Une réponse à un article critique envers Call me by your name…

— Ecrit le mercredi 14 mars 2018 dans la rubriqueCinéma”.

En surfant sur le net,

j’ai fini par pêcher enfin un article critique à l’encontre du film de Luca Guadagnino Call me by your name,

sous la plume d’un nommé Vincent Raymond, et publié simultanément dans divers Petit Bulletin

(de Lyon, de Grenoble, de Saint-Etienne),

le 27 février dernier.

Le voici,

d’abord tel quel,

sans la moindre farcissure de ma part :


CIAO BELLO
WTF ? à l’italienne : « Call Me By Your Name« 

de Luca Guadagnino (Fr-It-E-U-Br, 2h11) avec Armie Hammer, Timothée Chalamet, Michael Stuhlbarg…

par VINCENT RAYMOND
MARDI 27 FÉVRIER 2018

Italie, dans la moiteur de l’été 1983. Elio traîne ses 17 ans entre son piano, ses doctes échanges avec ses parents, et un flirt avec Marzia. L’arrivée du nouveau doctorant de son père, Oliver, le met étrangement en émoi. D’abord distant, celui-ci se montre aussi sensible à ses appâts…

Cette roublardise de moine copiste, aux forts relents de Maurice, Chambre avec vue ou Mort à Venise entre autres films avec éphèbes torse nu et/ou James Ivory au générique et/ou Italie vrombissante de cigales, a beaucoup fait parler d’elle dans tous les festivals où elle a été distillée depuis un an — même Hugh Jackman a succombé à son charme.

Ah, c’est sûr que Luca Guadagnino ne lésine pas sur les clichés pour fédérer dans un même élan les publics quadra-quinqua (indécrottables nostalgiques, toujours ravis qu’on leur rappelle leur adolescence) et gays (jamais contre une idylle entre deux beaux gosses, dont un façon Ruppert Everett blond) ; au point que ressortir du film sans avoir Love My Way des Psychedelic Furs gravé dans le crâne, ni le désir d’un bain de minuit en mini-short relève de l’exploit. Mais que de superficialité, que de prétextes et d’auto-contemplation satisfaite pour diluer un argument de court-métrage !

Car la romance entre Elio et Oliver se révèle assez ordinaire. Cette première amourette d’ado ne se heurte à aucune impossibilité extérieure : au contraire, la famille intello et libérale d’Elio considère avec bienveillance leur relation. Et si la séparation est vécue comme un immense dramuscule par ce petit égoïste, c’est qu’il s’agit de la seule écharde dans sa vie douillette.

Donnant parfois l’impression de vouloir contrefaire jusqu’au vertige et au moindre costume l’époque de narration, Guadagnino laisse planer un doute un peu malsain sur des marques affectant le corps d’Oliver — une allusion au sida, qui commençait alors sa terrible hécatombe ? — et se montre surtout bien plus timoré que les cinéastes d’il y a trente ans (notamment Belocchio dans Le Diable au corps) au moment de filmer les étreintes charnelles. Trop poli, Call Me By Your Name est long et morne comme une méridienne sans bain.

Et maintenant, le voici farci de mes commentaires :

D’abord, ce titre avec abréviation (pour initiés seulement !) :

CIAO BELLO
WTF ? à l’italienne : « Call Me By Your Name« 

Que peut donc signifier cette abréviation, WTF ?

WTF : abréviation de what the fuck,

équivalent argotique de what,

utilisé dans les discussions électroniques instantanées (une nuance d’exaspération, ou plus généralement d’émotion, y est ajoutée par the fuck).

WTF is this?! Putain, c’est quoi ?!

 

What The Fuck ? : une manière assez grossière d’exprimer son incrédulité, notamment sur Internet ;

en français, la vulgarité de l’expression anglaise disparaît ; et WTF signifie Mais c’est du grand n’importe quoi ! 

Dont acte !

Italie, dans la moiteur de l’été 1983. Elio traîne ses 17 ans entre son piano, ses doctes échanges avec ses parents _ universitaires _, et un flirt avec Marzia _ sa petite voisine. L’arrivée du nouveau doctorant _ américain, âgé de 24 ans _ de son père, Oliver, le met étrangement _ vraiment ? _ en émoi. D’abord distant, celui-ci se montre aussi _ un peu plus tard _ sensible à ses appâts _ si l’on peut dire : j’y suis personnellement peu sensible…

Cette roublardise de moine copiste _ de la part du réalisateur Luca Guadagnino, ainsi qualifié de madré copieur ! _, aux forts relents de Maurice, Chambre avec vue ou Mort à Venise entre autres films _ Retour à Howards end, aussi ! _ avec éphèbes torse nu _ mais Timothée Chalamet, s’il est bien très souvent, en effet, torse nu et en short, ici, a peu de choses de la plastique d’un éphèbe… _, et/ou James Ivory au générique, et/ou Italie vrombissante de cigales _ quelle gratuite ironie ! Pour ma part, je suis demeuré sourd aux prétendues cigales du film… _, a beaucoup fait parler d’elle _ = le buzz _ dans tous les festivals où elle a été distillée _ avec habileté apéritive ? _ depuis un an — même Hugh Jackman _ une référence pour l’auteur de l’article ! _ a succombé à son charme.

Ah, c’est sûr que Luca Guadagnino ne lésine pas sur les clichés _ mais parler et penser procède, et très nécessairement d’abord, chez l’in-fans, de la langue commune, et donc de ses clichés reçus et partagés ! La tâche noble de la parole effective (cf Noam Chomsky, par exemple en ses Réflexions sur le langage) est de s’extraire, en ses phrases inventées, de ces usages d’abord, en effet, stéréotypés, et d’apprendre peu à peu à parler (et penser) de façon si possible un peu plus plus originale (et critique, et même, et surtout, auto-critique !!!) que par ces stéréotypes et clichés, et peut-être enfin, in fine (mais le processus est infini…) par soi-même ; sur les conditions très concrètes de la liberté de penser (et contre la censure), cf l’indispensable et très beau Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? du grand Emmanuel Kant  : « Penserions-nous beaucoup et penserions-nous bien, si nous ne pensions pas pour ainsi dire en commun avec d’autres, qui nous font part de leurs pensées et auxquels nous communiquons les nôtres ? « , nous apprend, en effet, Kant… _ pour fédérer dans un même élan les publics quadra-quinqua (indécrottables nostalgiques, toujours ravis _ c’est à voir ! _  qu’on leur rappelle leur adolescence _ sauf que Luca Guadagnino a précisément choisi d’éliminer le principe de la voix-off, trop porté sur la nostalgie du passé, à ses yeux, et pas assez présent au présent (du présent présentisme !) ; le principe de cette voix-off qui se souvient, était en effet celui qui avait été choisi en son adaptation première par James Ivory, fidèle en cela à la démarche même du Je me souviens d’André Aciman en son roman ; d’où le clash survenu entre Luca Guadagnino et James Ivory en mai 2016 ; James Ivory dont le nom n’est demeuré au générique du film que dans la perspective (couronnée de succès !) d’une récompense pour le film aux Oscars, qui n’avaient pas su jusqu’ici honorer le nom de James Ivory, maintenant âgé de 90 ans… _) et gays (jamais contre une idylle entre deux beaux gosses _ ah ! cette affreuse expression-cliché ! _, dont un façon Ruppert Everett blond _ Armie Hammer, en l’occurrence : quelle négation de son pourtant très remarquable talent d’acteur ! à comparer, en l’élégante retenue de son incarnation du personnage complexe d’Oliver, avec l’extraversion californienne (!) de ses interviews _) ; au point que ressortir du film sans avoir Love My Way des Psychedelic Furs gravé dans le crâne _ à la première vision du film, ce serait tout de même un exploit ! la scène (impressionnante certes !!! cf mes articles des 10 et 13 mars, dans lesquels j’ai, par deux fois, intégré cette magnifique séquence de danse d’Oliver : «  et « ) dure en effet à peine 44′ … _, ni le désir d’un bain de minuit en mini-short _ à ce point ??? Quel extraordinaire impact a donc ce film ici vilipendé, sur un spectateur aussi mécontent et ronchon que l’auteur de cet article ! _, relève de l’exploit _ mais  c’est là rendre un bien bel hommage à l’hyper-efficacité professionnelle de la « roublardise«  du réalisateur et des producteurs de ce film. Mais que de superficialitécependant le très fort impact du film sur ses spectateurs, de même que celui du profondément émouvant troublant jeu des acteurs, ainsi que celui du fini du travail de tous ceux qui (chef opérateur en tête !) ont participé à la réalisation, à la suite de Luca Guadagnino, le maître d’œuvre final de Crema, contredit fortement cette ronchonneuse opinion !!! _, que de prétextes _ à quoi donc ? à de traîtresses manipulations de la sensibilité des spectateurs du film ? _ et d’auto-contemplation satisfaite _ satisfaite de quoi ? des complaisances pulsionnelles homoérotiques des réalisateur-producteurs ? _, pour diluer un argument _ mince et pauvre : mais artistiquement importe seul ce qui en résulte : le produit achevé !.. _ de court-métrage !

Car la romance _ pour qualifier les épanchements d’un premier amour, à 17 ans… _ entre Elio et Oliver, se révèle assez ordinaire _ et alors ? quid de la « romance«  de Tristan et Yseult ? de la « romance«  de Roméo et Juliette ? ou de la « romance«  de Pelléas et Mélisande ? Et cela, en leurs diverses et multiples reprises et ré-interprétations… C’est, in fine, seul le style propre de l’œuvre qui importe ! Cette première amourette d’ado _ quel mépris ! _ ne se heurte à aucune impossibilité extérieure _ et alors ? En matière d’« impossibilités« , il en est d’aussi puissantes intériorisées ; telle, ici, et à un certain degré, l’impossibilité d’Oliver de prolonger sa liaison d’un été italien avec Elio, par la persistance de son choix d’épouser la femme à lui promise, avec la pression de ses parents, aux Etats-Unis… _ : au contraire, la famille intello et libérale d’Elio considère avec bienveillance _ mais sans en rien manifester _ leur relation. Et si la séparation est vécue comme un immense dramuscule _ quel oxymore ! le film est (et se veut) l’expression du vécu de l’adolescent : qui peut, de l’extérieur et en surplomb, s’en moquer ?.. _ par ce petit égoïste _ là, c’est carrément injuste ! En dépit de l’égocentrislme normal de tout adolescent (voire de quiconque, du moins au départ de tout vécu), Elio demeure extrêmement attentif à (et très curieux de) l’altérité des autres ; cf par exemple sa belle réponse à la belle réaction de sa petite amie Marzia quand elle comprend que c’est bien Oliver que désire surtout (et aime vraiment) Elio, et pas elle… _, c’est qu’il s’agit de la seule écharde _ superficielle !!! _ dans sa vie douillette _ d’enfant de bobos privilégiés ; mais une blessure d’amour est-elle jamais superficielle, risible, méprisable ?.. De quelle indifférente et froide hauteur se permettre d’en juger ainsi ?..

Donnant parfois l’impression de vouloir contrefaire _ pourquoi injurier la simple probité de la réalisation ? _ jusqu’au vertige et au moindre costume _ et alors ?.. La fidélité de la reconstitution des décors, des costumes, du climat musical de 1983, tout cela participe, au delà de sa parfaite simple probité artistique (et d’abord artisanale), du puissant charme du film… _ l’époque de narration, Guadagnino laisse planer un doute _ vraiment ? _ un peu malsain sur des marques affectant le corps d’Oliver — une allusion au sida, qui commençait alors _ à vérifier plus précisément: quand se répandit vraiment la prise de conscience du phénomène du sida ?.. Dès 1983 ? _ sa terrible hécatombe ? — et se montre surtout bien plus timoré _ ah ! telle était donc l’attente principale de ce critique, et la probable raison principale de ses ronchonneries… _ que les cinéastes d’il y a trente ans (notamment Bellocchio dans Le Diable au corps) au moment de filmer les étreintes charnelles _ mais tel n’est pas l’objectif de notre film ; la fougue des désirs n’a pas du tout besoin de surlignages surchargés, telle l’image de la fellation dans le film provocateur (et chercheur de scandale) de Marco Bellochio en 1986. Trop poli _ pour être honnête ? mais non ! _, Call Me By Your Name est long et morne _ Non ! Certes pas ! _ comme une méridienne sans bain _ seulement pour un ronchon bien décidé à s’y ennuyer ; et plus encore à chercher à se faire mousser si peu que ce soit en  déversant ainsi un peu trop à bon compte de l’encre de sa bile sur le film…

Ce mercredi 14 mars 2018, Titus Curiosus – Francis Lippa

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