Posts Tagged ‘entertainment

Pour une « économie de la contribution » : diagnostic et pharmacopée « anti-Viagra » (de l' »économie de la culture ») du docteur Stiegler

26oct

Vendredi dernier, à 10 h, au Conseil Régional d’Aquitaine, dans le cadre d' »ateliers » :

« le numérique et la créativité en région« ,

était organisé un « débat » :

« La créativité et l’innovation au cœur de la relation homme / territoire dans un monde numérique« , avec les interventions des philosophes Bernard Stiegler et Heinz Wismann, avec Hervé Le Guyader pour « modérateur« …

Une initiative pratique a priori (du moins…) utile, prometteuse, féconde ; et mieux que bienvenue :

de première urgence ! :

tant il est positif que le terrain (plus ou moins institutionnel) des « entrepreneurs« 

(« producteurs » _ « créateurs » ou « exploitants » : à y regarder d’un peu près, de l’Art et de la Culture : ici, je sens sur mes épaules comme un souffle d’ironie d’un Michel Deguy… : encore faut-il s’entendre sur les justes qualifications…)

comme celui des « décideurs«  (politiques) _ en sinon « locomotives de l’action« , du moins en « boosters » d’appoint, mais vitaux, à l’ère de la concurrence (mondialisée) acharnée « sur le terrain«  (régional, en l’occurrence)… _

bénéficie du diagnostic et des pistes (éclairants !) que proposent les philosophes les mieux informés et réfléchissants d’aujourd’hui…

Une aubaine…

C’est en curiosus (et ami de Bernard Stiegler ;

cf mon article du 31 mai dernier sur la conférence de Bernard Stiegler au Festival « Philosophia » de Saint-Émilion : « Très fortes conférences d’Olivier Mongin et Bernard Stiegler à propos de ce qu’est « faire monde » à l’excellent festival « Philosophia » de Saint-Emilion« …)

que _ non « institutionnel« , que je suis, de facto _ j’accours à cette « rencontre«  ;

toujours en appétit _ personnel ! _ de la plus performante lucidité qui soit

pour toujours tenter d’un peu mieux (et de ma place ; et à mon échelle ! _ d’individu…) comprendre ce qui se passe présentement, ce qui se trame, dans le secret des flux (et tourbillons agités) humains les plus opérationnels dans le monde d’aujourd’hui :

j’essaie de « faire«  _ de ma place et à mon échelle, donc _ « le philosophe«  ;

et depuis le 3 juillet 2008, sur mon blog « En cherchant bien » _ ou « Les Carnets d’un curieux » : c’est son titre alternatif… _, je le partage (un peu) aussi (!) par l’écriture avec d’éventuels lecteurs un tant soit peu patients, en plus d’être, eux aussi, un tant soit peu curieux :

car il faut, certes, arriver à « suivre » le flux (un peu contourné, sinon réellement « labyrinthique« …), en son élan _ porteur, je voudrais croire … _ de mes circonlocutions,

ô « indiligents lecteurs »

(cf ici l' »Adresse » _ « Au lecteur«  _ inaugurale sublime des « Essais » du génialissime Montaigne, en 1581, à l’ouverture de la modernité philosophique :

l’article d’ouverture de ce blog annonçait la couleur ; on peut s’y reporter ; j’y suis _ de tempérament obstiné, ou têtu : par quelques ascendances bretonnes et basquaises, peut-être ; en plus d’être gascon ; et voisin de Montaigne, par mon enfance des côteaux surplombant la Dordogne… _ absolument fidèle)…

J’en viens au fait de la teneur de l’intervention (diagnostic + pharmacopée !) de Bernard Stiegler _ en « médecin consultant« , en quelque sorte... _ au Conseil Régional ce vendredi dernier 23 octobre

(cf aussi l’article de Bernard Stiegler : « Le Mépris« , sur le site « Culture Action Europe » du « Forum Européen pour les Arts et le Patrimoine« …) 

L’analyse du « modèle » de l »économie créative » au « menu » de cette rencontre organisée par le Conseil Régional d’Aquitaine a été proposée, dès 2001-2002, par John Howkins et Richard Florida (cf « Economie créative. Une introduction« , paru aux Éditions Mollat, en février 2009) :

cf John Howkins : « The Creative Economy« , 2001, Allen Lane ;

et Richard Florida : « The Rise of the Creative Class. And How It’s Transforming Work, Leisure and Everyday Life« , 2002, Basic Books ; et « Cities and the Creative Class« , 2005, Routledge…

Bernard Stiegler se déclare « en profond désaccord » avec ce modèle tout bonnement ségrégationniste d' »économie créative » du début des années 2000 ;

et selon lui les « pôles de compétitivité« , les « creative clusters » proposés par ces auteurs tels que Florida et Howkins ne sont que des « clusters Viagra » destinés à tenter de « relever » un peu l’énergie démotivée d’un modèle consumériste moribond _ et cela dès les années 80 ;

soit « remédier » à la « débandade » par défaut de désir du « consommateur« , en « dépression » chronique carabinée…

Un « psycho-pouvoir« , relevant le « bio-pouvoir » détecté et analysé par Michel Foucault dans la décennie 80,

vise au « contrôle de la vie de nos âmes » par une « destruction de la formation de l’attention« … 

« La crise économique » se trouve ainsi « devant nous« , souligne Bernard Stiegler ;

et se caractérise par « une perte de savoir généralisée » (soit, au sens étymologique, et selon Marx comme selon Adam Smith, une « prolétarisation« ) ;

une « crétinisation généralisée« , dit-il…


Aussi importe-t-il, sinon d’arrêter ce processus (peut-être « inarrêtable« ),

du moins, au moins, de le « penser » ;

et de le « retourner« , peut-être, vers (et pour) d’autres objectifs…

Aussi Bernard Stiegler propose-t-il d’abandonner les catégorisées usées  de « technologies de l’information et de la communication« , au profit de celles de « technologies cognitives et _ surtout ! _ culturelles » ;

avec pour résultats du déploiement des premières, une « paralysie de l’intellect« , « notamment politique« …

Et d’évoquer son expérience personnelle, au Centre Pompidou, de l’évolution vers un « consumérisme culturel » qu’il qualifie d' »effrayant » ;

avec l’obsession d' »augmenter les flux » des « visiteurs«  de passage, quand les œuvres demandent d’abord qu’on leur consacre du temps _ et un « dialogue«  : un tant soit peu serein… _ : « le temps de l’amour des œuvres« , précisément ! On ne peut pas aimer à la va-vite…


D’où l’urgente réhabilitation (et « renaissance«  : Bernard Stiegler embrayant ici sur les analyses éclairantes de Heinz Wismann) de l »amateur » et de l' »amatorat« .

En lieu et place d’une « consommation« , passive (et clonée) qui « consume« ,

aider au passage à une « économie«  _ active et pleinement créatrice _ de la contribution » !..


Toute technique est _ ainsi que l’a montré Jacques Derrida, d’abord en sa « Pharmacie de Platon«  _ un « pharmakon« , ambivalent : selon la dose, le médicament-drogue qui soigne devient un poison qui tue ! les pharmaciens ne distribuent donc les « médicaments » que selon ce que prescrivent, avec l’autorité certifiée de leur savoir, les médecins ;

sinon, ils ne sont plus que des « dealers« …

L' »amateur » (d’Art et de culture) qui se forme à l’expérience _ toujours et nécessairement, pour être vraiment « authentique« , singulière _ des œuvres et à l’épreuve d’échanges continus (et critiques) de « jugements de goût » avec d’autres témoignant peu à peu de leur propre compétence en cette matière complexe, infiniment fine et subtile, et prenant du temps,

est celui qui parvient à « porter au comble une intensité«  _ de joie, ajouterais-je… _ qui, sinon, « se perd dans le flux des choses substituables » ;

cela pouvant aussi passer, et nécessairement _ cf André Leroi-Gourhan : « Le Geste et la parole » ; et Sylvain Auroux : « La révolution technologique de la grammatisation. Introduction à l’histoire des sciences du langage« , paru en 1994, aux Éditions Pierre Mardaga… _, par certains artefacts…

Adressant le lendemain un courriel à Bernard Stiegler que je n’avais matériellement pas pu « saluer » après son intervention en séance publique,

 De :   Titus Curiosus

Objet : Intervention au Conseil Régional d’Aquitaine
Date : 24 octobre 2009 07:23:13 HAEC
À :   Bernard Stiegler

voici ce que je lui déclarais :

La séance d’hier au Conseil Régional m’a évoqué « L’Invitation » de Claude Simon…

Je suis un peu effrayé de, je crains, l’inefficacité de ces raouts
(même si on peut rêver qu’une petite graine d’une « piste » lancée là pourrait germer…) ;

il est pourtant tellement nécessaire
que certains « décideurs » comprennent un peu mieux
et agissent autrement…

Les intermédiaires de la culture
sont redoutables…

Bien de la surdité et de la veulerie régnaient comiquement, pensais-je pendant le « buffet« …
Là, je me remémorais le rire ravageur du Thomas Bernhard narrateur des « Arbres à abattre« 
_ dont le sous-titre est : « une irritation« 

J’admire votre énergie…

Bien à vous,

Titus Curiosus

Voilà.
Les enjeux sont si cruciaux…

Titus Curiosus, ce 26 octobre 2009


Post-scriptum :

voici l’intégralité de l’article de Bernard Stiegler « Le Mépris » cité plus haut ; et farci de quelques commentaires miens, en plus des gras que j’y dépose ;

il résume bien le sens de l’intervention-contribution de Bernard Stiegler au Conseil Régional d’Aquitaine vendredi dernier vers 11 heures… :

« L’Union Européenne et sa Commission subissent à nouveau l’affront d’un scrutin qui les désavoue _ calamiteux comme jamais, comme si la « construction de l’Europe » ne pouvait que conduire à la destruction de la vie démocratique qu’elle prétend incarner _ certes ! quelle tragédie pour nous tous que cette « destruction de la vie démocratique«  !!! _, et produire amertume et défiance des Européens _ en effet, de facto _ vis à vis de ce qu’ils ne reconnaissent donc pas _ certes ! _ comme l’Europe _ son « idée« , son « idéal régulateur« , dirait un Kant… ; cf, justement, de mon ami François Jullien, son tout récent « L’Invention de l’idéal et le destin de l’Europe«  _, mais, tout au contraire, comme l’organisation de son discrédit _ voilà ! est-ce aussi là une part (au moins…) de son « destin«  ?.. _, sur le plan intérieur aussi bien que sur le plan international _ et se résignent à subir, passivement…


Or, après l’effondrement du consumérisme fordiste _ un fait crucial _, advenu au cours de la crise de 2008 _ le krach financier et bancaire d’octobre 2008 _, il est évident que la coopération européenne est plus urgente que jamais pour contribuer à inventer _ oui ! cf « L’Institution imaginaire de la société« , cette œuvre visionnaire et indispensable du grand Cornelius Castoriadis _, particulièrement avec l’Amérique et l’Asie, un nouveau modèle industriel _ oui ! et plus fécond ! _ capable de surmonter la situation proprement catastrophique dans laquelle ce qu’il faut appeler « le règne de la bêtise systémique«  _ magnifique formulation d’une lucidité confondante ! hélas… _ a plongé l’humanité toute entière _ voilà ! Ce nouveau modèle industriel doit inventer un « nouveau mode de vie« , c’est à dire une « nouvelle culture«  _ authentiquement démocratique : pour accoucher du meilleur de l’humanité ; au lieu du pire, pour les profits (financiers et de pouvoir) mesquins et minables de très peu, comme c’est le cas de la « pente » prise aujourd’hui…

La « bêtise systémique » que cette « nouvelle culture » doit dès maintenant combattre _ voici la tâche sollicitant les ardeurs plus rationnelles ! _ a été engendrée et imposée par l’hégémonie du marketing _ oui ; cf sa théorisation par Edward Bernays (neveu de Siegmund Freud, expatrié aux États-Unis ; et créateur du marketing) : « Propaganda : comment manipuler l’opinion en démocratie« , dès 1928… _, dont les industries dites « culturelles«  _ sic, en effet ! c’est une auto-proclamation de leur part !.. il s’agit le plus souvent, et à échelle « mondialisée« , d’« industries de l’entertainment«  (!) _ auront été le bras séculier _ redoutablement efficace… _ : totalement soumises aux impératifs consuméristes, celles-ci auront lentement mais sûrement détruit la _ réelle  et vraie ! _ culture _ et, en cela, systématisé le règne de la bêtise _ par la « crétinisation » de masse des esprits ; cf aussi Dany-Robert Dufour : « L’Art de réduire les têtes«  _ en obnubilant les esprits _ oui ; par une opération de focalisation d’immense envergure… _ et en discréditant les institutions en charge de les élever _ à commencer par l’école ; cf ici le « Prendre soin _ de la jeunesse et des générations » de Bernard Stiegler lui-même. Dans ce contexte, ce que l’on appelle depuis Malraux la « démocratisation de la culture » s’est renversé et décomposé en « consumérisme culturel«  _ voilà !

Or, le modèle consumériste est mort _ ou moribond : tel est le diagnostic que pose et porte Bernard Stiegler _, et le « consumérisme culturel » avec lui _ s’il est vrai qu’il était fondé sur l’opposition fonctionnelle des producteurs _ vendeurs _ et des consommateurs _ acheteurs… Avec le fordisme, et avec les grandes industries de la métallurgie qui le mirent en œuvre, et qui dominèrent grâce à lui le XXè siècle, s’effondrent aussi les « industries culturelles » qui imposèrent à la culture _ au sens que critique de sa verve (et alacrité) le grand Michel Deguy ! cf son très beau et si juste « Le Sens de la visite » (aux Éditions Stock, en 2006 : une merveille !) _ la fonction d’organiser _ fort méthodiquement _ la consommation _ tout en détruisant les publics _ amateurs-amoureux singuliers : authentiquement « cultivés« , eux ; cf ici les magnifiques travaux de mes amies Marie-José Mondzain, « Homo spectator« , et Baldine Saint-Girons, « L’Acte esthétique » : indispensables !!! _ des œuvres, transformés _ ces dits « publics«  _ en audiences _ voilà : mesurées, comptabilisés, par le très précieux « audimat«  Il est triste que Michel Piccoli, dont le personnage « méprisé » incarne précisément cette question dans _ le film de Jean-Luc Godard, en 1963 _ « Le Mépris » _ d’après le roman éponyme d’Alberto Moravia « Le Mépris« , paru, lui, en 1954… _, en ait eu si peu conscience _ lui, Juliette Greco et quelques autres qui auront bien « profité » de ce système : « bien« , c’est à dire avec art _ l’accroche de cette allusion m’échappant pour le moment…

Depuis quatre ans maintenant, « Ars Industrialis«  _ qu’anime Bernard Stiegler ; et qui me fit l’honneur de publier, en avril 2007, mon article « Pour célébrer la rencontre« , en appendice à une présentation de « De la Démocratie participative _ fondements et limites » de Bernard Stiegler et Marc Crépon… _ affirme que ce modèle _ consumériste _, qui suscite tant de mépris, n’est plus soutenable, et qu’une autre organisation de l’économie industrielle est possible :

celle que nous appelons « l’économie de la contribution«  _ expression et concept à retenir ! à une époque où le terme « impôt » a été vilainement substitué à celui de « contribution« _, fondée sur les caractéristiques des réseaux et technologies numériques, où le couple fonctionnel production/consommation  _ ainsi que cet autre couple fonctionnel : vente/achat ?.. _ n’est plus pertinent. Le contributeur _ actif-effectif _, qui n’est ni un consommateur ni un producteur, met en œuvre des technologies cognitives et culturelles qui forment ensemble des technologies de l’esprit.

De toute évidence, le nouveau milieu social, de plus en plus pénétré par ces technologies, fait pour le moment apparaître et proliférer surtout des modèles hyperconsuméristes, addictifs _ cf « Addict » d’Avital Ronell… _, extrêmement mimétiques _ à rebours de l’originalité, voire « génialité«  vraies… _, que le marketing organise très systématiquement _ les algorithmes de l’hypertechnologie y aidant _ ; et dont il exploite les possibilités inouïes de contrôle comportemental individualisé et de manipulation des groupes _ d’utilisateurs dont est activée une hyper-passivité « réflexe«  Autrement dit, les réseaux numériques, les technologies culturelles qui s’y développent et les pratiques sociales qui s’y inventent sont porteuses _ a priori ! _ de possibilités radicalement alternatives _ et en lutte _ :

_ l’une est ce qui rend possible l’invention de relations économiques et industrielles fondées sur l’investissement _ possiblement enthousiaste _ personnel et collectif ; « l’intelligence partagée » ; et la formation de nouveaux espaces et de nouveaux temps critiques _ un point crucial ! _ soutenus par une politique industrielle des technologies de l’esprit qui doit être avant tout une politique culturelle, associant très largement les artistes, les écrivains, les penseurs et les scientifiques _ acteurs ; et « authentiques » (pas « imposteurs » : ce point-ci étant de mon fait !..) ; dont le « génie«  œuvre effectivement

_ l’autre vise _ a contrario _ à étouffer dans l’œuf _ c’est plus sûr ! ne pas laisser s’établir d’autres réseaux, d’autres flux, des habitudes de pratiques concurrentes ! _ les possibilités inédites que les technologies culturelles ouvrent _ vraiment : en une véritable liberté créatrice ; et pas du tout seulement illusoire… _ à un nouvel âge de la vie de l’esprit _ en ce début de XXIème siècle _, et à augmenter _ au contraire ! _ le pouvoir de contrôle _ oui _ comportemental, d’instrumentalisation _ voilà ! _ des artistes, écrivains, penseurs et scientifiques _ réduits à des objets et images (voire à des marques) _, et d’hyperconsumérisation de la culture _ elle-même : en touts cas de ses ersatz, ou de certaines de ses « retombées » seulement ; coupées des élans vrais, « créateurs« , eux (d’œuvres), mobilisateurs d’attention aigüe et d’enthousiasmes autrement « porteurs«  (et inspirants)… _, en aggravant encore la « bêtise systémique » _ malgré la catastrophe économique à laquelle celle-ci a _ pourtant _ déjà conduit le monde en 2008.

Il ne fait pas de doute que l’Union Européenne _ sous laquelle de ses « espèces » ?.. la Commission ? le Parlement ? les chefs d’État se mettant d’accord lors de « sommets«  ?.. _ n’a pas choisi la première possibilité, même si rien ne prouve qu’elle aura choisi la seconde : l’Union est un organisme complexe _ certes _ que peuvent traverser des conflits _ des tensions, des jeux non joués entièrement tous à l’avance… Mais il est certain que son absence de clarté _ certes ! cf sa porosité aux lobbies _ en ce domaine comme en tant d’autres aura contribué à son échec électoral _ à quoi fait précisément allusion Bernard Stiegler ici ?.. à l’augmentation galopante de l’abstention des électeurs aux « votations«  ?.. Car chacun sait aujourd’hui, délibérément ou intuitivement, dans l’Europe comme dans le monde entier, que faute d’un sursaut de l’intelligence collective _ « solidaire« , forcément : embarquée sur un même et unique bateau : la « nef des fous«  ?.. _, l’avenir du monde entier est compromis à brève échéance _ mais s’en soucie-t-il, ce « chacun«  qui « sait« , pour autant ?… cf le mot fameux (rapporté) de la Pompadour à Louis XV : « après nous, le déluge«  ; le mot aurait été prononcé, en manière de consolation au roi, le soir de la nouvelle de la défaite face à la Prusse, le 5 novembre 1757, à RossbachEt tout le monde _ des acteurs « vrais«  de la culture « authentique«  ?.. _ attend _ pour le reste, relire toujours le portrait du « dernier homme » du « discours du Surhumain » du superbe de lucidité « Prologue » d’« Ainsi parlait Zarathoustra _ un livre pour tous et pour personne » de Nietzsche (la précision est cruciale) : sur la pente savonneuse du nihilisme où s’entraîne l’humanité… _ que l’Europe _ celle de tous les Européens ? _ joue enfin le rôle que sa puissance économique et culturelle _ doublement ? _ lui impose _ en droit ; sinon en fait : ainsi, la démocratie se donne-t-elle, ne serait-ce que sur le plan politique, les dirigeants qu’elle « mérite » ? afin d’encourager le meilleur des œuvres possibles de cette « Europe«  ; de ces « Européens«  ?.. Cf ici le si pertinent « Qu’est-ce que le mérite ? » (aux Éditions Bourin), de mon autre ami lucidissime, lui aussi, Yves Michaud…

Jamais la question de l’alternative _ Hic Rhodus, hic saltus ! _ ouverte par la numérisation n’aura été _ réellement _ posée dans ce dont on nous parle _ voire « abreuve«  _ sous les noms _ flambants _ d’ »industrie de la connaissance« , de « société de savoir« , de « bataille de l’intelligence » et d’ »économie créative«  : autant de discours qui semblent plus vouloir conjurer par des incantations _ hélas : quand les mots se substituent aux choses ; ou l’ère (se poursuivant…) des « conduites magiques« _ la réalité _ carnassière _ du « capitalisme cognitif », également appelé « culturel », qui produit pour le moment exactement le contraire _ certes ! _ de la connaissance, du savoir ou de la création, que mettre un terme au « règne _ bien effectif, lui ; et auto-satisfait : à la Monsieur Homais… _ de la bêtise«  _ mais bien masqué par la panoplie ultra habile de tous les faux-semblants de la démagogie ! combien de victoires électorales a t-elle, celle-ci, la démagogie, ainsi, à mettre à l’actif de son « tableau de chasse » ?.. _, dont ces discours participent eux-mêmes très souvent de la façon la plus directe _ en effet : la propagande de l’idéologie est d’autant plus efficace qu’inaperçue : en douceur et rires allègres de connivence…

Et pas une seule fois la question de cette alternative n’aura été évoquée dans le cadre de  « l’année européenne de l’innovation et de la créativité » voulue en 2009 par le président de la Commission européenne _ brillamment réélu : M. José Manuel Durão-Barroso ; pose-t-il jamais les vraies questions de fond ?.. Que veut dire ici « créativité » ? Il ne fait pas de doute que, rapproché du mot « innovation« , il fait référence aux concepts de creative economy et de creative class, avancés par John Howkins et Richard Florida en 2001 et en 2002 respectivement. Les thèses de Florida et Howkins émergent sur le fond d’une théorie managériale _ voilà _ de la créativité qui est elle-même une version de la théorie _ managériale ? _ de l’innovation. Sa spécificité consiste à poser que la source de l’innovation est la créativité des individus.

Toute la théorie de l’innovation a été pensée dans le cadre consumériste _ d’une économie du taux de profit de la vente (sur un marché). Cependant, tandis qu’elle aboutissait au concept d’ »économie créative« , se développaient _ aussi, à côté _ les nouvelles pratiques qui ne correspondent plus à ce modèle consumériste fondé sur la grégarisation _ voilà ! cf la litanie rigolarde des « nous«  des « derniers hommes«  clignant des yeux d’autosatisfaction, du « Zarathoustra«  de Nietzsche… _ de l’individu _ se pensant même (= se figurant, se croyant, se leurrant : illusoirement !) « original« , en la « singularité » apparente de sa « conscience de lui-même » distincte, certes, de sa « conscience des autres«  : chacun comme une île… _, mais sur la « contribution«  _ à des échanges de réciprocité et mutualité, éventuellement _ qui met en valeur la singularité _ réelle et « vraie« , elle : mais bel et bien « à constituer«  dynamiquement, « découvrir« , « faire émerger«  en des actes, en des œuvres effectivement réalisées ; pas avant ! _ de l’individu _ ou plutôt de la personne _ dans un modèle collaboratif, c’est à dire intrinsèquement social _ avec des exemples désormais connus tel Wikipédia, le monde open source et le modèle des creative commons, ce qui constitue le vrai sujet de ce que l’on appellera non pas l’économie créative, mais la « société contributive« .

L’absence totale de vision et de compréhension de ces enjeux _ au profit de l’abandon à la « main aveugle » du marché, livré seulement à l’alea du jeu de ses forces… _ est l’un des nombreux facteurs d’échec _ actuel _ de l’Union européenne. Celle-ci ne vivra, c’est à dire qu’elle ne saura unir _ voilà _ les pays et les populations qui la composent, que le jour où elle prouvera _ aux Européens citoyens : la chose est encore bien difficile à faire advenir… qui, seulement, la veut ?.. _ qu’elle a une vision d’avenir. Cette « année de l’innovation et de la créativité » aurait dû être consacrée à orienter _ car tel est là le pouvoir du politique _ le processus de numérisation en cours, qui affecte toutes les dimensions de la vie psychique et sociale, vers la mise en œuvre d’une nouvelle politique industrielle, mettant la culture et l’esprit _ actifs _ au cœur de son déploiement, comme « économie de la contribution« , contre le consumérisme, et en premier lieu, contre le consumérisme _ dit, bien improprement : c’est une tromperie considérable ! Cf Michel Deguy… _ « culturel » _ afin d’inventer un nouvel âge industriel fondé sur l’économie d’une valeur plus précieuse que toute autre : l’intelligence, au sens où le XVIIIème siècle la met au fondement de la sociabilité sous toutes ses formes, sensibles aussi bien qu’intellectives _ à l’inverse de la crétinisation, donc…

Il n’en aura rien été _ cette année 2009-ci, du moins… Et c’est pourquoi le monde culturel européen _ en l’espèce des personnes le « constituant«  par leur activité vraiment « œuvrante«  (et pas par les à-côté people !..)… _ ne se sera pas plus _ activement _ mobilisé que les peuples de l’Union dans l’exercice démocratique _ de « votation », lui… _ qui leur était proposé. Il n’est cependant jamais trop tard _ ah ! l’Histoire n’est pas à sens unique… C’est pourquoi nous appelons _ voici… _ les artistes, les écrivains, les penseurs et les scientifiques de toute l’Europe à se mobiliser en se rassemblant à Bruxelles avant la fin de cette année pour que la culture soit _ enfin !

… 

on connaît la « pensée » (apocryphe ! seulement… : il s’agit d’un désormais célèbre hoax !) que Hélène Ahrweiler prêta, au conditionnel de l’idéel, seulement, donc, à Jean Monnet : « si c’était à refaire, je commencerais par la culture… » ; mais l’Histoire ne se refait pas !!! : « Si c’était à refaire, je commencerais par la culture, pourrait s’écrier Jean Monnet s’il revenait parmi nous« , s’était précisément exprimée madame Ahrweiler, en un discours public pour une cérémonie d’ouverture des « États généraux des Etudiants Européens« , dans la décennie 80… : on mesure excellemment là toute la fonction, en toutes ses ambivalences, justement, de l’« idéal«  ;

fonction (et ambivalences) à laquelle (et auxquelles) vient de consacrer une très significative étude François Jullien : « L’Invention de l’idéal et le destin de l’Europe » ; en confrontation avec le « penser«  dynamisant chinois

(cf du même François Jullien le récent aussi « Les Transformations silencieuses«  ; ainsi que « La Propension des choses : pour une histoire de l’efficacité en Chine« )_

pour que la culture soit mise _ réellement ; grâce à des décisions d’engagement économique des Politiques _ au cœur du projet de l’Union européenne de demain, et au service d’une renaissance _ « concept » parfaitement analysé et commenté, à excellent escient, par Heinz Wismann lors de sa propre intervention au Conseil Régional d’Aquitaine, vendredi dernier 23 octobre, au matin _ de la société industrielle _ dont l’Europe des Lumières fut le berceau  historique.

Bernard Stiegler

La splendeur du style cinématographique d’Angela Schanelec _ en ses regards sur Marseille et Berlin (« Nachmittag » + « Marseille » en un très fort DVD !)

22fév

Le style (de cinéma) d’Angela Schanelec me touche _ m’éblouit et m’enchante _ ;

et je me réjouis tout particulièrement d’avoir suivi les conseils d’Antoine Guillot et Arnaud Laporte, lors de leur émission « Tout arrive » du mercredi (consacrée au cinéma), le 7 janvier, recommandant très vivement le (double) DVD des films « Nachmittag » et « Marseille«  _ réunis sous un intitulé « La Nouvelle vague allemande » _ d’Angela Schanelec (aux Éditions « la vie est belle »)… ;

et de l’avoir commandé (constatant que nulle part à Bordeaux il n’était directement disponible)…


Car le style même d’Angela Schanelec va (assez incroyablement ! mais cela, du moins, reste relatif…) au fond des choses

avec une qualité d’attention au réel particulièrement fine, aiguë et formidablement lucide,

jusqu’à un degré de douleur (tourmenteuse : outrepassant la capacité de beaucoup d’y faire face ; et, a fortiori, de pouvoir, cependant, s’en réjouir, aussi…) peut-être proprement germanique…

_ ainsi, en ce vingtième anniversaire de la mort de l’immense Thomas Bernhard (un des deux ou trois génies majeurs du XXème siècle _ Heerlen (Pays-Bas), 9 février 1931 – Gmunden, 12 février 1989 _),

ai-je assisté, vendredi 13 février, à une passionnante conférence au Goethe Institut de Bordeaux, invité (à l’impromptu, alors que nous nous sommes rencontrés au rayon « Littérature » de la librairie Mollat à peine deux heures avant), par la toujours très perspicace Jutta Bechstein, consacrée à Rolf Dieter Brinkmann _ Vechta (entre Münster et Oldenburg), 16 avril 1940 – Londres, 23 avril 1975 _ et à son (formidable !!!) « Rome, regards« , par son éditeur (des Éditions Quidam), Pascal Arnaud, et sa traductrice, Martine Rémon _

qui m’étonne passablement aussi : à un tel degré d’intensité, veux-je dire…

Aussi, vais-je citer et commenter, à ma façon, un article remarquablement perspicace

_ de Mathieu Macheret, sur le site critikat.com

« Guerre lasse« 

Angela Schanelec _ édition DVD « Nachmittag » (2007) et « Marseille » (2005)

DVD _ 16 décembre 2008

« Marseille« , quatrième film d’Angela Schanelec, connut il y a trois ans les honneurs d’une sortie sur les écrans français _ ce qui signifie encore, pour pas mal de films, parisiens. Ce n’est malheureusement pas le cas de l’inédit « Nachmittag« , dernier opus en date de la cinéaste qui, en provenance directe du festival de Berlin 2007, atterrit chez nous sur la case vidéo et sort en catimini _ à l’exception au moins de France-Culture ; et de quelques sites Internet… _ de la soute à bagages…

Son prédécesseur _ « Marseille« , donc _, pas beaucoup mieux loti, n’avait pas résisté (!..) longtemps à la barbarie de la distribution hexagonale _ certes : et de ses finalités de plus en plus uniformément commerciales (et la loi d’airain du marché : le profit, en numéraire, des vendeurs)… Sa finesse rigoureuse, son port altier mais délicat _ comme c’est bien regardé ! _, lui avaient valu, face à la concurrence, un retour en charter aussi fulgurant qu’immérité. « La Vie est belle » _ l’éditeur de ce double DVD _ les a réunis en double programme sur une belle galette sans bonus. Plutôt : où le bonus serait la primeur du dernier film _ « Nachmittag« , de 2007… On s’en réjouit, certes, mais non sans se dire, les yeux embués, que c’est tout de même un peu dommage _ de ne pas disposer d’un peu plus de l’œuvre assez géniale d’Angela Schanelec…

C’est dommage, car rares sont aujourd’hui les films aussi lumineux _ à divers sens : comme c’est juste ! _ que ceux de Schanelec. Rares sont ceux, donc, qui ont autant à gagner d’une projection _ en salle ! _, dont la magie propre dépend autant du faisceau qui frappe l’écran et rejaillit sur son spectateur. Ainsi, « Marseille » et « Nachmittag » peuvent-ils bien être pris pour ce qu’ils sont : des traités pratiques sur la façon dont la lumière tombe sur les choses ou les traverse _ et l’analyse commence à pénétrer les secrets de la force de Schanelec… Sur la façon dont elle frappe les êtres, les éblouit et, ce faisant, les opacifie aux yeux des autres _ et là commence, bien, un certain drame… Cela n’a rien d’arbitraire. Nous sommes au cœur du projet esthétique de Schanelec _ l’analyse met dans le mille ! _ : dresser une barrière de clarté laiteuse _ séparante _ entre ses personnages, un voile diffus où s’engluent _ aussi, dans un présent s’étirant en vain _ leurs volonté et emportements. Un grand bain d’air dont l’épaisseur _ sidérante _ les freine et finit par les fixer _ et plomber, médusés… Un aquarium _ transparent à la lumière de l’extérieur autant que clos sur lui-même _ contre les parois duquel ils buttent _ et se blessent, peut-être mortellement. La faible profondeur de champ _ de la prise de vue, en intérieur, tout particulièrement _, souvent en vigueur, alliée aux partis pris de surexposition, achèvent de plonger l’environnement dans un même flottement _ d’été (berlinois) somptueux _ vague. À cette perception du monde tient une bonne part de la cruauté et de la tendresse _ étroitement mêlées, oxymoriques _ de Schanelec. Grâces lui soient rendues, l’éditeur _ du DVD, « la vie est belle«  _ a dû suer sang et eau pour restituer l’expérience lumineuse _ oui ! quelle beauté ! sur le petit écran de l’ordinateur même !.. _ de ces films tournés en 35 mm.

« Marseille » avait à l’époque _ février 2005 _ été lâché en salles avec pour seule arme le compagnonnage de deux compatriotes : « Voyage Scolaire » de Henner Winckler et « En Route » de Jan Krüger. Ces trois films étaient sensés entériner en France le lancement du terme tout frais _ et très approximatif _ de « Nouvelle Vague Allemande«  (on lui préfère celui, un poil plus précis, d’ »École Berlinoise« ). On peut mesurer aujourd’hui à quel point « Marseille« , en dépit d’une familiarité indiscutable, « prenait déjà la tangente » du mouvement… Si son hypothèse restait identifiable _ réalisme cru, jeunesse mutique et solitaire (avec l’étrangèreté pour les autres, comme pour le spectateur, de Sophie, la photographe), crise du couple allemand et effritement de la cellule familiale, froideur des teintes (tout particulièrement : à Marseille comme à Berlin ; en fonction de leurs lumières alors…) _ elle ne laissait rien augurer de la majesté _ oui ! _ de sa forme, ni de l’étrange alliage de brutalité et de douceur qui fait toute la beauté du film _ ô combien magnifiquement est-ce justement ressenti !


On y suit Sophie, jeune berlinoise venue, dans le cadre d’un échange d’appartement, passer dix jours dans la cité phocéenne du titre _ « Marseille » _ « pour prendre des photos« . Une intrigante première partie, où Sophie est de tous les plans, trace son parcours d’acclimatation _ voilà le concept-clé… Elle commence par acheter des baskets, elle ne s’arrêtera plus de circuler, à pieds ou par les transports en commun. On la voit arpenter _ oui ! _ une ville qu’on dit pittoresque et qui n’a cependant jamais autant ressemblé à n’importe quelle autre ville _ en effet !.. Nulle pacotille de folklore ou d’exotisme ici… Elle prend _ simplement _ des images et des repères. En même temps, elle n’échappe pas à la rudesse _ oui ! _ de ce nouvel air : tout un tas de micro-agressions _ à la limite du perceptible : nous sommes dans « le neutre » d’une sorte de « presque normalité » post-moderne (au moins française, dans le moindre des cas…) _ font saillies (jeunes qui chahutent, pompiers autoritaires, klaxons intempestifs, type grossier). Surtout, la solitude _ de la voyageuse, en permanence, ou quasiment, dans le champ de mire de la caméra (et donc, pour nous, sur l’écran) : Sophie _ enfonce le clou de son étrangèreté : ni là, ni là-bas, en transit _ avec peu de bagages. Elle finit par rencontrer un jeune garagiste _ Pierre _ qui lui prête sa voiture et la présente à des amis. La greffe, d’abord difficile (il la présente d’abord à un pote lourdingue), finit par prendre. Elle fait la fête avec cette nouvelle petite société quand…

Vlan ! On se met à parler allemand. Le temps d’une coupe insaisissable, presque dans notre dos, Schanelec _ au montage, mais d’abord à la caméra _ nous fait passer du Midi à Berlin. Sous les grands airs de sa mise en scène, d’une beauté (tranquille, sereine) assez hautaine _ cadres (toujours) au cordeau, compositions architecturales (des images), plans qui durent (mines de rien _ tel celui du bar, avec Pierre : un des plus intenses du film), dialogues rares et lacunaires (c’est le plus manifeste : mais le personnage de Sophie, la photographe, même si elle parle un très bon français, a, sur Marseille, la position et le regard d’une étrangère) _ celle-ci (Angela Schanelec, aux commandes de son art de cinéaste) enfouit _ oui ! sans le moindre maniérisme _ une structure très élaborée, très fine, toute en lignes brisées _ merci de si bien le montrer, l’analyser ainsi ! _, assemblant un tissu _ oui _ de ruptures douces et franches _ oui !!! _, disséminant une collection _ discrète _ de signes à retardement _ dont il faut, au spectateur, se souvenir, a posteriori : telles de petites mines ; qui sont au moins promises à explosion… _, dont le sens éclate _ pour qui ? pour le personnage de Sophie, dont le visage reste, invariablement, lisse ? pour le spectateur, immergé dans tant de « neutre », lui ?! _ de manière rétroactive _ et seulement ainsi, en effet _ et éclaire d’un nouveau jour _ la conscience du spectateur demeuré attentif _ ce qui précédait. D’où le sentiment _ éprouvé devant l’écran _ de nébulosité assourdie _ cotonneuse : ce n’est pas, ici, le triomphe de la lumière d’un plein été ! l’épisode marseillais (ou première stase) se déroulant au mois de février _, d’ivresse modérée _ pas encore nauséeuse _, où les choses ne sont jamais immédiatement claires

_ mais pour qui est-ce jamais le cas ?

comme pour n’importe quel enfant ;

et Angela Schanelec en place dans ces deux films ; interprétés, d’ailleurs par les siens, enfants (le petit Louis Schanelec interprétant le petit « Anton », et la petite Agnès Schanelec interprétant la petite « Mimmi »), dans la vie ! ; et comme si leurs jeux les préservaient _ pour un moment, peut-être… _ des blessures des autres, adultes… ; et encore il faudrait revoir bien mieux _ = re-regarder à la lumière de cette question _ ces séquences…

découvrant la vie ;

mais aussi pour tout un chacun ayant à « former » _ forcément ! _ sa propre expérience du réel, et toujours le rencontrant, en sa « sur-venue » vers lui, avec le sentiment d’une terrible nouveauté ; et s’y blessant, si peu que ce soit, forcément, aussi…

fin de l’incise sur l’enfance de tout « apprentissage » d' »expérience » de la vie... _

mais conservent _ « les choses« , donc… _ un temps leur ambiguïté.


Chacun des deux films _ « Marseille » comme « Nachmittag » _ étonne _ oui ! _ par cette manière de passer rapidement, comme si de rien n’était _ sans la moindre arrêt (d’image) maniériste : hyper-classique, au contraire ! _, sur les informations capitales _ et il y en a ! tout film forme un drame… _ du récit _ jamais marquées, ni, a fortiori, surlignées _, de ravaler _ le mot est intéressant _ les signes prétendument majeurs _ pour le spectateur qui y réfléchit, se remémore, fait le point, synthétise, veut comprendre (ce qui vient de se dérouler _ du « drame » _ sous ses yeux, sur l’écran, sans coups de projecteur, ni zooms, ni travellings… _ au même rang _ comme c’est le cas, déjà, « dans la vie », pour tout réel auquel tout un chacun a forcément affaire ; est (plus ou moins rudement ou doucement) forcément confronté : il faut (apprendre à) vivre ; et survivre _ que toutes les occurrences _ qui surviennent, pardon du pléonasme : l' »image-mouvement » du film nous offrant/imposant toujours, quelle que soit la durée de celui-ci, la situation de devoir offrir (et subir) un minimum de patience à cette diachronie ! _ du réel _ l’autre option (et unique !) étant de rompre soi-même _ comme le fera à deux reprises, cet « après-midi »-là, Konstantin, le fils, dans « Nachmittag« , le film suivant _ la partie…

Revenue à Berlin, Sophie retrouve tout ce qu’elle avait quitté. Rien n’a changé : elle replonge au centre de la même agonie sentimentale, du même amour emberlificoté et indénouable _ que nous découvrons alors, seulement maintenant, en cette seconde stase (berlinoise), au fil des images qui se succèdent (et sans drame). Celui qui stagne _ encalminé _ entre elle et un couple d’amis, femme _ Hannah _ actrice et homme _ Ivan _ photographe, élevant un petit Anton, alors que leur relation prend l’eau de tous bord. Devant cette somme d’impossibilités agglutinées _ se découvrant d’une séquence (ou stase) à une autre, accollée _, elle ne tarde pas à annoncer _ toujours dans le « neutre », sans mélodrame _ son retour à Marseille.

Elle prend alors le train pour la dernière _ brève _ partie _ ou dernière stase _ du film. À peine de retour là-bas, elle subit une agression terminale, sublime _ hors-images, hors écran _ : un échange de vêtements _ et dépouillement de tout, sous menace d’arme à feu : Sophie énonçant en son témoignage que sa priorité, de toute urgence, fut (ou était) de conserver sa vie… _ que nous ne verrons pas, mais dont le récit sera rapporté _ lors d’un interrogatoire purement réglementaire (de procès-verbal) _ au poste de police (le plus proche _ de ce coin de rue d’avec la Canebière où se produisit l’agression _) _ suit une ultime séquence, sur le rivage de la mer, à la plage, le soir, avec une Sophie, en jaune, étonnamment légère, et comme soulagée…

On en arrive _ alors _ au clou du disque _ DVD _ versatile, le tout frais « Nachmittag« , adapté de « La Mouette » de Tchékhov.

Le film s’ouvre sur ce qu’on devine être les répétitions d’une pièce de théâtre. Ce premier plan s’inscrit dans les quelques instants qui précèdent le début du jeu _ proprement dit ; et les dialogues _ : allées et venues des quelques personnes présentes _ gens de théâtre au travail (de répétition d’un spectacle) _, scène _ quasi _ nue, gradins _ quasi _ vides. Une actrice quitte la salle et rejoint la scène. Elle se prépare, elle va jouer…

on passe à autre chose : le film _ l’intrigue principale, après une séquence d’ouverture _ commence.

On tient peut-être _ sans la moindre insistance ; et comme par inadvertance _ dans ce plan introductif, dont l’agencement lacunaire _ toute vie l’est, déjà ! _ va s’éclaircir par la suite, la raison du style de Schanelec _ oui ! _ : tout s’agence _ parfaitement ! c’est le travail de construction des séquences ; puis du montage _ comme si chaque plan était pris _ =  extrait, par focalisation _ du fond du décor. Les bords du cadre _ avec ce qu’ils expulsent, forcément, « hors-cadre » !.. _ concentrent une bonne part de sa cruauté _ oui ! _ : ils piègent ou expulsent, ils tranchent, ils suppriment, mais jamais ne se font _ avec tendresse d’un centre ou d’un foyer de chaleur, protecteur, attractif _ accueil ou refuge. Ils sont comme ces coulisses visibles sur certains plateaux, au-delà desquelles les personnages n’existent plus _ en effet _ sans pour autant cesser d’apparaître.

Irène _ qu’interprète Angela Schanelec elle-même, de l’autre côté de la caméra, ici _ est actrice _ comédienne au théâtre. Un après-midi d’été _ somptueux, comme Berlin en connaît ! _, elle se rend chez son frère _ plus âgé _ Alex, en mauvaise forme _ plus que maussade, ou asthénique : on ne saurait davantage se montrer quasi uniformément bougon et aigri… _, où vit son jeune fils Konstantin, auteur de théâtre _ il écrit… _ veillant _ non sans une dose importante de patience _ sur son oncle. La grande _ belle et lumineuse _ demeure entourée de verdure _ luxuriante ! quel Berlin éclatant de beauté ! en cette saison d’été _ et bordée d’un lac _ où l’on se baigne ; et peut paresser au soleil, sur un radeau de bois : quelles belles images de l’eau ! _ accueille également les filles des voisins : Agnès, 19 ans, ancienne petite amie de Konstantin et sa petite sœur Mimmi qui partage son temps entre baignades et parties de cartes. Cette petite troupe n’a plus _ passé-composé à relever… _ grand-chose d’une communauté : l’habitude de se retrouver _ qu’on devine (en effet !) _ a cédé _ insensiblement _ le pas à la fatigue, l’ennui et le désintérêt. Irène profite de ces retrouvailles _ d’une après-midi, de passage, en quasi « coup-de-vent »… _ pour présenter son nouvel amant, Max _ c’est un écrivain « à succès », semble-t-il… _, à ses proches. Des échanges se configurent _ avec souplesse et intermittences _ entre les différents protagonistes, au cours desquels chacun prend acte _ sans vraiment rien dire, ni même rien manifester ouvertement : cela se perçoit seulement au jeu (et au rythme) des regards et des absences de patience (et de désir) _ de sa solitude et de sa propre indisponibilité _ c’est bien de cela qu’il s’agit _ aux autres. Bien qu’il perce parfois _ sans éclat _ ces nappes _ mot très juste _ d’attente, de repos _ d’agonie ? _ et d’amer _ oui ; dénué de suavité _ farniente, le passé émerge sourdement _ oui _ comme la survivance d’un rituel qui n’a plus lieu d’être, dans la mesure où il s’est vidé de tout désir _ = acédique, en cette « vacance » (plombée)… _ de la part de ceux qui l’accomplissent _ mécaniquement, sans âme _ encore _ mais pour combien de temps ?..

D’où ce sentiment que ces dernières retrouvailles _ familiales : avec (ou pour) Irène _ sont celles de trop, la fois où chacun comprend qu’il ne pourra plus _ qu’est-ce donc qui permet de l’affirmer ? de l’augurer ?.. _ délivrer _ mot un peu étrange _ envers les autres, jusque dans ses propres mots d’amour, que des paroles _ ou des mutités _ de haine.


Chez Tchekhov
_ dans « La Mouette« ; ou dans « La Cerisaie«  _, ce sentiment qu’un rituel était peut-être accompli pour la dernière fois s’accompagnait, pour la communauté en cause, de la douloureuse conscience de son inutilité. Fidèle en ce point à l’auteur, Schanelec situe son action au moment exact où le rituel, vidé de son sens, est devenu simulacre. Plus personne n’y croit, mais tout le monde s’y accroche _ vraiment ? _ lâchement, sans énergie. D’ailleurs, la seule qui semble y croire encore un peu, ou surestimer son importance _ Irène, qui garde un soupçon d’amour dans le cœur _ s’en prendra plein la gueule. Croyant à raison surprendre une _ première _ tentative de suicide, elle se coupe en retirant des mains de son fils _ sorte d’ange blond éthéré, distant au monde : c’est sur lui que le regard (de sa mère ?) se porte le plus… _ la lame qu’il pointait contre lui-même. Elle se fait traiter de « charogne » par son frère, avant qu’il n’avoue se désintéresser d’elle peu à peu. Et il faut voir à table comment les hommes lui parlent ! Elle concentre à son endroit toute l’hostilité de sa famille (deux hommes sans femme, soudés contre elle, la mère). C’est pourtant à elle que revient le dernier regard _ le dernier mot ? _ du film, posé sur un lac qui lui répond par la belle constance de sa sérénité et de son mutisme _ et son fils qui vient d’avaler des barbituriques, s’endormant sur le radeau de bois (du milieu du lac) qu’à la nage il est venu rejoindre…

Quand, au début du film, Konstantin demande à son oncle Alex : « À quoi crois-tu ?« , celui-ci lui répond : « À des moments isolés et souvent inattendus » _ des rencontres inespérées ; non programmées ; et improgrammables : où surgit, et est accueillie (et pas repoussée) la vérité… Une belle figure de ponctuation suspendue _ oui ! et c’est tout un art : d’hémioles, dirait-on dans l’interprétation (et les gestes : musicaux) de la musique dite « baroque » ; les hémioles ne sont pas écrites (notées) sur la partition ; il faut, au musicien-interprète, les deviner : au souffle, en écoutant et regardant les autres : les partenaires _ qui ressemble à s’y méprendre au cinéma d’Angela Schanelec : c’est excellemment observé !

Mathieu Macheret : « Guerre lasse » _ sur critikat.com

Voilà en quoi l’esthétique non-esthétisante d’Angela Schanelec

me touche

beaucoup…

Sur ce concept d’esthétique/æsthesis,

relire,

outre la magistrale et indispensable « Critique de la faculté de juger«  de Kant,

le fondateur de la discipline : Baumgarten (1714-1762) : une traduction en français de son « Esthétique«  (« Æsthetica« ) est parue il y a quelque temps en français, aux Éditions de l’Herne, en 1988 …

Il faudrait la comparer, cette esthétique/æsthesis d’Angela Schanelec,

à celle de Michelangelo Antonioni, quant à la complexité des approches et des contacts, entre les personnes _ silences et plans-séquences longs (et intenses ; mais sans lourdeur, jamais) compris… Même si, ici, il ne s’agit pas de brouillard, mais de son contraire : des halos éblouissants, auxquels viennent buter, sans à-coups (ni hystérie), des regards (et des corps, à leur suite)…


Ainsi qu’à celle d’Ingmar Bergman, bien sûr, aussi : si forte à l’image ; si tragiquement désespérante, elle _ et jusqu’à des suicides, aussi (comme dans « Nachmittag« )… Une des clés de l’œuvre entier de Bergman _ Uppsala, 14 juillet 1918 – Fårö, 30 juillet 2007 _ (« Les Fraises sauvages« , « Le silence« , « Une passion« …), me semblant résider dans le « récit d’enfance » de « Fanny et Alexandre«  (en 1982)… Il y a, probablement (= existent), certains tropismes des lumières du Nord (cf « Elle n’a dansé qu’un seul été« , du même Ingmar Bergman ; et les livres du grand Stig Dagerman : « L’enfant brûlé » et « Notre besoin  de consolation est impossible à rassasier« , pour commencer…)…

Par rapport aux brouillards de la plaine du Pô et de Ferrare (cf le sublime _ et bêtement méconnu, sinon snobé _ « Par-delà les nuages » : l’œuvre testamentaire d’Antonioni _ Ferrare, 29 septembre 1912 – Rome, 30 juillet 2007 _, en 1995 ; avec l’aide, très marginale _ pour « rassurer » les producteurs, inquiets des suites de son ictus, en décembre 1985 _ de Wim Wenders) _ ; aux brouillards de Milan (cf « La Notte« ) ; et même ceux de Rome et du Latium (cf « Identification d’une femme » ; et, en amont, « L’Eclipse« ) ; ou ceux des îles Lipari (cf « L’Avventura«  : films tous bouleversants : si merveilleusement prodigieux de justesse !)…

Ces « pistes _ d’un art (épuré, sobre) d’attention à la vérité _ Antonioni et Bergman »

devraient, bien sûr, être creusées beaucoup plus loin et profond…

En se plaçant du côté de la réception, par le spectateur,

maintenant :

rien, nulle part, n’est forcément seulement (et à jamais) « détail » inessentiel ;

notre attention (de découvreur, au « spectacle ») est toujours intensément requise ;

ainsi que le filtre (activé : au vif !) d’une critique (de notre part _ et le terme, « krisis« , signifie bien, en effet « tamis », « opération de filtrage ») assez réfléchie,

assez souple et assez fine (à assez petits grains : afin de recueillir effectivement, sans les laisser passer, filer à jamais _ mais essayer de les saisir et retenir, si peu que ce soit, du regard, lui-même si mobile _, les toutes petites pépites : d’or,

au milieu des boues et des poussières de tout le reste, qui passe : le tout-venant de ce qui occupe, et combien massivement _ jusqu’à l’obstruction et l’occlusion _, nos saisons, à la longueur _ qui peut être ennuyeusement proche du vide _ de nos journées…),

pour être assez perspicace, cette attention

à ce qui nous est alors « montré », par l’artiste, en son œuvrer…

Et, à ce regard-là,

le cadrage, et le montage,

avec leurs focalisations, leurs ellipses, leurs rythmes, à chaque fois singuliers,

de ces artistes-là,

nous aident ;

et formidablement : merci à leur génie, vif, puissant, vigoureux, dés-endormissant ; et dés-anesthésiant ! ;


tout en sollicitant aussi, forcément, un minimum d’attention, et plus, et mieux, d’investissement (participatif :

de cette attention fragile de notre regard et de notre écoute, toujours frêles

(en cours _ = voie _ perpétuelle, en quelque sorte, de « formation », … ; pas trop fossilisés, peut-être, encore : entre la folie douce la plus probable de l’enkystement et le cabrage _ à-côté-de-la-plaque _ de la tétanisation ruant-dans-les-brancards…),

mobilisés, pour lors _ regard comme écoute _, envers ce « réel » montré, en effet, en son œuvrer, par l’artiste :

on « en » manque tant ! dans le fil des jours, ordinaire, de cette perception un peu plus aiguë et fine d’un « réel » décisif, ô combien, pourtant ;

tant nous passons si souvent,

anesthésiés et abrutis que nous sommes, et quasi en permanence,

à côté de tout !.. ;

et c’est là qu’il faudrait une véritable éducation æsthétique : artistique, au lycée !!!

à la place des crétinisations par bombardement médiatique généralisé

des industries à rouleaux-compresseurs d’entertainment !!!

formatant avec tant d’efficacité si grossièrement, et en tous les sens du mot, les imaginaires) ;

tant nous passons si souvent

à côté de tout !.., donc _ je reprends et poursuis _

en notre « partie », si mal interprétée (par nous-même), de « spectateur », aussi ;

partie, pourtant, et ô combien !, nécessaire et indispensable :

car c’est là une condition sine qua non,

non seulement du spectacle (devant des œuvres _ qui soient « d’art », vraiment ; sans imposture, veux-je dire…),

mais aussi, et d’abord, et fondamentalement, de nos rapports aux autres, « dans la vie » même, elle-même, et d’abord ! ;

chacun, veux-je dire, en notre vie (unique ! comme un chemin-de-fer « à voie unique » ! et sans billet de retour, probablement, semble-t-il…) ;

alors, d’un amour !!

Il y a toujours là une terrrible urgence :

de ne pas passer aussi bêtement à côté…

Ce qui est le cas largement dominant, pourtant…

Tout cela _ en ce final d’article _,

en prolongement, en quelque sorte, des remarques sur la « connaissance » _ d’abord ; et essentiellement _ « poétique » des villes

de mon article du 16 février, à propos du « Mégapolis » de Régine Robin :

« Aimer les villes-monstres (New-York, Los Angeles, Tokyo, Buenos Aires, Londres); ou vers la fin de la flânerie, selon Régine Robin«  ;

et pour conjurer l’inquiétude soulevée par l’ami Bruce Bégout de « voir beaucoup trop de beaucoup, sans savoir qu’en faire, sans rien assimiler« , in Dans la gueule du Léviathan. Mon expérience de Las Vegas, inFantasmopolis. La ville contemporaine et ses imaginaires, aux Presses universitaires de Rennes, en 2005, page 31…


Regarder est bien aussi,

et fondamentalement,

un « acte esthétique« ,

nous apprennent, décidément (!),

et Baldine Saint-Girons, en son « Acte esthétique » ;

et Marie-José Mondzain, en son « Homo spectator« 


Ne craignons pas de nous y livrer

en (et avec) douceur

(= sans crispation) :

ainsi qu’Angela Schanelec

_ après Antonioni et Bergman _

avec une merveilleuse finesse :

celle de ses lumières ! de ses cadrages ; de ses ellipses, aussi ;

de son art cinématographique du « récit », toujours pris, par nous, « en cours » ;

et dont manquent (et manqueront toujours : à jamais !) bien des chapitres antérieurs

_ comme dans l’art de Faulkner (« Le bruit et la fureur«  ; « Absalon ! Absalon !« ) ; ou dans celui d’Antonio Lobo Antunes (« Traité des passions de l’âme«  ; etc… : il faut tout lire de lui, aussi !!!) ;

et comme dans toute vie !

(ainsi que son « art » : à apprendre, et d’urgence !)

ainsi qu’Angela Schanelec, donc,

en magnifique artiste de son cinéma,

nous y aide…


Titus Curiosus, ce 22 février 2009

Chercher sur mollat

parmi plus de 300 000 titres.

Actualité
Podcasts
Rendez-vous
Coup de cœur