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Deux avis bien distincts sur le récent CD Mendelssohn « Lieder ohne Worte » d’Igor Levit ; pour une approche de l’idiosyncrasie du génie mendelssohnien……

22fév

Voici ces deux avis :

_ celui de Jean-Charles Hoffelé, avant-hier mardi 20 février, sur son site Discophilia, et sous le sobre intitulé « 7 octobre » ;

_ et le mien, sur mon blog « En cherchant bien« , le jeudi 8 février dernier, et sous l’intitulé moins sobre « « …

7 OCTOBRE

Igor Levit avait probablement pensé payer son écot au piano de Mendelssohn, mais les crimes de masse perpétrés par les Palestiniens dans les kibboutz du sud d’Israël _ le 7 octobre 2023 _ auront tendu un voile funèbre sur le projet qu’ils auront, semble-t-il, hâté.

La pianiste, dont on voit au recto du disque, la main se refermant sur une étoile de David qui manque d’en tomber, s’en explique dans un bref texte qui ne doit pas excuser la moire univoque _ voilà ! _ dont les poésies mélancoliques de Mendelssohn se trouvent uniment obscurcies.

Des gondoles sans Venise, des romances toutes _ uniment _ nocturnes, une sélection trop brève _ certes _, un Alkan ajouté (La chanson de la folle au bord de la mer) qui, sous d’autres doigts, aura et l’amertume et l’étrange, mais qui gagné ici par ce deuil n’est plus qu’une _ réductive _ rumination, font un disque sinistre _ voilà l’avis _ où seul le toucher intime qui est le secret de l’art d’un pianiste qu’on a cru intellectuel et démonstratif (ce qui est son opposé) émeut _ oui ! _ malgré la grisaille, le constant _ uniforme climat _ entre chien et loup _ ou nuit et brouillard…

Et si _ plutôt qu’à Mendelssohn _ on rangeait l’album _ trop subjectif et circonstanciel, donc _ à Levit ?

LE DISQUE DU JOUR

Felix Mendelssohn-
Bartholdy
(1809-1847)


Lieder ohne Worte, Op. 19b
(4 extraits : I. Andante con moto ;
II. Andante espressivo ; IV. Moderato ; VI. Andante sostenuto)

Lieder ohne Worte, Op. 30
(3 extraits : I. Andante espressivo ;
III. Adagio non troppo ; VI. Allegretto tranquillo)

Lieder ohne Worte, Op. 38
(2 extraits : II. Allegro non troppo ; VI. Andante con moto)

Lieder ohne Worte, Op. 53 (2 extraits : IV. Adagio ; V. Allegro con fuoco)
Lieder ohne Worte, Op. 62 (2 extraits : III. Andante maestoso ; V. Andante con moto)
Lieder ohne Worte, Op. 102 (extrait : I. Andante un poco agitato)


Charles-Valentin Alkan (1813-1888)


La chanson de la folle au bord de la mer, Op. 31 No. 8

Igor Levit, piano

Un album du label Sony Classical 196588789823

Photo à la une : © Sony Classical

Le charme absolu, très prenant et très tendre, des « Lieder ohne Worte » de Felix Mendelssohn, en un choix de 14 pièces, par Igor Levit, en un parfait CD, tout fraîchement enregistré à Berlin au mois de décembre dernier…

— Ecrit le mardi 6 février 2024 dans la rubriqueBlogs, Musiques”.

Retrouver le charme très prenant et très tendre, voilà, des « Lieder ohne Worte« de Felix Mendelssohn, en une anthologie de 14 d’entre eux, puisés aux Op. 19, 30, 38, 53, 62 et 102 du maître,

sous les doigts justement délicats _ voilà _ d’Igor Levit,

en un CD Sony Classical 19658878982 tout fraîchement enregistré à Berlin les 3 et 4 décembre 2023 pour paraître le 26 janvier 2024

_ en une forme de réponse sienne au massacre du 7 octobre dernier : « And, at some point, it became clear that I had no other tools than to react as an artist. I have the piano, I have my music. And so the idea came to me to record these works, Mendelssohn’s« Songs Without Words » (…)  It is my artistic reaction  – as a person, as a musician, as a Jew – to what I have felt in the past few weeks and months. Or, to put it more precisely, it is one of many reactions that came to mind  » ; écouter et regarder cette brève vidéo de présentation par Igor Levit lui-même…

Je dois immédiatement ajouter cependant ici que rien, rien de rien, surtout, ne s’entend _ à mes oreilles du moins _ des terrifiantes atroces circonstances (et retentissements) qui ont conduit Igor Levit à ce parfait enregistrement-ci au Teldex Studio de Berlin les 3 et 4 décembre derniers, du sublime classicisme (mozartien ?..) de Felix Mendelssohn à son apogée de poésie (apollinienne ?..) de ces sublimissimes, si parfaitement dénuées du moindre pathos, 14 « Lieder ohne Worte« … Le choix d’une toute simple musique _ voilà _ pour l’éternité, très humblement parfaitement servie ici, voilà, par l’interprète, tout simplement, comme il se doit… _,

est un très délicat et modeste délice : écoutez donc…

Qui me rappelle aussi mon affection personnelle _ superlative ! _ pour le jeu magnifique et idéal de Roberto Prosseda, dans tout l’œuvre pour piano _ une intégrale génialissime ! et pas assez diffusée, tout spécialement en France… _ de l’immense probe et humble Felix Mendelssohn

_ et en cette occurrence-ci le parfait _ voilà ! _ double CD Decca 476 6796 des 57 « Lieder ohne Worte » (8 x 6 = 48 + 7 restés sans numéro), enregistré à Aci Reale, en Sicile, au pied de l’Etna, aux mois de janvier et mars 2008 ; cf le témoignage-constat de mon bref article du 3 mars 2018 :  « « , et écoutez aussi ceci

Tout simplement servir la grâce humble et modeste, heureuse et tranquille, intérieure et sereine, toute pure, de Felix Mendelssohn…

Ce mardi 6 février 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Pour une fois, mon appréciation personnelle de l’interprétation diffère de celle de Jean-Charles Hoffelé

_ peut-être un peu trop impressionné par le choix, et de la photo de couverture du CD, et des mots brefs de l’interprète dans le très mince livret du CD…

Ce jeudi 22 février 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un admirable concert de louanges sur l’admirable interprétation de Piotr Anderszewski de Bartok, Janacek et Szymanowski, au CD comme au concert choisi…

14fév

Ce soir _ et pour la cinquième fois depuis le 27 janvier dernier… _,

je tiens à solennellement célébrer un nouveau splendide hommage rendu au sublimissime CD _ ainsi que concert-récital, à Genève, sur ce même programme _« Bartok – Janacek – Szymanowski – Piotr Anderszewki » Warner Classics 5054197891274,

après mes articles «  » (du 27 janvier dernier,

avec la citation de l’article « Piotr Anderszewski, le promeneur songeur des sentiers escarpés » de Pierre-Jean Tribot, en date du 13 janvier 2024, sur le site de Crescendo),

«  » (du 29 janvier dernier),

«   » (du 30 janvier dernier),

et  «  » (du 3 février dernier,

avec la citation de l’article « A Genève, Un pianiste de classe : Piotr Anderszewski » de Paul-André Demarre, en date du 1er février dernier, 2024, sur le site de Crescendo)…

cette fois-ci l’hommage de Jean-Charles Hoffelé, intitulé « Modern Style« , sur son site Discophilia, en date d’hier, 13 février 2024…

MODERN STYLE

Choisir _ voilà ! _ est l’un des objets de l’art _ de composer superbement un programme (de récital-concert, ou de disque-CD) de Piotr Anderszewski : Sur un sentier recouvert de Janáček oui, mais le Second cahier seulement _ eh oui ! _, des Mazurkas de Szymanowski, mais pas tout l’Opus 50 _ mais le choix de seulement 6 d’entre elles… Ce qui pour le mélomane pourra, sur le papier, sembler _ a priori du moins _ frustrant, s’efface _ absolument ! _ à l’audition _ voilà l’exploit !

Le resserrement dramatique _ oui _ qu’il impose aux cinq pièces _ du Livre II _ de Sur un sentier recouvert, en faisant une quasi-sonate avec deux scherzos, convoque tout son art : phrasés éloquents, ampleur de la sonorité (l’Allegro conclusif vous a un de ces caractères, un hymne dansé !), l’aridité_ toute de splendide tendresse ! _ assumée des six Mazurkas, tour à tour minimalistes (le Moderato) ou fantasques, mais toujours dessinées de ce trait de crayon un peu cubiste, tout cela passe pourtant derrière la pure beauté_ voilà ! _ de ce pianisme gorgé d’harmoniques, vrai jeu à dix doigts qui ne laisse rien _ tu _  des _ subtiles _ nuances indiquées comme autant de didascalies par Janáček et Szymanowski, deux grands annotateurs de leurs partitions devant l’Eternel.

Mais au chapitre Bartók, Piotr Anderszewski a décidé de faire mentir mon propos liminaire : toutes les Bagatelles _ cette fois _ de l’Opus 6, ce laboratoire du nouveau piano qu’invente le Hongrois, sont bien là. Elles furent d’ailleurs parmi les premiers opus que le pianiste polonais inscrivit à son répertoire, soulignant d’emblée le regard particulier qu’il portait sur le répertoire, l’imposant à ses auditeurs. J’ai le souvenir très vif d’un concert à Radio France où l’œuvre le servait à un point incroyable pour un opus aussi peu public : elle exposait sa science pianistique et la hauteur _ justissime _ de son regard d’artiste _ incomparable _ , que je retrouve ici, inchangé, perçant, révélateur.

LE DISQUE DU JOUR

Leoš Janáček (1854-1928)…
Sur un sentier recouvert,
JW 8/17 – Second cahier


Karol Szymanowski
(1882-1937)


20 Mazurkas, Op. 50 (extraits : No. 3. Moderato ; No. 7. Poco Vivace – Tempo oberka ; No. 8. Moderato non troppo ; No. 10. Allegramente – Vivace – Con brio ; No. 5. Moderato ; No. 4. Allegramente, risoluto)


Béla Bartók (1881-1945)


14 Bagatelles, Op. 6, Sz. 38, BB 50

Piotr Anderszewski, piano

Un album du label Warner Classics 5054197891274

Photo à la une : le pianiste Piotr Anderszewski –
Photo : © Simon Fowler/Warner Classics

Un chef d’œuvre d’interprétation à la fois intériorisée, et donnée splendidement à partager, à notre tour :

au disque sur la platine comme au concert dans la salle…

Ce mercredi 14 février 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Dans l’impatience d’écouter enfin en sa continuité sur ma platine le très attendu CD « La Danse » de Martin James Bartlett…

12fév

Dans l’impatience d’écouter enfin en sa continuité sur ma platine le très attendu CD « La Danse » _ le CD Warner Classics 5054197896804 _ de Martin James Bartlett, pour lequel m’avait vivement appâté l’article « Danse funèbre » du 30 janvier dernier de Jean-Charles Hoffelé sur son site Discophilia,

et auquel j’avais réagi, dès le lendemain 31 janvier, en en proposant l’écoute discontinue des podcasts des plages en l’article de mon propre blog « En cherchant bien » « « ,

et alors que ce CD très attendu n’est toujours pas _ scrogneugneu : je ronge mon frein… _ disponible sur les rayons des disquaires de ma chère ville de Bordeaux,

voilà que j’ai découvert hier 11 février sur le site de Crescendo, et sous la plume de Pierre-Jean Tribot, la retranscription de cet entretien intéressant avec Martin James Bartlett, sous le titre de « Martin James Bartlett, apothéose de la danse« ,

que voici donc :

Martin James Bartlett, apothéose de la danse

LE 11 FÉVRIER 2024 par Pierre Jean Tribot

Le pianiste Martin James Bartlett consacre un album à des œuvres françaises réunies sous le thème de la danse. Sous ses doigts, Rameau, Ravel,  Couperin, Debussy et Hahn, virevoltent dans une chorégraphie musicale stylée, cultivée et éclatante _ oui. A l’occasion de la parution de cet album majeur (Warner), Crescendo-Magazine est heureux de s’entretenir avec ce brillant musicien aussi créatif que fédérateur.

Pourquoi avez-vous décidé de consacrer un album aux partitions de danse française ? La danse reflète-t-elle l’esprit français ?

Pour moi _ et pour nous tous aussi ! _, la danse est l’une des racines de toute la musique classique _ mais tout particulièrement française ! Ce flux essentiel, ce mouvement,  ascension, et ce sens de la collaboration multiple que l’on trouve dans la danse, sont également présents dans toute la musique. En tant qu’amateur de ballet, je voulais explorer davantage cette forme d’art et le monde français de la danse est rempli à ras bord de musique absolument exquise _ comme, réciproquement, et même d’abord, le monde français de la musique est remplis à ras bord de la danse absomument exquise…

Comment avez-vous sélectionné les partitions, compte tenu de leur grande diversité, de Rameau et Couperin à Debussy et Ravel ?

Les deux premières œuvres que j’ai explorées sont la Gavotte et la Double de Rameau ainsi _ surtout _ que La Valse de Ravel. J’ai adoré les programmer en récital, en commençant par le baroque et en terminant par cette valse d’avant-garde si contrastée ! Cela m’a amené à réfléchir à toute la belle musique française entre les deux, et m’a conduit en particulier au monde merveilleux de l’impressionnisme musical. Je voulais également faire le lien entre l’ère baroque et le XXe siècle, et j’ai trouvé que le Tombeau de Couperin de Ravel convenait parfaitement _ et combien ! L’œuvre fusionne admirablement ces époques et ces styles musicaux totalement différents, et crée un contour harmonieux tout au long de l’album.

Est-ce un peu provocateur, à l’heure de l’authenticité fondamentaliste du texte, de jouer Rameau et Couperin sur un piano contemporain ?

J’ai toujours été d’avis que les développements instrumentaux, du clavecin au piano à queue de concert d’aujourd’hui, auraient été bien accueillis et auraient inspiré les compositeurs. Nous savons, grâce à de nombreuses lettres et communications, que de nombreux musiciens souhaitaient faire avancer le processus de conception et d’ingénierie des instruments. Cependant, même en gardant cela à l’esprit, je tiens à rester aussi fidèle que possible à l’instrument pour lequel il a été conçu à l’origine. Dans le cas du Rameau en particulier, j’ai recherché de nombreux enregistrements de clavecin _ voilà _ et j’ai essayé d’intégrer un peu de ce monde sonore dans cet enregistrement, tout en utilisant les avantages de la richesse sonore qu’un instrument moderne peut offrir.

Avec Alexandre Tharaud, vous interprétez les rares sublimissimes !Décrets indolents du hasard de Reynaldo Hahn. Comment avez-vous découvert cette partition ?

J’avais déjà interprété quelques chansons de Hahn et son écriture me plaisait beaucoup, mais c’est Alexandre lui-même qui m’a fait découvrir ces œuvres stupéfiantes _ et c’est même là un euphémisme… Lorsque j’ai commencé à concevoir ce projet d’enregistrement, je lui ai demandé conseil et il m’a orienté vers ce merveilleux _ c’est le mot juste ! _ univers sonore. Je savais aussi que je voulais enregistrer avec lui en tant que collaborateur, et je suis ravi que cela ait été possible !

Les œuvres que vous présentez sont issues du grand répertoire et ont été marquées par les interprétations des plus grandes légendes du passé. Avant même cet enregistrement, aviez-vous envie d’écouter ces témoignages musicaux de l’art de l’interprétation, ou préfériez-vous ne pas risquer d’être influencé ?  

Dans la plupart des cas, j’ai écouté les enregistrements historiques de référence au cours des 15 dernières années de ma vie _ Martin James Bartlett a aujourd’hui 27 ans. Cependant, lorsqu’il s’est agi d’explorer ces œuvres, je me suis efforcé de rester aussi fidèle que possible à moi-même et au compositeur, avec, bien sûr, quelques influences subliminales des grandes interprétations du passé !

Avez-vous déjà un autre projet d’enregistrement en cours ?

Oui ! Un projet qui me passionne. Je me rends à Salzbourg pour enregistrer avec l’orchestre du Mozarteum, afin d’explorer les œuvres de Bach, Mozart et Britten _ pourquoi pas ? _ et tous les liens subtils _ voilà une intuition assurément intéressante à explorer… _ qui traversent leurs compositions.

Le site de Martin James Bartlett : www.martinjamesbartlett.co.uk

À Écouter :

« La Danse« . Œuvres de : Jean-Philippe Rameau, François Couperin, Maurice Ravel, Reynaldo Hahn, Claude Debussy.

Martin James Barltlett et Alexandre Tharaud, pianos.

1 CD Warner Classics.

Crédits photographiques : Parlophone Records Ltd

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot

 

En attendant l’écoute en continu enfin de ce CD « La Danse« …

Ce lundi 12 févier 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un pianiste bien mieux que prometteur : Martin James Bartlett, dans Ravel, Reynaldo Hahn, et Debussy, Rameau et François Couperin : son enchanteur CD « La Danse »…

31jan

L’article d’hier mardi 30 janvier de Jean-Charles Hoffelé, intitulé « Danse funèbre« , sur son site Discophilia,

m’a grandement mis l’eau à la bouche à propos du CD « La Danse«  _ le CD Warner Classics 5054197896804, tout juste sorti le 26 janvier dernier… _ du jeune pianiste anglais Martin James Bartlett _ né à Londres le 20 juillet 1996 ; le découvrir aussi dans sa vidéo du « Liebestraüme » n°3 , de Franz Liszt (4′ 58), du 3 mai 2019… _,

consacré principalement à 3 chefs d’œuvre absolus de Maurice Ravel, « Pavane pour une infante défunte« , « Le Tombeau de Couperin » et « La Valse« ,

ainsi que quelques autres pièces _ superbes, elles aussi ! _ de musique française, autour :

une « Gavotte et ses six doubles« , extraite de la « Suite en la mineur » des « Nouvelles Suites de clavecin » de Jean-Philippe Rameau,

« Les Barricades mystérieuses« , la pièce n°5 du Sixième Ordre du « Second Livre de pièces de clavecin » de François Couperin,

l' »Andantino n°1 » des « Arabesques » de Claude Debussy,

et _ surtout _ deux pièces _ d’un charme fou _ du « Ruban dénoué » de Reynaldo Hahn : « Décrets insolents du hasard » et « Les Soirs d’Albi » _ qui forment le sommet de charme français de ce merveilleux CD !

DANSE FUNÈBRE

Que l’on ne croit _ surtout _ pas le titre de ce papier. L’œuvre _ très effectivement, oui _ la plus ouvertement noire de ce disque que l’on classera à Ravel _ soit « La Valse » pour l’apocalypse viennoise… _ est emporté dans un clavier absolument solaire, dont les vertiges érotiques, les grands gestes d’un piano absolument orchestral, ne danseront jamais au bord d’un volcan. Cette Valse n’est pas _ ici… _ un monde qui s’effondre _ ce qu’elle est bien, en sa vertigineuse réalité ! _, mais un pur spectacle esthétique _ voilà, délié… _ où les canons de l’art de Ravel sont magnifiés par un jeu athlétique absolument clouant. La lettre oui, et c’est rare de l’entendre à ce point réalisée dans une partition où les chausse-trappes abondent, mais l’esprit aussi _ mais _ sans le tragique _ ce qui n’est tout de même pas peu… Et pour ma très modeste part, personnement je le regrette…

Le tragique, vous le trouverez _ subtilement _ masqué _ tapi _ dans un _ tout à fait _ émouvant Tombeau de Couperin, tout en apartés, phrasé avec une imagination de tous les instants, dansé (le Rigaudon est leste, les ornements de la partie centrale faisant vraiment paraître Couperin) mais surtout ému (la Forlane, hors du temps, belle à pleurer _ oui ! _). Ce tragique affleurera dans l’assombrissement du Menuet, moment saisissant, et sera à peine suggéré dans une Pavane pour une infante défunte admirablement tenue _ oui, oui, oui. C’est magnifique !

La variété du toucher, la présence d’une main gauche diseuse, le grand son mis à Rameau ou Couperin laissent espérer que Martin James Bartlett reviendra aux clavecinistes français qu’il entend avec bien plus d’art qu’un certain confrère plus chenu _ lequel ? _, mais l’autre merveille _ absolument ! _du disque, plus encore que la face Ravel, plus que l’Arabesque de Debussy qui sous ses doigts a un petit côté Clair de lune, ce sont bien _ oui, oui, oui _ les deux _ merveilleuses _ pièces tirées du _ formidableRuban dénoué _ ce délicieux pur chef d’œuvre, mais pas encore assez connu, de Reynaldo Hahn, composé pourtant dans les tranchées, en 1915 _ où le rejoint l’ami Alexandre Tharaud, romance nostalgique _ sublimisssime !!! _ des Décrets indolents du hasard, petit contredanse anisée des Soirs d’Albi, perles tirées d’un cycle de valses merveilleux _ oui, oui, oui _ tout juste enregistré dans son intégralité par Eric Le Sage et Frank Braley (voir ici) _ et voir aussi mon article enchanté «  » du 13 janvier dernier.

LE DISQUE DU JOUR

La Danse

Jean-Philippe Rameau
(1683-1764)


Gavotte et six doubles
(No. 7, extrait de la « Suite en la mineur, RCT 5 »,
des « Nouvelles suites de pièces de clavecin, 1727 »)


François Couperin
(1668-1733)


Les Barricades mystérieuses (No. 5, extrait de l’« Ordre VI », du
« Second livre de pièces de clavecin, 1717 »)


Maurice Ravel (1875-1937)


Le Tombeau de Couperin, M. 68
Pavane pour une infante défunte, M. 19
La Valse, M. 72 (version pour piano deux mains)


Reynaldo Hahn (1874-1947)


Le ruban dénoué (2 extraits : No. 1. Décrets indolents du hasard ;
No. 2. Les soirs d’Albi)
*


Claude Debussy (1862-1918)
Arabesque No. 1, CD 74/1. Andantino con moto

Martin James Bartlett, piano
*Alexandre Tharaud, piano

Un album du label Warner Classics 5054197896804

Photo à la une : le pianiste Martin James Bartlett –
Photo : © Paul Marc Mitchell

Afin d’en juger,

rien de mieux qu’en écouter, un par un, chacun des podcasts :

_ celui de la « Gavotte et ses 6 doubles » de Jean-Philippe Rameau (6′ 25)

_ celui des « Barricades mystérieuses » de François Couperin (2′ 44)

_ ceux des 6 pièces du « Tombeau de Couperin » de Maurice Ravel :

      _ le « Prélude » (3′)

      _ la « Fugue » (3′ 57)

      _ la « Forlane » (6′ 02)

      _ le « Rigaudon » (3′ 06)

      _ le « Menuet » (4′ 44)

      _ et la « Toccata » (3′ 55)

_ ceux de 2 extraits _ en contraste tout à fait épatant _ du « Ruban dénoué » de Reynaldo Hahn, à 2 pianos, avec Alexandre Tharaud :

      _ « Décrets indolents du hasard« (1′ 36)

      _ « Les Soirs d’Albi » (2′ 32)

_ celui de l’ « Arabesque » n°1 de Claude Debussy (4′ 37)

_ celui de la « Pavane pour une infante défunte » de Maurice Ravel (5′ 58)

_ celui de « La Valse » de Maurice Ravel, dans une version pour piano à deux mains ici (11′ 36)

Pour ma part,

de ce formidablement délicieux CD de sommets de charme fou du meilleur de la musique française,

je regrette seulement _ un peu, car l’interprétation est vraiment magistrale !! quelle clarté de lecture ! _ la dilution _ un poil trop purement hédoniste ici, à mon goût ; je ne partage donc pas toutà fait l’avis, pour une fois, de Jean-Charles Hoffelé… _ du tragique absolu, pourtant, de « La Valse » _ une œuvre génialissime !_ de l’apocalypse viennoise de l’immense Maurice Ravel,

cette sublime course à l’abîme et à la chute que décidément elle est bien, cette « Valse » pour Vienne…

Mais, à la suite de plusieurs infiniment jouissives ré-écoutes de ce piano à deux mains de Martin James Bartlett _ sans  Alexandre Tharaud donc… _ en cette splendidissime « Valse » de Maurice Ravel,

il me faut rendre les armes : le jeu de Bartlett est magistralement lumineux !

Et complètement fidèle à Ravel : au final du morceau, simplement ça s’arrête…

Tel l’ictus foudroyant, sans secours et sans grondement (ni pathos gras et redondant), de l’implacable mort subite.

Sobre et humble élégance ravélienne.

Bravo !

Un récital de piano somptueux !

Qui va droit à l’essentiel…

Ce mercredi 31 janvier 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Irradiant rappel (« vert ») de « Fêtes » slaves : à nouveau le CD Supraphon « Village Stories », via 3 articles réjouis…

19jan

C’est ce vendredi 19 janvier l’article « Noces » de Jean-Charles Hoffelé sur son excellent site Discophilia,

après l’article du vendredi 17 novembre 2023 « Fêtes villageoises entre ripailles et comptines » de Pierre Jean Tribot sur le non moins excellent site du magazine belge Crescendo,

ainsi que le mien, « « , en date du lundi 8 janvier 2024 dernier, sur mon blog Mollat « En cherchant bien »,

qui m’amène à revenir me réjouir sur l’irradiante fête de musique (de Stravinsky, de Janacek et de Bartok) qu’est le très prenant CD Supraphon SU 4333-2 « Village Stories – Stravinsky- Janacek – Bartok »  du Prague Philharmonic Choir dirigé par l’excellent chef tchèque Lukas Vasilek…

NOCES

Vous courrez d’abord aux Trois Scènes de village, l’un des opus les plus abrasifs _ oui ! _ de Bartók où son folklore imaginaire pare d’une folle animation _ voilà _ ou d’un ton mystérieux (la Berceuse) des mélodies qu’il avait notées en Slovaquie. Mariage avec cris d’une verdeur incroyable ici _ oui ! _, qui retrouve l’esprit de l’ancienne version de György Lehel pour Hungaroton, Berceuse étrange dans le mezzo clair de Jana Hrochová, à laquelle Lukáš Vasilek donne des couleurs très Seconde Ecole de Vienne, Danse des filles verte _ à nouveau _ et piquante ; bref, une nouvelle version épatante _ oui, oui ! _ qui rejoint une discographie étonnamment maigre _ hélas, en effet…

Les Noces stravinskiennes, orantes, portées par des percussions cérémonielles (les quatre pianos menés ici par Kirill Gerstein en font, dans l’esprit et la lettre de Stravinski, partie) sont tout aussi saisissantes _ oui ! _, vrai théâtre porté par des solistes qui au-delà du rite dessinent des personnages, Lukáš Vasilek se gardant bien d’en exagérer les effets, privilégiant la narration, puis laissant éclater le discours au long d’un Repas de noces qui frôle la folie _ à nouveau, dans sa sauvagerie d’apothéose.

Perle du disque pourtant, les enfantines que sont Říkadla, où les Pragois savourent les idiomes de ces vignettes dont les notes sont totalement asservies aux mots. Bois verts _ cette fois encore ! _, piano impertinent, un ténor émerveillé pour les herbes _ vertes… _ de printemps avec le babil de la flûte, dix-neuf instantanés de pure poésie qui, je le crois, ont trouvé ici leur version de référence.

LE DISQUE DU JOUR

Village
Stories

Igor Stravinski (1882-1971)
Les Noces, K040


Leoš Janáček (1854-1928)
Říkadla, JW 5/17


Béla Bartók (1881-1945)


Trois Scènes de village,
BB 87b

Katerina Knežíková, soprano
Jana Hrochová, mezzo-soprano
Boris Stepanov, ténor
Jirí Brückler, baryton
Lukáš Hynek-Krämer, basse

Kiril Gerstein, piano (Stravinski)
Zoltán Fejérvári, piano (Stravinski)
Katia Skanavi, piano (Stravinski)
Alexandra Stychkina, piano (Stravinski)
Matouš Zukal, piano

Amadinda Percussion Group (Stravinski)
Dakoda Trio
Zemlinsky Quartet (Bartók)
Belfiato Quintet (Bartók)

Chœur Philharmonique de Prague
Lukáš Vasilek, direction

Un album du label Supraphon SU4333-2

Photo à la une : le chef de chœur Lukáš Vasilek – Photo : © Petra Hajska

Quelle fête, décidément !!!

Ce vendredi 19 janvier 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

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