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Quelques actualités discographiques Bartok : maintenant l’intense poésie du CD « Bartok The Wooden Prince & Dance Suite » de Cristian Macelaru dirigeant le WDR Sinfonieorchester Köln…

09oct

Après mon article d’hier dimanche 8 octobre « « ,

voici, ce lundi 9 octobre, un regard mien sur le CD « Bartok The Wooden Prince & Dance Suite » de Cristian Macelaru dirigeant le WDR Sinfonieorchester Köln, soit le CD Linn CKD 714 ;

sur lequel un article de Patrice Imbaud intitulé « Cristian Macelaru à Cologne dans Le Prince de bois de Bartok« , paru sur le site ResMusica en date du 13 avril 2023, n’avait pas manqué d’attirer mon attention.

Cristian Măcelaru à Cologne dans le Prince de bois de Bartók

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Pour ce nouvel enregistrement discographique avec l’, dont il est directeur musical, et après un précédent album consacré à Dvořák (Légendes et Suite tchèque) pour le même label, Cristian Măcelaru poursuit dans la veine folklorique, avec le rare _ en effet _ ballet intégral du Prince de bois et la Suite de danses de Béla Bartók.

Quasiment contemporain du Château de Barbe-Bleue, Le Prince de bois, composé entre 1914 et 1916 par sur un argument de Béla Balaczs, nous conte les amours contrariées d’un prince et d’une princesse séparés par une forêt et un ruisseau magiques dans une ambiance mystérieuse et féérique nimbée de symbolisme tragique, où se bousculent thèmes récurrents, leitmotivs, accord atypique, timbres foisonnants, rythmes incongrus, curiosités harmoniques, instrumentarium novateur (saxophone), réminiscences wagnériennes ou debussystes et danses folkloriques populaires _ voilà.

Constitué de treize admirables pages orchestrales jouées enchainées, nous en livre une lecture claire _ oui _, éblouissante de virtuosité et de couleurs _ toujours excellemment conduites et maîtrisées _, envoûtante par sa dynamique soutenue et son intense poésie _ voilà. Plus impressionniste que véritablement narrative, laissons-nous guider et plantons le décor : il était une fois un prince et une princesse qui vivaient dans deux châteaux différents au sein d’une forêt profonde où coulait un ruisseau et dans laquelle régnait une fée, maitresse du jeu…

Le Prélude sombre s’ouvre sur une pédale de sonorités graves (basses et timbales) rappelant l’Or du Rhin par son statisme empreint d’un fort sentiment d’attente, juste troublé par quelques appels de cor, avant que le phrasé ne se densifie par l’entrée de cordes très lyriques et du tutti jusqu’à un crescendo puissant d’où émerge la cantilène de la douce clarinette et son thème virevoltant (La Princesse) qui danse seule, rêveuse et nostalgique ; Le Prince (contrebasses) l’aperçoit et veut entrer dans la danse, mais la Fée, gardienne de la Princesse, s’y oppose en agitant subitement la forêt dans une furieuse tempête qui fait danser les arbres (Danse de la forêt) sur des sonorités sombres, graves, soutenues par les cuivres et les bois dans un climat mystérieux et menaçant scandé par les percussions ; le Prince vient à bout de ce premier obstacle, mais bientôt c’est le ruisseau qui s’anime et enfle dangereusement en vagues infranchissables (Danse des vagues). On admire, ici, la fluidité du phrasé (cordes) et les scintillements de timbres (cordes, harpe et célesta) ; le Prince se désespère et décide d’attirer l’attention de la Princesse grâce à son avatar, un simple bâton de bois _ le très bientôt prince de bois, donc _ qu’il habille de son manteau, de sa couronne et de ses propres cheveux (phrasé très coloré oscillant entre joie et mélancolie, foisonnement de timbres et de rythmes). Contre toute attente, la Princesse en apercevant le pantin de bois, en tombe éperdument amoureuse et l’entraine dans une danse grotesque et bringuebalante aux faux accents stravinskiens rappelant Petrouchka, sorte de cavalcade infernale, hérissée de rythmes saccadés et de sonorités agressives (cordes, cuivres et percussions), véritable tourbillon orchestral dans lequel le Prince de bois se désarticule, tombe et retourne à sa vraie nature. Dès lors, la Fée compatissante cède au chagrin du Prince esseulé (longue cantilène nostalgique d’un lyrisme douloureux et tourmenté sur un tempo très lent riche de nuances) lui conférant de nouveau toute sa splendeur princière dans un épisode d’une belle ampleur sonore ; après quelques atermoiements orchestraux, Prince et Princesse se retrouvent enfin réunis dans les bras l’un de l’autre enveloppés d’une rayonnante lumière dans laquelle s’éteint l’orchestre… Magnifique, tant par la réalisation instrumentale irréprochable _ voilà _, que par la précision et la justesse de la direction qui parvient à éviter toute lourdeur : une lecture qui trouvera facilement sa place aux cotés de celles de Pierre Boulez, Iván Fischer, Antal Doráti, Georg Solti, ou encore Marin Alsop ou Susanna Mälkki.

D’une virtuosité orchestrale inouïe, la Suite de danses pour orchestre (1923) très contrastée, toute droite sortie du folklore imaginaire de Bartók, nourrie de ses patientes recherches ethnomusicologiques arabes, roumaines et hongroises, referme ce bel album porté par l’élan jubilatoire _ oui _  de la phalange allemande et la direction au cordeau de qui joue, ici, dans son jardin _ féérique roumain.

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Béla Bartók (1881-1945) : Le Prince de bois, ballet intégral, op. 13, Sz. 60 ; Suite de danses, Sz. 77.

WDR Sinfonieorchester Köln, direction : Cristian Măcelaru.

1 CD Linn.

Enregistré à la Philharmonie de Cologne les 23 et 24 novembre 2020 (Suite de danses) et du 13 au 15 juin 2022 (Prince de bois).

Notice de présentation en anglais et en allemand.

Durée : 74:14

Une lecture claire, précise et très fidèle à la féérie un peu grinçante et toujours incisive, d’une intense et irradiante poésie percussive, de l’immense Bela Bartok…

Ce lundi 9 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Quelques actualités discographiques Bartok : d’abord, le CD « Bartok Piano Concertos » de Pierre-Laurent Aimard, le San Francisco Symphony et Esa-Pekka Salonen…

08oct

Le 15 septembre dernier,

vient de paraître le CD Pentatone PTC 5187 029 « Bartok Piano Concertos« 

des 3 Concertos pour piano et orchestre (de 1926 _ créé à Francfort le 1er juillet 1927 _, de 1931 _ créé à Francfort le 23 janvier 1933 _ et de 1945 _ créé à Philadelphie le 8 février 1946 _) de Bela Bartok (Nagyszentmiklós, 25 mars 1881 – New-York, 26 septembre 1945),

par Pierre-Laurent Aimard, le San Francisco Symphony et Esa-Pekka Salonen _ soient, Aimard (né à Lyon le 9 septembre 1957), un pianiste excellent bartokien et, Salonen (né à Helsinki, le 30 juin 1958), un chef somptueux !

De ces 3 œuvres réunies interprétées par un même pianiste et un même chef,

ma discothèque comporte déjà les interprétations superbes de :

_ Geza Anda et Ferenc Fricsay,

avec le Radio-Orchester Symphonie Berlin,

soit le double CD Deutsche Grammophon 427 410-2, enregistré à Berlin, en septembre 1959 et octobre 1960 _ un enregistrement toujours de référence, de deux hongrois tous deux formés à l’ultra-brillanta Académie Franz Liszt de Budapest (par laquelle est lui aussi passé Bela Bartok : il y a enseigné de 1907 à 1934…): Geza Anda, né à Budapest le 19 novembre 1921, et décédé à Zurich le 13 juin 1976 ; Ferenc Fricsay, né à Budapest le 9 août 1914, et décédé à Bâle le 20 février 1963… _ ;

_ Stephen Kovacevich et Colin Davis,

avec le London Symphony Orchestra et le BBC Symphony Orchestra,

soit le CD Philips 675 8690, enregistré à Londres en décembre 1968, et Watford en avril et mai 1975 _ j’aime beaucoup, beaucoup, Kovacevich, né le 17 octobre 1940 à San Pedro, en Californie, d’un père serbe et d’une mère américaine ; Sir Colin Davis, lui; est né le 25 septembre 1927 à Weybridge, et est décédé le 14 avril 2013, à Londres _ ;

_ Zoltan Kocsis et Ivan Fischer,

avec le Budapest Festival Orchestra,

soit un CD (présent dans le coffret de 26 CDs « Zoltan Kocsis » Philips 485 1589), enregistré à Budapest en décembre 1984, décembre 1985 et décembre 1986 _ Kocsis (né le 30 mai 1952 à Budapest, et décédé, dans la même ville, le 6 novembre 2016), formé lui aussi à l’Académie Franz Liszt de Budapest, est un pianiste fabuleux, tout spécialement dans Bartok ; et Fischer, hongrois lui aussi, né le 20 janvier 1951 à Budapest, est un immense chef bartokien… _ ;

et

_ Andras Schiff et Ivan Fischer,

avec le Budapest Festival Orchestra, 

soit un CD (présent dans le coffret de 20 CDs « Bela Bartok » 0190296729817), enregistré à Budapest en avril 1996 j’aime énormément aussi le magnifique Andras Schiff, né le 21 décembre 1953 à Budapest, et formé, lui encore, à l’Académie Franz Liszt de Budapest

 

Ce dimanche 8 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Importance de la reparution de l’édition en traduction française des « Ecrits » de Bela Bartok, par Peter Szendy, aux Editions Contrechamps

10juin

Vient de re-paraître en traduction française par Peter Szendy, aux Éditions Contrechamps, la quasi intégralité des « Écrits » de Bela Bartok, ce compositeur génial et essentiel de la première moitié du XXème siècle…

Voici la présentation qu’en a réalisée, le 6 juin dernier, sur le site de ResMusica, Agnès Simon, sous l’intitulé « Les écrits de Bartók, une source essentielle en français » :

Les écrits de Bartók, une source essentielle en français

Édités en 2006 chez Contrechamps, les écrits de Béla Bartók traduits en français font l’objet d’une réimpression. Ils donnent aux curieux et aux chercheurs une source essentielle _ oui ! _ pour aborder ce compositeur _ majeur… 

En dépit d’une certaine popularité dans les salles de concert, les publications en français sur le compositeur hongrois étaient, pendant longtemps, très lacunaires. La postérité de son œuvre fut d’ailleurs biaisée par les récupérations politiques ; et en grande partie ignorée par la génération de compositeurs d’après-guerre. Cette publication participe donc d’un renouveau dans la connaissance du compositeur, auprès de la monographie de Claire Delamarche chez Fayard ou de celle, plus courte, de Laetitia Le Guay chez Actes Sud.

Laissant de côté la correspondance (en projet) et les écrits sur l’éthnomusicologie, Philippe Albèra, éditeur reconnu de nombreux textes de compositeurs du XXe siècle, et Peter Szendy (Béla Bartók, un abécédaire ennuagé, Philharmonie de Paris édition _ un ouvrage que je possède _ ), ont édité la quasi totalité de ses écrits (articles, conférences, notes de programmes…) portant sur la musique composée, parmi lesquelles les conférences d’Harvard, écrites à la fin de sa vie, et dont il ne prononça que trois sur les huit initialement prévues, terrassé par la maladie. Aux côtés des présentations de ses propres œuvres, au demeurant laconiques, le compositeur aborde les démarches des compositeurs qui l’ont marqué (Debussy, Strauss, Liszt, Ravel) et de ses contemporains (Stravinsky, Schoenberg, Kodály _ bien davantage qu’un contemporain… _), ainsi que les recherches formelles de son époque, parmi lesquelles la musique atonale, dont il se rapproche dans les années 1915-20 (Le problème de la nouvelle musique, La musique d’Arnold Schoenberg en Hongrie) avant de s’en écarter, pour proposer sa propre voie, principalement celle de la polymodalité, qu’il explique en détail dans ses Conférences d’Harvard.

Mais le sujet récurrent est _ en effet _ celui de la musique paysanne hongroise et de ses apports aux compositions. Il s’attache sans relâche à distinguer la « musique paysanne » ou « primitive », ayant échappé à toute influence urbaine, à la « musique d’allure populaire » (selon la traduction choisie par Szendy) ou à la musique dite tzigane. Il revient sur sa quête _ absolument _ intransigeante de musiques paysannes authentiques en Hongrie, dans les pays voisins et jusqu’en Afrique du Nord et en Turquie, parle même des apports et les risques des nouvelles techniques d’enregistrement (La Musique mécanique). Sa charge contre les éditeurs qui s’avisent de publier des musiques populaires hongroises truffées d’erreurs (Musique tzigane ? Musique hongroise ?) est symptomatique de sa défense d’un travail d’ethnomusicologue à la fois sérieux et vivant _ voilà.

Les textes, présentés de manière chronologique _ oui _ de 1904 à 1945, se caractérisent donc par une homogénéité dans les sujets abordés. Le ton évolue cependant au gré du contexte historique, qu’il s’agisse de son texte sur La pureté raciale en musique, « lancé à la face des fascismes européens » (Albèra), ou du portrait cinglant de la situation musicale de la Hongrie, ou des conditions matérielles d’exercice de la musique et de la musicologie sous la Russie stalinienne. Quel que soit le sujet ou le ton, Bartók s’exprime toujours avec précision et clarté, une forme d’honnêteté _ voilà ! _, comme l’expression d’une intime conviction.

Outre le gros travail de traduction, cette édition présente plusieurs compléments bienvenus : deux portraits touchants par Béla Balázs, son ami et l’auteur du livret du Château de Barbe-bleue, des annotations explicitant les choix de traduction ou de sources, une _ très _ éclairante préface de Philippe Albèra, une _ très précieuse _ bibliographie précise des écrits de Bartók (en hongrois, anglais, ou allemand), et quelques reproductions de photographies et de manuscrits.

Béla Bartók (1881-1945). Écrits. Traduction et annotation : Peter Szendy. Édition scientifique : Philippe Albèra et Peter Szendy. Contrechamps Éditions, 2022. 340 p.

Un outil de connaissance, par conséquent, incomparable !

Ce samedi 10 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le violon plus-que-parfait de Frank-Peter Zimmermann : à explorer en toute sa palette avec délectation…

29jan

En mon article du mercredi 25 janvier dernier, « « ,

je disais tout le bien que je pensais de l’admirable jeu musical de Frank-Peter Zimmermann.

Ce qui m’a incité à faire emplette

à la fois de son CD Martinu/Bartok Bis 2457 SACD des 2 Concertos pour violon de Bohuslav Martinu (avec le Bamberger Symphoniker sous la direction du chef tchèque Jakub Hrusa) et de la Sonate pour violon seul de Bela Bartok _ un CD qui, alors que je m’intéresse particulièrement aussi à tout l’œuvre de Bohuslav Martinu, avait échappé à mon attention à sa sortie, en 2020 : un CD transcendant ! ; cf l’excellent compte-rendu très détaillé (et avec extraits musicaux !) qu’en donne le 27 décembre 2020 Colin Clarke sur le site classicalexplorer.com _ ;

mais aussi de son récent coffret de 30 CDs de ses « Complete Warner Recordings » Warner 0190296317880 _ d’enregistrements pour EMI entre 1984 et 1997 (plus un CD Ligeti pour Teldec, enregistré en 2001) : né à Duisburg le 27 février 1965, Frank-Peter Zimmermann avait tout juste 19 ans en 1964, et 32 ans en 1997. Le mois de février prochain, il aura donc 58 ans accomplis…

Cf le très bel et très juste article « Zimmermann, la jeunesse«  que Jean-Charles Hoffelé a consacré à ce si riche coffret, le 18 septembre dernier, 2022…

En me convainquant ainsi,

avec l’appui de la plus éclatante évidence de la réussite absolue _ oui ! _ de tous ses CDs réalisés pour l’excellent label suédois Bis _  ainsi en ai-je ré-écoutés la plupart, et en particulier aussi  ceux avec Antoine Tamestit et Christian Poltéra, eux aussi musiciens magnifiques !.. _ ;

de l’extraordinaire précocité d’émergence de son lumineux talent, du temps, déjà, de ses enregistrements pour EMI _ entre les 19 et 32 ans de sa prime jeunesse… _, en ce généreux splendide coffret de 30 CDs que vient de proposer, cet automne 2022, le label Warner :

par exemple, en la réussite éclaboussante de ses quatre CDs de Sonates pour violon et piano de Mozart, avec le magnifique Alexandre Lonquich _ enregistrés aux mois de mai 1987 et mai 88, pour les deux premiers (les CDs 7 et 8), et juillet 1989 et juin 1990 pour les deux autres (les CDs 14 et 15) ; et toujours avec la naturelle complicité éminemment musicale d’Alexander Lonquich, mais, en un bien différent registre musical de leurs talents, le CD 11 de ce copieux coffret Warner comporte les deux superbes Sonates pour violon et piano de Sergei Prokofiev, enregistrées en novembre et décembre 1987…

Quel talent déjà si jeune muri et accompli !

Et quel parcours d’excellence si musicalement épanoui pour atteindre l’absolu des transcendantes merveilles d’interprétation d’aujourd’hui _ pour le label Bis tout spécialement…

C’est donc avec pas mal d’impatience que j’attends le Volume II _ est-il ou pas déjà enregistré ? _ de ses Sonates & Partitas pour violon seul (BWV 1001, 1002 et 1005) de Bach, ce chef d’œuvre lui aussi absolu, que Frank-Peter Zimmermann a atteint d’avoir un tel âge pour oser enfin y confronter son propre accomplissement de très humble _ mais très exigeant à l’égard de soi-même aussi _ interprète, comme sont les vrais grands …

Ce samedi 28 janvier 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Découvrir le génie puissant et singulier, profond, de László Lajtha (Budapest, 1892 – Budapest, 1963) en son Quatuor avec piano Op. 6 (de 1925), dans l’interprétation splendide, intense et profondément poétique, du jeune Notos Quartett…

30août

Je remercie très vivement l’excellent article « Divertissement et chef d’œuvre » de Jean-Charles Hoffelé, sur son site Discophilia, le 22 août dernier,

de m’avoir fait découvrir _ et adorer ! _ ce chef d’œuvre intense et profond, marquant, qu’est le Quatuor avec piano, Op. 6, de Laszlo Lajtha (Budapest, 30 juin 1892 – Budapest, 16 février 1963),

dans l’interprétation elle-même profonde et intense, percutante ainsi qu’infiniment poétique, du jeune Notos Quartet,

en le très récent excellent CD « Paris Bar« , du label Sony Classical 19439986682.

DIVERTISSEMENTS ET CHEF-D’ŒUVRE

Paris, jonction des années vingt-trente, un parfum de folle époque règne encore _ par delà le traumatisme indélébile de la Guerre Mondiale _, quelques musiciens étrangers, installés au bord de la Seine, s’en emparent ; rythmes vifs, écriture faisant la part belle aux danses du temps, harmonies pimentées, cela se retrouve, avec quelques touches éclatantes toute polonaises, dans la brillante Suite-Divertissement qu’Alexandre Tansman écrit en 1929 pour le Quatuor Belge, formation regroupée autour du piano de Marcel Maas.

Les harmoniques chaudes, belles comme celles des fauves, l’écriture dansante, toujours sur les pointes, les motifs savoureux et évidemment cette suractivité qui est la marque de fabrique du Polonais _ un compositeur absolument majeur ! _, éclatent au long des six mouvements, mais courrez d’abord aux étrangetés mystérieuses du Nocturne, un peu Bartók. Les Notos y sont prodigieux de vivacité, de précision, d’humour et de lyrisme lorsqu’il faut, tout comme pour le Divertissement de Jean Françaix, partition délicieusement piquante, un peu mozartienne aussi par l’allégement de l’écriture.

Puis vient le chef-d’œuvre _ le voilà !!! _, le vaste nocturne inquiet _ oui _ qu’est le Quatuor avec piano de László Lajtha, pièce manquante du génial trio de Budapest qui ne devrait plus tarder à rejoindre _ contre notre paresseuse incuriositéBéla Bartók et Zoltán Kodály dans leur empirée _ à mieux reconnaître !

L’œuvre est d’une beauté aussi suffocante qu’amère _ oui _, ces splendeurs sombres sont si émouvantes dans la lecture intense _ voilà _ des Notos qu’on a peine à croire qu’il s’agit du premier enregistrement de cet opus majeur _ oui ! _ des années vingt où ce génie trop oublié affirmait d’emblée son inextinguible singularité _ oui, oui, oui.

LE DISQUE DU JOUR

Paris Bar

Jean Françaix (1912-1997)
Divertissement


Alexandre Tansman (1897-1986)
Suite-divertissement


László Lajtha (1892-1963)
Quatuor avec piano, Op. 6

Notos Quartett

Un album du label Sony Classical 19439986682

Photo à la une : les membres du Notos Quartett – Photo : © DR

Les deux autres œuvres de ce splendide et nécessaire CD du Notos Quartett _ Sindri Lederer, violon ; Andrea Burger, alto, Philip Graham, violoncelle ; et Antonia Köster, piano ; l’enregistrement a eu lieu à Leipzig en février 2021… _ ,

la Suite-Divertissement (de 1929) d’Alexandre Tansman ( Łódź, 11 juin 1897 – Paris, 15 novembre 1986), et le Divertissement (de 1933) de Jean Françaix (Le Mans, 23 mai 1912 – Paris, 25 septembre 1997),

loin d’être, comme leurs titres pourraient l’incliner à penser, superficielles ou simplement anecdotiques,

complètent superbement le très vivant, passionnant et très juste portrait réalisé par les jeunes musiciens du Notos Quartett

de ce bouillant Paris de l’après Première Guerre Mondiale _ années vingt, début des années trente : les années de composition du principal de l’œuvre de mon cher Lucien Durosoir (Boulogne-sur-Seine, 5 décembre 1878 – Bélus, 4 décembre 1955)  _, si puissamment attractif alors tout particulièrement pour des musiciens originaires d’Europe orientale… 

Et si je me permets de rapprocher ainsi ce profond Quatuor avec piano Op. 6 de László Lajtha, composé en 1925, et créé à Budapest le 23 janvier 1927, de l’œuvre si singulier de Lucien Durosoir,

c’est pour ce que ces œuvres singulières si intensément poétiques surmontent de la Guerre Mondiale qui les a tous deux si puissamment marqués en leur humanité…

Un CD tout à fait important, en conséquence… 

Ce mardi 30 août 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

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