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Denis Diderot (1713 – 1784), entre Marivaux (1688 – 1763) et Laclos (1740 – 1803) ou Sade (1740 – 1814) : la verve grave de l’inspiration (« Jacques le fataliste ») du magnifiquement justissime « Mademoiselle de Joncquières » (2018) du grand Emmanuel Mouret

01jan

Les visions successives du DVD du film « Mademoiselle de Jonquières » (de 2018) d’Emmanuel Mouret

m’ont plus que ravi : enchanté !

Par rapport à la pétulante veine disons marivaldienne de la plupart des précédents films d’Emmanuel Mouret,

celui-ci,

librement inspiré du récit concernant Madame de la Pommeraye, un des récits annexes présents au sein du virtuose « Jacques le fataliste et son maître » _ publié en son intégralité, en traduction allemande, en 1792 ; et en l’original français, en 1796 _ de Denis Diderot (Langres, 5 octobre 1713 – Paris, 31 juillet 1784),

présente une veine tout aussi jubilatoirement alerte mais un soupçon plus grave _ on pourrait même ajouter philosophique, mais à mille lieues du moindre didactisme sentencieux ! ; car nous sommes bien là dans la verve étincelante des éblouissantes « Lettres à Sophie Volland » du cher Denis Diderot : le plus fin, juste et subtil de tous les philosophes français des Lumières… _ ;

une veine qui n’est ni celle du génie de notre très cher Marivaux (Paris, 4 février 1688 – Paris, 12 février 1763),

ni celle du superbe et très marquant Choderlos de Laclos (Amiens, 18 octobre 1740 – Tarente, 18 septembre 1803) _ dont « Les Liaisons dangereuses«  paraissent à Paris le 23 avril 1782, un peu plus de 2 ans avant le décès de Diderot, le 31 juillet 1784 _,

ni, non plus celle de Donatien-Alphonse-François de Sade (Paris 2 juin 1740 – Charenton, 2 décembre 1814)… 

En ce siècle des Lumières français,

Denis Diderot (1713 – 1784) est donc exactement de la génération intermédiaire entre celle de Marivaux (1688 – 1763), et celle de Laclos (1740 – 1803) et Sade (1740 – 1814)…

À un moment-clé, donc, de ces Lumières françaises, qui vont mener, aussi, au sanglant épisode de l’effarant impérialisme _ bien moins fin, bien moins subtil, et surtout bien moins juste _ de la vertu sous la Terreur robespierriste…

« Modération, modération« , prononce le passionné mais sage, au final, marquis des Arcis _ comme une esquisse d’auto-portrait de Diderot lui-même… _

dans ce fin, subtil, juste, et très réjouissant film « Mademoiselle de Jonquières » du brillantissime, toujours, Emmanuel Mouret, plus que jamais expert ici en ce très fin et délicat rendu cinématographique _ un subtilissime art du vibrant ballet des infra-postures, des micro-traits des visages, des paroles, qu’elles soient effectivement prononcées ou bien tues et masquées, gardées pour soi ; et surtout de l’éloquence des silences saisis, oui, en l’éclair d’à peine un quart de seconde, à l’image du film : ainsi de la brévissime déglutition finale de Madame de La Pommeray souriant (mais jaune…) à l’ultime image du film, contredisant ce que celle-ci vient juste, mensongèrement, à soi-même ; mais s’en abuse-t-elle ? probablement même pas…, d’énoncer à sa confidente, témoin et amie (mais pas complice)…_ du bien difficile et périlleux, sans blesser, « art d’aimer« …

Voir ici les 2′ de la bande-annonce du film,

même si celle-ci, loin de mettre le focus sur ce qui est l’essentiel tant pour Denis Diderot que pour Emmanuel Mouret, égare un peu le cinéphile _ comme le philosophe…

Bravo !

et infiniment merci à Emmanuel Mouret pour ce merveilleux travail d’adaptation cinématographique du subtil chef d’œuvre de Diderot !!

Ce dimanche 1er janvier 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le sublime – sublimissime CD Reynaldo Hahn de Pavel Kolesnikov, une fois encore justement reconnu et admiré comme tel…

15nov

« Sublime« ,

avais-je immédiatement dit pour ce CD « Reynaldo Hahn Poèmes & Valses » de Pavel Kolesnikov paru au mois de juin dernier au label Hyperion _ le CD Hyperion CDA68383 _ en mon article «  » du 2 juiller 2022 ;

et « sublimissime« ,

avais-je aussi dit en mon article «  » du 11 août suivant, en renfort à la chronique, intitulée « Heavenly Hahn from Pavel Kolesnikov« , de ce CD par Jed Distler sur le site de ResMusica…

Or voici que ce jour, ce mardi 15 novembre 2022,

c’est au tour de Jean-Charles Hoffelé, sur son site Discophilia, de prononcer lui aussi ce même adjectif, si parfaitement approprié, de « sublime » pour ce CD…

« Sublime« , cette musique même de Reynaldo Hahn ;

et « sublime » aussi cette interprétation justissime _ quel art parfait !!! _ de Pavel Kolesnikov, en temps méditatif _ idéalement approprié ! pour sa qualité de silence sertissant si magnifiquement cette idéale musique… _ de pandémie de Covid…

Le voici donc, ce nouvel article, joliment intitulé, lui, « Presque rien » :

PRESQUE RIEN

L’entrée du disque, Frontispice, est un murmure, un presque rien de son _ voilà. Les feuillets qui suivront seront joués dans la même discrétion _ oui _, le même son comme éteint. Ces musiques, Pavel Kolesnikov, les a intériorisées au point d’en faire ses fantômes, avec lesquels au long de l’album il dialogue en mots nostalgiques, parfois un peu tourmentés, souvent au bord de l’effacement, comme si les notes de Reynaldo Hahn succédaient à celle de Des pas sur la neige.

Et puis, quand même, Chérubin tragique ramène le grand jeu un peu ironique si cher à l’auteur de La Carmélite. Les Valses, qui font intermède, sont délicieuses _ oui _, et Ninette capricieuse à souhait a des petits airs latino.

La seconde sélection du Rossignol éperdu, commencée par l’impondérable Eros caché dans les bois, emmène loin dans les mystères _ voilà… _ de ce cycle inépuisable, où Pavel Kolesnikov enlève chaque marteau de son piano, faisant son clavier ondiste, lui donnant des visions d’opiomane. Sublime _ nous y voici donc !.. _ , et évidemment après cela, on veut ses Debussy !

Le texte de Camille de Rijck est un régal.

……

LE DISQUE DU JOUR

Reynaldo Hahn (1874-1947)


Le rossignol éperdu (extraits : Nos. 1, 2, 20, 8, 7, 21, 29, 16, 50, 9, 41, 32, 53, 19, 5, 52, 38, 489 & 22)
Premières valses (extraits : Nos. 1, 3, 4, 6, 9 et 10)

Pavel Kolesnikov, piano

Un album du label Hypérion CDA68383

Photo à la une : le pianiste Pavel Kolesnikov – Photo : © Colin Way

Et vient d’être annoncée la parution pour après-demain jeudi 17 novembre, chez Gallimard, du « Journal 1890-1945 » de Reynaldo Hahn…

Ce mardi 15 novembre 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un premier listing de mes articles sur (et podcasts de mes entretiens avec) le philosophe et ami bruxellois Pascal Chabot : pour préparer notre entretien à venir, à la Station Ausone à Bordeaux, le mardi 22 novembre 2022, à propos de l’ensemble de son parcours philosophique pour penser le réel…

25août

Afin de réaliser un point un peu substantiel sur le parcours philosophique de Pascal Chabot,

et préparer ainsi l’entretien que j’aurai avec lui à la Station Ausone le mardi 22 novembre prochain, dans le cadre de la saison 2022-2023 des conférences de notre Société de Philosophie de Bordeaux,

et en même temps que je procède à une lecture-relecture suivie de l’ensemble de son œuvre philosophique,

en commençant par son « L’Âge des transitions » de 2015 _ je viens de le relire aujourd’hui _,

je commence par passer en revue les articles de mon blog que je lui ai consacrés jusqu’ici :

0) _ d’abord, le passage très admiratif concernant le magistral « Global burn-out » de Pascal Chabot _ paru le 4 mars 2013 : un ouvrage tout à fait incisif qui m’a considérablement marqué et enthousiasmé par l’acuité et finesse de sa formidable lucidité vis-à-vis du réel qui est le nôtre ! _,

dans l’article du 25 avril 2013 « « …

0 bis) _ mais aussi cette première rencontre, chaleureuse et très positive _ nous avions immédiatement sympathisé et échangé nos coordonnées _, le 28 mai 2016, à Saint-Émilion, avec Pascal Chabot, lors de l’édition 2016 du Festival Philosophia de Saint-Émilion, dont le thème était cette année-là « la culture« ,

après avoir assisté à sa conférence, passionnante, intitulée « La Pédagogie intéresse-t-elle les philosophes ?« …

1) _ ensuite, la présentation de sa conférence « Le Système, les Ultra-Forces et le Soi » du dimanche 25 mai 2018 à Saint-Émilion dans la salle des Dominicains _ qui exposait en les explicitant les conclusions principales de son lumineux travail de 2017 « Exister, résister _ ce qui dépend de nous«  _,

au sein de l’article du 27 mai 2018 consacré à une présentation du programme de l’édition 2018 du Festival Philosophia de Saint-Émilion, sur le sujet de « La Vérité« , in l’article « « …

Et ce fut là notre seconde rencontre, toujours à Saint-Émilion, et à nouveau à l’occasion du Festival Philosophia.

2) _ une présentation rapide de « L’Homme qui voulait acheter le langage« , drame philosophique de Pascal Chabot, paru en 2018,

dans l’article du 15 septembre 2018 « « …

3) _ le podcast de mon entretien avec Pascal Chabot (de 49′) le 20 septembre 2018 au Studio Ausone à propos de son « L’Homme qui voulait acheter le langage _ drame philosophique« .

Et ce fut bien évidemment là, à la Station Ausone de la librairie Mollat à Bordeaux, bien davantage qu’une troisième rencontre, mais un entretien très détaillé…

4) _ l’article du 21 septembre 2018 « « …

5) _ la mention de ce podcast du 20 septembre 2018, que je viens de citer,

au sein de l’article du 6 avril 2022 « « ,

comportant un commode listing récapitulatif de l’ensemble de mes entretiens qui ont été vidéo et podcastés…

6) _ l’annonce de la conférence-entretien de Pascal Chabot (avec Martin Legros) intitulée « Petite métaphysique de la Terre »  _ et regarder ici la vidéo de cet entretien de 64′ _ le samedi 28 mai 2022 à la salle des Dominicains à Saint-Émilion, au cours de l’édition 2022 du Festival Philosophia de Saint-Émilion, et pour une quatrième rencontre, à nouveau à Saint-Émilion, et toujours pour Philosophia,

in l’article du 23 mai 2022 « « …

7) _ l’article du 25 mai 2022 « « , à propos de son excellentissime « Avoir le temps _ essai de chronosophie« … 

8) _ un premier très rapide schéma de regard panoramique sur le parcours de penser de Pascal Chabot,

in l’article _ immédiatement en suivant _ du 26 mai 2022 « « …

9) _ une lecture de l’important et très éclairant « Traité les libres qualités » de Pascal Chabot,

en mon article du 27 mai 2022 « « …

10) _ l’article immédiatement rétrospectif _ et enchanté ! _ de mes deux rencontres ce samedi 28 mai 2022 au Festival Philosophia 2022 à Saint-Émilion, avec mes amis Pascal Chabot et Karol Beffa,

en mon article de ce même 28 mai 2022 « « …

Notre entretien à venir à la Station Ausone le 22 novembre prochain, dans le cadre de la saison 2022-2023 de notre Société de Philosophie de Bordeaux _ dont je suis vice-président _constituera ainsi notre cinquième rencontre philosophiqueet notre second entretien, vidéocasté cette fois…

À suivre…

Ce jeudi 25 août 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

le soir de la naissance, à 18 h, à la clinique franco-britannique de Levallois-Perret, de notre petit-fils Noé,

fils de notre fille Agathe Lippa et son compagnon Pascal De Sa, et petit frère de Gaïa…

Ré-écouter en continu le puissamment charmeur et envoûtant « El Dorado » de John Adams (de 1991), dans l’enregistrement de Kent Nagano (en 1993, pour Nonesuch), en suivant aussi les analyses qu’en donne, avec admiration et lucidité tranquille, Karol Beffa en son passionnant et très riche « L’Autre XXe siècle musical » : pour contribuer à cerner l’idiosyncrasie de sa puissante imageance à travers les inventives hybridations de ses compositions…

10juil

Ce dimanche matin, et comme pour saluer le très beau temps et la chaleur californienne promise et à venir,

je mets sur ma platine le magique et troublant « El Dorado » de John Adams , en 1991,

tel qu’interprété par le Hallé Orchestra sous la direction de Kent Nagano, en un superbe enregistrement en juillet 1993, à Manchester _ soit le CD 14 du superbe merveilleux coffret de 40 CDs de l’Intégrale Nonesuch 075597932294 de nouveau disponible ! Quel trésor ! _,

en suivant aussi les pages d’analyse que lui consacre Karol Beffa, aux pages 181 à 200, de son indispensable « L’Autre XXe siècle musical »

_ cf aussi la vidéo de mon très détaillé entretien avec Karol Beffa, sur ce livre, à la Station Ausone (de la librairie Mollat) à Bordeaux, le vendredi 25 mars dernier, accessible aussi en mon article du 7 avril suivant : « « 

Outre son talent, d’abord, bien sûr, de compositeur, mais aussi, ensuite, d’interprète (au piano, ou à la direction d’orchestre), ainsi, encore, que d’enflammé improvisateur au piano,

Karol Beffa est un magnifiquement compétent écouteur-mélomane ainsi qu’analyseur merveilleusement fin de musique,

et un très efficace partageur _ communiquant et pédagogue _ de tout cela !

Que de talents réunis _ et si efficacement inter-connectés _ en ce très remarquablement sur-doué de la musique !!!

Ce n’est donc peut-être pas tout à fait un hasard, si, pour Marcel Bluwal et la télévision, en 1982, le petit Karol Beffa, âgé alors de 8 ans, a interprété le rôle de l’enfant Mozart _ écouter ici son témoignage rétrospectif là-dessus le 13 novembre 2020 sur France-Musique…

Bien sûr, jouir de la musique de l' »El Dorado » de Johns Adams, ne passe pas nécessairement, et loin de là (!), par la lecture de l’analyse que sait si finement en donner Karol Beffa.

Et il est même très fortement déconseillé de commencer par là !

La jouissance de la musique est d’abord une délectation de la sensibilité la plus ouverte et accueillante à l’inouï, et impromptue qui soit…

L’analyse compétente et sereine _ dénuée de pathos _ n’est en quelque sorte qu’un luxe supplémentaire pour une écoute peut-être un peu plus affinée _ mais ce n’est même pas sûr : à chacun de savoir aussi la transcender en son écoute la plus sensible et ouverte possible de la musique rencontrée… _, tel celui d’une belle cerise sur un surtout très délicieux gâteau…

Voilà :

découvrir et arpenter tout l’œuvre enregistré sur disques, ici pour Nonesuch, de John Adams, à défaut de l’écouter live au concert, est une chance à saisir désormais bien plus accessible.

Et, oui, John Adams est bien un compositeur admirable de cet « autre XXe siècle musical » un moment discrédité,

qui se situe, en sa création éminemment singulière, et nécessairement hybride aussi, tout à fait dans la lignée des grâces somptueuses d’un  Debussy et d’un Ravel, notamment _ en ce chapitre « El Dorado » de son livre, c’est à trois reprises, pour Debussy, et quatre reprises, pour Ravel, que Karol Beffa évoque ces noms pour les relier au plus intime de l’œuvre si puissamment charmeur et envoûtant, en son idiosyncrasie propre, de John Adams…

Cet article-ci de ce dimanche matin

prolonge celui du mercredi 30 mars dernier « « , qui permettait d’accéder aux podcasts des écoutes de la partie I (« The Machine in the Garden« , 12′ 40), et la partie II (« Soledades« , 16′ 09), de l’ « El Dorado » de John Adams en ce même enregistrement pour Nonesuch, sous la direction de Kent Nagano, à Manchester, en juillet 1993

Ce dimanche 10 juillet 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

D’admirables éblouissantes interprétations des Concertos pour piano de Saint-Saëns par Alexandre Kantorow au clavier et et son père Jean-Jacques à la direction de l’orchestre du Tapiola Sinfonietta : deux CDs absolument jubilatoires !

21juin

Le centième anniversaire, le 16 décembre 2021, du décès de Camille Saint-Saëns

(Paris, 9 octobre 1835 – Alger, 16 décembre 1921)

est magistralement (!!!) célébré au disque

par deux superlatifs SACDs BIS _ à grimper au rideau de pur plaisir ! _ d’Alexandre Kantorow, au piano, et son père Jean-Jacques Kantorow dirigeant le Tapiola Sinfonietta,

les CDs BIS 2300 et 2400, parus respectivement en 2019 et 2022,

qu’a superbement chroniqués, sur son site Discophilia, Jean-Charles Hoffelé,

en deux articles successivement intitulés « Bravoure » (en date du 21 mai 2019) et « Grand Piano » (en date du 14 juin 2022).

BRAVOURE

Et si le coup de génie pour réussir les Concertos de Saint-Saëns était l’entente intime et donc absolue entre le piano et l’orchestre ? À ce titre là, aucun pianiste n’aura eu cette chance, sinon peut-être Magda Tagliaferro pour son Egyptien _ le n°5 _ avec Jean Fournet.

Il aura fallu qu’un fils et un père s’y attellent. Evidemment, ce disque insensé doit être le premier volume d’une intégrale de tout ce que Saint-Saëns aura écrit pour son piano – il était un virtuose, cela s’entend : oui, oui… – et son orchestre. Car l’écoute délicate et fusante entre Alexandre et Jean-Jacques Kantorow expose enfin le génie de ces œuvres qui ne sont pas du tout des concertos classiques, se jouent des genres, revendiquent le droit à une fantaisie absolue _ voilà : Saint-Saëns ne manquait certes pas d’esprit !

Ce n’est pas peu écrire qu’ils sauvent l’opus le plus délicat de la série, ce Troisième _ composé en 1868 _, généralement le pont aux ânes des intégrales, ici en dessin clair _ oui _ et malgré ses ombres il rayonne _ mais oui… Le Quatrième _ composé en 1875 _ par le naturel absolu _ voilà ! _ de leur interprétation, rejoint Casadesus, les mêmes lignes lumineuses, mais l’ampleur des timbres en plus.

Et l’Egyptien ? Concerto redoutable _ composé en 1896 _, un peu Douanier-Rousseau, mais chéri des fortes personnalités : Tagliaferro l’aimait autant que Sviatoslav Richter, tous les deux y voyaient des Espagnes et un exotisme où le piano inventait d’autres sonorités tout au long de l’Andante qui n’est pas qu’un voyage en felouque : Saint-Saëns y produit une divagation poétique inouïe _ oui _ dont Alexandre Kantorow saisit les alliages subtils avec des caresses de grand fauve. Lorsque le motif de la musique nocturne sur le Nil résonne, il évoque dans le battement des accords qui stridulent le haut du clavier une dimension onirique que personne n’avait poussé aussi avant, avec une telle précision, ni Magda ni Sviatoslav.

La finesse _ oui _ des couleurs et des dessins que lui offrent son père et ses musiciens finnois sont de la pure poésie _ voilà. Le Finale peut venir, Alexandre fait fuser tranquillement son clavier, envole tendrement son piano avec des agilités de chérubin, petit génie dont ce n’est que le troisième opus ! J’admire !

LE DISQUE DU JOUR

Camille Saint-Saëns
(1835-1921)


Concerto pour piano et orchestre No. 3 en mi bémol majeur, Op. 29
Concerto pour piano et orchestre No. 4 en ut mineur, Op. 44
Concerto pour piano No. 5 en fa majeur, Op. 103 “L’Égyptien”

Alexandre Kantorow, piano
Tapiola Sinfonietta
Jean-Jacques Kantorow, direction

Un album du label BIS 2300

Photo à la une : le pianiste Alexandre Kantorow – Photo : © DR.

GRAND PIANO

En ouvrant l’album, une photographie montrant Saint-Saëns jouant sous la direction de Pierre Monteux, Salle Gaveau le 6 novembre 1913 me saute aux yeux. Quelle belle idée, pour illustrer le deuxième volume d’une intégrale de tout ce que le compositeur du Carnaval des animaux aura écrit pour le piano et l’orchestre.

L’ampleur _ oui _ de la déclamation initiale du Deuxième Concerto _ composé en 1868 _, jusqu’au tonnerre qui ouvre le grave du piano, puis ce thème modelé avec une douleur sourde, quel art, quelle façon de faire entendre dans cette partition si courue comme une autre musique _ exotique… Saint-Saêns fut un immense voyageur de par le globe…

Le père aide le fils, cet orchestre n’est pas en retrait, il est absolument consubstantiel aux sons qui murmurent ou jaillissent du grand meuble dont Alexandre Kantorow joue comme d’un orgue, rappelant à quel point Saint-Saëns savait élargir le piano en creusant l’espace entre les registres. Faire entendre cela est simplement inouï. Finale épique, l’orchestre bondissant autant que le pianiste dans un saltarello à perdre haleine.

Génial _ absolument ! _ , comme tout le disque où le fils et le père rédiment le Premier Concerto _ composé en 1858 _ et se délectent des bizarreries _ en effet délicieuses _ d’Africa  _ terminé de composé au Caire, le 1er avril 1891 : Saint-Saëns adorait séjourner en Afrique ; et est, d’alleurs, décédé à Alger… _, de la fantaisie pince-sans-rire du Wedding Cake _ de 1885 _ (comme ce jeune homme sait se moquer, ses doigts rire !) ou encore de la pétillante bourrée _ en 1884 _ de la Rhapsodie d’Auvergne !

LE DISQUE DU JOUR


Camille Saint-Saëns (1835-1921)


Concerto pour piano et orchestre No. 1 en ré majeur, Op. 17, R. 185
Concerto pour piano et orchestre No. 2 en sol mineur, Op. 22, R. 190
Wedding Cake, Op. 76, R. 124
Allegro appassionato en ut dièse mineur, Op. 70, R. 37
Rhapsodie d’Auvergne, Op. 73, R. 201
Africa, Op. 89, R. 204

Alexandre Kantorow, piano
Tapiola Sinfonietta
Jean-Jacques Kantorow, direction

Un album du label BIS Records 2400

Photo à la une : le pianiste Alexandre Kantorow – Photo : © DR

Œuvres superbes _ et magistralement classieuses… _ d’un immense, très grand, compositeur français,

à redécouvrir comme ici…

Et interprétations magnifiques _ que dis-je, absolument éblouissantes ! _

absolument idoines à l’idiosyncrasie du puissant génie singulier de l’élégant et clair et imaginatif et fantasque Saint-Saëns,

des Kantorow, fils et père,

saisis ici, au Tapiola Hall, à Espoo, en Finlande, en un jubilatoire enthousiasmant état de grâce…

Un double enchantement discographique, donc.

Et un must pour toute vraie discothèque !

Constituant une aubaine à ne surtout pas laisser passer…

Aux bons entendeurs de musique à ce point de perfection-là incarnée, salut !

Ce mardi 21 juin 2022 _ Fête de la musique… _, Titus Curiosus – Francis Lippa

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