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Construire un programme musical à partir de ce qui a été composé autour du mariage de Louis XIV à Saint-Jean-de-Luz le 9 juin 1660 : deux réalisations, par Hugo Reyne en 2007, et par Vincent Dumestre en 2021…

16juin

La toute récente parution du CD de Vincent Dumestre et son Poème Harmonique pour le label Château de Versailles Spectacles,

soit le CD CVS 066 « Les Noces royales de Louis XIV » enregistré à la Chapelle Royale du Château de Versailles du 11 au 14 novembre 2021 _,

m’amène à venir repenser un peu la constitution d’un programme de musique, pour un concert ou pour un disque,

à la façon dont Hugo Reyne et La Simphonie du Marais ont pu s’y essayer dans les années 90 du siècle dernier _ à ce moment j’étais leur conseiller artistique, et ai procédé à d’ardentes passionnantes recherches, en particulier à Saint-Jean-de-Luz, auprès d’érudits locaux susceptibles de m’en ouvrir, peut-être, quelques menues pistes… _, et, à nouveau, en 2007, quand Hugo Reyne et sa Simphonie du Marais ont construit et réalisé un concert (pour Jean-Bernard Meunier, à Sablé-sur-Sarthe, le 23 mars 2007), et publié un double CD, intitulé « Musiques pour le mariage de Louis XIV« ,

soit l’album double Accord 442 9894 _ enregistré les 22 et 23 mars 2007 au Centre culturel Joël Le Theule, à Sablé-sur-Sarthe _,

 

quand il s’avère que les principales éventuelles sources documentaires directes (et les partitions in concreto utilisées alors) désespérément manquent, et cruellement font défaut ;

et que le projet esquissé doit alors s’efforcer, pour produire, malgré ce handicap, un concert ou un disque à la fois tant soit peu plausible, et surtout un brin satisfaisant, à la fois historiquement et musicalement, de trouver quelques palliatifs à ces manques décevants de la recherche aventureuse et méthodique…

 

Ce jeudi 16 juin 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

Découvrir en CD un opera, jusqu’ici inédit au disque, de Pietro-Antonio Cesti (1623 – 1669) : « La Dori », créé à Innsbruck en 1657, en une interprétation, ici, sous la direction d’Ottavio Dantone

24mai

Pietro-Antonio Cesti (1623 – 1669) est,

dans le sillage de Claudio Monteverdi et Francesco Cavalli,

un des compositeurs qui ont créé l’opéra _ en Italie d’abord_, au XVIIe siècle…

Et voici que ces jours je répare un oubli discographique principalement dû aux circonstances (a-musicales) de la pandémie de Covid :

me procurer le double CD CPO 555 309-2 de l’opéra de Pietro-Antonio Cesti « La Dori » _ créé à Innsbruck en 1657 , après « L’Argia« , en 1655 et « Orontea », en 1656 : tous pour l’archiduc Ferdinand-Charles… _,

en un enregistrement de l’Accademia Bizantina, sous la direction de l’excellent chef vénitien Ottavio Dantone…

 

Ce mardi 24 mai 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

Re-création de l’opéra « Il Palazzo incantato di Atlante » (1642), de Luigi Rossi (1597 – 1653)

29sept

Une très intéressante interview _ Leonardo Garcia Alarcon confiné dans le palais enchanté de Rossi _ du chef Leonardo Garcia Alarcon

par Charlotte Saulneron dans le numéro de ce jour de ResMusica,

à propos de le re-création _ à Dijon, Nancy et Versailles _ de l’opéra de Luigi Rossi (Torre Maggiore, près de Foggia, 1597 – Rome, 19 février 1653)

« Il Palazzo incantato di Atlante« ,

sur un livret de Giulio Rospigliosi (Pistoia, 27 janvier 1600 – Rome, 9 décembre 1669 ), futur pape Clément IX (20 juin 1667 – 9 décembre 1669),

un opéra qui fut créé le 22 février 1642, à Rome, au théâtre du splendide Palazzo Barberini _ Maffeo Barberini (Florence, 5 avril 1568 – Rome, 29 juillet 1644) étant alors le fastueux et flamboyant pape Urbain VIII (6 août 1623 – 29 juillet 1644) _ ;

me donne l’occasion de me pencher un peu sur l’importance de Luigi Rossi dans l’histoire de la musique,

à la fois en Italie et en France…

Leonardo García Alarcón confiné dans le Palais enchanté de Rossi

Après les opéras de Cavalli, comme Eliogabalo présenté à l’Opéra de Paris en 2016, Il Giasone à Genève et Erismena au Festival d’Aix-en-Provence en 2017, puis El Prometeo d’Antonio Draghi en 2018, ou encore La Finta Pazza de Francesco Sacrati à l’Opéra de Dijon en 2019, voici la nouvelle redécouverte _ oui _ italienne de Leonardo García Alarcón, qui sera présentée début octobre à l’Opéra National de Lorraine, puis à l’Opéra Royal de Versailles, après avoir été créée en ligne, pandémie oblige, à l’Opéra de Dijon : Il Palazzo Incantato de Luigi Rossi.


ResMusica : Très habitué à exhumer des ouvrages lyriques baroques, comment avez-vous découvert Il Palazzo Incantato de Luigi Rossi ?

Leonardo García Alarcón : J’ai découvert le manuscrit d’Il Palazzo Incantato à la Bibliothèque du Vatican vers 1999-2000. J’étais en train d’étudier la musique de Marco Marazzoli, un harpiste _ et compositeur (Parme, 1602 – Rome, 26 janvier 1662), installé à Rome en 1626 _ qui travaillait avec Luigi Rossi, quand je suis tombé sur ce manuscrit tout à fait par hasard. Je n’ai _ hélas _ pas retrouvé à l’époque des écrits ou des textes de différents musicologues qui puissent me parler plus de l’œuvre que je venais de découvrir. J’ai commencé autour de 2006-2007 à me rendre compte qu’il y avait un intérêt dans l’œuvre de Luigi Rossi en commençant à m’intéresser à sa musique qui se trouvait à la Bibliothèque nationale de France. Quand finalement l’Opéra de Dijon m’a proposé de monter Il Palazzo Incantato, j’ai pu demander la copie de ce manuscrit que j’avais vu en 1999 au Vatican. C’est en se basant sur ce manuscrit que l’on a construit notre partition.

RM : Pourquoi avoir choisi cet ouvrage monumental pour le faire revivre sur scène ?

LGA : Il me semble très important de connaître Il Palazzo Incantato parce que l’œuvre de Luigi Rossi occupe une place conséquente _ certes !!! _ dans l’histoire de la musique, pas seulement au sein de la musique romaine ou de la musique italienne, mais aussi dans l’histoire de l’opéra français _ bien sûr ! En effet, en 1646, on lui commande l’Orfeo qui va devenir _ rien moins que _ la première commande d’un opéra en France. Il s’agit d’un grand compositeur qui avait une grande admiration pour l’œuvre de Claudio Monteverdi ; on garde même des copies de plusieurs pièces de Claudio Monteverdi de la main de Luigi Rossi _ voilà. J’ai pensé que c’était nécessaire, notamment d’un point de vue historique _ au moins… _, de mettre en lumière ce compositeur et cette œuvre composée en 1642, quelques mois plus tôt que l’Incoronazione di Poppea de Claudio Monteverdi composée la même année à Venise.

RM : Comment caractérisez-vous l’écriture et le sens de la dramaturgie de Rossi dans Il Palazzo Incantato ?

LGA : Je vais commencer par une petite anecdote : on parle toujours de « Pur Ti Miro » dans l’Incoronazione di Poppea, comme le premier duo d’amour de l’histoire de l’opéra, mais en réalité c’est le duo d’amour entre Bradamante et Ruggiero à la fin d’Il Palazzo Incantato qui est le premier duo d’amour de l’histoire. C’est notamment pour cette raison que je pense qu’il y a encore des pages à écrire et à analyser sur la relation entre ces deux pièces qui, d’une certaine façon, incarnent l’esthétique romaine et vénitienne de l’opéra _ voilà. Je suis aujourd’hui convaincu que ce Palazzo Incantato a même pu influencer _ rien moins que _ la décision de donner l’Incoronazione di Poppea à Venise en 1642. D’une certaine façon, ce Palazzo Incantato incarne tout ce que l’Incoronazione de Poppea critique sur le plan moral. Enfin, il ne faut pas oublier que l’Incoronazione de Poppea correspond au premier opéra historique de l’histoire, mais Il Palazzo Incantato est le premier opéra où on utilise un livret basé sur l’Orlando furioso de l’Arioste, qui met aussi en scène quelques personnages historiques comme Orlando.

Giulio Rospigliosi, le librettiste d’Il Palazzo Incantato, futur pape Clément IX, a réalisé une adaptation du passage du Palais enchanté d’Orlando Furioso, qui permet déjà à Luigi Rossi d’organiser son discours musical. Le compositeur possède vraiment un génie particulier pour décider quel type de forme musicale va accompagner un texte poétique _ ce qui est d’une immense importance musicale, forcément… Du temps de l’écriture de l’opéra, on est au moment où les récitatifs montéverdiens basculent _ oui… _ vers une sorte d’arioso, c’est-à-dire un récitatif cantabile, qui va être aussi _ en effet _ la particularité du récitatif de Francesco Cavalli _ Crema, 14 février 1602 – Venise, 14 janvier 1676 _ à la même époque à Venise. Ce récitatif va amener Lugi Rossi à composer dans Il Palazzo Incantato des airs qui vont se développer avec des ornements, une sorte de « pré-aria », c’est-à-dire des arias à l’état primitif de ce que va devenir l’aria à partir de 1660-1670, comme l’aria da capo napolitain qui donnait _ donnera _ la possibilité à l’interprète de montrer toute la pyrotechnie vocale dont il était capable et qui va faire _ bientôt, alors _ des castrats la gloire de l’Italie à travers toute l’Europe. Ici dans cet opéra, on peut voir d’une manière très subtile comment les récitatifs se transforment peu à peu _ voilà.

On remarque également que dès le prologue, l’orchestre accompagne à six et à sept voix écrites, une richesse inouïe qu’on pouvait seulement se permettre _ pour des raisons financières _ à Rome. On a aussi dans cette œuvre des chœurs avec un orchestre double, voire même des triples chœurs, chose que l’on n’avait jamais entendue à l’opéra _ du moins _ au XVIIᵉ siècle. Il Palazzo Incantato est un opéra qui anticipe tout ce que l’on va faire à la fin du XIXᵉ siècle, qui utilise tous les moyens mis à disposition. Il ne faut pas oublier qu’on est à la Cour de Barberini à Rome _ oui ! _ où l’on dispose aisément de ces doubles orchestres et de ces triples chœurs, ainsi que de tout un casting de plus de 22 rôles solistes à l’époque, alors que cela était inimaginable pour Venise. Luigi Rossi a utilisé tous ces moyens de richesse, de complexité aussi, pour choisir des formes très contrastantes, mais qui permettent justement au discours dramaturgique d’avancer avec une variété de styles extraordinaire _ voilà.

RM : Le nombre conséquent de solistes, les doubles et triples chœurs et les ballets : ce n’est pas vraiment dans l’ère du temps avec la pandémie qui a notablement impacté le secteur ! De quelle manière s’est menée la transposition de cet ouvrage lyrique sur scène, autant musicalement que scéniquement ? Avez-vous fait des concessions dans cette période si particulière ?

LGA : Quand vous me parlez de pandémie, ma première pensée se tourne vers la pandémie de 1642 qui a ravagé l’Italie entre 1641 et 1642, mais vous évoquez sûrement celle du Coronavirus ! La décision de monter Il Palazzo Incantato s’est prise naturellement bien en amont de la période que l’on est en train de vivre, mais Laurent Joyeux et l’Opéra de Dijon ont décidé de maintenir cette création, tout autant que Matthieu Dussouillez à l’Opéra National de Lorraine, qui est co-producteur de ce spectacle. Cela a été pour nous une véritable chance.

Ainsi, on a simplement agi comme à cette époque, c’est-à-dire que les différents acteurs du projet se sont contrôlés régulièrement pour identifier les personnes éventuellement infectées au sein de l’orchestre, des chœurs, comme des solistes. Heureusement, on n’a eu aucun cas positif. Par contre, on a vivement ressenti que la pièce était écrite pour décrire l’époque dans laquelle nous évoluons aujourd’hui, soit un Palais enchanté où tout le monde est confiné _ voilà ! _, où personne ne peut se rencontrer, empêchés par Atlante. Pour nous, Il Palazzo Incantato est devenu un _ stupéfiant _ miroir de notre vie quotidienne, avec des métaphores et des figures allégoriques quasi-permanentes. D’ailleurs, lors de sa création, nous étions presque dans un palais enchanté à l’Opéra de Dijon, seuls sur scène et sans public. On pensait que nous étions aussi manipulés par Atlante !

Mais la concession la plus difficile à faire pour moi a été que les chœurs soient masqués. Quand un chœur crie ou s’exprime d’une manière tellement exacerbée que dans l’écriture de Luigi Rossi, cela est très difficile. A part cela, je ne me souviens pas d’avoir fait d’autres concessions, et on ne m’en a pas demandé d’en faire. La seule qui nous manquait, c’était le public : cela sera rétabli à Nancy dans les prochains jours !

RM : Le travail d’une production lyrique se mène à deux, avec un metteur en scène. Quelles grandes lignes directrices avez-vous définies avec Fabrice Murgia ?

LGA : Avec Fabrice Murgia, notre seule ligne conductrice a été le livret _ c’est capital, en effet… D’une certaine façon, l’esthétique sur scène, et même mes choix d’interprétation, sont anecdotiques par rapport à la force dans nos âmes que provoque le livret et le discours proposé par celui-ci. Notre ligne directrice a été d’être toujours fidèle à ce qu’aujourd’hui, c’est-à-dire en 2021, provoque un livret de ce type : de quelle manière sommes-nous bouleversés aujourd’hui _ voilà _ par les propositions d’un tel livret ; dans quel sens partage-t-on encore le même type d’émotions qu’un être humain de la moitié du XVIIᵉ siècle ? Nous n’avons pas perdu de temps à essayer de raconter une histoire qui n’est pas celle qui est écrite dans le livret ou bien proposée par le compositeur…

RM : Si vous aviez à présenter l’ouvrage en quelques mots…

LGA : L’histoire nous rappelle le combat entre Tancrède et Clorinde _ narré par L’Arioste en son Orlando furioso. Le magicien Atlante, protecteur du Sarrasin Ruggiero, cherche à le protéger de son amour envers la chrétienne Bradamante, en construisant un palais enchanté où seront englouties toutes les personnes s’en approchant. Ce palais est une sorte de sédatif _ voilà _ des désirs, un sédatif de l’âme. Finalement, beaucoup d’amour et beaucoup de couples sont absorbés par ce palais, générant de fait plusieurs histoires parallèles. Mais Atlante n’empêchera pas la rencontre entre Ruggiero et Bradamante, celui-ci devenant même le miroir de celui qu’il souhaite protéger d’un amour interdit, comme une sorte d’hologramme. Bradamante va entendre chanter ainsi deux Ruggiero, sans savoir lequel est le vrai. C’est pour cette raison que ce palais enchanté est d’une certaine façon, le miroir de nos vies, avec le fait de ne pas savoir si cette vie est vraiment notre vie ou bien si nous sommes en train d’être rêvé par quelqu’un d’autre. Mais le plus important dans tout cela est que la réalité, le désir, et l’amour, ne peuvent pas être arrêtés, même par un magicien de la puissance d’Atlante.

RM : Et si vous aviez à retracer brièvement l’aventure de cette nouvelle production ?

LGA : Le grand défi de cette nouvelle production était de pouvoir donner une pièce avec un livret aussi complexe _ comme toujours à cette époque ! Cf par exemple les opéras de Cavalli… _ que celui-ci, de le rendre intelligible par un spectateur sans qu’il soit contraint de le lire avant le spectacle, et de lui faire comprendre immédiatement les enjeux les plus basiques. En cela, Fabrice Murgia a réalisé un travail extraordinaire que j’admire en tous points de vue, parce qu’on arrive vraiment, du début à la fin, à percevoir une trame, un fil rouge _ voilà : c’est essentiel… _ , qui permet de lire les histoires de chaque protagoniste à l’intérieur de ce palais et de comprendre l’histoire globale sans se perdre. Désormais, le plus grand défi pour cette création à Nancy sera la rencontre avec le public ; c’est cette respiration qui nous a manqué à Dijon et que nous offre habituellement le public.

Aussi, une dernière chose : la vidéo, dans ce spectacle, joue un rôle très important. C’est une sorte de quatrième dimension, une dimension à part car les personnages, même à l’intérieur du palais, sont filmés ; de cette manière, on vit une réalité qui est celle de la scène. Une autre réalité se superpose : celle qui se passe à l’intérieur du palais et qui est reflété dans un écrin avec deux cadreurs qui filment de manière presque permanente les personnages. C’est d’une richesse telle qu’on a été inspiré comme s’il s’agissait d’un décor d’opéra, un décor émotionnel alimenté par les visages des chanteurs qui expriment les émotions les plus intenses.

Crédits photographiques : Leonardo García Alarcón © Franck Juery

Un recul un peu panoramique sur certains des débuts _ ailleurs qu’à Venise : à Rome et à Venise _ de l’opéra en Europe _ même si l’on constate la formidable circulation, à cette époque comme à d’autres, des œuvres, des idées, et des hommes, à travers l’exemple ici de Luigi Rossi…

Ce mercredi 29 septembre 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

L’Opéra italien après Monteverdi : Ottavio Dantone « explorateur » heureux de « l’autre Cavalli », Pietro-Antonio Cesti (1623 – 1669)

26oct

Parmi les interprètes du répertoire musical ancien,

et tout particulièrement « baroque« ,

trop peu font preuve d’un peu audacieuses « explorations« …

Mais ce n’est pas le cas de l’excellent Ottavio Dantone

(né à Cerignola le 9 octobre 1960, magnifique claviériste et chef d’orchestre),

qui nous propose ici une « Doria » (de 1657, à Innsbruck),

de Pietro Antonio Cesti (Arezzo, 5 août 1623 – Florence, 14 octobre 1669).

Voici ce que nous rapporte du double CD CPO 555309-2 La Dori, sous la direction d’Ottavio Dantone,

Pierre-Yves Lascar,

en son article de ce jour, intitulé « L’autre Cavalli« ,

sur l’excellent site Discophilia.

L’AUTRE CAVALLI

Mort à quarante-six ans, laissant son aîné Francesco Cavalli (Crema, 14 février 1602 – Venise, 14 janvier 1676) lui survivre sept années, Pietro Antonio Cesti (Arezzo, 5 août 1623 – Florence, 14 octobre 1669) fut l’autre _ au singulier _ génie _ c’est une appréciation… _ de l’Opéra Vénitien du XVIIe siècle. On le releva de ses vœux à l’occasion de ses trente-six ans, alors qu’il était déjà devenu un des maîtres de l’art lyrique de son temps, une passion qui lui avait valu neuf ans plus tôt de sévères réprimandes : il avait paru en scène lors de plusieurs représentations du Giasone _ créé en 1649 _ de Cavalli !

René Jacobs avait tenté _ en 1982, pour Harmonia Mundi _ de faire renaître son théâtre brillant en enregistrant son Orontea ; et voici que, à l’invite d’Alessandro De Marchi, qui assure la direction du Festival d’Innsbruck, Ottavio Dantone ressuscite La Dori, y transfusant son sens inné du théâtre.

Mais quoi faire d’une partition qui en son entier dépasse les cinq heures _ wow ! _, quel prologue choisir parmi ceux qui accompagnèrent les diverses apparitions de l’œuvre – La Dori fut l’un des ouvrages les plus courus en son siècle -, comment présenter aujourd’hui ce chef d’œuvre oublié ?

Adieux Prologue, Ottavio Dantone resserre sa Dori en un peu moins de trois heures _ voilà _, n’oubliant rien de l’intrigue _ ouf ! _ et laissant à tous les personnages l’espace nécessaire. Subtilement, il insiste sur le grand matériau d’arias _ voilà _ que contient l’œuvre, soulignant cette émancipation du théâtre de Cesti en regard de celui de Cavalli, et il habille le tout d’une orchestration opulente, saturée de timbres _ oui _, dont les couleurs avivées faisaient écho à la magnificence des costumes d’Anna Maria Heinreich pour cette production qui aurait mérité d’être filmée.

Admirable jusque dans ses plus sensibles tourments, la Dori de Francesca Ascioti, alto clair aux couleurs ambrées, Oronte virtuose, aux aigus envoûtants, au medium profond, selon Rupert Enticknap, Artaserse impérieux de Federico Sacchi, magnifique Arsinoe de Francesca Lombardi Mazzuli, soprano décidément à suivre, Alberto Allegrezza ébouriffante nutrice d’Oronte, rôle que Cesti assaisonne de « cavallismes », et comment ne pas céder devant le ténor de bronze de Bradley Smith, Arsete idéal ?

Dans cette distribution parfaite _ voilà _, dont tous les rôles seraient à citer, une perle d’émotion, le Tolomeo d’Emöke Baráth. Et si, bientôt, les mêmes pensaient à nous rendre L’Argia, cet autre opus majeur _ quid de Il pomo d’oro, créé en 1656 à Vienne ?.. _ composé par Cesti _ en 1655 _ pour Innsbruck ?

LE DISQUE DU JOUR

Pietro Antonio Cesti
(1623-1669)
La Dori

Francesca Ascioti, contralto (Dori)
Emöke Baráth, soprano (Tolomeo)
Francesca Lombardi Mazzulli, soprano (Arsinoe)
Rupert Enticknap, contre-ténor (Oronte)
Federico Sacchi, basse (Artaserse)
Bradley Smith, ténor (Arsete)
Alberto Allegrezza, ténor (Dirce)
Pietro Di Bianco, baryton (Erasto)
Rocco Cavalluzzi, basse (Golo)
Konstantin Derri, contre-ténor (Bagoa)

Accademia Bizantina
Ottavio Dantone, direction

Un album de 2 CD du label CPO 555309-2

Photo à la une : le spectacle à Innsbruck – Photo : © Innsbrucker Festwochen / Rupert Larl

Merci donc de ce cadeau discographique marquant

pour la connaissance du répertoire musical du XVIIème siècle italo- autrichien  !

Ce lundi 26 ctobre 2020, Titus Curiosus – Francis Lippa

La virtuosité de la brillante Emöke Barath dans un éclatant récital du premier Baroque italien

31jan

Au sortir d’écoutes enchantées

de divers récitals

de sublimissimes Madrigaux italiens de la Renaissance,

tout spécialement pour la cour ultra-raffinée des Este

à Ferrare

_ que de merveilles de poésie !!! _,

la virtuosité exacerbée

de la très brillante soprano Emöke Barath,

servant des compositeurs _ surtout pour le théâtre public, et à Venise _

tels que Barbara Strozzi (Venise, 1619 – Padoue, 1677),

Antonio Cesti (Arezzo, 1623 – Florence, 1669),

Francesco Cavalli (Crema, 1602 – Venise, 1676) ;

mais aussi Tarquinio Merula (Busseto, 1595 – Crémone, 1665)

_ avec aussi quelques pièces instrumentales du très brillant, lui aussi, Biagio Marini (Brescia, 1594 – Venise, 1663) _,

touche et émeut un peu moins, dois-je dire, ma sensibilité.

Cet éclatant et très beau récital,

intitulé Voglio cantar,

dispose aussi du somptueux tapis _ pré-orchestral, déjà _,

de l’excellent ensemble Il Pomo d’Oro,

dirigé ici _ depuis le clavecin _ par Francesco Corti :

soit un CD Erato 0190295632212.

Voici donc un CD qui me paraît plutôt constituer

une luxueuse carte de visite

pour une brillantissime cantatrice,

déjà bien remarquée dans pas mal de très réussies _ voire marquantes _ productions d’opéras

du Baroque,

de par toute l’Europe ;

qu’un programme centré sur le touchant des œuvres.

Ce jeudi 31 janvier 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

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