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Naissance, ce mois de mai 2024, du Festival Lucien Durosoir « Mai musical 2024″, autour de Bélus, en pays d’Orthe, pour des oeuvres magnifiques données ici en miroirs ; ou le constat renouvelé de la sidérante singularité Durosoir…

16mar

Une magnifique initiative

pour honorer un compositeur à la très forte personnalité musicale.


De: « Georgie Durosoir »

Objet: Naissance d’un festival

Date: 14 mars 2024 à 09:50:43

Chers mélomanes, chers amis,

Nous avons le plaisir de vous annoncer la création d’un festival de musique de chambre consacré à la mémoire de Lucien Durosoir (1878 – 1955). Nous l’inaugurons par le Mai Musical 2024 dont vous trouverez le détail ci-dessous.

Lucien Durosoir a maintenant conquis la place qui lui  revient dans le concert des grands de l’histoire de la musique. Il est légitime de lui dédier un festival. Celui-ci se tiendra en Pays d’Orthe, dans le pourtour du village de Bélus auquel il lia son destin à son retour de la Grande Guerre, et où il fonda sa famille. Nous avons choisi l’idée du « Miroir », une manière de mettre Lucien Durosoir face à ses contemporains _ voilà ! Sa musique démontre ainsi d’elle-même que cette place n’est pas usurpée. Nous espérons vous retrouver nombreux à ces événements qui enrichiront la vie culturelle de notre région.

Georgie et Luc Durosoir.

Musique de chambre en Pays d’Orthe

             Festival Lucien Durosoir »

         « Mai Musical » 2024

Dimanche 5 mai 2024 : « Sonates en miroir »

Sonates pour violoncelle et piano de Claude  Debussy et de Lucien Durosoir

Duo Stanislas Kim, violoncelle et Marie Günter, piano

Château de Monbet (Saint Lon les Mines, 40300)

Dimanche 12 mai 2024 : « Scherzando ! »

 

Le scherzo, avec sa fantaisie, inspirera « Les Gabriëles », quatuor à cordes

Scherzos de Fritz Kreisler, Lucien Durosoir, Henryk Wieniawski, Quatuor de Claude Debussy

Château de Monbet (Saint Lon les Mines, 40300)

Dimanche 19 mai 2024 : « Durosoir invite Ligeti »

Durosoir Quatuor n° 3 et Ligeti Quatuor n° 1 par le Quatuor Tana

Château de Monbet (Saint Lon les Mines, 40300)

Samedi 25 mai 2024 : « Trio/miroir »

Trios de Debussy, Durosoir, Lili Boulanger par le Trio Ernest,

Église de Bélus (40300)

Tous les concerts ont lieu à 16 heures

Réservations ouvertes à partir du 15 avril

maimusicalLD@gmail.com

Ou : 06 80 89  63 34

Voilà une passionnante initiative, avec de jeunes ensembles de musiciens prometteurs ou déjà confirmés.

Ainsi, du Quatuor Tana, je possède pour ma part 4 magnifiques CDs :

_ le double CD « Seven » des sept premiers Quatuors de Philip Glass,

_ le CD « King Lear » des Quatuors n° 8 et 9 de Philip Glass,

_ et le CD « WTC 9/11 » de Steve Reich…

Du Quatuor n°1 (composé en 1953-1954) de György Ligeti (1923 – 2006),

je possède deux interprétations au disque par le Quatuor Arditti, enregistrées toutes deux à Londres, en 1978, pour le label Wergo _ j’en possède la « special edition«  de 2006 : le CD WER 6926 2 _, et 1994, pour le label Sony Classics_ en formation en partie modifiée : si Irvine Arditti, premier violon, et Rohan de Saram, violoncelle, sont des deux enregistrements de 1978 et 1994, dans celui de 1994, Lennox Mackenzie, second violon, et Levine Andrade, alto, de l’enregistrement de 1978, ont cette fois été remplacés par David Alberman et Garth Knox ; cette interprétation de 1994 (disponible dans le coffret « György Ligeti – Works » de 9 CDs dans la ré-édition-anniversaire de 2010 que je possède : Sony 88697616412) est sidérante d’incisivité et beauté ! C’est magistral !!! _écoutez-ici cette seconde interprétation de 1994 (d’une durée de 20′ 41), elle est spendidissime…

Ainsi que deux autres interprétations, l’une par l’Artemis Quartet enregistré à Cologne, en 1999 _ dans le CD « Ligeti – String Quartets 1 & 2« , Erato 0946 3369 34 2 5 _, et l’autre par le Quatuor Béla enregistré à Grange des Villarons en 2012 _ dans le CD « György Ligeti – Métamorphoses intimes« , Æon AECD 1332…

Et il me faut ajouter ici que ce sont mes échanges avec Karol Beffa _ cf son important « György Ligeti » paru chez Fayard en mai 2016 : un magnifique travail  que j’ai dévoré à sa sortie…  _ qui ont aiguillé ma curiosité vers l’œuvre, magistral en effet, de György Ligeti…

À partager,

et bien sûr à suivre…

Francis Lippa

Des confrontations « en miroirs » passionnantes.

Et bravo pour un choix si judicieux de programmes de concerts afin de mettre si bien en valeur l’idiosyncrasie puissante de l’œuvre de Lucien Durosoir

_ cf ma contribution « «  au Colloque « Lucien Durosoir, un compositeur moderne né romantique » qui s’est tenu les 19 et 20 février 2011 au Palazzetto Bru-Zane à Venise ; ainsi que mon article du 23 juin 2020 à propos des trois stupéfiants Quatuors de Lucien Durosoir ; « «  _,

mises ainsi en regard de quelques uns de ses plus excellents contemporains, tant compositeurs que violonistes :

Henrik Wienawski (1835 – 1880)Claude Debussy (1868 – 1918), Lili Boulanger (1893 – 1918), Fritz Kreisler (1875 – 1962), György Ligeti (1923 – 2006)…

Et c’est bien cette très marquante singularité (ou idiosyncrasie), en son siècle, de Lucien Durosoir, à laquelle j’avais consacré la première de mes deux contributions de recherche et analyse au colloque du Palazzetto Bru-Zane à Venise, en février 2011 : «  » _ la seconde de ces deux contributions miennes au colloque de Venise étant : « La poésie inspiratrice de l’œuvre musical de Lucien Durosoir : Romantiques, Symbolistes, Parnassiens, Modernes« 

Ce samedi 16 mars 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Julien Behr : « solaire et élégant, puissant et délicat, charmant et profond », ou la confirmation de son éclatant talent de ténor de demi-caractère dans l’épatantissime CD « Confidence » (Alpha 401, en 2018)…

29juin

En éclatante confirmation

de ce que m’avait révélé le merveilleux tout récent CD « L’Heure espagnole – Bolero«  _ de Maurice Ravel _ par le flamboyant François-Xavier Roth et Les Siècles _ soit le CD Harmonia Mundi HMM 905 361 _ ;

cf l’enthousiasme jubilatoire de mon article «  » du 20 juin dernier,

voici ce jeudi 29 juin,

que l’écoute plus que ravie de l’épatantissime CD « Confidence » (Alpha 401) de Julien Behr, avec Pierre Bleuse dirigeant l’Orchestre de l’Opéra de Lyon, un CD paru le 28 septembre 2018 _ CD que je m’étais empressé de commander illico presto à mon disquaire préféré… _,

me fait complètement adhérer à ce qui en a été dit, lors de la parution de ce CD, à l’automne 2018, sur le site »OperaOnline.com« , sous le titre « Chronique d’album : Julien Behr, Confidence« , pour qualifier la prestation magnifique de ce formidable charismatique ténor de demi-caractère qu’est Julien Behr… :

« le timbre solaire et élégant de Julien Behr, à la fois puissant et délicat, charmant et profond. Ajoutons à cela une diction qui frôle l’exemplarité. (…) Il devient difficile de ne pas succomber à cet enregistrementt balayant près d’un siècle de musique » _ française romantique : le CD a aussi bénéficié des conseils très avisés du Palazzetto Bru-Zane, dont le directeur, l’excellent Alexandre Dratwicki, signe le très riche texte de présentation du livret de ce CD « Confidence« 

Quelle présence ! Quel charme !

Et je rappelle à nouveau ici, au passage, le témoignage absolument décisif de la prestation magnifique tout spécialement de Julien Behr, en bachelier-poète Gonzalve, que nous offre l’enthousiasmante vidéo de l’enregistrement de la scène finale de « L’Heure espagnole » de Maurice Ravel, avec ses quatre collègues chanteurs _ Isabelle Druet, Loïc Félix, Jean Teitgen, Thomas Dolié _, et Les Siècles, sous la direction justissime, clarissime _ en son ultra-fin irrésistible esprit français… _, et enivrante de vie, de François-Xavier Roth…

 

Ce jeudi 29 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Découvrir Mathieu Pordoy merveilleux de poésie aussi au piano, en son CD avec Marina Rebeka, « Voyage » _ et tout particulièrement en son jeu éblouissant dans « La Flûte enchantée » de Maurice Ravel…

22juin

Désirant découvrir aussi, au disque, la personnalité de Mathieu Pordoy cette fois au piano _ et pas seulement en son merveilleux travail décisif, mais discret, « dans l’ombre« , de chef de chant ; cf mon enthousiaste article d’hier : « «  _

je me suis procuré son CD, avec la magnifique soprano Marina Rebeka _ le CD Prima Classic PRIMA014, paru le 16 septembre 2022 _, « Voyage« …

Et le merveilleux _ oui ! _ de ce que Mathieu Pordoy a su obtenir des chanteurs qu’il a « coachés« dans la si délicate à « attraper » et vraiment vraiment réussir « Heure espagnole » de Maurice Ravel _ j’en reviens une fois encore au transcendant miracle des 3′ 26 de la vidéo (dansante !) de l’enregistrement, les 24 et 25 mars 2021, du quintette vocal final sous la direction proprement magique de François-Xavier Roth, avec ses merveilleux Siècles ; à comparer avec les 3′ 06 du podcast de l’enregistrement Maazel, en 1965, avec pourtant rien moins que les talents magnifiques de Jane Berbié, Michel Sénéchal, Jean Giraudeau, Gabriel Bacquié et José Van Dam ; c’est dire le degré de hauteur du défi qu’a permis de relever et si merveilleusement réussir le chef de chant Mathieu Pordoy, aux talents supérieurs de comédiens-chanteurs extraordinaires qu’ils sont, eux aussi, d’Isabelle Druet, Julien Behr, Thomas Dolié et Jean Teitgen : chapeau, les artistes !.. Quelle performance d’intelligence et sensibilité du chant ! Quelle compréhension supérieure du génie si fin et malicieux de Ravel… C’est un enchantement dont on n’arrive décidément pas à se lasser… _,

eh ! bien!, il n’est que d’écouter tout ce que réalise au piano dans cet hyper-sensuel « Voyage » avec Marina Rebeka Mathieu Pordoy pour le retrouver, cette fois dans l’art de servir au plus haut l’art de la mélodie ;

et tout spécialement dans « La Flûte enchantée » (extraite de la « Shéhérazade » de Maurice Ravel et Tristan Klingsor) dont Mathieu Pordoy tire des sonorités musicales absolument magiques, inouïes jusqu’ici…

Je n’ai hélas pas découvert jusqu’ici de podcast ou de vidéo qui m’aurait permis de le faire écouter ici…

Mais voici trois très pertinents articles de commentaires de ce CD, sous les plumes

de Matthieu Roc, sur le site de ResMusica, le 11 octobre 2022 : « Beau voyage aux frontières de la mélodie française avec Marina Rebeka » ;

de Charles Sigel, sur le site de forumopera.com, le 16 octobre 2022 : « Voyage en douce » ;

et de Laurent Bury, sur le site de premiereloge-opera.com, le 21 octobre 2022 : « Voyage, le nouveau disque de Marina Rebeka _ Plus loin que la nuit et le jour« .

C’est une bonne idée du Palazzetto Bru Zane _ l’ami Étienne Jardin signe la présentation du livret du CD… _ de parrainer ce disque co-produit par Marine Rebeka et , et d’explorer un florilège de mélodies dont le caractère français est soit ambigu, soit partagé avec d’autres identités nationales.

Sur le thème du voyage, ce disque rassemble quelques items connus et évoquant un Orient fantasmé (Duparc, Ravel, Fauré, Saint-Saëns, Widor), mais surtout, il nous permet de découvrir des pièces de Gounod écrites en Angleterre sur des textes italiens, d’autres de Pauline Viardot écrites en Allemagne sur des textes russes, ou encore de l’alsacienne Marie Jaëll dont on ne saurait dire s’il s’agit de Lieder ou de mélodies françaises. Ce n’est pas seulement le rêve d’ailleurs qui est exploré, mais aussi la transnationalité _ en effet, c’est très bien vu… L’ensemble fait _ déjà _ un programme « border-line » tout à fait captivant _ absolument…

Si on prend pour jauge l’Invitation au voyage de Duparc _ et Baudelaire _ et La flûte enchantée de Ravel _ et Klingsor _, et si on affirme qu’à côté de ces merveilles, aucun des morceaux choisis ne pâlit ou ne démérite, on prend la mesure _ voilà ! _ de la qualité des mélodies _ en effet. Ceux de Marie Jaëll sont particulièrement intéressants. On découvre dans Rêverie une mise en musique admirable des vers de Victor Hugo (Orientales), avec une étonnante mise en évidence du désir d’absolu ou du rêve d’un Eden sur terre, qui sous-tend toutes ces poésies évoquant un ailleurs inatteignable. Le cycle des « Quatre mélodies » a cette particularité d’avoir été d’abord cinq Lieder… Marie Jaëll (née Trautmann) a dû s’habituer en 1870 (à 24 ans), à être Allemande et à publier en allemand des pièces qui seront créées plus tard en français, quitte à en supprimer une au passage. Ont-elles été pensées en français ou en allemand ? Sont-ce des mélodies ou des Lieder ? Peu importe : Dein est bouleversant de tendresse, Der Sturm très efficace dans la description de l’orage en reflet des mouvements de l’âme, Die Vöglein d’une beauté très raffinée. Die Wang ist blass achève de distiller une tristesse à la fois élégante et profonde. Les mélodies de Pauline Viardot, soit en italien, soit en russe (de son ami Tourgueniev) montrent aussi une belle variété de caractères, de sentiments, de paysages, avec sans doute plus de sérénité que Marie Jaëll, mais sans aucune superficialité. A côté de ces deux compositrices qui font plus de la moitié du programme, on se délecte encore de deux savoureux Saint-Saëns _ Désir de l’Orient et La madonna col bambino _, une pittoresque Chanson slave de Cécile Chaminade (qui fait fortement penser à Lalo ou Bizet), d’une charmante Chanson indienne de Charles-Marie Widor, ainsi que d’autres mélodies plus fréquentées.

Chanter des mélodies dans toutes ces langues (français, allemand, italien, toscan, russe…) relève de la gageure _ oui _, et Marina Rebeka semblait à même de la relever. La voix est superbe _ oui ! _, robuste, homogène dans toute son étendue et elle est manifestement polyglotte, tous les idiomes étant honorablement _ voilà… _ articulés. Le problème _ que relève ici Matthieu Roc _ est celui de beaucoup de ces voix athlétiques, gutturales et hypervibrantes, dont l’émission compromet l’intelligibilité des mots, ceux-ci manquant de projection dans le masque _ voilà. On reconnait les syllabes, mais pas les phrases _ et là est bien sûr le fâcheux…, que ce soit en français, allemand ou italien, cela ampute les pièces de la dimension poétique du texte _ un indispensable de l’art de la mélodie _, nous prive d’une bonne part de l’émotion, et fait plafonner le plaisir au niveau de l’esthétisme. Sans doute conscient du problème _ oui _, Matthieu Pordoy déploie sur un piano somptueux _ oui _ des merveilles _ absolument ! _ de sensibilité et d’inventivité _ et d’intelligence, des textes comme de la musique… Ses phrases _ au piano _ sont magnifiques, ses dynamiques _ en leur galbe et leur élan superbes _, ses petites intentions _ que Mathieu Pordoy sait rendre au millimètre près : tout cela, très finement entendu, est très juste _ prouvent une compréhension intime _ oui ! Mathieu Pordoy possède le génie de l’intimité… _ des poésies _ ce qui est absolument indispensable à l’art d’interpréter la mélodie… Le prélude de la mélodie de Widor est particulièrement réussi. Il arrive à sauver _ mieux que çà : il les sublime… _ le Duparc et le Ravel _ qu’il ne faut surtout pa manquer : ce qu’y fait, au piano, Mathieu Pordoy, est sublime… _ en les jouant comme un nocturne de Fauré, prenant entièrement à sa charge l’aura poétique _ oui, oui, oui _ des morceaux, la soprano faisant du beau son, et l’auditeur qui connait son texte par cœur faisant le reste. Pour les autres, surtout Jaëll et Viardot, la curiosité, le plaisir de découvrir du peu ou du pas connu rachète la prononciation _ l’élocution, et surtout essentiel l’élan des phrases…

En somme, c’est effectivement un beau voyage auquel nous invitent Marina Rebeka et Mathieu Pordoy. L’itinéraire est passionnant, le wagon luxueux, la compagnie distinguée, les paysages magnifiques… mais au bout de quelques étapes, la frustration gagne _ un peu _, et on a envie de briser la glace pour sentir enfin la réalité _ en toutes ses infra-dimensions de poésie _ de toutes ces merveilles qui nous sont données à voir ou à entendre. Un disque de découverte, donc, mais d’attente.

Henri Duparc (1848-1933) : L’Invitation au voyage. Cécile Chaminade (1857-1944) : Chanson slave. Maurice Ravel (1875-1937) : La Flûte enchantée. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Désir de l’Orient ; La Madonna col bambino ; Alla riva del Tebro. Charles-Marie Widor (1844-1937) : Chanson indienne. Gabriel Fauré (1845-1924) : Les Roses d’Ispahan. Charles Gounod (1818-1893) : Perché piangi ? ; Oh ! Dille tu !. Marie Jaëll (1846-1925) : Rêverie ; Dein ; Der Sturm ; Die Vöglein ; Ewige Liebe ; Die Wang’ ist blass. Pauline Viardot (1821-1910) : L’innamorata ; La Mésange ; Le Saule ; Sérénade ; La Fleur ; Soupir… ; Invocation.

Marina Rebeka, soprano ; Mathieu Pordoy, piano.

1 CD Prima Classic.

Enregistré en mai 2021 au Latvian Radio Studio à Riga, Lettonie.

Texte de présentation en français et anglais, poèmes donnés dans leur langue originelle et traduits en anglais.

Durée : 74:13

16 octobre 2022

Le titre « Voyage » est un peu bateau (pardon !), mais le programme l’est moins _ oui : il sait voyager en terres pas trop fréquentées jusqu’ici ; et hors des clichés (touristiques !) rebattus… On peut imaginer qu’il reflète la collaboration entre Marina Rebeka et Alexandre Dratwicki, directeur artistique du Palazzetto Bru Zane à qui rien du répertoire français du 19e siècle n’est _ en effet _ inconnu _ merci Alexandre ! Merci Etienne Jardin… Mais on y sent aussi _ et beaucoup ! _ la patte _ voilà ! _ d’un magnifique pianiste _ ô combien ! _, Mathieu Pordoy, qui fait respirer _ pleinement et si intelligemment _ la musique, et celle d’un producteur/ingénieur du son, Edgardo Vertanessian, souvent dans l’ombre de Marina Rebeka _ pour leur label Prima Classic _, et qui fait des merveilles : trouver l’équilibre juste entre une voix aussi puissante et un piano, d’ailleurs superbe _ oui _, dont on entend _ scintiller _ toute la palette de sons, et être le premier auditeur, celui qui conseille _ Mathieu est aussi chef de chant _, c’est essentiel dans la réussite d’un disque.

Marie Jaëll : découverte

La révélation (pas seulement pour nous j’imagine), ce sont les six mélodies de Marie Jaëll (1846-1925). Cette Alsacienne, née Marie Trautmann, fut une pianiste virtuose, à qui Liszt avait promis une grande carrière, qu’elle accomplit d’ailleurs conjointement avec son mari Alfred Jaëll, célèbre en son temps. Ses deux concertos pour piano ont été donnés et enregistrés et son œuvre entier pour piano existe au disque (par Cora Irsen). Amie de Saint-Saëns et de Fauré, autrice de beaucoup de musique de chambre, elle s’intéressa intensément à la pédagogie du piano, notamment au toucher, et ses écrits théoriques sur la psychophysiologie montrent un esprit pionnier.


Personnage d’une énergie folle, désireuse avant tout de créer, contemporaine de Louise Farrenc ou de Mel Bonis, on la redécouvre (un peu) de nos jours après un long oubli. Schéma connu.


Marie Jaëll © Bibliothèque de Strasbourg

D’abord on sera intrigué par le très insolite Rêverie sur un poème de Victor Hugo, qui semble errer dans une incertitude tonale, sur les arpèges très éthérés du piano, et non moins surpris par ses cinq mélodies en allemand, d’une puissance insensée _ c’est vrai _, sur des poèmes écrits par elle.


Elles furent éditées en Allemagne en 1880. D’un romantisme tardif, dans la ligne de Brahms ou de Liszt, elles font appel à de grands moyens vocaux (Marina Rebeka les a) et à une tessiture d’une longueur redoutable. L’effusion amoureuse de Dein, l’intensité et la violence de Der Sturm, la légèreté puis la mélancolie de Die Vöglein, l’élan à la Schumann d’Ewige Liebe, le désespoir de Die Wang’ ist blass, toute cette aventure intérieure, qu’on peut penser autobiographique, Marie Jaëll la transpose puissamment, sans sensiblerie. Et Marina Rebeka la transmet avec noblesse, parfois avec virulence, parfois en suspendant le temps : souffle inépuisable, sûreté de la ligne vocale, limpidité du timbre, magnifiques pianissimi et jamais de sensiblerie… _ en effet.

La Russie de Viardot

Les six mélodies russes de Pauline Viardot qui viennent ensuite ont des ambitions plus modestes, mais beaucoup de charme. Sans doute composées pendant le long exil à Baden-Baden du couple Viardot, et pour le public de leurs amis, elles mettent en musique des poèmes de Pouchkine, de Fet ou du cher Tourgueniev, ami tendre de Pauline, qui l’introduisit à la poésie russe. Ces romances, Maria Rebeka y met une délicatesse teintée de nostalgie. Et surtout cette voix d’une pureté lumineuse _ oui.  Elle sait plier ses grands moyens à l’intimité d’une confidence de salon. Mais c’est toute sa puissance qu’elle retrouve dans Invocation sur un poème de Pouchkine, et là Viardot atteint à une grandeur pathétique et à une ampleur dignes de tous ceux qu’elle a servis et du grand personnage qu’elle fut, elle qui créa la Rhapsodie pour alto de Brahms.


Pauline Viardot © D.R.

Exotisme Troisième République

On avouera que certaines des mélodies choisies semblent d’un intérêt plus anecdotique ou pittoresque. Mais quel chic dans la Chanson slave de Cécile Chaminade, et quel soin à tirer le meilleur d’autres partitions, d’un orientalisme d’époque, tel Désir de l’Orient (1871) de Saint-Saëns (le texte est de lui, qui mélange la terre chinoise, une sultane enivrée et de blancs minarets), Saint-Saëns qui à vingt ans rêvait d’Italie, assez banalement d’ailleurs (La Madonna col bambino, sur un texte de saint Alphonse de Liguori), et poursuivait son retour à une Italie fantasmée avec Alla riva del Tebro, nettement plus inspirée.

Quant à Gounod, c’est dans une période de dèche à Londres, où il s’était exilé après la capitulation de Sedan, qu’il composa  pour se renflouer Perché piangi et Oh ! Dille tu. Il fallait plaire au public victorien en lui offrant un exotisme sans trop d’inattendu. Rebeka soutient ces partitions aimables avec panache.

Cela dit, malgré tout le talent qu’elle y met, la mélodie de Widor reste un pensum…

Passages obligés

Mais ç’aurait été dommage de se passer de quelques mélodies fameuses, sous prétexte qu’elles le sont.
L’Invitation au voyage (Baudelaire/Duparc) devient une pièce aérienne, se perchant sur les sommets de la voix. Marina Rebeka prend le parti d’en faire une grande chose, quasi un air d’opéra, vaste et radieux, et le toucher liquide _ oui _ de Mathieu Pordoy suggère à merveille les flots des canaux où flottent les vaisseaux…

La Flûte enchantée, deuxième mélodie de Shéhérézade (Klingsor/Ravel), rayonne _ oui, comme jamais _ de sensualité et de transparence _ absolument… La voix dorée s’alanguit, portée par un souffle inépuisable. Les couleurs du piano, tout aussi voluptueuses _ oui ! _, sont à l’unisson.

Les Roses d’Ispahan (Leconte de Lisle/Fauré) est d’un charme irrésistible _ oui _ et vaudrait le voyage à elle seule. La ligne serpentine de la mélodie, évoquant la silhouette de Leïla, la clarté du timbre, la diction distillée et impeccable (on ne perd pas un mot), le plaisir à séduire, les arabesques 1900, tout concourt à un plaisir teinté de mélancolie.

Qu’en est-il aujourd’hui de cet Orient-là ?

voilà.

D’abord mozartienne, puis belcantiste, Marina Rebeka s’illustre depuis peu _ au contact de Mathieu Pordoy ?.. _ dans la musique française. Il y eut Thaïs à Monte-Carlo en janvier 2021, plus récemment La Vestale au Théâtre des Champs-Elysées, avec à paraître un enregistrement estampillé Palazzetto Bru Zane. Au disque, il y avait eu au printemps 2020 Elle, tout entier consacré à l’opéra français. Et voilà que le nouveau disque que la soprano lettone revient, toujours sous son label Prima Classic, dans un répertoire où l’on ne l’attendait pas forcément : la mélodie française _ voilà. Et pas avec orchestre, mais avec piano, et accompagnée par rien moins _ mazette ! _ que Mathieu Pordoy. Surtout, le programme ne se contente pas de parcourir tous les lieux communs et passages obligés, mais propose au contraire d’explorer des pages inconnues de la plupart des mélomanes _ oui ! Rien d’étonnant à cela si l’on sait que le choix des pièces a été guidé par les conseils avisés du susdit PBZ _ Palazzetto Bru-Zane… Il est heureux qu’une artiste du calibre de Marina Rebeka ait le courage de s’aventurer au beau pays des raretés, et jamais audace ne se sera avérée aussi fructueuse, puisque Voyage offre son lot de vraies révélations.

La thématique de l’exotisme n’est certes pas d’une originalité folle, mais chacun conviendra qu’en dehors des « Roses d’Ispahan » et de l’incontournable « Invitation au voyage », à peu près tout de ce que l’on entend ici sort des sentiers battus _ en effet ; et c’est très très bien ! Même « La flûte enchantée », extraite de la Shéhérazade de Ravel, n’est pas si courante _ en effet _ dans sa version avec piano _ elle est absolument resplendissante. Et si le programme inclut un peu plus d’œuvres de compositrices que de compositeurs (14 plages sur 23), ce n’est pas simplement pour être dans l’air du temps. Le « Chant slave » de Cécile Chaminade est plein de caractère et de sauvagerie, et les mélodies de Pauline Viardot sur des poèmes russes dégagent un charme irrésistible. Quant à Marie Jaëll, à qui le Palazzetto avait consacré un alléchant livre-disque en 2016, le recueil de cinq Lieder qu’elle publia en 1880 sur ses propres textes en allemand est un authentique chef-d’œuvre _ oui _, une partition ambitieuse qui mériterait amplement de figurer aux côtés des plus belles réussites des maîtres du genre, et sa « Rêverie » n’est pas moins impressionnante, digne de voisiner avec Duparc. On l’aura compris, le programme inclut des mélodies en langue étrangère par des compositeurs français, Gounod et Saint-Saëns écrivant sur des paroles en italien (émouvant « Perchè piangi ? » du premier, superbe « Alla riva del Tebro » du second).

L’auditeur sera d’abord surpris _ dés la première plage du CD, en effet… _ par les tempos très étirés adoptés sur ce disque : superposant son timbre au jeu scintillant _ oui !!! _ de Mathieu Pordoy, Marina Rebeka s’exprime dans un français de grande qualité, et la relative lenteur choisie pour certaines mélodies (le Duparc introductif, notamment _ oui : il surprend, en effet _, ou même « Désir d’Orient » de Saint-Saëns, dont on entend mieux que jamais la pulsation « arabe ») permet à sa voix de se déployer avec une grande sensualité _ oui. La soprano possède des ressources telles qu’elle parvient à conférer la fraîcheur nécessaire aux mélodies russes ou à « L’innamorata » de Pauline Viardot, aussi bien que leur caractère dramatique aux lieder de Marie Jaëll, d’une inventivité constante, et d’une ampleur quasi-wagnérienne en ce qui concerne le tumultueux « Der Strum ». Marina Rebeka s’y livre sans retenue et manifeste une expressivité et un dramatisme particulièrement remarquables _ oui. Heureux ceux et celles qu’une telle artiste a choisi de défendre : une nouvelle postérité leur appartient.

Un très beau récital, donc.

Et la découverte du formidable talent au piano aussi _ quelle poésie ! _ de Mathieu Pordoy. 

Ce qui vient excellemment éclairer aussi _ et réciproquement _ sa magistrale réussite en tant que chef de chant auprès des chanteurs.

Ainsi _ et j’y reviens encore ; tant j’ai de mal à m’en détacher présentement… _ que cela s’admire en ce final proprement miraculeux de sens _ intelligence et sensibilité admirablement réunies _ et de vie _ cf à nouveau la vidéo de l’enregistrement au mois de mars 2021_, où tous, y compris, et d’abord, le chef, dansent, et dans le plus juste tempo, si merveilleusement, de « L’Heure espagnole » de Maurice Ravel et Franc-Nohain, sous la formidable baguette de François-Xavier Roth dirigeant ses somptueux Siècles _ sur magnifiques instruments de l’époque de la création, en 1911…

Bravissimo !

Ce jeudi 22 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Cyrille Dubois, ténor de grâce, dans le très riche et délicieux CD « So romantique ! » d’airs d’opéras romantiques français à re-découvrir et goûter : un régal…

19mar

C’est à la fois un timbre de voix et un répertoire opératique guère fréquenté(s) présentement,

qu’avec son très grand talent l’excellent ténor « de grâce » Cyrille Dubois, en un CD un peu rapidement intitulé « So Romantique !«  le CD Alpha 924 : very charming ! : écouter (et regarder) ici par exemple l’air (de 2′ 38) « Ah ! Vive Dieu !.. Suprême puissance« , de l’opéra « Le Roman d’Elvire« , en 1860, d’Ambroise Thomas (1811 – 1896)…_, avec l’Orchestre National de Lille sous la direction de Pierre Dumoussaud, vient nous offrir avec un récital d’airs extraits d’Opéras français créés entre 1825 _ »La Dame blanche » de François-Adrien Boieldieu (1775 – 1834), pour le plus précoce de cette sélection _ et 1913 _ « Myriane » de Charles Silver (1868 – 1940), pour le plus tardif… _ ;

ce qui justifie pleinement _ déjà par les dates des œuvres ici abordées via ces beaux airs (et leur superbe interprétation par le décidément parfait Cyrille Dubois _ l’obtention du label du Palazzetto Bru-Zane,

le _ bien connu très fécond re-découvreur d’excellentes musiques parfois injustement négligées ou carrément oubliées, d’entre 1780 et 1924 (le décès de Gabriel Fauré) du répertoire français… _ Centre de Musique Française Romantique _ situé en plein cœur de Venise…

Un régal…

Ce dimanche 19 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

La correspondance de guerre (1914 – 1919) de Lucien Durosoir et sa mère Louise, « Ma Chère Maman, mon Cher Enfant », à paraître le 11 novembre prochain chez Blackwater Press, à Charleston, West-Virginia, traduite en anglais par Elizabeth Auld…

12oct

Le 11 novembre prochain, 2022,

va paraître, aux États-Unis, aux Éditions Blackwater Press, situées à Charleston, en Virginie occidentale,

un substantiel choix de lettres (de 564 pages) échangées durant la Grande Guerre de 1914 – 1918, entre le violoniste (et très bientôt compositeur) Lucien Durosoir (Boulogne-sur-Seine, 1878 – Belus, 1955) et sa mère Louise ;

intitulé « Ma Chère Maman, mon Cher Enfant _ The Letters of Lucien et Louise Durosoir (1914 – 1919)« , en une traduction en anglais d’Elizabeth Auld.

Un choix de lettres original,

distinct en effet de celui effectué naguère par Luc Durosoir, en son très riche « Deux musiciens dans la Grande Guerre«  (qui sont le violoncelliste Maurice Maréchal et le jusqu’alors seulement violoniste Lucien Durosoir)qui était paru en octobre 2005 aux Éditions Tallandier.

Sur Lucien Durosoir compositeur éminemment singulier,

je renvoie, au sein du « Lucien Durosoir, un compositeur moderne né romantique« , soient les Actes du colloque qui s’est tenu au Palazzetto Bru-Zane, à Venise, les 19 et 20 février 2011,

à ma contribution : « Une poétique musicale au tamis de la guerre : le sas de 1919 – la singularité Durosoir  » ;

ainsi qu’à cette autre : « La Poésie inspiratrice de l’œuvre musical de Lucien Durosoir : romantiques, parnassiens, symbolistes, modernes« .

 

De même qu’à l’ensemble des articles consacrés sur ce bloc à Lucien Durosoir compositeur, accessibles dans les archives de ce blog ouvert le 3 juillet 2008 ; ainsi mon article inaugural du 4 juillet 2008 intitulé « «  exprimait-il ma vive et profonde émotion à l’écoute de l’extraordinaire CD Alpha 125 des 3 « Quatuors à cordes » de Lucien Durosoir, par le Quatuor Diotima.

Et à cette époque je ne connaissais pas encore personnellement Luc et Georgie Durosoir, le fils et la bru de Lucien Durosoir.

Ce mercredi 12 octobre 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

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