, âgé de 40 ans,  est à nouveau indiqué de profession peintre _ sans mention cette fois (et désormais : pour quelles raisons ?..) de l’état de propriétaire _ et son épouse Dorotea, est dite alors âgée de 33 ans ;

il faut aussi indiquer que ce n’est pas Pascal Bibal, probablement absent alors de Saint-Jean-de-Luz, qui vient présenter l’enfant nouveau-né à la mairie, mais l’oncle paternel _ par alliance : ce dernier est en effet l’époux d’Annette Bibal, la sœur aînée de Pascal _ de celle-ci, Edmond Gaudin, 42 ans, receveur municipal _ ailleurs il est dit marineur.

_ et rue Saint-Jacques _ sans mention de numéro de maison _ (le 29 décembre 1888, pour la naissance de Philippe-Joseph),

Pascal Bibal, le père, âgé de 41 ans, est indiqué une fois encore ici de profession peintre, et l’âge de son épouse Dorotea n’est cette fois-ci pas mentionné.

Les contacts que j’ai pu établir avec divers correspondants très compétents _ et très aimables _

ont donné jusqu’ici assez peu de résultats

pour élargir ma connaissance en répondant à mes micro-questionnements :

_ les commissaires-priseurs, à Pau (M. Carrère) et à Saint-Jean-de-Luz (Arnaud Lelièvre et Caroline Lelièvre-Cabarrouy), ne disposent ni l’un ni les autres de biographie de Pascal Bibal

_ dont ils ont eu à vendre le premier au moins un Portrait de Dame Basque

et la seconde, tout récemment, L’Apprenti-boucher (signé seulement Bibal, sans prénom, il est vrai) ; mais le style de l’oeuvre fait pencher pour une réalisation du père, Pascal (né le 12 juin 1847 : il a 48 ans au mois d’août 1895) , plutôt que du fils, François-Ignace (né le 17 septembre 1878, qui n’a pas encore 17 ans en ce mois d’aout 1895 de cette toile… ; il resterait à confronter les signatures du père Pascal et du fils François-Ignace… ;

les commissaires-priseurs ne semblent pas très curieux de la biographie de l’auteur du tableau qu’ils avaient à vendre ou ont vendu, et semblent se contenter de la biographie de son fils, peintre lui aussi, et mieux connu que lui, François-Ignace Bibal (sauf que le jeudi 14 novembre Arnaud Lelièvre vient de m’adresser un courriel : « Nous vous remercions de votre message. Vous en savez très certainement beaucoup plus sur la famille Bibal que nous. En effet, l’œuvre que nous avons vendue était datée 1896 _ non : 1895, a rectifié son épouse quand je l’ai eue au téléphone un quart d’heure plus tard, et que je l’ai priée de bien vouloir me le préciser… ; cette date ayant beaucoup d’importance pour m’aider à cerner la fourchette de plausibilité de la date du décès de Pascal Bibal… : mais j’ai donc enfin découvert, le 19 avril 2022, que Pascal Bibal est décédé à Bilbao le 12 avril 1898 ! _ et au regard des dates, il nous a semblait pertinent _ oui, en effet ; à moins qu’il s’agisse là d’un travail de jeunesse de François-Ignace, son fils (qui n’a pas encore 17 ans au mois d’août 1895) _ de l’attribuer à Pascal » _ dont Arnaud et Caroline Lelièvre connaissent ainsi l’existence et le travail de peintre… Mais nous n’avons pas davantage d’information _ notamment de la part du vendeur du tableau. N’hésitez pas à nous en transmettre si vous en avez d’autres ! _ bien sûr ! et avec le plus grand plaisir ! Merci et bravo pour votre travail. Cordialement...« )…. _ ;

_ la documentation _ en l’occurrence en la personne de Madame Marie-Hélène Deliart, très aimable _ du Musée basque de Bayonne, musée qui dispose de plusieurs œuvres de François-Ignace Bibal,

a pu me faire part d’une page significative, mais trop partielle _ pages 514 – 515 _, d’un article, paru dans Gure Herria, de Philippe Veyrin, en 1926 :

Philippe Veyrin évoque bien l’expatriation à Cuba du peintre François-Ignace Bibal,

postérieurement _ « mauvais destin« , dit-il, page 515 de ce numéro de Gure Herria _ « à la mort de son père« , Pascal Bibal. 

Malheureusement

ni la date du décès de Pascal Bibal, le père,

ni la date de l’expatriation à Cuba des enfants Bibal,

ne sont précisées ici par Philippe Veyrin.

Voici le détail de ce texte _ précieux ! _ de Philippe Veyrin, en 1926, assorti de quelques commentaires de ma part  :

« Nous allons consacrer quelques pages de cette revue à Ignace-François Bibal, peintre basque-français.

Car c’est un vrai basque, ce petit homme souple, nerveux, fougueux, l’œil vif et malicieux sous le béret crânement posé. Un vrai basque (malgré sa fine moustache en bataille) par l’enthousiasme grave et réfléchi qu’il éprouve pour son art et qu’il sait faire passer dans ses œuvres.

Un vrai basque enfin, par sa vie elle-même.

Il convient, nous semble-t-il, de laisser quelque pâture _ Philippe Veyrin est bien bon : il a pensé à nous laisser, par ce qu’il ne détaille pas ici, du travail de recherche…à la curiosité des historiens et critiques d’Art qui travailleront dans les siècles futurs. Aussi nous contenterons-nous de donner ici les seules notes biographiques susceptibles de faire connaître _ c’est-à-dire découvrir un peu, commencer d’apercevoir _ à la fois l’homme et son œuvre.

Ignace- François Bibal est né à Saint-Jean-de-Luz _ le 17 septembre 1878, Grand Rue n° 39… Sa famille existait depuis longtemps dans le pays : sur les registres de la commune le nom de Bibal apparaît souvent dès le milieu du XVIIIème siècle _ son grand-père Baptiste Bibal, armurier, né à Hasparren en 1768, s’est marié à Saint-Jean-de-Luz (avec la luzienne Catherine Jeyre) le 11 février 1796 ; et le père de ce dernier, Jean Bibal, armurier lui aussi, était décédé à Saint-Jean-de-Luz, rue Oythourboure (?), le 23 mai 1795. Quant à son père, Pascal Bibal, il est né à Saint-Jean-de-Luz le 12 juin 1847, Grand Rue n° 22 (ou 21)…

Labourdin par sa famille et par sa naissance _ à Saint-Jean-de-Luz _, Bibal, par sa mère _ Dorotea Iburuzqueta Zabala _ originaire de Zarauz _ Pascal Bibal et Dorotea Iburuzqueta se sont mariés religieusement à Zarautz le 23 janvier 1877 ; puis civilement à Saint-Jean-de-Luz le 13 juillet 1878 _, appartient aussi au Guipuzcoa. Enfin, la Biscaye, où il vécut _ à Bilbao _une grande partie de son adolescence _ mais probablement pas avant la naissance du plus jeune frère de la fratrie, Philippe-Joseph Bibal, né à Saint-Jean-de-Luz le 29 décembre 1888 ; et peut-être afin de permettre à François-Ignace de bien compléter à Bilbao sa première formation de peintre, qui eut lieu à Ciboure, auprès de Gustave Colin _, a eu aussi son influence sur sa formation.

A Ciboure (dont les ruelles ombrageuses et les murs blancs ensoleillés n’ont jamais cessé de hanter son rêve d’artiste) Bibal fut un des rares élèves du maître Gustave Colin _ 1828 – 1910 : présent dès 1862 à Saint-Jean-de-Luz.

A Bilbao, quelques années plus tard _ au cours de la décennie des années 90 _, il fut, avec le catalan Santiago Rusiñol, avec Zuloaga, Dario de Regoyos, Manuel Losada, Alberto Arrué et quelques autres basques, un des fondateurs de l' »Exposition d’Art moderne ». Âgé seulement d’une vingtaine d’années, Bibal était le benjamin de ce groupe, dont la plupart des membres ne devaient pas tarder à s’illustrer.

Hélas, un mauvais destin vint, sinon interrompre, du moins ralentir une carrière si bien commencée. A la mort de son père _ à Bilbao, le 2 avril 1898, au n°6 de la Calle Arbolancha ; et inhumation au cimetière de Mallona… _, Bibal dut s’expatrier. Un vrai basque ne pouvait partir qu' »aux Amériques » : il fut s’établir à La Havane _ le 17 mars 1905 il est domicilié à La Havane, nous indique son livret militaire _ et y demeura jusqu’en 1914.

Revu en France pour combattre _ le livret militaire nous apprend aussi qu’Ignace-François est domicilié à Saint-Jean-de-Luz au n° 41 de la rue Gambetta (chez sa tante Annette Bibal Gaudin et son mari Edmond Gaudin) dès le 28 septembre 1914 _, Bibal, la guerre finie, ne voulut plus repartir _ il s’était entretemps probablement marié à Auch (avec Marie-Augustine-Rose Tournerie) ; Auch où il réside dès le 7 juillet 1917 ; et où il peint une vue de la cathédrale d’Auch, en 1919.

Dès lors, avec énergie, avec une patiente obstination il commença d’édifier cette œuvre dont la sensibilité vraie, la technique souple et variée, l’art sincère et consciencieux, s’imposent chaque année davantage à l’attention du public.

Tour à tour, ses envois annuels aux Salons de la Nationale, des Indépendants et des Tuileries, ont valu à Bibal des succès grandissants« , etc.

Ne perdons pas de vue que Philippe Veyrin, en plus de l’historiographe majeur du pays basque qu’il est, est aussi un important peintre de ce pays basque…

Madame Deliart a consulté le très compétent (sur l’école bayonnaise de peinture tout particulièrement) Olivier Ribeton, qui ne dispose pas, lui non plus, m’a-t-elle indiqué, de renseignements plus précis sur la vie et l’œuvre de Pascal Bibal.

Et il se trouve aussi que ni le Musée Basque, ni le Musée Bonnat, de Bayonne, ne possèdent dans leurs collections, d’œuvres de Pascal Bibal _ à la différence de la ville de Ciboure.


_ Robert Poulou, éminent connaisseur de la peinture basque, et de l’école bayonnaise,

ne possède pas, lui non plus, de précision supplémentaire sur Pascal Bibal ;

ni Jacques Ospital, l’historien de Saint-Jean-de-Luz _ qui a eu l’occasion de jeter un coup d’œil méthodique sur les archives familiales de Charles-Paul Gaudin (Saint-Jean-de Luz, 15 janvier 1938 – Saint-Jean-de-Luz, 25 mai 2006), le fils d’Edmond Gaudin (Saint-Jean-de Luz, 30 mai 1903 – Saint-Jean-de-Luz, 28 décembre 1988), et petit-fils de Martin-Marie-Charles Gaudin (Saint-Jean-de Luz, 19 novembre 1875 – Bimbo, Congo Français, 12 septembre 1910), et arrière-petit-fils d’Annette Bibal-Gaudin (Saint-Jean-de Luz, 28 avril 1845 – Saint-Jean-de-Luz, 21 novembre 1936), la sœur aînée du peintre luzien Pascal Bibal ;

et certaines œuvres de Pascal Bibal, demeurent, semble-t-il, dans la famille Gaudin, ainsi que dans la famille Courteault.._,

très aimables et coopératifs.


Et jusqu’ici je n’ai pas réussi à joindre Jean-François Larralde, autre particulièrement éminent connaisseur de la culture luzienne.

Sur le destin des enfants Bibal de Pascal et son épouse Dorotea Iburuzqueta,

je dispose _ et c’est une mine d’informations unique sur leurs parcours vitaux, y compris après les conseils de révision, ou leurs situations durant la guerre de 14 _ des livrets militaires des 3 frères Bibal,

Ignace-François-Victor, classe 1898,

Grégoire, classe 1902

et Philippe-Joseph, ou Philippe, classe 1908 ;

qui nous livrent de très précieux enseignements sur leurs parcours,

tant en France (Saint-Jean-de-Luz, mais aussi Auch) qu’en Espagne (Bilbao) ou à Cuba (La Havane).

Pour ce qui concerne l’aîné, Ignace-François-Victor Bibal,

de la classe 1898,

son livret militaire nous apprend en effet qu’à la date du conseil de révision, qui s’est tenu en 1898 _ sans plus de précision _, l’appelé (dont le domicile légal se trouve à Saint-Jean-de-Luz _ son lieu de naissance, le 17 septembre 1878 _) est dit résider alors à Paris _ probablement pour sa formation picturale _ ;

alors que le domicile de ses parents, feu Pascal Bibal _ l’information est pour nous capitale ! Pascal Bibal est donc déjà décédé lors du conseil de révision de son fils en 1898 : oui, il est décédé à Bilbao le 2 avril 1898  _ et Dorotea Iburesqueta (sic), est dit se situer à Bilbao.

À ce conseil de révision de 1898, l’appelé Ignace-François-Victor Bibal est provisoirement réformé ; et il est appelé à venir se représenter l’année suivante, en 1899, où il sera alors définitivement réformé (pour « faiblesse« ), et est alors versé dans la Réserve (en la 18ème section de L. O. A. ).

Sur le document,

ont été indiquées ensuite _ et c’est très précieux pour notre recherche ici _ les « localités successives habitées

par suite de changement de domicile ou de résidence » :

_ le 17 mars 1905, La Havane _ voilà une date cruciale : très probablement celle de (ou peu après) l’arrivée de la fratrie Bibal à Cuba…

_ le 28 septembre 1914, Saint-Jean-de-Luz, 41 rue Gambetta l’appelé, bien que réformé et mis dans la réserve, rentre alors de Cuba en France afin d’y remplir ce qu’il estime constituer ses obligations militaires ; et il loge ainsi chez sa tante paternelle Annette Bibal-Gaudin (née à Saint-Jean-de-Luz  le 28 avril 1845) et son époux Edmond Gaudin (né à Saint-Jean-de-Luz  le 17 novembre 1844).

_ le 7 juillet 1917, 7 rue de Colmar à Auch _ et c’est à Auch que réside (et est née, le 22 mars 1874) celle qui va être l’épouse (puis la veuve le 26 mai 1944) de François-Ignace Bibal : Marie-Augustine (dite Rose) Porterie (elle décédera au domicile du couple, 5 Place du Maréchal Foch à Saint-Jean-de-Luz, le 11 décembre 1962) : les deux futurs époux se sont-ils rencontrés à Auch, et puis mariés peu après ? Ou bien est-ce pour retrouver Rose Porterie, connue un peu auparavant, que François-Ignace Bibal se serait rendu à Auch ? C’est bien difficile à éclaircir…

Le 6 novembre 1914, la Commission de réforme a maintenu Ignace-François-Victor, qui est venu se présenter aux autorités militaires, dans sa situation primitive de réforme.

Le cas militaire de son frère Grégoire Bibal est, lui, plus complexe _ du fait que, choisissant de demeurer à Cuba au lieu de retourner en France, comme son frère aîné, suite à la déclaration de guerre avec l’Allemagne, en 1914, Grégoire Bibal sera considéré comme insoumis et en subira des conséquences (lors d’un retour en France en 1929) _ ;

et son livret militaire nous livre de forts intéressants renseignements, sur une longue durée.

En 1902,

comme ceux de la classe 1902, Grégoire Bibal passe le conseil de révision _ il n’est pas encore parti à Cuba.

Sa fiche d’identité comporte, comme celle de son frère aîné _ il faut le relever _, quelques erreurs :

il est dit fils de feu Pascal Bibal _ comme son frère aîné, quatre ans auparavant : forcément _ et de Dorothée Iburuzquieto (sic), domiciliés à Bilbao _ comme pour la fiche de son frère aîné _,

lui-même résidant aussi alors, de même que ses parents, à Bilbao (alors que son domicile légal est à Saint-Jean-de-Luz _ sans précision d’adresse plus précise _) _ et c’est probablement à Bilbao qu’est décédé Pascal Bibal, vers 1895-96-97-98 ; c’est ce que je cherche à établir ; oui, à Bilbao, calle Arbolancho, le 2 avril 1898…

Quant à la profession de Grégoire Bibal,

le mot peintre, d’abord inscrit, est rayé, et remplacé _ à quelle date ? C’est difficile à décider _ par architecte _ de fait, Gregorio Bibal Iburuzqueta va mener une brillante carrière d’architecte à La Havane, couronnée probablement par l’édification de l’Opéra de la Havane, à la fin des années 20.

Les conseils de révision de 1902 et 1903 prennent deux fois la décision de l’ajourner, et de le verser, pour « faiblesse, avis de Bilbao » _ la mention est significative ! _,  dans les « Services auxiliaires » de l’armée active, la « 18ème section d’Infirmiers » de la réserve.

Il est déclaré être passé dans la réserve de l’armée active à la date du 1er octobre 1906.

Puis, suite au décret du 1er août 1914, le voilà affecté à la 18ème section d’Infirmiers à Bordeaux.

Mais n’ayant pas rejoint son poste _ ni la France ; dès 1910 ou un peu avant, Gregorio est marié (dans le faire-part de décès de son cousin germain Martin-Marie-Charles Gaudin au mois d’octobre 1910, Grégoire Bibal figure comme marié, mais sans encore d’enfant : cf mon article du 16 juillet 2019 : ) ; mais n’est hélas pas alors mentionnée l’identité précise de son épouse _,

il est considéré comme insoumis le 15 octobre 1915 _ il demeure en effet à Cuba, à La Havane, avec son frère Joseph ; et ne reviendra, semble-t-il, séjourner en France qu’en 1929.

Le 21 août 1929,

s’étant présenté volontairement _ il faut le relever ! _ au bureau de recrutement de Bayonne le 16 août 1929 _ afin de régler sa situation militaire d’insoumis ; et il est désormais un architecte internationalement reconnu ! _,

il est rayé de l’insoumission ;

et il est laissé en liberté provisoire à Saint-Jean-de-Luz (Rue du Midi, Maison Marintchu _ (sic) au domicile de sa tante Annette Bibal veuve Gaudin ; laquelle a quitté le 41 de la rue Gambetta en juillet 1924 pour s’installer, avec sa sœur célibataire Bernardine Bibal (née le 22 août 1855), sa fille célibataire Marie Gaudin (née le 3 mars 1879), ainsi que sa petite-fille Annie Courteault, encore enfant (elle est née le 26 septembre 1913), à la Villa Mirentxu, rue du Midi. Ici, je me demande où, en quel domicile, résident ce 16 août 1929 son frère François-Ignace et sa belle-sœur Marie-Rose : à Ainhoa ? à Saint-Jean-de-Luz, rue Vauban ? Et pas encore 5 Place du Maréchal Foch à Saint-Jean-de-Luz, où le peintre décédera le 26 mai 1944.

Grégoire Bibal est officiellement condamné le 18 octobre 1929 par le Tribunal Militaire permanent de Bordeaux à 6 mois de prison avec sursis, pour insoumission en temps de guerre. Mais il n’a pas subi de détention provisoire.

Il est classé sans affectation le 24 octobre 1929 ; et affecté au C. M. d’Infanterie 183, le 30 juillet 1930, en raison, est-il précisé, de sa résidence à l’étranger _ Cuba, où il est retourné dès le mois de février 1930 ; voir plus bas. Il est aussi, et le fait est notable, un architecte reconnu internationalement.

Sur ce livret militaire de Grégoire Bibal,

ont été indiquées ensuite _ et c’est à nouveau très riche d’enseignements pour nous _ les « localités successives

habitées par suite de changement de domicile ou de résidence » :

_ le 14 février 1930, Calle Obispo, n° 16 à La Havane _ Gregorio Bibal est donc retourné là à Cuba, mais il veille à scrupuleusement signaler aux autorités françaises ses moindres changements de domicile (y compris à La Havane) ;
_ en 1931, Calle Montoro n° 5, toujours à La Havane 
_ en 1932, il y réside toujours _ et prend soin prudemment d’en informer les autorités militaires françaises.

Mais il a été définivement libéré de ses obligations militaires le 14 octobre 1931.

Le cas militaire de leur frère Philippe-Joseph Bibal, est, lui, plus simple.

Sa fiche d’identité militaire_ très pauvre, cette fois _ comporte, elle aussi, des erreurs :

son père, Pascal Bibal, n’est pas indiqué cette fois (en 1908) comme étant déjà décédé (le 2 avril 1898) ;

et le nom de sa mère est une fois de plus mal orthographié : Dorothée Iburuzagueta (sic)

Visiblement, Philippe-Joseph Bibal, de la classe 1908, ne s’est pas présenté au conseil de révision :

c’est qu’il réside désormais à la Havane (c’est effectivement mentionné _ et probablement lui aussi depuis le mois de mars 1905 _), et il n’a pas pris la peine de faire alors, en 1909, le voyage de Cuba vers la France.

Il est donc déclaré « Absent » en 1909 ;

puis inscrit sur la liste des insoumis le 4 mai 1910 _ j’ignore si lui est jamais retourné une seule fois en France ; oui, et même à de nombreuses reprises, m’indique sa cousine Maylen Gaudin-Lenoir ; mais probablement bien plus tard : vraisemblablement après 1945…

Lui donc n’a jamais eu à vivre les pénibles péripéties de réglement de sa situation militaire qu’a subies son frère Grégoire les années 1929-1930, avant le retour de ce dernier à Cuba le 14 février 1930.

Je m’interromps ici ce soir ;

je poursuivrais cet exposé sur mon enquête à propos de Pascal Bibal et sa famille demain.

Ce vendredi 8 novembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Pour suivre l’histoire des Bibal et des Gaudin au XIXe siècle à Saint-Jean-de-Luz : les changements de numérotation ainsi que de dénomination des rues de Saint-Jean-de-Luz

02nov

Afin de faire un rapide _ et commode _ bilan des domiciliations Grand Rue (au moins jusqu’en janvier 1883 _ où naît, le 31 du mois, au domicile de ses parents Gaudin-Bibal (ainsi que sa grand-mère Victoire Dupous, veuve de Pierre Bibal), au 41 Grand Rue, Pascal Gaudin _),

puis Rue Gambetta (à partir d’au moins avril 1884 _ où décède chez lui Léon-Pierre Bibal, fils de Victoire Dupous, veuve de Pierre Bibal, le 28 avril _)

des membres des familles Bibal

(issus de Pierre Bibal et Victoire Dupous, à partir de leur mariage _ à Saint-Jean-de-Luz _ le 26 avril 1843, ainsi que de Pascal Bibal et Dorotea Iburuzqueta, à partir le leur mariage _ à Zarautz _ le 23 janvier 1877 ; ainsi que, plus en amont, de leurs parents Baptiste Dupous et Françoise Benoît _ ils se sont mariés à Saint-Jean-de-Luz le 17 septembre 1821 _)

et Gaudin (issus d’Edmond Gaudin et Annette Bibal à partir de leur mariage à Saint-Jean-de-Luz le 27 janvier 1875),

je constate que,

lors de leur naissance ou de leur décès tels qu’ils sont attestés dans les actes d’état-civil,

la plupart d’entre ces personnes Bibal et Gaudin nées ou décédées à Saint-Jean-de-Luz

entre le 7 février 1844 (naissance de Jean-Baptiste Bibal) et le 2 novembre 1899 (décès de Louis Gaudin)

sont notées dans l’acte d’état-civil le déclarant

domiciliées au 21 Grand Rue,

qui devient le 41 Rue Gambetta au moins dès avril 1884 _ lors du décès chez lui de Léon-Pierre Bibal (1er février 1849 – 28 avril 1884) _ :

Jean-Baptiste Bibal, né au 21 Grand Rue le 7 février 1844

Annette Bibal, née au 21 Grand Rue le 28 avril 1845

Léon-Pierre Bibal, né au 21 Grand Rue le 1er mars 1849

Marie Bibal, décédée au 21 Grand Rue le 13 mars 1849 _ à l’âge de un an et 9 mois  _

Justine Bibal, née au 21 Grand Rue le 13 septembre 1850

Marie Bibal, née au 21 Grand Rue le 19 mai 1852

Marie-Martine-Eliza Bibal, née au 21 Grand Rue le 11 novembre 1853

Justine Bibal, décédée au 21 Grand Rue le 31 mars 1854 _ à l’âge de 3 ans et demi  _

Bernardine Bibal, née au 21 Grand Rue le 22 août 1855

Pierre Bibal, décédé au 21 Grand Rue le 12 septembre 1855 _ à l’âge de 49 ans  _

Baptiste Dupous, décédé au 21 Grand Rue le 18 avril 1865 _ à l’âge de 64 ans  _

Charles Gaudin, né au 41 Grand Rue le 19 novembre 1875

Marie-Pascaline Gaudin, née au 41 Grand Rue le 10 novembre 1876

Marie-Pascaline Gaudin, décédée au 21 Grand Rue le 30 avril 1877 _ à l’âge de 5 mois et demi  _

Pierre Gaudin, né au 21 Grand Rue le 7 février 1878

Marie Gaudin, née au 21 Grand Rue le 3 mars 1879

Jeanne Gaudin, née au 21 Grand Rue le 16 octobre 1880

Pascal Gaudin, né au 21 Grand Rue le 31 janvier 1883

Léon-Pierre Bibal, décédé au 41 Rue Gambetta le 28 avril 1884 _ à l’âge de 35 ans  _

Louis Gaudin, né au 41 Rue Gambetta le 23 février 1886

Louis Gaudin, décédé au 41 Rue Gambetta le 2 novembre 1899 _ à l’âge de 13 ans  _

et j’y ajoute, au XXe siècle :

Gracieuse Billac _ domestique, gouvernante des enfants Gaudin et grand-tante de Maurice Ravel _, décédée au 41 Rue Gambetta le 17 décembre 1902 _ à l’âge de 78 ans  _

Victoire Dupous _ la mère d’Annette et Pascal Bibal, et la grand-mère des enfants Gaudin et Bibal _, décédée au 41 Rue Gambetta le 16 juin 1903 _ à l’âge de 81 ans  _

et encore Edmond Gaudin _ le mari d’Annette Bibal et le père des enfants Gaudin _, décédé au 41 Rue Gambetta le 28 décembre 1920 _ à l’âge de 76 ans  _

_ au mois d’août 1924, Annette Bibal Gaudin vend (ou du moins va déménager de) la maison du 41 rue Gambetta, et va emménager avec sa fille Marie Gaudin, sa nièce Annie Courteault et sa sœur Bernardine Bibal, la fameuse Tante Bibi des lettres de Maurice Ravel à Marie Gaudin, à la (proche) Villa Mirentxu, rue du Midi ; depuis le double décès de ses fils Pierre et Pascal Gaudin, au Chemin des Dames, le 12 novembre 1914, et la mort de son mari Edmond Gaudin, le 28 décembre 1920, la maison du 41 Rue Gambetta est en effet devenue trop grande (et trop vide) pour ce qui demeure de la maisonnée Bibal-Gaudin… D’où ce déménagement dans cette petite maison, Mirentxu, aux volets verts… _ ;

aux notables exceptions suivantes-ci :

le 12 juin 1847, les jumeaux Pascal et Marie Bibal sont déclarés être nés 20 Grand Rue ;

le 13 septembre 1855, Françoise Benoît  (la mère de Victoire Dupous et grand-mère maternelle d’Annette et Pascal Bibal) est déclarée être décédée _ à l’âge de 82 ans _, elle aussi, 20 Grand Rue.

S’agit-il là d’une erreur de graphie du numéro (20 au lieu de 21) ?

Ou bien cette double naissance ainsi que ce décès

ont-ils eu lieu en une maison distincte _ et peut-être voisine, voire contigüe ? _ de celle numérotée 21 Grand Rue ?

Ensuite, c’est au 39 Grand Rue _ et pas au 41 _ que naît le 17 septembre 1878 Ignace-François-Victor Bibal (Paquito), le fils aîné de Pascal Bibal et son épouse Dorotea Iburuzqueta ;

et c’est au 16 Grand Rue _ et pas au 41 _ que naîtront ensuite, le 27 novembre 1880 et le 3 mai 1882

sa sœur Marie-Micaela-Léonie Bibal,

puis son frère Grégoire Bibal ;

et au 5 Rue Gambetta _ et pas au 41 _ que naîtra le 5 mai 1884 sa sœur Elise Bibal.

Les deux derniers enfants de Pascal Bibal et Dorotea Iburuzqueta,

soient Jeanne-Ignace-Bernardine Bibal,

et Philippe-Joseph Bibal (Pepe),

née le 28 juin 1887 et le 29 décembre 1888,

ne naîtront pas, eux, Rue Gambetta,

mais Jeanne, 16 Rue Tourasse,

et Joseph, Rue Saint-Jacques _ sans numéro de maison indiqué sur l’acte de naissance à l’état civil… 

C’est donc entre

le 22 août 1855date de la naissance de Bernardine Bibal _ à l’âge de 87 ans _,

ou plutôt le 12 septembre 1855date du décès de Pierre Bibal,

_ ou même le 13 septembre 1855, date du décès de Françoise Benoît ; mais celle-ci, pas au numéro 21, mais au numéro 20 de la Grand Rue, pour elle _,

et le 18 avril 1865, date du décès de Baptiste Dupous (né à Urrugne-Béhobie le 26 juin 1800_ et époux à Saint-Jean-de-Luz, le 17 septembre 1821, de Françoise Benoît : née à Saint-Jean-de-Luz, (j’ignore dans quelle maison de quelle rue) le 2 octobre 1786 et décédée à Saint-Jean-de-Luz, Grand Rue n° 20, le 13 septembre 1855 _),

que semble avoir été modifié le numérotage de la Grand Rue de Saint-Jean-de-Luz :

le numéro 21

devenant désormais le numéro 41 de la Grand Rue ;

qui sera au moins dès avril 1884 le numéro 41 de la rue Gambetta.

Je peux donc en déduire que

le 21 Grand Rue d’entre au moins février 1844 et au moins septembre 1855,

le 41 Grand Rue d’entre au moins avril 1865 et au moins janvier 1883

puis le 41 Rue Gambetta au moins dès avril 1884

semble bien être la dénomination-numérotation de la même maison

_ et en effet c’est bien dans ce créneau temporel que la municipalité de Saint-Jean-de-Luz procéda au changement de nom de pas mal des voies importantes de la cité :

le 14 février 1883. Juste 15 jours après la naissance de Pascal Gaudin, le 31 janvier 1883, au 41 Grand Rue !

Cette maison a-t-elle d’abord été _ et à partir de quelle date ? _ la propriété des Dupous _ voire, en amont, des Benoît ? _ ?

ou celle des Bibal ?

_ en tout cas, pas la propriété des Gaudin : le mariage entre Annette Bibal et Edmond Gaudin a lieu seulement le 27 janvier 1875 _ :

voici une piste intéressante de recherche…

Baptiste Dupous (1800 – 1865), le père de Victoire (1822 – 1903), était boulanger

_ de même que le père de Françoise Benoît et grand-père maternel de Victoire Dupous, François Benoît (né en 1746 et décédé à Saint-Jean-de-Luz le 16 avril 1828, Rue Montante), lui aussi boulanger… _,

et Pierre Bibal (1806 – 1855), le mari de Victoire, était maître au cabotage _ Pierre Bibal était né le 5 septembre 1806, Rue Saint-Jacques n° 24 ; et ses parents Baptiste Bibal (né à Hasparren en 1768, armurier, et décédé le 21 mai 1825, rue Saint-Jacques n° 25) et sa mère Catherine Jeyre (née à Saint-Jean-de-Luz en 1772 (j’ignore dans quelle maison de quelle rue), et décédée le 1er juin 1821, rue Saint-Jacques n° 24) étaient tous deux décédés, eux aussi, Rue Saint-Jacques : Baptiste Bibal au n° 25, et son épouse Catherine au numéro 24, selon les mentions de l’état-civil : à quoi tient cette différence de numéro ? à une variation de la numérotation, ou à une différence de domicile ?.. _ : …

La micro-histoire permet de préciser la connaissance via de micro-détails.

Ce samedi 2 novembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

De sublimes contributions de micro-histoire : « Les Camps d’internement et de travail dans l’Ardèche et la Drôme durant la seconde Guerre mondiale »

31juil

Ayant été mis en contact, pour des précisions concernant le général Ménard, avec Vincent Giraudier par François Broche,

je découvre un admirable travail auquel Vincent Giraudier a participé par 3 contributions, et publié aux Éditions Peuple Libre & Notre Temps, en 1999 :

le recueil d’articles Les Camps d’internement et de travail dans l’Ardèche et la Drôme durant la seconde Guerre mondiale de Vincent Giraudier, Hervé Mauran, Jean Sauvageon et Robert Serre,

et qui porte sur les divers camps d’internement, en Ardèche et dans la Drôme, entre 1939 et 1946 _ et notamment le 352e GTE de Crest.

 

Titus Curiosus, le 31 juillet 2015

Un point sur une enquête de micro-histoire sur un commandant de GTE dans les Basses-Pyrénées de novembre 1940 à juillet 1943

22avr

Voici un point-synthèse, j’espère significatif,

sur un élément précis des recherches de micro-histoire que je mène depuis deux ans
sur le parcours de mon père, du 5 juin 1942 au 30 septembre 1944
_ dates de son départ de, et de son retour à Bordeaux, où il résidait _
en zone dite, un moment, « non-occupée »,
après son passage illégal de la ligne de démarcation _ à Hagetmau _, ce 5 juin-là…
Mon père, venu en 1932 de Galicie polonaise _ Stanislawow _  en France, afin d’y faire ses études de médecine,
était, ces années 1941-42, assistant en ORL du Professeur Georges Portmann à la Faculté de Médecine de Bordeaux ;
et le 20 septembre 1939 il s’était engagé dans les régiments polonais au service de la France.
Cf mes articles du 31 juillet et du 27 septembre 2014 :
et
Pour ce nouveau point-synthèse, ce jour, sur le parcours de mon père,
et qui concerne précisément ici le commandant des 182e, puis 526e GTE (= Groupe de Travailleurs Etrangers), Marcel Brenot
_ c’est lui, Marcel Brenot, ce « commandant de GTE dans les Basses-Pyrénées de novembre 1940 à juillet 1943«  du titre de cet article… _,
dont mon père a probablement croisé _ sinon physiquement, au moins administrativement : nous allons le voir… _ la route,
ne serait-ce que parce que,
d’abord,
le nom de Marcel Brenot figure imprimé sur l’en-tête du tout premier « contrat agricole » de complaisance qui a ex-filtré mon père du camp de Gurs, en date de 26 août 1943
_ certes Marcel Brenot avait quitté Oloron et le Béarn au début du mois de juillet 1943 : pour Vichy, puis Orléans, où il venait d’être nommé Commandant régional des GMR (Groupes Mobiles de Réserve) ;
cependant, fin novembre 1942, Marcel Brenot (qui avait quitté le camp de Gurs au cours du mois d’avril 1942) signait avec René Gruel, devenu le chef du camp de Gurs, un contrat (valable pour le seul mois de décembre 1942) mettant administrativement à la disposition du 526e GTE départemental des Basses-Pyrénées que dirigeait alors Marcel Brenot, un groupe d’« hébergés«  détenus dans le camp de Gurs, afin que ceux-ci aident le service du camp de Gurs, et bénéficient ainsi, ne serait-ce que durant ce seul mois, des droits dont disposaient les TE, et dont ne bénéficiaient pas les détenus « hébergés«  :
c’est donc que Marcel Brenot, même en se trouvant à Oloron, continuait à entretenir des liens suffisamment étroits avec le camp de Gurs, son administration, comme ses détenus… _ ;
et aussi, et surtout,
parce qu’une lettre de Pierre Klingebiel d’avril 1945 donne très clairement à entendre
que c’est ce même Marcel Brenot,
qui avait déjà accordé à Pierre Klingebiel _ qui les lui avaient sollicités _, plusieurs « contrats agricoles » _ mais mon père, lui, se trouvait alors à Bordeaux, quitté par lui seulement le 5 juin 1942, sur le conseil pressant de Georges Portmann, l’avertissant qu’il figurait sur les listes de la Gestapo bordelaise… _ ex-filtrant, et à plusieurs reprises, du camp de Gurs _ et aussi du 182e GTE du camp de Gurs : quand Marcel Brenot dirigeait ce 182e GTE du camp de Gurs : à partir de novembre 1940, et jusqu’en avril 1942 _, plusieurs membres de la famille (de républicains espagnols, et protestants) Maso, à la demande du protestant actif qu’était, à Oloron, Pierre Klingebiel ;
que c’est ce même Marcel Brenot, donc,
qui, _ et cela de son initiative, cette fois _ avait sollicité Pierre Klingebiel,
qu’il connaissait donc bien, pour lui avoir plusieurs fois rendu le service d’ex-filtrer du camp de Gurs des républicains protestants espagnols amis, qui y étaient enfermés ;
afin, grâce à un « contrat agricole »,
mais de pure complaisance, cette fois,
de faire sortir mon père du camp de Gurs (et du 182e GTE dans lequel il officiait en tant que médecin et secrétaire-traducteur)
et de mettre ainsi ses compétences médicales, à disposition, cette fois,
des TE dispersés _ et non plus confinés dans un camp tel que celui de Gurs _ du 526e GTE d’Oloron,
en même temps que cela pouvait mettre, un peu mieux, mon père à l’abri de mesures genre « Organisation Todt » :
« pour ne pas recevoir d’ordres type STO » _ la loi instituant le STO date du 16 février 1943 _,
si je reprends l’expression de Pierre Klingebiel dans sa lettre du 17 avril 1945 à « M. le Directeur de la Régie Dépenses-Recettes des Groupements de TE« , 21 rue de Berri, Paris, 8e,
en réponse à une demande administrative de paiement d’impayés concernant ces « contrats agricoles » de TE de mon père,
reçue par Pierre Klingebiel ce même 17 avril 1945
_ soit bien longtemps après la fin du régime de Vichy, ainsi que le retour, le 30 septembre 1944, de mon père chez mes grands-parents maternels et sa fiancée, à Bordeaux ;
mais il faut en même temps noter que ce ne sera « finalement (…) que le 2 novembre 1945«  que « le général de Gaulle signe(ra) une ordonnance qui annule(ra) toute la législation de Vichy  concernant les GTE« ,
ainsi que le signale page 366 de sa thèse Camps de travail sous Vichy l’excellent Peter Gaida… _
je reproduits ici certains échanges récents _ hier 21 avril _ de courriels ;
et cela, en réponse et en réaction à la réception de nouveaux documents concernant Marcel Brenot (1893-1986),
que venait de m’adresser Bruno Le Marcis, l’époux de la petite-fille de ce dernier.
C’est via l’entremise de Claude Laharie,
que m’a contacté, le 2 février dernier _ 2015 _, Bruno Le Marcis,
à la recherche d’éléments pouvant l’aider à déchiffrer-comprendre le parcours (de toute une vie, mais ici au camp de Gurs et à Oloron) du grand-père, Marcel Brenot, de son épouse,
suite au décès récent (à l’âge de 90 ans) de la mère de cette dernière,
qui était une des deux filles de Marcel Brenot ;
Claude Laharie connaissant la recherche que je mène depuis deux ans à propos de divers commandants de GTE des Basses-Pyrénées _ dont ceux du 182e GTE du camp de Gurs, et du 526e GTE d’Izeste – Louvie-Juzon, puis Oloron _
apparaissant sur les documents d’archives concernant mon père : Marcel Brenot, Philippe Grandclément, E. Delluc…
Et depuis ce 2 février dernier, c’est ainsi une très riche correspondance, dense et extrêmement fertile (et à rebondissements passionnants !) ,
que Bruno Le Marcis et moi-même entretenons, 
à partir, et au fur et à mesure, des documents qu’il découvre et déchiffre
dans les archives parfaitement conservées du grand-père _ Marcel Brenot (17-7-1893 – 1-1-1986), donc _ de son épouse ;
archives fournissant autant d’indices à apprendre à interpréter pour faire progresser la recherche,
concernant tant son parent Marcel Brenot
que mon père,
lors de leur séjour à tous deux en Béarn sous l’Occupation…
Et cela alors que je ne sais toujours pas, à ce jour, si Marcel Brenot et mon père
se sont physiquement rencontrés, au camp de Gurs,
ou à Oloron…
Mais bien des personnes ont pu servir d’intermédiaires à cette connexion :
mon père avait reçu, au camp de Gurs, des mains du pasteur Cadier, un livre dont celui-ci est l’auteur,
et que mon père avait recouvert d’une feuille,
sur laquelle sont inscrits _ d’une écriture qui n’est pas celle de mon père _ son titre et son auteur ;
et dont le verso _ je ne m’en suis pas aperçu tout de suite ! _ est rien moins qu’un formulaire vierge
de demande d’inscription au statut de TE !!!
Et parmi les gardiens du camp de Gurs,
il y avait notamment Henri Duchemin (Oloron, 22-3-1918 – Roquiague, 14-8-1944),
protestant actif et résistant membre de l’Armée Secrète et du Corps-Franc Pommiès,  Henri Duchemin fut assassiné à Roquiague par les Allemands dans une ferme où il se remettait de blessures reçues quatre jours plus tôt à Mauléon-Licharre lors d’une action de Résistance _ ;
et je remarque que dans son dossier de résistant, mon père indique qu’il s’est engagé dans la Résistance dès le mois de juillet 1942,
soit dès le premier mois de sa présence comme TE au camp de Gurs.
Et Henri Duchemin a pour frère Laurent Duchemin _ chauffeur de l’ingénieur des Ponts et Chaussées Elie Larribeau, dont dépend aussi le camp de Gurs ; au camp de Gurs, Arlette Dachary est secrétaire des Ponts et Chaussées _,
protestant très actif, lui aussi, à Oloron,
et très proche, ainsi que son épouse Anna, de la famille Klingebiel.
….
Et les Duchemin, Anna et Laurent,
vont devenir,
avec les Klingebiel, Pierre et Elsie,
et les Castille, Léonie et Joseph _ chez lesquels mon père va loger à Oloron, 40 rue des Oustalots ;
Léonie Castille a pour sœur Marthe Lartigue (dont le fils Jacques, né en 1934, se souvient fort bien de mon père l’ayant soigné chez sa tante Léonie) ;
et les sœurs Léonie Castille et Marthe Lartigue, nées Brun, ont pour cousine germaine Alexandrine Bonnemason, née Brun elle aussi,
l’épouse décédée de Jean Bonnemason, collègue et ami de Pierre Klingebiel, le dirigeant de l’Armée Secrète à Oloron ;
lequel Jean Bonnemason témoignera de l’engagement dans la Résistance de mon père… _,
les amis et protecteurs de mon père à Oloron.
Fin de l’incise ;
et retour aux connexions plus que jamais à déchiffrer entre mon père et Marcel Brenot,
et d’autres commandants de GTE… 

D’où ce courriel de témoignage faisant un point-synthèse de ma recherche
aux historiens Peter Gaida et Denis Peschanski :

De: Titus Curiosus
Objet: Documents issus des archives de Marcel Brenot, (commandant des GTE 182, du camp de Gurs, et 526, d’Oloron, puis commandant régional des GMR d’Orléans)
Date: 21 avril 2015 12:05:38 UTC+2
Cc: Peschanski Denis
À: Peter Gaida

Messieurs,

poursuivant mes recherches sur le parcours de mon père, le Dr Benedykt Lippa, sous l’Occupation,

et convaincu du rôle majeur qu’y ont joué divers commandants (et autres personnels) des GTE successifs auxquels a eu à faire mon père,

au camp de Gurs (182e GTE), à Oloron (526e GTE), à Beaupuy (561e GTE), à Toulouse-rue de Belfort (562e GTE) et à Jurançon (à nouveau le 526e GTE départemental des Basses-Pyrénées et Landes non-occupées),

 …
je vous adresse copie du courriel que je viens d’adresser à Bruno Le Marcis,
qui explore les très riches archives du grand-père de son épouse : Marcel Brenot (17 juillet 1893 – 1er janvier 1986),
qui commanda le 182e GTE du camp de Gurs d’avril 1940 à avril 1942,
puis le 526e GTE, d’abord d’Izeste – Louvie-Juzon, puis d’Oloron (à partir du 6 novembre 1942), d’avril 1942 à juillet 1943,
comme l’attestent ses mémoires de défense, rédigés fin 1944.
 …
C’est très probablement Marcel Brenot qui, avant son départ d’Oloron _ pour Vichy _ au mois de juillet 1943, a proposé à Pierre Klingebiel,
professeur de philosophie au collège d’Oloron, militant protestant, et ami et collègue du résistant (Armée Secrète) d’Oloron Jean Bonnemason,
d’accepter d’assumer les charges d’un « contrat agricole » de complaisance en faveur de mon père,
afin, à la fois, de faire sortir celui-ci du camp de Gurs _ où il faisait partie des TE du 182e GTE de ce camp _,
ainsi que, de faire bénéficier
tant de ses compétences médicales (mon père avait été l’assistant en ORL à la Faculté de Médecine de Bordeaux, du Professeur Georges Portmann),
que de ses compétences linguistiques (mon père parlait polonais, russe, allemand et espagnol) et de secrétariat,
les TE du 526e GTE d’Oloron,
 …
tout en cherchant à éloigner _ un peu _ mon père de menaces type « Organisation Todt »,
voire Wehrmacht (la Galicie _ Stanislawow _ d’où venait mon père étant devenue allemande lors de la rupture du pacte Molotov-Ribentropp, le 22 juin 1941),
comme l’indique précisément une lettre rédigée au mois d’avril 1945 par Pierre Klingebiel, et conservée dans ses archives privées.
Je sais désormais que l’adjoint au chef du 526e GTE d’Oloron, puis Jurançon,
dont je lisais la signature à l’encre verte sur les documents du 526e GTE concernant mon père,
les 25 août 1943, 26 août 1943, (3 fois), 16 septembre 1943 et 21 juillet 1944,
comme quelque chose comme « Gourmençon »,
s’appelait en fait Joseph de Goussencourt
_ dont la famille (à Saint-Eman, tout à côté d’Illiers-Combray) a servi de modèle
rien moins qu’aux Guermantes de Proust !!!!
 …
Mais jusqu’ici, je n’ai rien découvert sur le parcours après la guerre de ce Joseph de Goussencourt
(né le 9 mai 1896, à Saint-Eman,
marié en 1928, avec Henriette Gros de Perrodil, née le 23 janvier 1896 et décédée en 1931 ; ils ont eu 2 enfants ;
et remarié le 27 janvier 1938 ; ils ont eu un enfant).
 …
C’est ce même Joseph de Goussencourt qui, le 21 juillet 1944,
quand mon père, revenu de Toulouse (et des 561e et 562e GTE de Beaupuy et Toulouse – rue de Belfort),
s’est rendu à la Villa Montréal à Jurançon, siège du 526e GTE départemental des Basses-Pyrénées,
lui a procuré _ à la demande expresse de mon père : le régime de Vichy vacillait fortement, au fur et à mesure de l’avancée des Alliés en Normandie et Bretagne ; et des bombardements alliés, aussi, dans le Sud-Ouest … _ un nouveau « contrat agricole » de complaisance,
adressé à nouveau, cette fois encore, à Pierre Klingebiel à Oloron _ que mon père désirait rejoindre…
Le nouveau chef du 526e GTE départemental étant alors E. Delluc,
qui _ venant des Hautes-Pyrénées : du 525e Groupe Disciplinaire de Travailleurs Etrangers de Bagnères-de-Bigorre _ avait remplacé Philippe Grandclément,
signataire, avec son adjoint Joseph de Goussencourt,
des contrats et documents concernant mon père au 526e GTE de la fin août à la mi-décembre 1943…
Voilà.
Les archives de Marcel Brenot
que déchiffre peu à peu Bruno Le Marcis
sont une mine d’éléments passionnants…
 …
Titus Curiosus
P. s. :
vendredi prochain, 24 avril, je me rends à Navarrenx,
sur les traces des liens _ et des témoins encore vivants de cette période ! _ entre Marcel Brenot,
Henriette Verdalle (épouse de Jean Laclau-Barrère _ du 28 mars 1924 au 22 avril 1940 _, puis de Frédéric-François Wachsner _ à partir du 8 décembre 1945)
et la famille de Pierre Cassin,
réfugiée à Navarrenx pendant la guerre.
 …
Henriette Verdalle (Navarrenx, 21 août 1896 – Mauléon-Licharre, 27 août 1988) est la fille du maire et conseiller général de Navarrenx, Paul Verdalle (Mauléon-Barousse, 19 mars 1860 – Navarrenx, décembre 1949 ou janvier 1950) .
Et c’est lui, Paul Verdalle, qui a donné l’autorisation de construire sur les territoires de Dognen, Préchacq-Josbaig et Gurs, le camp (dit, dès lors, « de Gurs »),
après le refus qu’avait opposé au député-maire d’Oloron, Jean Mendiondou,
le maire d’Ogeu-les-Bains, le chanoine Arthur Biers, d’installer sur sa commune d’Ogeu ce camp d' » accueil » des Républicains espagnols
vaincus par les franquistes, lors de leur Retirada
 …
Pierre Cassin (Paris, 9 août 1910 – Paris, 26 juillet 2000), avocat à Paris,
est le fils de Raphaël David Cassin (Nice, 7 juin 1875 – Saint-Maurice, 22 avril 1936), avocat à Paris lui aussi
_ niçois de naissance, celui-ci se trouve à Paris dès 1901, domicilié 5 rue Racine, dans le quartier latin _ ;
et le petit-fils de Gratien Cassin (Nice, 17 janvier 1843 – Nice, 26 mai 1881) et de son épouse Léontine Cassin (Nice, 24 décembre 1850 – Nice, 12 octobre 1918) ;
cette dernière étant la sœur aînée d’Azaria Henri Cassin ((Nice, 8 mai 1860 – Nice, 13 mai 1959),
père de René Cassin (Bayonne, 5 octobre 1887 – Paris, 20 février 1976)…
Et David Raphaël Cassin (né en 1875) fut le mentor, à Paris, de son cousin René Cassin (né en 1887), au moment des études de Droit de ce dernier dans la capitale.
Et au moment de la débâcle du printemps 1940,
René Cassin avait proposé à son cousin Pierre Cassin _ et à sa famille _ de partir avec lui _ et son épouse _ pour l’Angleterre…
René Cassin et son épouse purent s’embarquer à Saint-Jean-de-Luz, sur un bateau polonais, le 20 juin 1940, et gagner Londres le 28 juin suivant ; René Cassin se rendant aussitôt offrir ses services au général de Gaulle.
Tandis que Pierre Cassin et les siens préférèrent rester en France.
Ils franchirent la ligne de démarcation à Salies-de-Béarn ; puis décidèrent de demeurer à Navarrenx, où ils avaient trouvé un excellent accueil notamment de la part d’Henriette Verdalle : Pierre Cassin allait donner des leçons au fils d’Henriette Verdalle, le jeune André Laclau-Barrère (qui préparait le bac), au Vieux-Logis ; et Henriette Verdalle trouvait une maisonnette (avec un petit jardin potager) un peu à l’écart du bourg de Navarrenx, au lieu-dit « du Bois de Navarrenx« , dans laquelle résideraient les Cassin… _, plutôt que de rejoindre Nice _ berceau de la famille Cassin dès la première moitié du XIXe siècle _, comme ils l’avaient d’abord envisagé.
Frédéric-François Wachsner (avocat berlinois et juif antinazi), lui, était TE au 182e GTE du camp de Gurs ;
et c’est Marcel Brenot qui lui avait permis de quitter le camp de Gurs afin de servir de précepteur au fils d’Henriette Verdalle, André Laclau Barrère (alors lycéen à Pau, mais malade à ce moment _ il préparait le bac chez lui), au Vieux-Logis, à Navarrenx _ 26 rue du Faubourg.
Marcel Brenot ainsi que sa famille étaient régulièrement reçus chez Henriette Verdalle, au Vieux-Logis, à Navarrenx,
comme s’en souvient bien aujourd’hui encore la dernière fille encore vivante de Marcel Brenot.
Et celle-ci, née, comme André Laclau-Barrère, le fils d’Henriette Verdalle, en 1925 _ André Laclau-Barrère : Cierp, 4 novembre 1925 – Susmiou, 1er mai 2001 _,
se souvient même que le jeune André ne l’appréciait pas beaucoup…
Pierre Cassin _ dont se souvient aussi la fille de Marcel Brenot (90 ans maintenant) _, avocat parisien,
qui habitait avec son épouse Hélène et ses deux enfants, Nelly et Jacques, une petite maison (avec un jardin) à l’écart du faubourg de Navarrenx _ dans le quartier un peu plus excentré dit « du bois de Navarrenx«  _,
allait aider lui aussi, au Vieux-Logis, le lycéen André Laclau-Barrère à préparer le bac.
Et le Vieux-Logis de Navarrenx hébergeait encore un certain nombre _ mais oui ! _ de réfugiés…
 … 
Henriette Verdalle, quant à elle, possédait, en effet, dès avant la guerre une carte d’adhérente à la Ligue contre l’antisémitisme.
Et il faut noter que Marcel Brenot a maintenu toute sa vie des liens avec Henriette Wachsner-Verdalle…
Cf ce document que m’a adressé Bruno Le Marcis le 13 avril dernier :
 …
« Je retrouve à l’instant une carte de visite postée à Hendaye-Plage le 22/12/1978
et reçue par Marcel Brenot le 26 à PARIS, suite à une erreur d’adresse« .
« Madame H. WACHSNER-VERDALLE
Vous adresse ses bons vœux et souhaits les plus sincères pour l’année nouvelle pour vous et vos enfants,
serait si heureuse de vous revoir,
garde un si bon, si fidèle souvenir de vous tous.
J’espère que vous êtes en bonne santé et vous adresse l’expression de toute mon amitié !
Je vous embrasse affectueusement,
votre vieille fidèle amie.« 
Henriette Wachsner-Verdalle avait, ce 22 décembre 1978, 82 ans, et Marcel Brenot, 85…
Tout cela est passionnant.
Et voici ma réponse à l’envoi par Bruno Le Marcis de nouveaux documents
_ issus d’un des « mémoires de défense » de Marcel Brenot, rédigés fin 1944 -début 1945, au moment de sa mise en accusation par une commission d’épuration… _,
occasion et origine de ce point-synthèse-ci :

Début du message réexpédié :
De: Titus Curiosus
Objet: Marcel Brenot : suite des documents
Date: 21 avril 2015 10:38:26 UTC+2
À: Bruno Le Marcis

Merci de ces nouveaux documents.
 …
J’en retiens surtout les précisions qu’apportent la lettre de soutien du Commandant H. Peyrelongue,
et la liste des documents annexes concernant la période de Gurs :
Gurs
1 – Lettre Picard Toulouse du 5 11 44
2 – Copie lette Cdt Peyrelongue du 15 11 44 à M. le Commissaire Ral
3 – Lettre UGIF du 28 mai 1943. remerciements 526e GTE
4 – Lettre remerciements Wachsner du 11 9 1942 _ rédigée à Navarrenx, je remarque… _
5 – Lettre Yahni remerciements du 16 4 43
6 – Carte Mme Nahoum déclarant patriote du 20 10 44
7 – Carte lettre Mme Verdalle à Navarrenx à M. le Commissaire Ral
8 – Copie carte David à M. le Commissaire Ral indiquant sauvés déportation
9 – Copie lettre Mlle Roux à M. le Commissaire Ral
 …
Qu’apporte le détail de ces nouveaux documents annexes ?
 
Les liens entre Marcel Brenot (ainsi que sa famille)
avec Frédéric François Wachsner (un des TE de Marcel Brenot au 182e GTE du camp de Gurs)
et Henriette Verdalle (et sa famille : son père, Paul, et son fils André Laclau-Barrère) au Vieux-Logis à Navarrenx
constituent décidément une pièce importante de notre enquête :
tout cela à partir des souvenirs, se précisant peu à peu, de votre tante Huguette…
De mon côté,
je viens de lire le très riche La Lutte contre le chômage à Vichy _ Henri Maux, le Juste oublié 1939-1944  (aux Éditions Lavauzelle, en 2002 )
d’Antoinette Maux-Robert,
fille de Henri Maux ;
lequel, Henri Maux, en tant que « Commissaire-adjoint à la Lutte contre le Chômage » pour la zone non-occupée, à Vichy,
chapeautait le Service des GTE,
que dirigeait, toujours à Vichy, le lieutenant-colonel Tavernier
_ à propos duquel Peter Gaida dit, page 120 de sa thèse Camps de travail sous Vichy _ Les « Groupes de Travailleurs Etrangers » (GTE) en France et en Afrique du Nord 1940-1944 :
« les archives restent muettes sur ce personnage »
 …
Je vais tâcher de me renseigner si, depuis les travaux d’Antoinette Maux-Robert (2002) et de Peter Gaida (2007),
on en a appris un peu plus sur ce personnage méconnu de Tavernier
 …
Je remarque aussi, au passage, que le livre d’Antoinette Maux-Robert ne cite qu’une seule fois le nom de Lemay _ en une note, page 293 : « CHAN, 72 AJ 2265 et 2266 (Heilmann) : rapport confidentiel de Lemay, chef du GTE n°2, sur le recrutement allemand à Figeac, Muret, Tarbes, juillet-août 1942«  _, qui dirigeait le Groupement n°2 de Toulouse,
alors que le livre cite plusieurs fois le nom du commandant Rougier, qui dirigeait le Groupement n°1 de Clermont-Ferrand…
Il est vrai que Clermont-Ferrand était moins éloigné de Vichy que Toulouse,
même si Henri Maux s’est rendu aussi à Toulouse, ces années-là…
J’aurais aimé en apprendre un peu plus sur ce M. Lemay, et son rôle à la Direction du Groupement n°2 des GTE de la Région de Toulouse…
Et voici, maintenant, un très bon résumé de la situation du CLC de Henri Maux, et de sa chronologie, par Denis Peschanski :
 …
« Dès le 11 octobre 1940, une loi instituait un Commissariat à la Lutte contre le Chômage (CLC),
auquel furent rattachés les GTE.
… 
François Lehideux en était le responsable _ Henri Maux ayant refusé de s’occuper de la zone occupée ! _,
mais Henri Maux avait la tutelle sur la zone libre, où il fit prévaloir une autre logique que celle _ répressive _ en vigueur ;
cela lui valut d’être fortement menacé dans son poste et sa mission à l’automne 1941 ;
puis,
même s’il fut chargé, le 26 septembre 1942, d’assurer par intérim les fonctions de commissaire _ pour les 2 zones : non-occupée et occupée _,
d’être remercié ;
et la structure d’être liquidée le 17 janvier 1943.
… 
Il _ Henri Maux _ pouvait s’appuyer sur le « Service des Etrangers »,
qui entra officiellement en action à partir du 4 juillet 1941.
Son responsable, Gilbert Lesage, eût un rôle majeur dans le rapprochement familial et dans la politique qui vise à faire basculer les internés des camps vers les GTE,
avant de mettre sur pied les « Centres d’Accueil Spécialisés ».
… 
Au CLC, était attaché un « Service Central des Formations de Travailleurs Etrangers »,
dirigé par le colonel Tavernier ;
tandis qu’au moment où fut instituée une « Inspection Générale des Camps », sous la houlette d’André Jean-Faure (en septembre 1941),
on nomma le commandant Doussaud _ ou Dousseau, comme l’orthographie Peter Gaida, aux pages 121-122 de sa thèse _ comme « Inspecteur des Formations de Travailleurs Etrangers » » _ ou GTE ;
et ce commandant Dousseau vint en effet au camp de Gurs, au moins en mars 1943… Mais on sait bien peu de choses sur son parcours par la suite…
J’ignore si les noms du colonel Tavernier,
du commissaire-adjoint Henri Maux,
ainsi que celui de Gilbert Lesage _ ce dernier est mieux connu des historiens _,
se retrouvent dans les archives de Marcel Brenot, commandant des 182e et 526e GTE.
Pour ce qu’il en est du nom de Dousseau _ Dousseau est venu à Gurs au moins en mars 1943 _,
il est possible qu’il en soit fait mention dans les archives de Marcel Brenot,
même si en ce mois de mars 1943, de sa venue attestée au camp de Gurs, Marcel Brenot, lui, se trouve diriger le 526e GTE, à Oloron, et ne se trouve donc pas au camp de Gurs.
Les 2 pages (121 et 122) de Peter Gaida sur ce commandant Dousseau sont d’ailleurs très intéressantes…
 …
Aux AD 64 de Pau, se trouve une série de documents mentionnant les suites conflictuelles auxquelles donna lieu l’inspection du commandant Dousseau au camp de Gurs ;
concernant surtout, je suppose, le commandant du camp de Gurs : Gruel, en mars 1943.
Peter Gaida m’en a communiqués certains, sur son CD-Rom…
 …
Je mets l’accent sur les noms de Tavernier et de Maux,
parce que ceux-ci étaient, à Vichy, les supérieurs hiérarchiques de Marcel Brenot,
via Lemay, le chef du Groupement n° 2 de Toulouse (puis Toulouse-Sud, quand fut créé un Groupement n° 7, pour Toulouse-Nord),
rue de Belfort à Toulouse… 
Tout cela pour essayer d’éclairer la décision de Marcel Brenot
de demander à quitter le 526e GTE d’Oloron, au printemps 1943
_ départ dont se trouve au courant Georges Picard, du CAR (Centre d’Accueil des Réfugiés) de Montauban, dès la fin mai 1943,
comme en témoigne sa lettre du 28-5-1943 à Marcel Brenot.
 …
Henri Maux, lui,
devenu officiellement Commissaire provisoire _ et non plus Commissaire-adjoint _ à la Lutte contre le Chômage pour les 2 zones, à la date du 26 octobre 1942,
quitte son service au Ministère du Travail le 1er mars 1943,
viré par le ministre Lagardelle..
 …
Mais dès le retour de Laval à Vichy en mai 1942 bien des choses avaient commencé de se dégrader pour Henri Maux et le CLC.
 …
En tout cas, au mois de décembre 1942, suite à deux rencontres orageuses, à Paris, avec Henri Maux (les 20 et 21 décembre),
le ministre du Travail Hubert Lagardelle a décidé que le CLC disparaissait,
remplacé par un « Office de Reclassement Professionnel », qui sera créé par la loi du 16 janvier 1943 ;
et que « Maux restera seulement _ quelques semaines encore, pour organiser la transformation du CLC »…
 …
Page 195 de son livre, Antoinette Maux-Robert écrit :
« Finalement, Lagardelle décide d’opérer une réorganisation complète de son ministère
et de créer une 5éme Direction, qui englobera le Service de l’Inspection du Travail et de la Main-d’œuvre.
C’est cette Direction qui sera chargée d’élaborer les mesures imposées à l’Office de Reclassement Professionnel. »
 …
Et d’autre part, elle met l’accent, page 196, sur ce fait capital :
« Le 16 février 1943, est adoptée la loi instaurant le Service du Travail Obligatoire » ;
et « par une courte lettre _ du 4 février 1943 _, le ministre du Travail _ Lagardelledemande à Maux de cesser toute activité à dater du 1er mars »…
C’est donc dans ce contexte (de disparition à terme des GTE, vidés peu à peu de ses TE, envoyés massivement à l’Organisation Todt…)
que Marcel Brenot prend, à Oloron, au printemps 1943, la décision de quitter ce Service menacé des GTE…
Et il est aidé en cette prise de décision par son amitié avec le général Perré, chef de la Garde du maréchal Pétain, à Vichy,
par lequel général Perré Marcel Brenot obtient de devenir Commandant régional des GMR à Orléans.
Cette période du printemps 1943 est donc intéressante pour saisir l’évolution de Marcel Brenot en ces années d’Occupation…
Cependant les GTE, même se vidant peu à peu de nombre de ses TE, ne disparaitront pas totalement
tant que durera le régime de Vichy
_ à preuve le statut de mon père TE, du 10 décembre 1943 au 20 juillet 1944, aux 561e et 562e GTE de Haute-Garonne (Beaupuy et Toulouse rue-de-Belfort),
puis à nouveau, à partir du 21 juillet 1944, au 526e GTE de Jurançon,
et cela jusqu’au 30 septembre 1944, date où il peut enfin regagner librement Bordeaux, libéré des Allemands…
 …
Mon père entre en effet au 526e GTE d’Oloron le 26 août 1943 (après le départ d’Oloron pour Vichy, début juillet, de Marcel Brenot) ;
il passe au 561e de Beaupuy (près de Toulouse) le 10 décembre 1943 _ alors que de nombreux TE des Basses-Pyrénées sont directement envoyés, eux, au camp de Noé, pour triage vers l’Organisation Todt, ou Drancy (et Auschwitz !)… _ :
il y est chargé d’organiser l’infirmerie du cantonnement du Domaine de Lagaillarde (un château inoccupé depuis au moins dix ans ! et alors sans eau courante, ni électricité !),
ce 561e GTE étant transplanté de Clairfont, en banlieue sud-ouest de Toulouse, à Beaupuy, dans la campagne vallonnée des côteaux du nord-est de Toulouse ;
(et il devait aussi rejoindre le 562e GTE de Toulouse rue de Belfort le 16 juin 1944 ; mais cette mutation fut déclarée « nulle et non avenue » le 19 juillet 1944 sur le registre de ce 562e GTE de Toulouse : une énigme encore pour moi à ce jour…) ;
et enfin mon père peut même revenir _ du fait de quelles initiatives (et complicités) ? _ au 526e GTE de Jurançon, le 21 juillet 1944,
où il obtient un nouveau « contrat agricole » de complaisance,
signé une nouvelle fois par l’adjoint (au chef de ce 526e GTE départemental des Basses-Pyrénées _ E. Delluc (venu du 525e GTE départemental (et disciplinaire) des Hautes-Pyrénées, à Bagnères-de-Bigorre, remplaçant alors Philippe Grandclément à la tête de ce 526e GTE départemental des Basses-Pyrénées ; mais j’ignore à ce jour quand eut lieu cette passation de commandement au GTE de Jurançon… _) : Joseph de Goussencourt
(c’est sa signature à l’encre verte que je lisais jusqu’ici « Gourmençon ») ;
et adressé cette fois encore _ de l’initiative de Joseph de Goussencourt ? et à la demande de mon père, très probablement… _ au très bienveillant toujours Pierre Klingebiel, à Oloron.
Mon père, membre à nouveau, par conséquent, de ce 526e GTE départemental des Basses-Pyrénées, résidera ainsi à nouveau, comme de septembre à décembre 1943, à Oloron-Sainte-Marie _ 40 rue des Oustalots, chez Joseph et Léonie Castille _,
de cette fin juillet jusqu’à la fin septembre 1944, date de son retour définitif, libre, à Bordeaux…
Auparavant, mon père aura participé aux actions de Libération d’Oloron,
auprès de Jean Bonnemason (de l’Armée Secrète) _ collègue et ami de Pierre Klingebiel _, au cours de la fin du mois d’août 1944.
Depuis longtemps,
et de plus en plus à mesure que mon enquête progresse,
je pense que mon père a bénéficié de protections efficaces de la part de certains des membres de la hiérarchie des GTE ;
et que c’est très probablement à l’initiative de Marcel Brenot (qui connaissait Pierre Klingebiel à Oloron dès son commandement du 182e GTE du camp de Gurs : à l’occasion de « contrats agricoles » ayant permis d’ex-filtrer du camp de Gurs des protégés républicains espagnols protestants dont Pierre Klingebiel connaissait les parents réfugiés à Oloron, tels plusieurs membres de la famille Maso…)
que mon père a pu quitter Gurs (et le 182e GTE du camp de Gurs)
pour Oloron (et le 526e GTE), au mois d’août 1943.
 …
Reste à préciser et mieux comprendre les conditions effectives de la transmission Marcel Brenot – François Bodin-Hullin – Philippe Granclément, à la tête de ce 526e GTE d’Oloron, en juillet-août 1943…
Quant au mystérieux colonel (ou lieutenant-colonel) Tavernier,
il continuera de diriger le Service des GTE à Vichy…
A suivre…
Titus

Voilà donc ce point-synthèse intermédiaire que je tenais à faire à propos des avancées à ce jour de mon enquête…
Et, suite à mon envoi aux historiens Peter Gaida et Denis Peschanski,
voici, enfin, le petit mot de réception de Denis Peschanski à mon courriel de synthèse :
Le 21 avr. 2015 à 12:46, Denis Peschanski a écrit :
Cher Monsieur,
 
C’est à une enquête exemplaire que vous vous livrez
et, ainsi, vous éclairez, par une histoire singulière, un pan important de l’histoire de la France des années noires.
Simple détail que vous connaissez bien sûr: les ponctions massives dans les GTE ont commencé dès 1941.
 
Bonne continuation
 
Bien amicalement
——————–
Denis Peschanski
Titus Curiosus ce 22 avril 2015

Un admirable monument de micro-histoire de l’Occupation : le « Dictionnaire de la Collaboration _ Collaborations, compromissions, contradictions » de François Broche

12nov

Poursuivant un travail entamé avec L’Armée française sous l’Occupation (2002-2003), Une histoire des anti-gaullismes des origines à nos jours (2007) _ je viens d’en commencer la lecture ; et c’est passionnant et très riche ! _ et le Dictionnaire de la France Libre (2010 _ je viens de le parcourir de la première à la dernière page : c’est aussi une très riche source de micro-informations…),

François Broche nous livre ce mois-ci, avec son Dictionnaire de la Collaboration _ Collaborations, compromissions, contradictions, qui paraît aux Éditions Belin, un admirable monument (de 928 pages et 848 entrées) de micro-histoire, magnifiquement fouillée, sur le sujet ô combien complexe _ ainsi que délicat, encore, même si des braises s’apaisent… _ des Collaborations, compromissions et contradictions _ pour reprendre les termes excellemment choisis de son sous-titre _ de diverses sortes, et à des degrés très variés, vis-à-vis tant de l’Occupant allemand que de l’État français de Vichy.

Le temps est donc venu, comme ont bien commencé de nous l’apprendre les travaux très précis _ et très précieux, ainsi : la précision est en effet indispensable ! _ de Robert Belot (La Résistance sans De Gaulle, L’Affaire suisse, Les Secrets de la Résistance, Aux Frontières de la liberté) et de Bénédicte Vergez-Chaignon (Les Vichysto-Résistants), de dépasser l’ère de la domination des clichés tant résistantialistes que vichystes et néo-vichystes qui encombraient et gênaient une historiographie enfin suffisamment soucieuse des complexités, nuances et évolutions _ sinon contradictions : au gré des circonstances et changements survenant ; à commencer par l’issue des batailles se livrant sur divers fronts (au premier chef desquels ceux de l’Est et ceux d’Afrique), et influençant les attentistes de tous poils… dans le temps, des protagonistes des événements survenant en France ainsi qu’en son empire entre 1940 et 1944-45,

pour cesser de succomber aux manichéismes tant idéologiques que moralisateurs, simplificateurs :

écueil que sait magnifiquement éviter François Broche…

Pour ce qui _ modestement _ me concerne en tant que chercheur de la micro-histoire de mon père, entre le 7 juin 1942 et le 30 septembre 1944 _ dates de son départ de Bordeaux occupé, et de son retour à Bordeaux libéré ; cf mon article Poursuite d’enquête sur les liens de résistance entre Pierre de Bénouville et les Portmann, père et fils _, et en zone non-occupée (principalement Oloron, Gurs, Toulouse, Beaupuy),

c’est le fil d’Ariane de l’Armée Secrète qui principalement mobilise l’enquête que je poursuis,

à travers, d’abord, les personnalités des Résistants qui l’ont aidé (d’abord Jean Bonnemason et Pierre Klingebiel, les deux à Oloron) ;

mais aussi les commandants des GTE des Basses-Pyrénées (Marcel Brenot, Philippe Grandclément, E. Delluc, se succédant au 526e GTE d’Oloron _ rue Saint-Grat _, puis Jurançon-Pau _ Villa Montréal, avenue Henri IV _, à partir du mois de septembre 1943)

et de Haute-Garonne (Georges Ledoux, au 561e GTE de Beaupuy _ au Domaine de La Gaillarde _ ; et éventuellement Brouguière, au 562e GTE de Toulouse-rue de Belfort ; ainsi que Lemay, qui dirigeait le Groupement II des GTE de Toulouse, pour être exhaustif _ jusqu’ici j’ignore les prénoms de ces Messieurs Brouguière, Lemay et E. Delluc) ;

ainsi que le Professeur Georges Portmannn, le maître en ORL de mon père à la Faculté de Médecine de Bordeaux, qui lui a permis de fuir la Gestapo, à Bordeaux, les premiers jours de juin 1942, en l’informant à temps que la Gestapo allait venir l’arrêter _ cf à nouveau mon article précédent : Poursuite d’enquête sur les liens de résistance entre Pierre de Bénouville et les Portmann, père et fils.

Si le nom de Georges Portmann apparaît bien à la page 752 du Dictionnaire de la Collaboration de François Broche, à l’entrée « Radio-Vichy« , mais très succinctement _ trop succinctement pour ma curiosité _,

en revanche Georges Portmann n’y est pas cité comme ayant été Secrétaire général à l’Information au gouvernement de Vichy (du 2 janvier au 16 février 1941), ainsi que directeur de la Radio de Vichy, lors de l’intermède Flandin _ Pierre-Étienne Flandin, dont Georges Portmann était alors le « bras droit« , comme le signale, parmi d’autres, Philippe Burrin, en sa France à l’heure allemande (page 381) ; Olivier Wieviorka, en son Histoire de la Résistance, qualifie Georges Portmann d‘ »un des fidèles de Flandin«  _, entre un premier gouvernement Laval _ avec Jean-Louis Tixier-Vignancourt au Secrétariat à l’Information _ et le gouvernement Darlan _ les tous premiers jours, c’est Henry Moysset qui, seul, remplace Georges Portmann ; puis, à partir du 23 février, Paul Marion est associé à Henry Moysset à cette fonction gouvernementale ;

ni, non plus comme ayant fait partie, et cela dès l’origine, de la Délégation française à la Commission allemande d’armistice de Wiesbaden _ François Broche me précise que ce fut très précisément du 28 juin au 13 septembre 1940.

Alors que le nom de Max Brusset _ rencontré, lui, dans les Souvenirs de Georges Portmann (parus en 1982), comme dans Le Sacrifice du matin de Pierre de Bénouville (rédigé et paru dès 1945, aux Éditions La Palatine, à Genève ; le texte sera modifié-enrichi lors de plusieurs rééditions, dès 1946 et jusqu’en 1983, aux Éditions de son ami Robert Laffont) : à propos de l’intervention de la Gestapo chez lui, 28 Boulevard Raspail, le 26 mars 1944, à dix heures du matin, alors que devaient se retrouver dans ce salon et à cette heure plusieurs membres du réseau de Pierre de Bénouville, dont Georges (le père) et René (le fils aîné) Portmann, ainsi que Pierre de Bénouville lui-même : c’est ainsi que furent arrêtés ce 26 mars 1944 Armand Magescas et Alain de Camaret… _ en est absent.

Depuis, François Broche m’a appris que Max Brusset a été député gaulliste de Charente-Maritime de 1946 à 1958 _ d’abord ce fut sous l’étiquette du Parti Républicain de la Liberté, de Joseph Laniel, de décembre 1946 à juin 1951 (le RPF n’avait pas encore été créé en décembre 1946) ; puis comme député RPF, de juin 1951 à décembre 1955 ; et enfin sous l’étiquette des Républicains Sociaux (nouveau nom d’un parti rassemblant des gaullistes, avant 1958), de janvier 1956 au 30 novembre 1958) _ cf là-dessus le très utile et très précis Dictionnaire de la France libre, dirigé par François Broche, Joseph Caïtucoli et Jean-François Muracciole.

Max Brusset a été aussi maire de Royan, de mai 1953 à mars 1959,  démissionnant de ce mandat municipal, après avoir été battu le 30 novembre 1958 aux élections législatives par André Lacaze (candidat Indépendant et Paysan) ; à la mairie de Royan, lui succèdera alors, au mois de mars 1959,  l’amiral Hubert Meyer _ oncle de l’actuel maire de Royan, Didier Quentin.

J’ai découvert aussi, depuis, que, à partir de 1937 et pendant la guerre, Max Brusset, journaliste et homme de radio de son métier, a pris des parts, à partir de 1938, à une radio dans le Midi, à Antibes-Juan-les-Pins : Radio Nice-Côte d’Azur, qui était devenue le 20 mars 1937 Radio-Méditerranée. Et que cette radio deviendrait, suite à diverses péripéties durant la période de guerre, et impliquant les Allemands _ dont Otto Abetz _, Radio Monte-Carlo… Voilà donc un point de convergence entre Max Brusset et Georges Portmann, ainsi que Pierre de Bénouville, qui a vécu à Antibes, Biot, etc., sur la Côte d’Azur, sous l’Occupation.

Mais c’est au Dictionnaire de la Collaboration _ Collaborations, compromissions, contradictions de François Broche que je veux rendre ici l’hommage que ce travail considérable et magnifique, passionnant, mérite.

Les 848 entrées de ce Dictionnaire, magnifiquement précises et détaillées, et même fouillées, nous livrent en effet un portrait somptueusement riche _ et étonnamment vivant ! _, au travers de toutes ses complexités, de cette époque particulièrement riche en nuances _ et évolutions, sinon contradictions _ de toutes sortes ;

assorties, pour chacune des entrées, d’une bibliographie aussi complète que possible (et par là extrêmement utile), elle aussi.

Je tiens à souligner au passage le souci de François Broche de donner le maximum de précision, en matière de lieux _ pour ce qui concerne la domiciliation des diverses institutions abordées : un soin assez rare, il faut le souligner… _, de dates _ c’est aussi très appréciable _, de détails bibliographiques sur les personnes, sans s’en tenir, d’ailleurs, à la seule période (1940-1944) de la Collaboration _ tant ce qui précède (dans la formation et les carrières des individus) que ce qui suit ces moments (dans le devenir de l’après-guerre) est en effet très judicieusement porté à la connaissance du lecteur, et nous apprend beaucoup…

Max Brusset a lui-même beaucoup appris en travaillant à sa passionnante et très riche, déjà, histoire des anti-gaullismes des origines à nos jours

Et cela _ je reviens au Dictionnaire de la Collaboration _ Collaborations, compromissions, contradictions _ à partir d’une conception éditoriale elle-même extrêmement bien conçue : chaque titre de notice est accompagné d’un excellent sous-titre, et chaque entrée comporte une ou deux citations représentatives mises en exergue, à côté du corps du texte lui-même.

Si bien que ce Dictionnaire de la Collaboration _ Collaborations, compromissions, contradictions constitue désormais un outil de référence indispensable pour les chercheurs comme pour les curieux de cette période plus que jamais fascinante…

Au passage, je peux indiquer que deux éléments ont sollicité tout particulièrement ma curiosité, au point d’en désirer découvrir davantage… :

tout ce qui concerne, d’une part, les très riches interconnexions des milieux d’affaire, autour de ce qui alors fut qualifié par certains de synarchie _ cf ainsi, et entre bien d’autres, l’article que François Broche lui consacre aux pages 829-830 ; et au passage, je remarque l’absence d’une entrée consacrée à Pierre Taittinger (1887-1965)… _ ;

et d’autre part, ce qui concerne, parmi les divers medias d’information, communication, propagande, la radio _ cf les articles Radio-Paris et Radio-Vichy, aux pages 751-752-753 ; et j’aurai souhaité en apprendre davantage sur les autres radios, en particulier en zone d’abord dite non-occupée ; par exemple à propos de Radio-Méditerranée, à Antibes, et de la naissance de Radio-Monte-Carlo, autour des activités de Max Brusset ; ou encore du développement de Radio-Andorre… _ cf La Résistance à Toulouse et dans la Région 4, de José Cubero.

Et il me faut souligner que les articles consacrés aux différents organes de presse (ainsi que d’édition) de cette période de l’Occupation sont tout particulièrement riches, et nous font pénétrer fort judicieusement dans les arcanes de l’information et de la propagande sous l’Occupation ; mais aussi pour toute la période qui suit, où fleuriront de nombreuses publications néo-vichystes : ici, l’apport de François Broche est tout spécialement remarquable, et très précieux pour le lecteur…

Bref, cet ouvrage de 928 pages de François Broche est bien davantage qu’un simple dictionnaire :

c’est un monument passionnant et grouillant de vie de micro-histoire,

en plus de former un très riche répertoire d’informations, à consulter par entrées, au fur et mesure de ses curiosités, comme pour tout dictionnaire…


Titus Curiosus, le 12 novembre 2014          

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