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Décès hier 6 mai 2023 de Menahem Pressler, pianiste, et membre du Beaux-Arts Trio…

07mai

J’apprends à l’instant, en consultant le site de ResMusica, le décès à Londres, hier 6 mai 2023, de Menahem Pressler, né à Magdebourg le 16 décembre 1923.

Décès de Menahem Pressler

Le pianiste légendaire du Beaux Arts Trio, , est décédé à Londres le 6 mai 2023 à l’âge vénérable de 99 ans.

Né à Magdebourg le 16 décembre 1923 au sein d’une famille juive, quitte l’Allemagne nazie en 1938 pour se réfugier dans ce qui deviendra l’État d’Israël, où il reçoit sa formation musicale (Eliahu Rudiakov et Leo Kestenberg). De là, il émigre aux États-Unis et remporte le Concours Debussy de San Francisco en 1946. Il est alors engagé par Eugène Ormandy pour faire ses débuts américains avec l’Orchestre de Philadelphie, ce qui lancera sa carrière soliste. C’est à cette époque qu’il enregistre de nombreux disques pour MGM notamment dans des répertoires plutôt originaux : la Sonate, la Ballade et les Pièces lyriques de Grieg, La Boîte à joujoux de Debussy et les Histoires d’Ibert, Pour les enfants de Bartók, les 24 préludes op. 34 de Chostakovitch, la Sonate piano n°9 et 10 pièces tirées de Cendrillon de Prokofiev. En 1955, Pressler fait la connaissance par l’intermédiaire de Robert Casadesus (un fidèle soutien) du violoniste Daniel Guilet qui lui-même le met en relation avec Bernard Greenhouse (violoncelle). Ils formeront dès lors la première mouture du légendaire Beaux Arts Trio et malgré le renouvellement des membres au fil des décennies, il restera le pianiste du trio jusqu’à sa dissolution en 2008. Outre ses activités de chambriste, Menahem Pressler enseigna également à partir de 1955 à la Jacobs School of Music de l’Université de l’Indiana à Bloomington.

Pressler reprit une activité de soliste après le Beaux Arts Trio _ en 2008, donc _ et fit même ses débuts avec l’Orchestre Philharmonique de Berlin en 2014 !

..;

Outre sa discographie de soliste antérieure au trio, il enregistra pour le microsillon dans les années 1960 à Vienne divers concertos publiés par la Guilde internationale du disque. Cette partie de la discographie a été partiellement rééditée par Doron, Doremi et Forgotten Records. Le Beaux Arts Trio a de son côté enregistré et même réenregistré une bonne part du répertoire de trio avec piano (Mozart, Haydn, Beethoven, Schubert, Schumann, Brahms…), chez Philips. Tous ces enregistrements ont été réédités dans un gros coffret en 2015. Menahem Pressler s’est aussi produit et a enregistré avec d’autres ensemble, notamment le Quatuor Emerson. Enfin en soliste, il a gravé quelques disques pour La Dolce Volta et plus récemment encore (2018) pour Deutsche Grammophon. (JBdLT)

 

En forme d’hommage,

voici la vidéo _ d’une durée de 113 ‘ _ du concert _ Haendel, Mozart, Debussy, Chopin _ que Menahem Pressler a donné, en soliste, à Tokyo, le 16 octobre 2017…

Ce dimanche 7 mai 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

En post-scriptum,

voici aussi, en précieux et très éclairant complément, un magnifique témoignage _ quelle splendide très simple humanité ! _ extrait de divers entretiens (à Waterloo, Tampere, Verbier, entre 2010 et 2012) de Bernadette Beyne avec Menahem Pressler, publié le jeudi 11 mai sur le site de Crescendo :

Hommage à Menahem Pressler : « la profondeur de la musique est plus que tout au monde ! »

LE 10 MAI 2023 par Bernadette Beyne

Décédé l’âge de 99 ans, le doyen des pianistes avait accordé une interview à Bernadette Beyne, co-fondatrice de notre média Crescendo.

Depuis la dissolution du Beaux-Arts Trio -il donnait son concert d’adieu au Festival Mendelssohn de Leipzig le 23 août 2009, Menahem Pressler multiplie les concerts, tantôt en récital, tantôt en concertos, tantôt en musique de chambre avec de jeunes interprètes.

Je me souviens l’avoir rencontré  à la Chapelle Musicale Reine Elisabeth peu après la fin du Trio et et lui avais demandé comment il envisageait son avenir. D’emblée, il m’avait répondu : « Je continue… Pressler and Friends ! ». Lorsqu’il était venu recevoir son « ICMA Lifetime Achievement Award » à Tampere (Finlande) en mai 2011, il arrivait de Bloomington (USA) où il avait enseigné après avoir joué en concert la veille à Paris. Il était arrivé à l’aéroport d’Helsinki où l’attendait une voiture pour l’emmener à Tampere où il déposa sa valise à la réception de l’hôtel pour rejoindre aussitôt la répétition en salle avec l’orchestre. Le soir, il jouait le Concerto Jeunehomme de Mozart lors de la soirée de gala, une beauté indiscible. Depuis, l’artiste accumule les prix, les concerts, les masterclasses. Récemment sont parus un DVD consacré à sa vie et un CD de Sonates de Schubert. Le 16 décembre dernier, il fêtait ses 90 ans. Tout récemment, on le rencontrait en récital à Liège… (lire la critique de François Mardirossian)…

– Que signifie pour vous la musique ?


La musique n’est pas seulement importante, elle est simplement tout pour moi : mon amour, ma vie, mon existence, ma profession. Rétrospectivement, cela signifie encore plus du fait de mon exil. Lorsque je me suis enfui d’Allemagne en 1938, tout mon environnement a changé d’un jour à l’autre. La plupart des gens n’ont aucune idée de ce que cela signifie d’avoir à quitter l’endroit où vous êtes né, où vous avez grandi, où tout est familier, pour arriver dans un pays où prévalent d’autres coutumes et une langue que vous ne connaissez pas. La seule chose qui n’avait pas changé, c’était la musique. Je me souviens très bien que lors de mon arrivé en Israël, j’ai eu des problèmes de nutrition et je perdais de plus en plus de poids. La seule chose qui m’a gardé en vie était la musique, ma compagne dans les bons et les mauvais moments… Elle était l’air que je respirais, les pensées, les émotions que je vivais… Et les émotions sont importantes parce que la musique est le langage de l’émotion. Personne mieux que Bach, Beethoven, Mozart, Schumann, Brahms,… ne comprennent ces émotions qui enrichissent tellement nos vies et, finalement, les rendent vivables.

– Quels événements ont été les plus mémorables dans votre long parcours ?


Inoubliables, les rencontres avec mes différents professeurs. Très important, le prix que j’ai gagné en 1946, au Concours Debussy de San Francisco. Mon professeur ne m’y avait pas envoyé pour gagner, mais juste pour voir si j’étais assez bon pour envisager une carrière de concertiste. Le jury présidé par Darius Milhaud m’a donné le premier prix. C’était pour moi une responsabilité écrasante !


Très importante aussi, ma rencontre avec Arthur Judson, le fondateur de la « Columbia Broadcasting System » (CBS ), qui m’a fait signer un contrat à long terme. Il m’a fait jouer avec Eugene Ormandy et l’Orchestre de Philadelphie. C’était mon premier concert aux États-Unis. J’ai joué le Concerto de Schumann et j’ai aussitôt obtenu un contrat pour quatre concerts dans les quatre saisons suivantes. C’était la deuxième fois seulement qu’un soliste signait un tel contrat dans l’histoire de l’orchestre.


Une troisième événement important, c’est la création du Beaux Arts Trio qui a été presque le fruit d’un accident. Je faisais alors beaucoup d’enregistrements en soliste pour MGM -Schumann, Prokofiev, Chostakovitch, Ernst Bloch, Milhaud,…- et je voulais enregistrer de la musique de chambre, je pensais aux Trios de Mozart. Le directeur de MGM était d’accord, mais je devais trouver les partenaires pour former un ensemble. A l’époque, il n’y avait pas réellement de Trios constitués, des solistes se réunissaient pour jouer ensemble, et il y en a eu de fantastiques ! Après la guerre, j’avais passé un été à travailler avec Robert Casadesus à Fontainebleau. Il m’avait fait rencontrer Daniel Guilet (1899-1990) un violoniste russe dont le nom de baptême était Gullevitch et qui avait travaillé au Conservatoire de Paris sous la direction d’Enesco ; il avait fait ses débuts avec le très réputé Quatuor Joseph Calvet. Sous l’occupation, il avait rejoint les Etats-Unis grâce à l’aide de Casadesus, ce qui lui a sauvé la vie. Guilet était très proche du violoncelliste américain, Bernard Greenhouse qui avait étudié à la Juilliard School et plus tard avec Emanuel Feuermann et Diran Alexanian puis, finalement, avec Pablo Casals dont il fut un des rares étudiants officiels avant de devenir son assistant à l’Ecole Normale Alfred Cortot. Guilet me l’a présenté, « juste pour jouer Mozart »… et, plus de trente ans plus tard, il était toujours là… C’est ainsi qu’a commencé l’histoire du Trio. Nous étions sensés réaliser seulement quelques enregistrements et dissoudre le Trio dès la fin du contrat. Pour nous préparer, nous avons donné une série de concerts pendant un mois, puis nous avons été invités, en remplacement, au Festival de Berkshire à Tanglewood, la résidence d’été de l’Orchestre Philharmonique de Boston. Nous avons joué Beethoven (op.1 n°3, op.70 n°1, l’ Esprit, et l’Archiduc op.97). Un vrai succès ! C’était le 13 Juillet 1955. A la fin de la saison, nous avons réalisé que nous avions donné 70 concerts de musique de chambre ! Et nous avons abandonné l’idée de dissoudre l’ensemble… Robert Casadesus nous a introduits en Europe et notre carrière s’est envolée… Casadesus disait qu’il n’avait plus entendu un tel Trio depuis Cortot-Thibaud-Casals… Il exagérait, bien sûr, mais son enthousiasme était authentique. Nous lui devons notre carrière. Robert a également composé un trio pour nous, nous étions très proches.


Un autre moment mémorable, c’ est le jour où on m’a offert d’être « Artiste en résidence » avec des tâches d’enseignement à l’ « Indiana University ». Tout d’abord, j’ai refusé ; puis j’ai accepté à condition de considérer mon engagement pour un semestre. J’ai donc essayé d’y enseigner… Aujourd’hui, 55 ans plus tard, j’y suis toujours. J’aime enseigner _ voilà! _ ; mes étudiants viennent de partout dans le monde ; ils sont comme mes enfants et la fierté de ma vie.
Ce sont les points forts, mais il y a aussi d’autres moments très importants comme par exemple mon mariage. Je suis marié depuis 65 ans et j’aime ma femme comme au premier jour. Il y a aussi eu la naissance de mes enfants…

"Transmettre à la jeune génération" - Ici, à Tampere, lors d'une soirée conviviale à l'occasion de la remise des ICMA, le "Jeune Artiste de l'Année", David Kadouch, aux côtés du "Lifetime Achievement"
« Transmettre à la jeune génération » – Ici, à Tampere, lors d’une soirée conviviale à l’occasion de la remise des ICMA, le « Jeune Artiste de l’Année », David Kadouch, aux côtés du « Lifetime Achievement »

– J’ai lu le livre de William Brown consacré à votre enseignement. Vous y dites notamment que la partition est très importante…


Oui, bien sûr, c’est là que tout se trouve, c’est là qu’il faut chercher le sens profond de la musique. L’enseignement a été est est toujours très important dans ma vie parce qu’il est la façon de transmettre la musique à la jeune génération et de l’aider à éviter les erreurs que l’on a faites soi-même. Tout le monde fait des erreurs ; mais si pouvez aider les jeunes à trouver en eux-mêmes combien la musique est importante à côté de la technique et de la compréhension des styles, si vous pouvez les aider à trouver le profond « feeling », la profondeur de la musique, c’est très important et ce n’est pas facile : comment pouvez-vous dire à quelqu’un quelque chose pour laquelle vous n’avez aucune explication concrète. C’est un véritable défi. A Bloomington, je peux choisir mes élèves et ne prendre un étudiant qu’après lui avoir parlé : savoir comment il se voit, comment il voit la vie. Et je trouve toujours exactement les valeurs qui étaient les miennes : travailler longtemps et longtemps pour pratiquer l’amour pour la musique, faire le sacrifice de soi, mettre sa volonté à l’épreuve et trouver la satisfaction en dépit de l’effort et de la solitude dans laquelle on se trouve. Ces personnes, j’ai confiance en elles. Il y a des enseignants qui sont satisfaits lorsque les élèves sont techniquement au point. Cela ne me satisfait pas. Si vous avez appris le piano techniquement, vous devez aussi apprendre mentalement, vivre la musique au plus profond de vous-même. Il y a bien sûr le « know how », l’habileté à jouer de l’instrument. Mais le musicien professionnel doit offrir à son audience ce qu’est réellement, profondément la musique, celle de Mozart, Beethoven, Ravel, Debussy, Schubert,… Là est la différence avec le musicien amateur qui peut s’adonner pleinement à ses émotions ; il est libre. Le musicien professionnel doit veiller à ce que les émotions soient sculptées comme un arbre, garder leur contrôle et les exprimer de manière à ce que tout le monde puisse les comprendre.

– Vous parlez de vos « erreurs ». Est-il indiscret de vous demander d’en parler ?


(sourire…) Dans la vie, nous procédons souvent par essais et erreurs. Si vous sentez que ce que vous essayez de penser et de faire n’est pas vous, il faut avoir le courage de dire : « Non, ce n’est pas moi ». Il faut continuer en prenant un chemin qui est parfois opposé ; mais il faut le faire. Cela ne veut pas dire « vouloir faire plus beau » ; c’est autre chose ; c’est être totalement en accord avec soi-même.

Dans le livre qui vous est consacré, vous parlez des pianistes « qui en rajoutent »…


Oui, mais je parle là de fantastiques pianistes… Horowitz… J’ai connu Horowitz. Quand je l’écoutais, ce n’était pas sa fantastique technique qui me séduisait mais la beauté de ce qu’il faisait quand il jouait Chopin. Pour Argerich, rien n’est difficile, elle fait tout ce qu’elle veut, c’est fantastique « of course »,… qui n’aimerait pas cela ? Mais la musique est plus que Horowitz, plus qu’ Argerich. Prenez une simple sonate de Mozart, de Haydn, il y a encore plus que la beauté, il y a toute la profondeur du sentiment humain. Nous avons été les premiers à jouer l’intégrale des Trios de Haydn et c’est une chose dont je suis fier et surtout heureux : d’avoir vécu l’expérience, de les avoir fait connaître et aimer. Pour cet enregistrement, notre Trio a obtenu un grand prix à Londres, un prix qui avait été attribué aux plus grands artistes du moment : Gilels, Horowitz, Rubinstein, Heifetz. Pour nous, c’était vraiment un grand honneur et une grande joie.

Au cours de votre longue carrière, le monde de la musique a beaucoup changé, parfois pour le meilleur, parfois pour le pire. qu’est-ce qui vous a le plus impressionné à cet égard ? Comment vivez-vous ces changements ?


Aujourd’hui, nous avons maintenant un public beaucoup plus large qu’au début de ma carrière, et c’est très important. La radio et la télévision nous permettent d’atteindre des millions de personnes. Il y a aussi beaucoup de nouvelles salles de concert, nous « conquérons » aussi de nouveaux territoires, je pense à la Chine, à l’Inde… Je regrette par contre que l’on ne pratique plus la musique comme avant dans les familles. Je regrette également que le travail de relations publiques joue un rôle dominant _ hélas. De moins bons musiciens ont parfois plus de succès que de grands musiciens, tout simplement parce que le public n’a plus les mêmes exigences qu’avant, parce que l’apparence est plus importante que le contenu, que l’émotion contenue dans la musique .

Vous jouez Mozart, un compositeur souvent associé à une grande « simplicité »…


Ce que vous appelez « simplicité » est ce qui donne tant de joie. Il fut un temps où les concertos de Mozart étaient rejetés par de nombreux pianistes. Le grand Arthur Schnabel disait que c’était dû au fait que de nombreux étudiants en musique trouvaient que Mozart était trop facile pour eux… Les musiciens expérimentés savent qu’il est très difficile _ en effet… _ de jouer un concerto de Mozart. Et croyez-moi, même les plus grands musiciens sont et ont été confrontés à de tels défis. Heifetz, le musicien le plus parfait, a dû se battre ; Horowitz a dû se battre… Il y a quelques exceptions, Rubinstein par exemple, merveilleusement doué par nature ; il avait une relation très naturelle avec la musique. La simplicité est en fait essentiellement la pureté _ voilà. Jouer un concerto de Mozart est toujours un défi. Mais si vous y arrivez, c’est un grand bonheur, comme un grimpeur qui atteint le sommet de l’Everest.

Tampere, le 5 avril 2011, Menahem Pressler a donné à son public le "Jeunehomme" de Mozart en compagnie de l'Orchestre Philharmonique de Tampere dirigé par Hannu Lintu
Tampere, le 5 avril 2011, Menahem Pressler a donné à son public le « Jeunehomme » de Mozart en compagnie de l’Orchestre Philharmonique de Tampere dirigé par Hannu Lintu

Comment un jeune pianiste peut-il arriver à une telle pureté ?


Pour les jeunes pianistes ce n’est pas facile, parce qu’ils veulent mettre un peu d’eux-mêmes dans la musique. Le jeune pianiste se demande ce qu’il peut apporter de lui-même dans une œuvre. Je lui conseille par contre de se demander : « Qu’est-ce que je peux faire de la musique qui est devant moi ? Comment puis-je au mieux la servir ? » _ voilà.

Quelle a été votre recette secrète de longévité du « Beaux Arts Trio »… 55 ans…


Le secret est sans doute dans la force de la première rencontre _ oui. J’ai tellement appris des personnes que j’ai rencontrées, et aucune ne m’a autant touché que Guilet. Un grand musicien mais il n’était pas la personne la plus facile pour répéter et pour travailler. Travailler avec lui, c’était le sang, la sueur et les larmes. Le secret réside aussi dans les relations interpersonnelles _ oui. Si vous voulez vraiment faire de la musique de chambre, vous faites appel aux sentiments de vos partenaires. Un faux accent peut être considéré comme une insulte. Le cours des choses sera discuté, bien sûr, les arguments seront échangés, mais le partenaire aura l’impression qu’il y a un manque de respect mutuel. Et croyez-moi, de toute petites choses peuvent conduire à la discorde. Il faut donc être très prudent tout en sachant ce que l’on veut vraiment _ voilà : tact et exigence partagée.

– Vous donnez ce soir le Winterreise de Schubert avec Christophe Prégardien. Comment cela se passe-t-il ?**
C’est la première fois que j’accompagne un chanteur : c’est pour moi une expérience passionnante ; j’apprends _ voilà _ énormément, je suis à l’affût de son chant, de sa respiration… _ oui.

– Etes-vous confiant dans le futur ?


Pas dans le futur du monde, son écologie, ses armes. Mais une chose dont je suis sûr, c’est que la musique est ce qui restera dans le futur.

Propos recueillis par Bernadette Beyne
Waterloo, Tampere, Verbier 2010 – 2012

* Indiana University Press – Bloomington and Indianapolis, 2009
** c’était à Verbier en juillet 2012

Crédits photographiques : Martin Hoffmeister / ICMA

C’est magnifique d’humanité la plus vraie.

Découvrir en DVD un excellent Woody Allen mélancolique et tragique (à la Tchékhov) : « Wonder Wheel », de décembre 2017

19avr

Aimant beaucoup le cinéma de Woody Allen, de lui peu de films m’ont échappé jusqu’ici…

 

C’était cependant le cas jusqu’ici de « Wonder Wheel« , sorti en décembre 2017,

sur le DVD duquel je viens de tomber par hasard…

Et c’est un superbe film,

assez mélancoliquement tchékhovien _ et terriblement humain, et compatissant, face à l’implacable tragique de la malencontreuse conjonction, parfois, du jeu (cf aussi le délicieux « Match Point« , en 2005 , mais sans mélancolie cette fois-là : ou encore le brillant et merveilleux dostoïevskien « Crimes et délits« , en 1989…) de divers déterminismes… _ à mes yeux…

Et qui m’a aussi donné l’occasion de remettre de l’ordre dans la pile de mes DVDs de films de Woody Allen…

Ce mercredi 19 avril 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le très marquant talent, intense et passionné, « à la vénitienne », de Mario Brunello, au violoncelle piccolo : suite des écoutes de ses CDs…

25mar

Mon article du 16 mars dernier « « ,

à propos du merveilleux _ et tout simplement sidérant de beauté ! _ CD Arcana A 535 « Bach Transcriptions » de Mario Brunello, violoncelle piccolo, et lAccademia dell’Annunciata dirigée par Riccardo Doni,

résume assez bien le sentiment qui m’a très vivement incité, après l’écoute intégrale de ce CD, à rechercher à me procurer sans délai les précédents CDs Arcana (A 469, A 472 et A 490) de ce ce musicien magicien qu’est Mario Brunello…

 

Ainsi, ai-je pu tout de suite me procurer le double CD Arcana A 469 « Sonatas & Partitas for solo violoncello piccolo » : celui-ci était tout simplement présent et immédiatement disponible, bien caché, tapi qu’il était au fond des rayonnages, comme oublié de tous…

Et ai-je aussi immédiatement commandé les CDS A 472 « Sonar in ottava » Bach – Vivaldi_ avec l’ami merveilleux violoniste Giuliano Carmignola _, et A 490 « Sei Suonate à cembalo certato è violoncelle piccolo solo » de Bach, par Mario Brunello accompagné de Roberto Lorregian au clavecin et à l’orgue positif, et Francesco Galligioni, au violoncelle et à la viole de gambe _ et ce samedi est parvenu le double album A 490 « Sei Suonate à cembalo certato è violoncelle piccolo solo«  : j’en parlerai très bientôt donc .. ; mais pas encore l’album « Sonar in ottava«  : je rongerai donc pour celui-ci le frein de mon impatience…

Alors, qu’en est-il de ce double CD Arcana A 469 _ enregistré du 1er au 3, puis du 20 au 22 octobre 2028, à la Sala delle Reste de la Villa Parco Bolasco, à Castelfranco Veneto, et sur le violoncelle piccolo à 4 cordes de Filippo Fasser réalisé à Brescia en 2017, d’après un Antonio et Girolamo Amati (à Crémone, vers 1600 – 1610) _ de ce chef d’œuvre absolu que sont les « Sonatas & Partitas for solo violoncello piccolo » _ dont les diverses admirables interprétations discographiques qui ne manquent certes pas dans ma discothèque personnelle, aurait pu me dissuader de le rechercher… _ par Mario Brunello au violoncelle piccolo  à 4 cordes, du luthier Filippo Fasser (Brescia, 2017), d’après un Antonio et Girolamo Amati (Crémone, 1600-1610) ?..

Superbe ! Magnifique !

La voix, radieuse et merveilleusement tranquille, parle, au juste tempo.

Le plus humainement du monde.

Un double CD doucement méditatif _ automnal ? _ qui tient chaleureusement _ à la vénitienne : sans excès… _, et pour longtemps, compagnie…

Immense merci !

Ce samedi 25 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

A propos du partage, le plus large possible, par entretiens, du magnifique « Le chemin continue _ Biographie de Georges Lambrichs » d’Arnaud Villanova (aux Editions Gallimard), de petites considérations sur des temporalités et fenêtres d’opportunité diverses pour des entretiens ouverts avec auteurs choisis de livres d’extrême qualité…

22fév

À propos du partage, le plus large possible _ via vidéos ou podcasts d’entretiens à réaliser (enregistrer et diffuser largement via l’ultra-performant site Mollat !) avec l’auteur de livres d’excellence… _, du magnifique « Le chemin continue _ Biographie de Georges Lambrichs » d’Arnaud Villanova (tout juste paru le 16 février dernier aux Éditions Gallimard),
voici, ce jour, ces quelques petites considérations-ci sur des temporalités et fenêtres d’opportunité diverses, pour des entretiens ouverts, et si possible un peu riches, substantiels, avec quelques auteurs choisis de livres d’extrême qualité, tel que ce « Le chemin continue _ Biographie de Georges Lambrichs » d’Arnaud Villanova :
Ecrire, publier, éditer, promouvoir un livre,
puis lire, partager avec des amis (voire plus largement peut-être aussi) le plaisir de la lecture
et réussir à donner à d’autres le désir de, à leur tour, lire (et éprouver une vraie joie de lire) tel ou tel livre singulier :

autant de situations
et autant d’acteurs divers d’une même chaîne diversifiée et ramifiée, et continuée,
au départ de laquelle s’est trouvé un beau livre écrit par un auteur,
avec autant de temporalités diverses,
et ayant chacune son rythme spécifique et singulier…
Et ce n’est certes pas à un auteur tel que vous, Arnaud, qui travaillez professionnellement là-dessus, que je vais apprendre quelque chose de neuf…
Pour ma part, 
je veux dire celle d’un lecteur simplement attentif et passionné de quelques certains livres qui m’ont considérablement plu et réjoui
et de fait mes goûts sont assez larges et assez éclectiques, tout en étant très très exigeants :
d’une façon qui, à ma place de simple lecteur, me fait, en l’occurrence, et en ces traits-là, admirer la personnalité ici, ainsi que la personne dans sa vie relationnelle, généreuse et ouverte, d’un Georges Lambrichs,
situé pourtant apparemment, je veux dire professionnellement, à une tout autre place que celle d’un simple lecteur désintéressé, amateur, au sens plein de ce mot, qui se trouve être la mienne : celle, pour lui, Georges Lambrichs, d’éditeur littéraire ;
mais Georges Lambrichs était aussi, en sa singulière façon, absolument désintéressé en sa follement généreuse passion pour la plus authentique littérature « de qualité », un tel lecteur, pour commencer –,
il se trouve qu’une de mes passions est celle de la joie assez rare, en tous les sens de ce terme de m’entretenir, à l’occasion occasion qu’il me faut bien provoquer un peu par mon initiative ; car rien n’advient seulement de soi, et nul ne me l’offrira spontanément de lui-même (ou alors bien rarement ! même si cela, et il me faut le reconnaître, est quelquefois arrivé…) sur un plateau -, avec ou à propos d’auteurs que j’admire,
et en un entretien absolument ouvert, entre interlocuteurs sachant s’écouter vraiment et cette chose aussi est assez rare –, et les voix comptent beaucoup, les attentions, les silences aussi,
afin d’aider si peu que ce soit, de la modeste place de lecteur passionné s’entretenant alors avec (ou, à défaut de l’auteur lui-même, à propos de) tel auteur qui le mérite, à partager cettepas si fréquente que cela, mais qui comme miraculeusement advient parfois, de temps en temps, de temps à autre… – très exaltante joie de lire un livre qui paraît le mériter vraiment…
Car il y en a tant de médiocres, et même tant de faux livres, dont le temps de lecture vient voler un peu du si précieux, non infini, temps de la vie, en l’occurrence, du lecteur…
« Indiligent lecteur, quitte ce livre ! »,
prévenait très obligeamment le merveilleux et délicieux Montaigne adoré à l’ouverture de ses très exigeants à suivre vraiment l’entier déroulé de leurs étincelants écheveaux ramifiés de fils entrecroisés et rajoutés à ses diverses propres relectures… magnifiques « Essais »…
C’est donc aussi de toute petite à sa modeste place… contribution à la formation du goût, qu’il s’agit là…
Et plus que jamais en ce moment de bourrages de crânes désinhibés absolument éhontés de crasse propagande…
Voilà donc la place en laquelle je situe ce que, de ma modeste et improbable positionje ne suis pas éditeur, ni libraire, ni même journaliste : seulement simple lecteur passionné et un peu attentif de vrais livres... –, je peuxvoire je dois, à mes yeux tout au moins..faire, agir, œuvrer, en pareille occurrence, voire urgence !, de joie, à proposer de partager, à l’occasion Kairos un petit peu aidant, avec d’autres.
Les fenêtres d’opportunité pour celaou conjonction d’alignement des planètes…étant assez étroites, furtives, passagères…
Une vie humaine, d’abord, n’étant pas elle-même nous le saurions, cela n’arrive pas, infinie…
«    But at my back I always hear

Time’s wingèd chariot hurrying near :
And yonder all before us lye

Desarts of vast Eternity »,
a dit Andrew Marvell en son sublime poème « To his coy mistress ».
Mais le généreux temps d’une vie reçue de nos parents et de la chaîne si peu probable au départ de nos ancêtres plus lointains : via, là aussi, une chaîne-concours d’assez improbables transmissions, tant génétiques que culturelles… – , en son cheminement même, nous ouvre aussi la porte de tels infiniment précieux moments, rien moins, d’éternité puisqu’il n’y a d’éternité effective que dans, et par le temps de ces brèves vies, du moins quand celles-ci sont vraiment « humaines », c’est-à-dire vraiment « de qualité », je suis donc ici joyeusement spinoziste ; et proustien.
Tel est donc le contenu du courriel que j’ai adressé ce matin à Arnaud Villanova,
l’auteur, superbe de quelle qualité est aussi son écriture !, de cette passionnante et très riche enquête sur l’œuvre d’éditeurmais pas seulement !ainsi que la personne même, généreuse, libre, amicale, juste et ouverte, de Georges Lambrichs (1917 – 1992),
avec cet impressionnant portrait que vient nous donner ce « Le chemin continue _ Biographie de Georges Lambrichs » qui paraît en ce moment même aux Éditions Gallimard
Ce mercredi 22 février 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Découvrir le génie puissant et singulier, profond, de László Lajtha (Budapest, 1892 – Budapest, 1963) en son Quatuor avec piano Op. 6 (de 1925), dans l’interprétation splendide, intense et profondément poétique, du jeune Notos Quartett…

30août

Je remercie très vivement l’excellent article « Divertissement et chef d’œuvre » de Jean-Charles Hoffelé, sur son site Discophilia, le 22 août dernier,

de m’avoir fait découvrir _ et adorer ! _ ce chef d’œuvre intense et profond, marquant, qu’est le Quatuor avec piano, Op. 6, de Laszlo Lajtha (Budapest, 30 juin 1892 – Budapest, 16 février 1963),

dans l’interprétation elle-même profonde et intense, percutante ainsi qu’infiniment poétique, du jeune Notos Quartet,

en le très récent excellent CD « Paris Bar« , du label Sony Classical 19439986682.

DIVERTISSEMENTS ET CHEF-D’ŒUVRE

Paris, jonction des années vingt-trente, un parfum de folle époque règne encore _ par delà le traumatisme indélébile de la Guerre Mondiale _, quelques musiciens étrangers, installés au bord de la Seine, s’en emparent ; rythmes vifs, écriture faisant la part belle aux danses du temps, harmonies pimentées, cela se retrouve, avec quelques touches éclatantes toute polonaises, dans la brillante Suite-Divertissement qu’Alexandre Tansman écrit en 1929 pour le Quatuor Belge, formation regroupée autour du piano de Marcel Maas.

Les harmoniques chaudes, belles comme celles des fauves, l’écriture dansante, toujours sur les pointes, les motifs savoureux et évidemment cette suractivité qui est la marque de fabrique du Polonais _ un compositeur absolument majeur ! _, éclatent au long des six mouvements, mais courrez d’abord aux étrangetés mystérieuses du Nocturne, un peu Bartók. Les Notos y sont prodigieux de vivacité, de précision, d’humour et de lyrisme lorsqu’il faut, tout comme pour le Divertissement de Jean Françaix, partition délicieusement piquante, un peu mozartienne aussi par l’allégement de l’écriture.

Puis vient le chef-d’œuvre _ le voilà !!! _, le vaste nocturne inquiet _ oui _ qu’est le Quatuor avec piano de László Lajtha, pièce manquante du génial trio de Budapest qui ne devrait plus tarder à rejoindre _ contre notre paresseuse incuriositéBéla Bartók et Zoltán Kodály dans leur empirée _ à mieux reconnaître !

L’œuvre est d’une beauté aussi suffocante qu’amère _ oui _, ces splendeurs sombres sont si émouvantes dans la lecture intense _ voilà _ des Notos qu’on a peine à croire qu’il s’agit du premier enregistrement de cet opus majeur _ oui ! _ des années vingt où ce génie trop oublié affirmait d’emblée son inextinguible singularité _ oui, oui, oui.

LE DISQUE DU JOUR

Paris Bar

Jean Françaix (1912-1997)
Divertissement


Alexandre Tansman (1897-1986)
Suite-divertissement


László Lajtha (1892-1963)
Quatuor avec piano, Op. 6

Notos Quartett

Un album du label Sony Classical 19439986682

Photo à la une : les membres du Notos Quartett – Photo : © DR

Les deux autres œuvres de ce splendide et nécessaire CD du Notos Quartett _ Sindri Lederer, violon ; Andrea Burger, alto, Philip Graham, violoncelle ; et Antonia Köster, piano ; l’enregistrement a eu lieu à Leipzig en février 2021… _ ,

la Suite-Divertissement (de 1929) d’Alexandre Tansman ( Łódź, 11 juin 1897 – Paris, 15 novembre 1986), et le Divertissement (de 1933) de Jean Françaix (Le Mans, 23 mai 1912 – Paris, 25 septembre 1997),

loin d’être, comme leurs titres pourraient l’incliner à penser, superficielles ou simplement anecdotiques,

complètent superbement le très vivant, passionnant et très juste portrait réalisé par les jeunes musiciens du Notos Quartett

de ce bouillant Paris de l’après Première Guerre Mondiale _ années vingt, début des années trente : les années de composition du principal de l’œuvre de mon cher Lucien Durosoir (Boulogne-sur-Seine, 5 décembre 1878 – Bélus, 4 décembre 1955)  _, si puissamment attractif alors tout particulièrement pour des musiciens originaires d’Europe orientale… 

Et si je me permets de rapprocher ainsi ce profond Quatuor avec piano Op. 6 de László Lajtha, composé en 1925, et créé à Budapest le 23 janvier 1927, de l’œuvre si singulier de Lucien Durosoir,

c’est pour ce que ces œuvres singulières si intensément poétiques surmontent de la Guerre Mondiale qui les a tous deux si puissamment marqués en leur humanité…

Un CD tout à fait important, en conséquence… 

Ce mardi 30 août 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

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