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Qu’il y a couples et couples : sur « L’Art d’aimer » d’Emmanuel Mouret (suite de la méditation sur l’amour vrai, versus l’angoisse _ et aussi le déni et l’anesthésie _ de son absence…)

21avr

En méditant sur la réalité-vérité (versus l’apparence-illusion-mirage ! ) des couples vrais du passionnant film-comédie L’Art d’aimer d’Emmanuel Mouret, c’est-à-dire Zoé-Jérémie, Vanessa-William, Emmanuelle-Paul, et peut-être, et même surtout (!) _ si nous assistons bel et bien, les 80 minutes de ce film, à la naissance-éclosion (oui !) de tels vrais couples : ce qui sera ma thèse ! _ Achille-sa voisine, et, plus encore, Isabelle-Boris,

versus le faux couple, lui _ anesthésié ! _, d’Amélie-Ludovic (en dépit de l’incapacité tenace d’Amélie à l’infidélité, mais pour des raisons étrangères _ même si elle n’en a pas bien conscience _ à l’amour !..),

il me faut ici méditer et approfondir ce qui fait la particularité de la série _ à variations ! et son découpage en séquences… _ des premiers, les vraies relations d’amour,

face au contre-exemple du second, le fait social du couple (en son anesthésie semi-volontaire)…

_ existe encore le cas de l’angoisse de l’absence d’un tel amour vrai : celle qui, en ouverture des variations du film, taraude (et peut-être tue prématurément) Laurent, le compositeur, qui désirait en vain aimer vraiment, en désespoir de la bonne rencontre !..

Mais angoisse d’absence qui affecte aussi ceux des personnages en mal, plus ou moins conscient, de cet amour vrai ! Telle la patiente et réservée Isabelle. Et même l’adorable voisine d’Achille… Qui ne cultive jamais, aujourd’hui, le rêve secret de son prince (ou princesse) charmant(e) ?…

Ou encore ce qui distingue _ au-delà d’une doxa que l’on pourrait qualifier grosso modo « de gauche«  _ la générosité vraie d’une Zoé (à prêter son Jérémie _ in la séquence 1, « Il ne faut pas refuser ce que l’on nous offre«  _ à son amie Isabelle _ afin de lui « faire un petit peu du bien«  ; car « on peut faire du bien à quelqu’un même si on est amoureux d’une autre personne : c’est ça la bonté, la générosité, l’amitié en quelque sorte…«  _)

de l’incapacité à la générosité, précisément ! _ en dépit de ses intentions exprimées, et en dépit, ou plutôt à cause de ce que l’on pourrait nommer, symétriquement, une doxa grosso modo « de droite« … _ _, d’une Amélie à l’égard de son ami Boris, et par rapport à son cher (et pas si tendre que cela…) époux, le très, très, trop affairé Ludovic _ in la séquence 3, « Il est difficile de donner comme on le voudrait«  ; et la (très remarquable) interprétation distanciée d’un Ludovic « ailleurs«  par Louis-Do de Lencquesain, est parfaite !)…

Et encore ce qui distingue la force (à toute épreuve !) d’un amour vrai _ le film teste ainsi la force des amours de Vanessa et William (in la séquence 7, « Arrangez-vous pour que les infidélités soient ignorées« …), ainsi que celle d’Emmanuelle et Paul (in la séquence 6, « Sans danger, le plaisir est moins vif« …), à défaut de mettre à l’épreuve la force de celui de Zoé et Jérémie : nous n’y assisterons pas ici ; les deux autres exemples devant suffire à l’exposé… _,

versus la fausse force _ celle de l’incapacité d’Amélie à sortir de sa fidélité seulement convenue (de bourgeoise bon chic bon genre) à son Ludovic de mari… _ du non-amour _ un amour de couple conventionnel seulement… _ d’Amélie et Ludovic..,

c’est que dans le cas des amours vraies

où s’entend sonner clair et fort la fameuse « musique particulière » _ ou plutôt « singulière«  ! _ « au moment où l’on devient amoureux » _ mais ensuite aussi, et c’est là sa puissance ! ; en particulier au moment des « épreuves« , ou aussi des « expériences«  ! _ évoquée par la voix-off (de Philippe Torreton _ pour nous donner à entendre, non sans beaucoup d’humour, la voix forcément grave du point de vue, surplombant, de Sirius !.. _) à propos de l’absence d’amour un tant soit peu vrai et substantiel

_ n’allant guère plus loin hélas, dans le cas du malheureux (bien que beau : trop beau ?..) compositeur Laurent  : un romantique !, que quelques minces « bribes« , ou ersatz, d’amour ; et qui n’ont donné lieu, en le travail de composition du musicien que celui-ci est, qu’à « deux-trois notes » ou « à peine plus…«  de musique, au lieu de la pleinement belle  « mélodie«  ardemment espérée et attendue mais en vain de lui en sa trop brève vie… _ ;

à propos de l’absence d’amour un tant soit peu vrai et substantiel,

absence douloureusement ressentie de la part du compositeur Laurent, en la séquence 0 d’ouverture du film, « Il n’y a pas d’amour sans musique » ;

c’est que dans le cas des amours vraies, donc,

c’est à de parfaites singularités _ et parfaitement identifiées comme telles, en leur épanouissement-éclosion, une fois extirpées de la nécessaire chrysalide commune de départ : absolument irremplaçables, non plus qu’interchangeables ! dès lors… _, que nous avons à faire : celles de vraies personnes absolument uniques ; et qui, via la puissance de l’amour pleinement et frontalement éprouvé et ressenti, sont fort bien engagées sur la voie (radieuse) d’accomplissement et épanouissement de leur être _ en cet élan de joie dont, en son Éthique (= « art de vivre et s’épanouir« …), Spinoza affirme qu’il témoigne lumineusement qu’alors, en lui , « nous sentons et expérimentons que nous sommes éternels«  ; j’y reviendrai !

Personnes singulières, qui adviennent ainsi et se révèlent à elles-mêmes comme à l’autre, par cette métamorphose (amoureuse), grâce à la chance insigne _ de fait pas forcément très courante : une grâce !.. _ de s’être rencontrées et avoir su _ ce qui ne va pas non plus de soi : cela s’apprend, et seulement sur le tas… _ se reconnaître (et ne pas se manquer !), et puis, assez vite, s’entendre à merveille : en cet amour vrai !

A côté des rebondissements syncopés _ à la vitesse de l’art de la comédie tout en élégance (à la Marivaux…) d’Emmanuel Mouret ! _ des péripéties de l’apprentissage de la découverte de « la complexité de (leurs _ peut-être… _) sentiments » par Achille et son adorable à la fois simple et un peu compliquée voisine,


j’en prends pour principale (et magnifique !) illustration,

les paroles lumineusement significatives de Boris à celle qu’il prend encore pour son amante (de dans le noir), Amélie, à la suite de ses deux premières séances d’amour dans le noir à l’hôtel West-End, avec celle qu’il ne sait pas encore être Isabelle _ une parfaite inconnue de lui jusqu’ici ! _ :

« La première fois, je ne voulais pas y croire !

Mais tu _ Boris confond avec son amie Amélie celle qu’il a tenue dans ses bras deux fois à l’hôtel, dans le noir, et qu’il ne sait donc pas encore être Isabelle (qu’il n’a, de plus, jamais vue, de ses yeux vue, jusqu’ici) ; et Amélie n’a pas encore essayé de les mettre en présence visuelle, cette fois, l’un de l’autre (mais sans leur annoncer qui est l’autre !) à ce moment ; ce qu’au constat de l’évolution ultra-rapide et ultra-envahissante de Boris, elle va tenter très bientôt à deux reprises : à la librairie de Boris, Passage Verdeau, d’abord ; puis lors d’une réception d’amis (nombreux), à son propre domicile… ; mais sans que jamais Boris et Isabelle se plaisent le moins du monde, en se regardant à peine l’un l’autre, les deux fois !) _ ;

mais tu es amoureuse autant que je le suis ; je le sais, j’en ai eu deux fois la preuve (incontestable ! dans la chambre d’hôtel dans le noir !). Il ne peut pas exister une si parfaite (c’est tout dire !) complicité (telle que jouie par les deux partenaires du noir) si elle n’est pas partagée. Ton corps, ta peau, tes gestes  (de dans le noir) m’ont dit (sans nul besoin de mot ni parole d’aucun des deux) que tu _ Boris ignore encore qu’il s’agissait d’Isabelle ! _ m’aimais ! Il faut se rendre à la raison ! Ludovic s’en remettra ; et nous, nous n’avons plus un instant à perdre !« 

La fameuse musique de l’amour a donc bel et bien retenti, pour Boris et celle _ il était bien forcé de s’en rendre compte !.. _ qu’il tenait dans ses bras à l’hôtel, dans le noir et sans parole !!! Alleluhia !!! Joie !!!

Et Boris de balayer alors, dans l’élan irrésistible _ d’autant que Boris est quelqu’un de très retenu et d’une politesse parfaite ! _,

et Boris de balayer alors, dans l’élan irrésistible de son absolu (tout frais et tout neuf) enthousiasme amoureux _ la chose est proprement « magique » !, selon le mot de Boris lors d’une conversation précédente avec Amélie : avec son ancienne compagne, Marie, « ils s’entendaient bien, mais sans plus… Ce n’était pas magique«  !.. _, les réticences persistantes de la pauvre Amélie, qui non seulement n’est pas celle des séances de dans le noir, mais n’a _ surtout _ jamais entendu retentir semblable musique de sa vie !


Et non seulement Amélie ne connaît pas cette musique, mais elle est à mille lieues du soupçon de sa réalité !

Et il est probable qu’elle ne prendra pas conscience de son ignorance de cela ! : « n’est-elle pas« , selon son expression de satisfaction à Boris, « en couple«  ?..

Tout au plus, Amélie a-t-elle avoué se sentir travaillée par quelque chose comme une « insatisfaction« … : « J’ai l’impression que ma vie manque de sens. (…) J’aimerais donner… » ; elle ne se rend tout simplement pas compte _ elle n’est pas la seule ainsi en ce monde… _ que c’est d’amour vrai que sa vie manque ! ; et la bourgeoise bon chic bon genre qu’elle est (et continuera d’être probablement toujours), n’en prendra vraisemblablement jamais conscience !!! ;

Et Boris de poursuivre l’exposé enthousiaste _ à une Amélie proprement éberluée (alors qu’elle est censée en avoir le savoir le plus brûlant ! de ce qu’elle a partagé dans la singulière expérience de dans le noir !..) de l’évolution d’une situation qui complètement lui échappe ! _ de sa propre révélation-illumination amoureuse : « Rien ne passera ! Ce qui nous arrive _ Boris croit forcément s’adresser à sa partenaire de dans le noir à l’hôtel ; ne sachant ni ne soupçonnant bien sûr pas qu’il s’agissait d’Isabelle !, totalement incapable de pouvoir s’imaginer avoir eu à faire à un coup fourré d’Amélie et à une substitution de personne !!! (comme chez Feydeau, Goldoni, Marivaux, Shakespeare, Plaute…) _ ;

 Ce qui nous arrive est unique ! Je n’ai jamais ressenti ça !  _ avec aucune de ses compagnes, ce n’avait été ainsi « magique«  !..

Pourquoi laisser le temps filer ? Je ne peux plus me passer de toi ! Je n’ai plus envie de rien d’autre que de nous ! Je ne vais pas te laisser une seule seconde de répit, mon amour ! _ dit-il à celle qu’il prend pour sa partenaire de dans le noir à l’hôtel  West-End Le seul repos _ capable d’apaiser, non pas le désir ou la pulsion sexuels, mais bel et bien le transport de l’amour vrai ! _ que l’on peut trouver maintenant, c’est chacun dans les bras de l’autre !« … _ et qu’est donc l’amour si ce n’est ce désir permanent de la présence absolue, et de jamais assez près, de l’autre ?!..

Ce qu’Amélie, aux abois de la tournure que prennent ces choses qu’elle ne contrôle pas du tout !, rapporte très vite ainsi à Isabelle : « Écoute, je ne sais pas ce qui s’est passé entre vous _ deux _, mais (le résultat des séances dans le noir à l’hôtel est que désormais) il est persuadé que je suis _ en fait que tu es, toi, Isabelle ! _ la femme de sa vie !..« 

Quant à apprendre d’Isabelle ce que cette dernière ressent de cette nouvelle _ et tout de même scabreuse ! pour elles deux, comme pour l’inconnu de dans le noir… _ situation _ dont cependant le double anonymat des deux partenaires de dans le noir, continue pour le moment de les protéger, elle, Isabelle, comme lui, Boris, de trop fâcheuses suites ! _, Amélie _ bien moins intime avec Isabelle qu’elle ne l’est avec son « meilleur ami«  Boris _, n’en tirera rien ;

d’autant qu’Isabelle demeure complètement persuadée, que le comportement dans le noir de l’inconnu sans nom _ qu’elle voudrait, à certains égards, continuer de n’être pour elle que « le meilleur ami d’Amélie«  ; en luttant contre une autre part d’elle-même pour ne pas le considérer autrement que cela… _, ne s’adresse en rien à elle-même, Isabelle (puisque cet inconnu ne la connaît pas, ne l’a jamais ni vue, ni entendue ! et est dupe du subterfuge de la substitution…), mais seulement à l’Amélie que l’inconnu croit que sa partenaire du noir est !!!

Comme dans la dramaturgie de Marivaux, ou dans celle de Shakespeare _ sinon celle de Feydeau, voire de Musset, selon le topos de l’Amphitryon de Plaute… _, la comédie des masques (et des erreurs !) fonctionne à plein dans le cinéma jubilatoirement drôle _ et diaboliquement tiré au cordeau ! _  d’Emmanuel Mouret !..

Isabelle est néanmoins fort troublée de cette tournure à tous égards surprenante des choses : prise qu’elle est entre sa terrible timidité foncière, et l’agrément que toutefois aussi, elle ne peut s’empêcher de constater, bien sûr !, qu’elle y prend, et dont son partenaire du noir se rend, lui aussi, mieux que compte !..

Isabelle, en effet, ne sait pas trop comment interpréter et mettre au clair ce qu’elle ressent de ces séances dans le noir, même si elle se rend à ces séances de plus en plus jubilatoirement, comme l’image sur l’écran _ et, comme celui, entre retenue de l’homme bien élevé et réjouissance jubilatoire qui finit par transpirer et éclater, du Boris du magnifique Laurent Stocker, le jeu mi-contrit, mi-réjoui de l’Isabelle de la stupéfiante Julie Depardieu, est absolument délicieux ! _ ;

comme l’image sur l’écran nous le montre épatamment bien ! Car Isabelle, ainsi troublée, est aussi très loin d’être une dévergondée matérialiste purement cynique…

Et c’est de la surprise de l’amour vrai _ comme dans le théâtre parfait de Marivaux _ qu’il s’agit bien ici, en ce cinéma parfaitement épatant d’Emmanuel Mouret !

Jusqu’à l’épisode conclusif _ et plus encore climax grandiose ! _ de la  rencontre par hasard, lors de la fête d’anniversaire de Zoé _ chez Zoé et Jérémie : la séquence 9 bouclant le fil de l’intrigue ouvert par la séquence 1, celle du rêve (avec Zoé, en forêt) d’Isabelle, suivi de la conversation consécutive entre Isabelle et Zoé (dans Paris), quant à l’absence d’amour depuis un an d’Isabelle… _ ;

Jusqu’à l’épisode conclusif de la rencontre par hasard _ et retrouvailles : ni l’un ni l’autre (encore sous le choc des conséquences du subterfuge tramé par l’ingénuité niaise d’Amélie, et de l’accident de sa mise au jour !) n’avait cherché à se revoir… _ d’Isabelle et de Boris ; car cette fois-ci, et pour la toute première fois, chacun des deux, Isabelle comme Boris, sait qui est l’autre !!!

Et leur compréhension-parfaite-entente _ mettant à profit une courte panne d’électricité ! : une ultime fois dans le noir !!! _ sait parfaitement se passer alors de paroles…

Fin du rapport sur ce qui advient du retenu Boris et de la très timide Isabelle, en les péripéties de la succession de leurs rencontres (dans le noir)…

Maintenant, et sur le fond des choses, comment distinguer l’amour vrai (de ceux qui entendent bien distinctement la « mélodie » de sa musique…),

de l’absence d’amour (ou, pire, de l’illusion d’amour) de ceux qui ne l’entendent pas, ou, sinon, seulement deux-trois « bribes » de-ci de-là ?

Quel statut, ainsi, donner aux déclarations de la directe et délurée, mais aussi amoureuse vraie de Jérémie, Zoé,

comparant l’acte de chair _ afin de « faire un petit peu du bien«  à un autre ?.. _ à un massage un peu plus généralisé que le massage d’un kinésithérapeute, soit « un massage qui ne fait pas qu’avec les mains« , mais sans avoir « besoin d’être amoureux d’un kinésithérapeute » ?

S’agit-il là seulement d’une technique (pouvant s’apprendre en suivant mécaniquement un mode d’emploi ou une recette) thérapeutique ? _ il est vrai que la lucide Zoé distingue fort clairement le partage volontaire, dont on peut être fier, de ce qui « fait du bien«  de de ce qui se pratique en catimini « dans le dos«  de la compagne, et suscite, de fait, la jalousie…

Ou bien d’un « art » : un « art d’aimer » ?..


A tout le moins le passage à l’acte semble être ici une voie d’accès possible, sinon inévitable, à l’amour vrai (et à sa « mélodie« …)  : ce serait là ce qui pourrait se déduire de l’exemple des péripéties de la rencontre et de la relation entre Achille et son adorable et affriolante voisine, laquelle prône aussi (et au nom d’un certain « sacré » : elle prononce avec une touchante fraîcheur ce mot…) une certaine « retenue » _ et à l’inverse de trop de « légèreté«  _, du moins provisoirement… Comme en préambule et approches préalables, de (ou à) l’exemple principal ici, en la comédie de ce film, de l’aventure « dans le noir » d’Isabelle et Boris…

..

Et que penser de la comparaison que le rêve d’Isabelle prête à la figure _ fantasmée ? ou pas ?.. _ de son amie (« de gauche« ) Zoé, entre l’échange monétaire et l’échange de services sexuels ou/et amoureux ?.. :

« On paie bien des impôts à la communauté afin d’aider les plus pauvres… Pourquoi on ne prêterait pas son compagnon à celles qui _ célibataires _ en sont démunies ?..« 

Le partage des gestes physiques de l’amour est-il assimilable à la redistribution, par solidarité bien comprise, des ressources financières, aux nécessiteux ?..

Si l’argent peut être défini comme « l’équivalent général des marchandises« ,

l’amour _ et lequel ? seulement la réalisation des pulsions de la Libido ?.. _ est-il lui aussi redistribuable et partageable, non pas même selon les particularités (plus ou mois partagées en une population donnée) des personnes, mais étant donnée l’absolue et irréductible singularité _ du moins quand singularité effective et vraie il y a ! _ de celles-ci ?.. Tout est là !

Même si Zoé, assurément, sépare et distingue qualitativement, l’amour vrai _ et son unique musique, si « singulière«  (plutôt que seulement « particulière« …) !!! _ de la simple gymnastique des « massages qui ne se réduisent pas aux mains » et « font un petit peu du bien«  _ rien que, même si c’est nécessaire et « hygiénique« , pour la santé du corps biologique… 

A relier encore au comportement de cette autre amoureuse vraie (de son compagnon William), qu’est la jeune Vanessa,

qui, amusée (« il a tellement de désir pour moi que ça me donne envie« ), veut bien se prêter à une brève et unique expérience sexuelle (« légère » !), avec son collègue de travail si empressé, Louis, qui doit partir le lendemain pour le Brésil, tant qu’il ne s’agit entre eux que de choses « légères » : « Tu me plais bien ; et voilà tout ! » ; « Je pensaisdit-elle à regret de leur malentendu, à Louis, en lui signifiant son impossibilité de poursuivre l’aventure _ qu’entre nous, ce serait simple et léger« …


Mais Vanessa interrompt net l' »expérience » dès qu’elle s’avise que Louis est bel et bien tombé amoureux d’elle : « Je ne savais pas que tu étais amoureux ; sinon, je ne serais pas venue. Non, maintenant que je sais que tu m’aimes, ce n’est plus possible !« … Et cela, lui répond-elle encore, « parce que je suis amoureuse » (vraiment) : de William… C’est en effet là un absolu qui n’est pas négociable et dont je dirai _ à la Spinoza : « sub specie æternitatis«  _ qu’il a bel et bien une très effective « dimension d’éternité« …

Et tant pis pour le malheureux Louis éconduit : « Je t’aime, Vanessa. Je t’aime depuis la première seconde où je t’ai vue. C’est comme si je t’avais reconnue, comme si je t’attendais depuis toujours« . Et Louis de commenter sa situation, et de plaider encore sa cause : « Je sais que ce genre de chose n’arrive qu’une seule fois dans une vie« … Mais justement ! Il y a là incompatibilité absolue…

Car indépendamment de sa situation temporelle, tout amour vrai a très effectivement dimension d’éternité,

tellement que rien ne peut et ne pourra jamais affecter son irréfragable consistance, et faire comme s’il n’avait jamais été !!!

Voilà un aspect de sa formidable puissance… Face au temps, à la mort et au néant, l’amour vrai dispose d’un pouvoir de consistance absolue et d’irréversibilité sans égal…

Même si beaucoup n’accèdent jamais, de fait, à ce savoir _ toujours particulier, et même singulier ! _ d’expérience…

Alors, pouvons-nous séparer d’un trait-fossé infranchissable, à la coupure franche et sans rémission,

les amours vraies,

des illusions d’amour et des absences d’amour ?..

Et que faire de _ et comment les situer ?.. _ ces « bribes » d’amour parfois éprouvées _ comme par le compositeur Laurent, ici dans le film _, incapables cependant de donner lieu à une vraie, consistante et vraiment belle, « mélodie » ?..

De celles qui expriment _ et donnent à la réception de leur expression, en et via une œuvre (musicale, poétique, ou autre…) d’Art : le film nous le donne à contempler avec les images de ce que ressentent certains des auditeurs au concert de musique de Laurent, à l’ouverture du film… _, en l’irradiant, de la joie…

Ou bien, est-ce, à son tour, s’illusionner, que de penser-croire entendre résonner pareille « mélodie » amoureuse ? là où tant d’autres, se contentant de relations « légères« , ludiques, ou au moins « hygiéniques« , n’entendent jamais _ ni n’aspirent même pas à entendre quelque jour, réalistes matérialistes (et pratiquant le rasoir d’Occam) qu’ils sont… _ pareille musique ?

A l’instar du pari de l’existence _ et non mirage ! _ de pareilles vraies mélodies amoureuses par Emmanuel Mouret en la comédie de son film, dont c’est là le fil rouge,

et à contrepied des minimalismes cyniques,

j’applaudis à mon tour à cet article de foi qui s’expérimente

très effectivement dans le cas de certains ; mais jamais, dans le cas d’autres

qui ne l’expérimenteront donc pas !…

La prise de conscience plus ou moins progressive, ou instantanée _ cela pouvant beaucoup varier ! _, des sentiments, et de leur « complexité » (selon la juste formule de la quête de la voisine d’Achille recherchant un livre sur ce sujet dans la librairie de Boris, Passage Verdeau),

demande, pour être effectivement activée _ et non déniée et anesthésiée, comme dans le choix d’existence confortable d’une Amélie… _ de la probité, à tous égards,

et un effort intense et courageux de clarification des opérations de la conscience

_ opération à laquelle l’Art, quand il en témoigne du détail, peut nous initier _ ;


ce qui à la fois requiert une lucidité dans l’aventure de la nouveauté la plus déstabilisante et de la fraîcheur, toujours d’abord perturbante pour le confort, de l’instant,

mais aussi une capacité de progresser dans l’évolution (ou histoire) de la relation affective

à travers l’évolution, parfois  bouleversante, des situations…

Il me semble aussi que de très effectifs seuils existent,

et qui ne sont pas de purs mirages ou illusions, plus ou moins théâtralisées, comme le penserait un empiriste tel que un David Hume.

Pour ma part, je préfère la foi  vitaliste et rationaliste d’un Spinoza, avec son affirmation que notre existence d’humains temporelle (et par là mortelle, parmi les espèces sexuées, qui ne se perpétuent qu’à travers le renouvellement et remplacement des générations) comporte aussi, et vitalement tissée à elle, une dimension d’éternité.

Cette dimension d’éternité de l’existence humaine temporelle _ vivante, et par là même mortelle ; même si, comme le rappelle fort justement Spinoza, « la philosophie est méditation de la vie, non de la mort«  ! _,

cette dimension d’éternité, donc,

seul la sent et l’expérimente

et apprend à la connaître en profondeur

celui qui sait en prendre progressivement _ c’est-à-dire peu à peu et avec patience ! _ mieux conscience (au lieu de la fuir : dans le déni de l’anesthésie)

et en approfondir sa connaissance par la réflexion et la méditation

vaillantes, courageuses

et un minimum aussi _ sans jamais en exclure la fondamentale dimension d’humour ! _ sérieuses.

Alors que » l‘ignorant » ne sait pas _ et n’apprendra, bien sûr !, jamais à _ donner consistance à son existence qui passe (et fuit ; et va mourir, comme toute autre…),

« le sage« , lui, réussit à avancer dans la connaissance de sa nature, en l’éventail large de ses potentialités disponibles, et leur vocation à se réaliser effectivement ;

et il accède à leur épanouissement…

Ce dont vient lui donner l’assurance (éminemment sensible), le sentiment _ actif _ de la joie à distinguer de la passivité du couple, seulement mécanique, lui, du plaisir et de la douleur !!..

A terme, Spinoza nomme cela, la « béatitude« …

Et c’est cette musique-là

que la comédie virevoltante de L’Art d’aimer d’Emmanuel Mouret, vient parfaitement figurer cinématographiquement

dans la batterie syncopée de ses très jouissives variations…

Titus Curiosus, ce 21 avril 2012

une flopée de merveilles de musiques, et une passionnante exposition, aussi, « Deadline », cette Toussaint

02nov

Est-ce la difficulté (commerciale ?) des temps qui courent ?..

toujours est-il que les éditeurs de disques redoublent ces derniers temps-ci d’exigences de qualité pour nous offrir d’admirables interprétations de chefs d’œuvre de la musique…


D’abord, cette Toussaint _ et « remarqués« , pour une fois, par les magazines de disques : tout arrive !.. _ trois admirables CDs de piano à divers « stades » de composition du Romantisme : Schubert ; Liszt ; Brahms _ et encore ai-je (provisoirement?) « délaissé » _ ni lui ai seulement prêté une oreille ! pour le moment… _ le « Chopin chez Pleyel«  d’Alain Planès (CD Harmonia Mundi HMC 902052) _ sur lesquels, CDs, je ne regrette pas de m’être « précipité » ! :

des « merveilles » et de musique, et de musicalité !


De Franz Schubert (1797-1828), le CD « Wandererfantasie and other Works for solo piano«  _ la « Fantasie in C (Grazer Fantasie) » D 605A ; « Three Piano Pieces« , op. posth. D946 ; « 13 Variations on a Theme by Hüttenbrenner«  D 576 ; en plus de la « Wandererfantasie » op. 15D 760 _, par Michaël Endres (CD Oehms OC 731) ;

de Franz Liszt (1811-1886), le CD « Franz Liszt « un portrait » » _ avec « La Danza _ Tarantella napoletana » (des « Soirées musicales » de Rossini S. 424) ; les « Funérailles » (des « Harmonies poétiques et religieuses » S. 173) ; la « Bagatelle sans tonalité«  (ou « Mephisto-valse«  n°4b) S. 216a ; « Saint-François de Paule marchant sur les flots«  (des « Deux Légendes » S. 175) ; les « Consolations«  S. 172 ; la « Vallée d’Obermann«  (des « Années de pélerinage, 1ère année, Suisse«  S. 160 ; « Liebestraum«  (« Rêve d’amour« ), « Nocturne » n°3 S. 541 ; et la « Rhapsodie hongroise » n° 2 S. 244/2 _, par Guillaume Coppola (CD Calliope CAL 9412) ;

 …
et de Johannes Brahms
(1833-1897), le CD « Die Späten Klavierstücke Op. 116 – 119«  _ les 7 « Fantasien » op. 115 ; les « 3 Intermezzi » op. 117 ; les 6 « Klavierstücke » op. 118 ; et les 4 « Klavierstücke » op. 119 _, par Anna Gourari (CD Berlin Classics 0016472BC) ;

toutes œuvres transcendées ici par des interprétations magnifiquement inspirées et idéalement adéquates, toutes trois ; et selon des styles fort divers…


Le Schubert de Michaël Endres chante à la perfection … »à la Schubert« , avec une grâce (légère en sa gravité : le génie est toujours oxymorique, à « résoudre » sans effort et dans la jubilation la « quadrature du cercle » !..) : il nous enchante ! tout simplement…

Le Liszt de Guillaume Coppola « chante« , lui, aussi _ en une inspiration d’ascendances italiennes : napolitaine, sicilienne, etc… _, mais « au concert« , cette fois, avec la virtuosité pleine de panache (frisant le gouffre _ d’entre Charybde et Scylla ! entre Calabre et Sicile : là même où se produit le miracle de « Saint-François de Paule marchant sur les flots«  (la plage 4 de ce CD !)… _ de l’emphase, mais, le défiant, victorieusement, pour, n’y sombrant pas, en triompher brillamment !..) de Franz Liszt : une joie puissamment rayonnante anime ce vaste « portrait » de Franz Liszt (ainsi, médiatement, que celui, aussi, du jeune interprète (d’ascendance sicilienne, celui-ci prend bien soin de rendre hommage, en couverture du disque, et à sa grand-mère Lina, et « à la mémoire de (s)on grand-père Vincenzo » ! et par-delà eux, peut-être aussi, au catanais Giovanni Bellini, le maître du bel canto ; qu’a pu, à Paris, admirer Liszt…). Chapeau !

Quant au Brahms d’Anna Gourari, tout en assumant, pleinement, et magnifiquement, un certain pianisme (qui était passé, ces dernières années, pour ainsi dire de mode), il demeure, avec un « plus que parfait » éclat, fidèle à la magie mirifique de la poésie feutrée et chargée de goutelettes de toute fraîche rosée translucide, tout à la fois, de ces (20) « petites » œuvres, si grandes (sublimes ! oui…), de la « fin de vie » de musicien de Johannes Brahms… Bravo ! Bravissimo, la « parfaite » musicienne…

Sur les œuvres de « fin de vie« ,

mais cette fois en ce qui concerne les arts plastiques (principalement la peinture) contemporains,

on se plongera avec d’infinies délices dans le regard _ et la lecture ! _ du magnifique catalogue « Deadline«  _ avec une très belle « préface-présentation » de la commissaire (aidée d’Emile Ouroumov) Odile Burluraux : « Mourir « vivant »«  (pages 17 à 25) _ qui accompagne l’actuelle (16 octobre 2009 – 10 janvier 2010) exposition éponyme, « Deadline« , au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, consacrée à des œuvres « terminales » de Martin Kippenberger (Dortmund, 1953 – Vienne, 1997), Absalon (Ashdod, 1964 – Paris, 1993), Hans Hartung (Leipzig, 1904 – Antibes, 1989), James Lee Byars (Detroit, 1932 – Le Caire, 1997) _ c’est un cliché (étincellamment tout doré !)

Performance pour le vernissage The Death of James Lee Byars à la Galerie Marie-Puck. Broodthaers, Bruxelles 1994.(Photo : Marie-Puck Broodthaers)

de James Lee Byars lui-même lors de sa « performance pour le vernissage de l’exposition « The Death of James Lee Byars«  à la Galerie Marie-Puck Broodthaers, à Bruxelles« , à l’automne 1994, qui figure en (fascinantissime !) couverture (sur fond noir) de l’album !.. _,

Felix Gonzales-Torres (Guáimaro, 1957 – Miami, 1996), Joan Mitchell (Chicago, 1925 – Vétheuil, 1992) _ est amplement cité un « entretien«  avec Yves Michaud, le 12 janvier 1986, aux pages 97 et 98 de l’album (extrait du catalogue « Joan Mitchell, les dernières années«  des expos au Musée des Beaux-Arts de Nantes et à la Galerie nationale du Jeu de Paume, en 1994… _, Robert Mapplethorpe (New-York, 1946 – Boston, 1989), Chen Zhen (Shanghaï, 1955 – Paris, 2000) _ qui avait participé (brillamment !) en juillet 1990 à l’exposition « Chine demain pour hier«  qu’avait organisée à Pourrières, près de la Sainte-Victoire, mon amie Michèle Cohen, qui dirige la Galerie « La Non-Maison«  à Aix-en-Provence (elle m’a invité à y disserter « Pour un Non-art du rencontrer«  le 13 décembre 2008 dernier) ; le catalogue de cette expo « Chine demain pour hier«  ayant reçu un « avant-propos«  (excellent !) de notre ami Yves Michaud, Directeur alors de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris… ; cf pour précisions mon post-scriptum au bas de cet article _, Gilles Aillaud (Paris, 1928 – Paris, 2005), Willem de Kooning (Rotterdam, 1904 – East Hampton, 1997), Hannah Villiger (Zug, 1951 – Aug, 1997) et Jörg Immendorff (Bleckede, 1945 – Düsseldorf, 2007)…

Les notices (et « entretiens » avec les artistes…) pour chacun des douze artistes présentés sont passionnant(e)s, dans la finesse de précision des analyses (par Ann Temkin, Joël Bartoloméo, Odile Burluraux elle-même, Joachim Sartorius, Lewis Baltz, Molly Warnock, Sophie Delpeux, Hou Hanru (avec Odile Burluraux), Éric Darragon, Joachim Pissarro, Annelie Pohlen et Nicole Hackert, Bruno Brunnet & Michael Werner _ avec aussi un « Avant-propos«  de Fabrice Hergott, pages 13 à 15 _), d’un art qui atteint le maximum de sa « liberté » face au temps (qui reste) et sa dimension (d’élévation) d’éternité : ce à quoi s’affronte, se confronte, s’entretient, se nourrit, s’enchante, tout art « véritable«  ; par rapport aux impostures courant les rues de ce qui prétend s’afficher « art » et n’en est que tristes et pénibles « contrefaçons » ; d’autant plus grossières que vulgaires… La discrétion (envers la personne d’autrui) étant politesse essentielle d’un artiste…

A ces 3 « divins » CDs de piano romantique,

j’ajouterai encore le volume VIII de très, très belle facture (toujours !) que nous offre la maestria d’Éric Le Sage (double album CD Alpha 154) en la « continuation » _ et parfaite captation sonore de Jean-Marc Laisné à la Salle de musique « L’Heure bleue« , à La Chaux-de-Fonds, en Suisse, en janvier 2009 _ de l’intégrale « éclatante » (et diaprée) des « Klavierwerke & Kammermusik«  de cet autre immense génial musicien (romantique, aussi…) qu’est Robert Schumann (1810-1856) _ avec les « Études pour le Pianoforte d’après les « Caprices » de Paganini« , Op. 3 ; les « Études de concert pour le pianoforte d’après les « Caprices » de Paganini« , Op.10 ; l’« Allegro«  Op. 8 ; la « Faschingsschwank aus Wien, Fantasiebilder » Op. 26 ; les « Vier Klavierstücke » Op. 32 ; et les « Drei Clavier-Sonaten für die Jugend » Op. 118 : la « Kinder-Sonate Julien zur Erinnerung » ; la « Sonate Elisen zum Andenken«  ; et la « Sonate Marien gewidmet » ; musiques pour trois des filles de Robert et Clara Schmann _ ; pour ces musiques de l’âge romantique, donc…

Pour le Baroque,

quelques merveilleux bijoux, aussi :

d’abord, du génial Alessandro Stradella ; et par un interprète dont j’admire depuis longtemps (après l’avoir entendu en masterclasses à Barbaste, aux stages _ quant aux « fondamentaux » de l’interprétation musicale baroque _ de Philippe Humeau) la parfaite musicalité (ainsi que probité de jeu _ mais les deux vont de pair ! là où se pressent et précipitent (hystériquement…) tant d’impostures, justement : devant (et rien que pour) les sunlights, les caméras, les micros, les foules… _, je veux parler d’Enrico Gatti, dirigeant ici, avec sa merveilleuse justesse « musicale » coutumière, l' »Orchestra Barocca della Civica Scuola di Musica di Milano« , ainsi que les chanteurs Lavinia Bertotti, Barbara Zanichelli, Emanuela Galli, Roberto Balconi, Maurizio Sciuto et Carmo Lepore, un magnifique enregistrement de deux « cantates de Noël«  _ de la période « romaine«  de Stradella : vers 1675, sous le pontificat (29 avril 1670 – 22 juillet 1676) de Clément X Altieri…, ainsi que l’indique, à la page 19 du livret du CD, Carolyn Gianturco _ du grand, mais pas assez enregistré (non plus que donné en concert) Alessandro Stradella (Nepi, 3 avril 1639 – Gênes, 25 février 1682), donc : « Cantate per il Santissimo Natale« , « Si apra il riso » et « Ah! Troppo è ver«  (ainsi qu’une « Sonata di viole _ con concertino di due violini et leuto e concerto grosso di viole« ) ; en un CD splendide de l’Arcana du regretté Michel Bernstein (CD Arcana A 331) ;

puis,

un électrisant récital, sans affèteries ni assauts de (trop) gratuites vocalises, d' »airs d’opéras » napolitains _ un répertoire loin d’être assez exploré encore !.. et pourtant ô combien crucial dans l’histoire de l’opéra !.. (faute de pouvoir « remonter«  vraiment dans leur intégralité de tels « spectacles«  ?.. _, de Giovanni-Battista Pergolese (1710 – 1736), Nicola Antonio Porpora (1686 – 1768), Leonardo Vinci (1696 ? – 1730) & Johann-Adolf Hasse (1699 – 1783 _ présent à Naples, le saxon, lui, pour s’y « former« , auprès de Nicola Porpora et d’Alessandro Scarlatti, en ces si ingénieux conservatoires de Naples, de 1724 à 1727) : « Lava _ Opera Arias from 18th Century Napoli« , par la parfaite Simone Kermes, soprano, et « Le Musiche Nove« , dirigées par Claudio Osele : un CD Deutsche Harmonia Mundi 8869754121 2 ;

puis, en remontant vers des contrées au climat un peu plus « tempéré« ,

d’abord, un très rafraîchissant _ intense et profond en son élégance… _ CD de « goûts réunis » de Jean-Marie Leclair (Lyon, 10 mai 1967 – Paris, 22 octobre 1764) _ compositeur à l’élégance, donc, hautement raffinée ; et violoniste virtuose (sans excès, à la Locatelli…), formé à Turin auprès du maestro Giovanni-Battista Somis _ constitué des quatre premières des six « Sonates en trio pour deux violons et basse continue » op. 4 (de 1731-1732) et de la « Deuxième récréation musicale d’une exécution facile pour deux flûtes ou deux violons » op. 8 (de 1737), interprétées ici par deux hautbois, un basson, une contrebasse et un clavecin _ tenus par David Walter, Hélène Gueuret, Fany Maselli, Esther Brayer & Patrick Ayrton, en un ensemble s’intitulant « Pasticcio barocco«  _ ; soit le _ délicieusement fruité ! _ CD 01 de Hérissons Production s’intitulant « Jean-Marie Leclair, ou l’apogée des Goûts Réunis« 

et un peu plus en amont, dans le temps, à Paris,

et en changeant cette fois de siècle :

un tout simplement « magique » récital de « Pièces de luth«  en sol majeur, la mineur, fa majeur et si mineur de Denis Gaultier (dit « Gaultier de Paris« , ou « Gaultier le jeune » : Paris, 1603 – Paris, janvier 1672) _ avec l’appoint de deux chaconnes (en do majeur et fa majeur) du cousin Ennemond Gaultier (dit « le vieux Gaultier » ou « Gaultier de Lyon » : Vilette-en-Dauphiné, 1575 – Nèves-en Dauphiné, 11 décembre 1651) _ ; intitulé « Apollon orateur« , sous les doigts _ inspirés par le dieu maître des Muses ?.. _ du parfait luthiste qu’est le maître Anthony Bailes, chez Ramée : le CD Ramée RAM 090La musique qu’adorait, pour son infini raffinement, sa poésie, la délicatesse de sa grâce divine, La Fontaine : peut-être la quintessence de l’art musical français…

Et enfin,

au XXème siècle, cette fois, et ni en Italie, ni en France, mais en (un violent) exil d’Allemagne _ en 1938-39 pour deux des principales pièces : somptueuses ! _

des œuvres d’un maître bien injustement mis sous l’éteignoir, et qui réveille pourtant l’acuité la plus fine de nos ouïes, par le brillant « profond » (sans clinquant !) de la clarinette, ici : les « Clarinet Quintet ; Clarinet Quartet ; Clarinet Sonata ; Three Easy Pieces » de l’immense Paul Hindemith (Hanau, 16 novembre 1895 – Francfort 28 décembre 1963), un des « plus grands » de ce siècle… : un CD Naxos 8.572213 de « Chamber Music » par le décapant (en même temps que magnifiquement élégant : autre « quadrature du cercle » !) ensemble « Spectrum Concerts Berlin« , que dirige de son violoncelle Frank Dodge ; et avec le clarinettiste virtuose (excellent !) Lars Wouters van den Oudenweijer !..

Le contraste avec le luth de Denis Gaultier sera magnifique ; révélant, si besoin en était, toute l’amplitude de la magie féérique de la musique…


Titus Curiosus ce 2 novembre 2009

Post-scriptum :

je joins, ce matin du 3 novembre, ce courriel

à mon amie Michèle Cohen, directrice de la Galerie « La Non-Maison » à Aix-en-Provence

(où je vins le 13 décembre 2008 présenter mon « Pour un Non-Art du rencontrer« ) :

De :   Titus Curiosus

Objet : En lisant mieux « Deadline« , je découvre que c’est ton exposition à Pourrières en juillet 1990 qui est citée dans l’interview de Hou Hanru, page 123 de « Deadline »
Date : 3 novembre 2009 09:40:06 HNEC
À :   Michèle Cohen

En lisant un peu mieux le catalogue de l’expo « Deadline« ,
il s’avère que
l’expo que tu avais organisée (comportant des réalisations originales de Chen Zhen)
est très précisément citée (avec son « titre » !), page 123 de ce catalogue
« Deadline :

je cite : « l‘exposition « Chine demain pour hier« ,


organisée par Fei-Da-Wei dans le sud de la France.
Cette exposition avait lieu dans le village de Pourrières, à côté de la montagne Sainte-Victoire.
C’était vraiment une exposition intéressante.

(…)
Chen avait conçu des pièces très importantes, dans un grand camion.
Il s’agissait d’une sorte de parcours qui reproduisait des pierres tombales suspendues à l’envers,
et de la terre au sol avec les matériaux, les journaux recyclés comme il les utilisait depuis les années 1990.

C’était assez impressionnant.
Et l’autre pièce était encore plus étonnante
: c’était dans la forêt.
A l’époque, on commençait seulement à parler d’écologie.
Il y avait eu un débat sur les incendies qui avaient dévasté la Sainte-Victoire. Les gens se plaignaient que certains ne respectaient pas la nature et qu’ils mettaient le feu.
En fait, Chen était allé derrière le village, dans la forêt brûlée, où il a trouvé des centaines et des centaines d’objets abandonnés, des déchets ;
il en a effectivement récupéré beaucoup (quatre-vingt-dix-neuf, je crois),
et il les a ensuite suspendus aux arbres.

C’était un geste extrêmement fort,
qui semble très léger mais en même temps très fort.
Cette pièce est vraiment formidable
« …
« A partir de ce moment-là, nous avons commencé à nous voir, à discuter ; nous sommes devenus très amis« ,
continue Hou Hanru…

est celle-là même que tu montas, Michèle !!!

bien que ton nom ne soit pas cité par Hou Hanru _ celui qu’interviewe la « commissaire » de l’expo actuelle, Odile Burluraux, pages 123 à127… _,
Fei Da-Wei en étant, en effet, lui, le « commissaire«  (cf page 4 de ton catalogue de 1990 !)…

Je viens de mettre la main sur le catalogue (que tu m’as donné l’an dernier à Aix) de cette expo qui eut lieu à Pourrières du 7 au 31 juillet 1990, « Chine demain pour hier« ,
organisée par l’association « les Domaines de l’Art » dont tu étais la « présidente » ;
avec une préface de toi, page 11
et un avant-propos de l’ami Yves Michaud, page 9 !


Je vais introduire cette précision
dans mon article :
et voilà qui est fait !..

Titus

Réponse par retour de courriel de Michèle :

De :   Michèle Cohen

Objet : Rép : En lisant mieux, je découvre que c’est ton exposition à Pourrières en juillet 1990 qui est citée dans l’interview de Hou Hanru, page 123 de « Deadline »
Date : 3 novembre 2009 09:45:04 HNEC
À :   Titus Curiosus

Titus,
Tu es vraiment gentil. Peu de gens citent leurs sources. Tu fais un travail de passeur incroyable….
Merci d’avance
Michèle

Dans son « Avant-Propos«  de juillet 1990 à ce catalogue « Chine demain pour hier« , page 9, Yves Michaud, disait que « trop souvent la culture est laissée au soin des institutions«  ; alors que « la création culturelle a, au contraire, besoin de se déplacer et de bouger ; elle n’a pas vraiment besoin d’atours et de pompe. La respectabilité arrive toujours trop vite. La création nous intéresse quand elle vient _ généreusement : tel Kairos… _ là où nous ne l’attendons pas, quand elle nous surprend _ sans calcul d’aucune sorte… _ dans un monde où prédominent aujourd’hui _ certes : les choses, depuis, n’ayant fait que s’aggraver… _ les spécialistes en attente et en motivations«  :

« un monde où prédominent _ voilà ! _ aujourd’hui les spécialistes _ « professionnalisés« , en quelque sorte !.. diplômés peut-être même !.. _ en attente et en motivations » ; comme c’est justement « croqué » ! Comme ils nous pèsent, ces experts ; et plombent tout ce à quoi ils s’attachent, ces « spécialistes » patentés ès « attentes et motivations » ! Comme ils sont loin du véloce, divin et éternellement jeune, lui, capricieux et ludique Kairos ! Tout le contraire des « amateurs » qui « aiment » _ auxquels s’intéresse, par exemple, un Bernard Stiegler…

Là où il s’agit pour la « vitalité«  (de l’Art : d’artistes authentiques !) de « s’affirmer à travers _ avec la fluidité véloce de la souplesse _ des installations, des rencontres, des concerts, à travers des interventions transitoires et momentanées _ oui ! _ qui gardent _ par cette délicate finesse de la légèreté _ le sens de la vie«  _ plutôt que de se perdre ; ou d’être anéantie, ou exténuée, lourdement, cette « vie«  ; désorientée, sans boussole, faute de l’« aimant«  (et de l’« aimantation« ) de vrais profonds désirs, amours, passions

Sur cela, cf toujours Bernard Stiegler (importants travaux en cours !) autour de l’« amatorat » !

Yves concluait ce « mot de présentation » de 1990 par un bref commentaire du titre même de l’exposition : « D’où, je suppose, au-delà du jeu de mots _ « Pourrières » est déjà un nom magnifique : alors le lieu lui-même (!) au flanc de la « magique » Sainte-Victoire : on comprend qu’il y a eu là de quoi inspirer « vraiment » un artiste « profond » tel que Chen Zhen ! quant à quelque « résilience » (à la Boris Cyrulnik…)… _,


D’où, je suppose, au-delà du jeu de mots,

le titre de l’ensemble de la manifestation _ de Pourrières, ce mois de juillet 90-là ; cela a fait dix-neuf ans cet été ! _ : « Chine demain pour hier« . « Pour hier », comme pensée et hommage ; « pour demain », comme création et vie » _ cf ce que François Jullien, expert en sinologie, nomme, avec beauté autant que justesse, les « transformations silencieuses » du « vivre« , par-delà le « mourir » ; qui peut ainsi, face au « trou noir«  du néant, n’en être qu’une « phase« , un « moment » : quand le processus, y compris celui du jeu des mouvements-forces de la « nature«  (mais y a-t-il vraiment « séparation » ?..), est « artiste« , du moins : c’en est l’impérative condition !..

Tout le crucial est dit ! Bravo Yves ! Bravo Michèle ! En 1990 déjà !

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