Posts Tagged ‘Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville

Le charme absolument délicieux du « Daphnis et Alcimadure » de Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville, pastorale languedocienne, créée à Fontainebleau le 19 octobre 1754, avec le béarnais Pierre Jelyotte, la bordelaise Marie Fel et le toulousain François de La Tour : une vraie réussite de Jean-Marc Andrieu à la tête de son orchestre Les Passions et le choeur Les Eléments, et les chanteurs François-Nicolas Geslot, Elodie Fonnard et Fabien Hyon…

13nov

Le double CD Ligia Digital LIDI 0302354-23 « L’Opéra occitan Daphnis et Alcimadure de Mondonville« ,

une « pastorale languedocienne » du narbonnais Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (Narbonne, 25 décembre 1711 – Belleville, 8 octobre 1772), d’après une Fable de Jean de La Fontaine,

qui a été créée pour la cour à Fontainebleau le 19 octobre 1754 par le béarnais Pierre Jelyotte, la bordelaise Marie Fel et le toulousain François de La Tour _ excusez du peu ! la fine fleur du chant français sous le règne de Louis XV… _,

avec ici François-Nicolas Geslot, haute-contre, Élodie Fonnard, dessus, et Fabien Hyon, taille, l’Orchestre Les Passions (de Jean-Marc Andrieu) et le chœur Les Eléments (de Joël Suhubiette), tous sous la direction du montalbanais Jean-Marc Andrieu _ une première intégrale au CD de cette œuvre atypique tout à fait originale !!!! _,

est une réussite absolue, au charme tout simplement absolument délicieux : l’interprétation donnée ici, comme l’œuvre elle-même de Mondonville :

une double surprise pour beaucoup, mais pas tout à fait pour tous,

et qui ravira tout le monde…

A découvrir donc !!

 

Ce lundi 13 novembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Joseph Marchand (1673 – 1747) et la naissance du violon français, au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles (suite)…

05avr

Dans la continuité de mon article du 29 mars dernier «  »

et toujours à propos du triple album AParté AP 301 des « Suites » pour le violon et la basse, en 1707, de Joseph Marchand (1673 -1747) par le oh! Trio,

voici ce mercredi 5 avril 2023, sur le site Discophilia, un article intitulé « Apogée du violon français » de Jean-Charles Hoffelé consacré à cette superbe réalisation discographique _ du label Aparté _ d’un jeune ensemble polonais, le oh! trio, explorant le répertoire baroque français étrangement bien trop ignoré et délaissé par les violonistes baroques français d’aujourd’hui…

APOGÉE DU VIOLON FRANÇAIS

Dans la longue théorie des musiciens et compositeur de la famille _ et homonymes ! Joseph n’a pas de lien de parenté avec le mieux connu claveciniste et organiste Louis Marchand !Marchand, Joseph, basse de violon à la Chapelle Royale puis à la Grande Bande, musicien courant des concerts des petits appartements de Louis XV, avait corps et bien disparu _ de l’horizon (de connaissance et fréquentation) des musiciens et de la plupart des musicologues _, et c’est un peu un miracle que quatre amis polonais _ Martyna Pastuszka, Krzysztof Firlus, Anna Firlus et Jan Čižmář _ aient retrouvé ces somptueuses Suites pour les exhumer au disque.

Pas moins de trois CDs où parait l’épanouissement _ alors en voie de déploiement _ de l’influence italienne (jusqu’à l’usage du double trille) intégré au style noble de la suite française, airs et danses, pièces en portrait, chaconnes ou siciliennes pour conclure, Sonates pour ouvrir, souvent la nostalgie la plus étreignante (l’Air II de la Sixième Suite) voisine avec des danses toujours élégantes.

Musique de pur plaisir, et des plus raffinées _ dans le voisinage de l’œuvre absolument contemporaine de François Couperin (1663 – 1733) _, mais aussi rêveries un rien crépusculaires _ un peu à la Marin Marais (1656 – 1728) _ que magnifient des interprètes audiblement sous le charme de leur découverte _ oui ! _, prenant soin de varier les couleurs : Anna Firlus prend l’orgue positif dans la Deuxième Suite, le luth de Jan Čižmář s’invite dans la Troisième Suite, la viole de gambe de Krzyzstof Firlus contrechante avec tendresse au long de cet émouvant recueil sauvé de la poussière des bibliothèques.

Et si demain les quatre amis exploraient le legs, plus italianisant encore, de Jean-Baptiste Anet le fils _ 1676 – 1755 _ ?

LE DISQUE DU JOUR

Joseph Marchand
(1673-1747)


Suites de Pièces mêlée de
Sonates pour le violon
et la basse (1707)

{oh!} trio
Jan Čižmář, luth

Un album du label Aparté AP301

Photo à la une : © DR

Ainsi la très intéressante notice de ce CD _ d’Evangelina Kopsalidou, s’inspirant de la rubrique de Bernard Bardet concernant « les Marchand«  dans l’indispensable « Dictionnaire de la musique en France aux XVIIe et XVIIIe siècles » de Marcelle Benoît, aux Éditions Fayard, en 1992… _ dresse-t-elle un tout à fait bienvenu panorama historique de l’école française de violon _ cet instrument italien si tard venu en France _ à l’époque baroque :

après le premier livre de Sonates pour violon de François Duval, publié en 1704, puis en 1707 et 1711, avec ces Suites & Sonates pour le violon & la basse de Joseph Marchand, les Sonates pour violon de Sébastien de Brossard, Elisabeth Jacquet de La Guerre et Jean-Fery Rebel, les œuvres pour violon de la génération de Jean-Baptiste Anet et ses élèves, Louis et François Francoeur, Jean-Baptiste Sénaillé.

Puis, une génération plus tard, à partir de 1725, viendront Jean-Marie Leclair, Jean-Pierre Guignon, Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville, Louis-Gabriel Guillemain.

Vers 1750, la troisième génération est celle de Jean-Baptiste Cupis, Jean-Baptiste Canavas, Joseph-Bernabé Saint-Sévin l’Abbé le fils.

Et à la fin du siècle, la quatrième génération de Pierre Vachon, Nicolas Capron, le chevalier de Saint-Georges et surtout _ le bordelais _ Pierre Gaviniès.

Une réalisation discographique exemplaire, donc.

Et à suivre…

Ce mercredi 5 avril 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le répertoire sublime des « Grands Motets » français : une superbe réalisation au disque de trois motets de Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711 – 1772) par Gaétan Jarry pour le beau label Château de Versailles Spectacles

15juin

Le label Château de Versailles Spectacles poursuit son très beau travail de réalisation-réactualisation discographique des « Grands Motets » français de Henry Du Mont à Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville

_ pour le volume n°5 de sa collection « Grands Motets » : les volumes précédents ont été consacrés à des « Grands Motets » de Jean-Baptiste Lully (volumes n°1 et n° 4), Pierre Robert (volume n°2) et Jean-Philippe Rameau (volume n°4)… _

par un très réussi premier CD de « Grands Motets » français de Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (Narbonne, 25 décembre 1711 – Paris-Belleville, 8 octobre 1772),

soit le CD « Grands Motets » CVS 063 _ comportant les Motets « In exitu Israel » (1753), Dominus regnavit » (1734) et « Cœli enarrant gloriam Dei » (1749)…  _ par Gaétan Jarry à la tête du Chœur et de l’Orchestre Marguerite-Louise

_ sur le travail de celui-ci, cf  mon article du 19 février dernier « « , à propos de son CD des « Grands Motets«  de Jean-Philippe Rameau (CD Château de Versailles Spectacles  CVS 052)… _

qui vient de paraître ce mois de mai 1022.

Entre 1734 et 1753, Mondonville a composé 9 « Grands Motets« ,

ainsi que 12 « Petits Motets« .

Avant cet enthousiasmant CD Château de Versailles Spectacles CVS 063 dirigé par Gaétan Jarry, qui vient tout juste de paraître,

figuraient dans ma discothèque trois CDs, respectivement parus en 1988 pour le label Hyperion, 1997 pour le label Erato, et 1997 encore pour le label Auvidis Astrée, sous les directions

d’Edward Higginsbottom (CD « De Profundis. Venite exultemus » Hyperion CDA66269) _ comportant « Venite Exultemus » et « De Profundis » _,

de William Christie (CD « Grands Motets » Erato 0630-1779-1-2) _ comportant « Dominus Regnavit« , « In exitu Israel » et « De Profundis«  : écouter ce CD ici _

et de Christophe Coin (CD « Grands Motets » Astrée E 8614) _ comportant « Cœli enarrant« , « Venite Exultemus » et « Jubilate Deo« 

Mais je m’aperçois aussi que manque à l’appel, paru, lui, en 2016, le CD Glossa « Grands Motets » de Mondonville, le CD GCD 923508,

par le Purcell Choir et l’Orfeo Orchestra sous la direction de Gÿorgy Vashegyi, qui comporte, lui, « Cantate Domino« , « Magnus Dominus« , « De Profundis » et « Nisi Dominis ædificavit« …

Le 13 juin dernier, sur son site Discophilia,

Jean-Charles Hoffelé a consacré une excellente chronique, joliment _ et très justement _ intitulée « Stupeur et tremblement« , à ce tout nouveau excellent CD Mondonville par Gaétan Jarry,

article que voici :

STUPEUR ET TREMBLEMENT

Avec ses Motets à grand chœur, Mondonville refermait brillamment _ oui ! en 1753 _ le grand livre du genre _ importantissime, musicalement, ouvert splendidement par Henry Du Mont (1619 – 1684), qui en a composé rien moins que 69, la musique de 26 d’entre eux nous étant accessible…

In exitu Israel _ de 1753 _, par lequel Gaétan Jarry et sa vaillante troupe ouvrent ce que j’espère _ et moi aussi… _ être le premier volume d’une série qui devrait se compléter des six autres motets (et qui sait, des Petits motets _ au nombre de 12 _ où les merveilles _ oui ! _ abondent), est l’un des plus saisissantes _ mais oui ! _ musiques du XVIIIe siècle français, son Intrada impérieuse, ses chœurs d’écho ouvrant les flots, son immense air de ténor (Montes exultaverunt) où Mathias Vidal transfigure _ parfaitement ! _ son chant, quel saisissement, qui trouve dans le geste épique de tous mieux qu’une interprétation, une élévation _ tout à fait : en une admirable douceur… Car Gaétan Jarry, derrière le théâtre pétri d’italianismes, n’oublie jamais la spiritualité du verbe comme celle de la musique _ oui _, donnant leur impact aux deux autres motets.

Le Dominus regnavit _ de 1734  _ imposa Mondonville au public du Concert spirituel et restera l’un de ses plus joués _ en effet… _ dans ses fastes où passe le souvenir du grand style de Delalande, sa roide ardeur est magnifiée par l’élan _ oui _ imprimé ici, alors que le ton plus élégiaque, la ferveur aérienne du Cœli enarrant gloriam Dei _ de 1749 _ fusent dans un arc-en-ciel de couleurs.

Album saisissant _ tout à fait ! _, qui rappelle le génie si singulier que le genre du motet aura imprimé aux audaces de bien des compositeurs, de Pierre Robert, de Madin, de Montigny, de Blanchard, moins connus que ceux de Du Mont, Lully ou Delalande, qui tous auront illustré les psaumes avec art, mais aucun n’y aura osé faire entrer à ce point le théâtre ! Splendeur ! _ oui !

LE DISQUE DU JOUR

Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711-1772)
In exitu Israel (Psaume 113)
Dominus regnavit
Cœli enarrant gloriam Dei

Maïlys de Villoutreys, dessus
Virginie Thomas, dessus
Mathias Vidal, haute-contre
François Joron, taille
Nicholas Scott, taille
David Witczak, basse-taille

Chœur & Orchestre Marguerite Louise
Gaétan Jarry, direction

Un album du label Château de Versailles Spectacles CVS063

Photo à la une : Maurice Quentin de La Tour, Portrait du compositeur – Photo : © DR

Une superbe réalisation musicale, enthousiasmante donc, que ces interprétations-ci de Gaétan Jarry !

Ce mercredi 15 juin 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

La merveille Jelyotte (1713 – 1797) magnifiquement servie par Reinoud Van Mechelen : le joyau de musique que constitue le CD « Jéliote, haute-contre de Rameau » (CD Alpha 753)

18oct

Pour qui se réjouit de voir ces moments-ci la musique baroque française des siècles des rois Bourbon (Henri IV, Louis XIII, Louis XIV, Louis XV, Louis XVI) enfin, certes depuis très peu, un peu mieux servie, et au concert, et au disque,

le CD « Jéliote, haute-contre de Rameau« , soit le CD Alpha 753, vient très heureusement constituer un merveilleux et rafraîchissant moment de musique,

très fort et très élevé…

Une formidable réussite !

Le chanteur ténor haute-contre oloronais Pierre Jelyotte (Lasseube, 13 avril 1713 – Estos, 12 octobre 1797), en effet,

représente la perfection _ admirable ! _ du chant français à l’époque de Rameau (Dijon, 25 septembre 1683 – Paris, 12 septembre 1764), et de ses contemporains,

sous le règne de Louis XV

_ cf au passage mon tout récent article, du 16 octobre dernier, à propos de l’histire de la voix de ténor :

Le CD comporte 7 airs _ magnifiques _ de Jean-Philippe Rameau,

extraits de

Hippolyte et Aricie (1733),

Dardanus (version de 1744),

Platée (1745),

Le Temple de la gloire (1745 aussi),

Castor et Pollux (1737)

et Les Boréades (une oeuvre splendide achevée en 1764, mais non représentée alors du fait du décès subit de Rameau ; l’œuvre sera créée à Aix-en-Provence seulement en 1982…) ;

mais aussi 9 autres airs

tirés d’œuvres de 9 compositeurs contemporains de Rameau :

_ de François Colin de Blamont (1690 – 1760) : Les Fêtes grecques et romaines (1723) ;

_ de François Rebel (1701 – 1775) et François Francœur (1698 – 1787) : Scanderberg (1735) ;

_ de Charles-Louis Mion (1698 – 1775) : Nitétis (1741) ;

_ de Jean-Marie Leclair (1697 – 1764) : Scylla et Glaucus (1746) ;

_ d’Antoine Dauvergne (1713 – 1797) : Les Amours de Tempé (1752) ;

_ de Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711 – 1772) : Daphnis et Alcimadure (1754) ;

_ de Pierre-Montan Berton (1727 – 1780) : Érosine (1765) ;

_ de Jean-Benjamin de La Borde (1734 – 1794) : Ismène et Isménias (1763) ;

ainsi qu’un air de Zélisca, une comédie-ballet de Jelyotte lui-même, créée à Versailles le 17 mars 1746…

Le programme ici réuni est absolument splendide ;

et l’interprétation qu’en donne ici Reinoud Van Mechelen, avec l’ensemble A Nocte Temporis, proprement admirable…

C’est toute la foisonnante et rayonnante vie de l’opéra français sous Louis XV qui reprend vie, ici, pour nous…

Soit carrément un CD de 80′ pour l’île déserte…

J’en avais rêvé depuis longtemps, Reinoud Van Mechelen vient de le réaliser !

Et maintenant j’attends un second CD de Reinoud Van Mechelen, avec d’autres airs aussi superbes que Rameau et ses contemporains ont composés pour le merveilleux Jélyotte ;

il y a matière fort abondante pour cela… 

Ce lundi 18 octobre 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

Pour en apprendre un peu plus sur Johannes Pramsohler, violoniste et créateur des disques Audax

13mai

Voici déjà quelques temps que j’apprécie les CDs Audax

que publie _ et interprète parfois _ le violoniste italien (du Sud-Tyrol) Johannes Pramsohler :

ainsi les excellents CDs

Bach & Weiss, par Johannes Pramsohler, baroque violin, et Jadran Duncum, baroque lute (Audax ADX 13706),

Handel Works for keyboards, par Philippe Grisvard (ADX 13709),

French Sonatas for Harpsichord and Violin, par Philippe Grisvard et Johannes Pramsohler, violin (ADX 13710)

et German Cantatas with Solo Violin, par Nahuel Di Pierro, basse, Johannes Pramsohler, violon, Andrea Hill, soprano, Jorge Navarro Colorado, tenor, Christopher Purves, basse, et l’Ensemble Diderot (ADX 13715) _ sur ce dernier CD cf mon article du 28 avril dernier : _

Or voici que le site Res Musica vient de publier hier un excellent article sur le double CD Audax 13710 des Sonates françaises pour clavecin et violon, par Philippe Grisvard et Johannes Pramsohler.

Le voici donc _ avec l’ajout de menues farcissures miennes, en vert _ :

 

SONATES FRANÇAISES POUR CLAVECIN AVEC ACCOMPAGNEMENT DE VIOLON

CD, Musique de chambre et récital

Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711-1772) : Sonata I en sol mineur ; Sonata VI en la majeur.

Louis-Gabriel Guillemain (1705-1770) : Sonata V en ré majeur ; Sonata VI en sol mineur ; Sonata IV en do mineur.

Jacques Duphly (1715-1789) : « La de Casaubon », « La du Tailly », « La de Valmallette » ; « Ouverture », « La de May », « La Madin ».

Michel Corrette (1707-1795) : Sonata IV en mi mineur.

Claude Balbastre (1724-1799) : Sonata I en sol majeur.

Luc Marchand (1709-1799) : Première suite avec accompagnement de violon en la mineur.

Charles-François Clément (c. 1720-1782) : Sonata I en do mineur.

Philippe Grisvard, clavecin ; Johannes Pramsohler, violon.

2 CD Audax Records.

Enregistré en avril 2016 au SWR Studio Kaiserslautern.

Textes de présentation en français, anglais, allemand et japonais.

Durée : 1:50:23

Le claveciniste Philippe Grisvard et le violoniste Johannes Pramsohler nous présentent, pour leur troisième album enregistré en duo, une dizaine de sonates pour clavecin avec accompagnement de violon, genre en vogue sous le règne de Louis XV, dans les années 1740-1760. En offrant un beau bouquet de compositions méconnues, parmi lesquelles cinq sont des premiers enregistrements mondiaux, cette production est une aubaine _ mais oui ! _ pour tous les admirateurs de la musique d’alors.

L’âge du baroque tardif a vu naître en France un nouveau genre de musique instrumentale _ voilà ! _ : la sonate pour clavecin avec accompagnement de violon. Une telle combinaison d’instruments, sous forme de sonates en trio, avait déjà été proposée par Jean-Sébastien Bach pour son cycle BWV 1014-1019, composé aux alentours des années 1720-1723, pour lequel, cependant, la voix supérieure du clavecin et celle du violon étaient mises sur un pied d’égalité, tandis que pour les sonates françaises, la partie de violon était estimée de moindre importance par rapport au rôle tenu par l’instrument à clavier _ telle est donc la différence…

En parlant de cette innovation, nous pouvons résolument utiliser le terme _ expression plutôt _  de « révolution esthétique » car, jusqu’alors, dans la musique pour plus d’un instrument, que ce soient des sonates ou des suites, l’accompagnement était destiné à être réalisé par le continuo _ voilà. Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville décide – en vue d’explorer de nouvelles manières de s’exprimer – de confier au clavecin aussi bien la basse qu’une voix de dessus, et de les enrichir de « commentaires » donnés par une seconde voix de dessus exprimée par le violon. C’est ainsi qu’il fait publier, en 1740, ses Pièces de clavecin en sonates avec accompagnement de violon. Dans l’avant-propos de ce recueil, il note : « Il y a peut-être plus que de la témérité à donner aujourd’hui de la musique instrumentale au public. On a mis au jour depuis quelques années un nombre si prodigieux de sonates de toute espèce qu’il n’est personne qui ne croie que ce genre est épuisé. Cependant […] je me suis appliqué à chercher du nouveau » _ oui.

D’une part, les sonates de Mondonville présentent une division en trois mouvements empruntée à la sonate italienne ; d’autre part, on y perçoit un certain raffinement des lignes et le culte du détail caractéristiques de la musique française de l’époque _ bien sûr !

Le paysage de la musique de chambre en France fut dès lors changée de manière considérable. D’autres recueils, publiés par les contemporains de Mondonville, lui ont succédé : les Sonates pour le clavecin avec un accompagnement de violon que Michel Corrette fait éditer en 1742, pour lesquelles il affirme qu’elles peuvent être exécutées « sur le Clavecin seul », et celles de Charles-François Clément (1743), pour lesquelles la position du violon est affermie (du moins d’après leur titre : Sonates en trios pour un clavecin et un violon) par rapport à celle du clavecin. En 1745 voient le jour les sonates de Louis-Gabriel Guillemain, pour lesquelles la partie de clavecin, très athlétique, surpasse, du point de vue des difficultés techniques, celle laissée par Mondonville ; puis en 1747 sont publiées les suites de Luc Marchand, dans lesquelles le clavecin se voit rejoint non seulement par le violon, mais également par d’autres instruments ; en 1748 paraissent trois Pièces de Clavecin en Sonates avec accompagnement de violon de Claude Balbastre ; finalement, Jacques Duphly fait sortir, en 1756, son Troisième Livre de Pièces de Clavecin, renfermant six courtes pièces écrites selon le modèle laissé par Mondonville _ cet éclairage historico-musicologique est très intéressant.

Prestations puissantes, élégantes et ciselées

Pour ce qui est des exécutions, Philippe Grisvard et Johannes Pramsohler mènent une conversation galante _ voilà _ qui, malgré un léger manque de théâtralité rhétorique, convient étonnamment au goût français, en s’inscrivant dans la tradition qui consiste à mettre en lumière aussi bien la beauté même de la musique que la richesse des nuances _ oui : un goût français _ dont celle-ci s’accompagne. C’est ainsi qu’on admire la netteté du contour et la maîtrise des ornements (dont la majorité ont été annotés de la main des compositeurs _ c’est à souligner : marquant un tournant d’époque _), de même que l’importance de la mise en valeur de la pulsation _ oui _ et, pour la plupart des mouvements extrêmes, d’une certaine vivacité des tempi. Celle-ci accuse le côté expressif, voire émotif _ oui : anticipant en quelque sorte le moment de l’empfindsamkeit _ de ces partitions, et pourtant, n’affecte pas leur charme ni leur grâce, en y apportant au contraire de la fraîcheur _ très bien.

Pour la plupart des compositions présentées dans cet album, le violon s’implante _ voilà _ au sein du tissu acoustique du clavecin afin de perfectionner la partie de ce dernier, conçue comme un centre de gravité _ voilà _ autour duquel tourne son satellite. Si dans cet enregistrement l’instrument à clavier se caractérise par un geste simple et introverti (ce qui ne veut pas dire qu’il a tendance à se retirer du dialogue), à savoir étudié plutôt que spontané, et équilibré plutôt qu’impératif – en quelque sorte, le contraire de ce que nous propose Christophe Rousset dans sa récente interprétation de la Sonate en sol majeur de Balbastre –, le violon se montre un meneur de jeu éblouissant _ voilà _ de virtuosité (sonates de Mondonville et Guillemain), de poésie (celle de Corrette), de tendresse (celle de Clément) et de douceur (la suite de Marchand et la sonate de Balbastre) _ c’est remarquablement dégagé.

Accordés à une fréquence de 415 Hz, les deux musiciens déploient une belle sonorité baroque, se distinguant par un large éventail de teintes et, surtout pour le violoniste – jouant d’un instrument construit en 1713 par Pietro Giacomo Rogeri, ayant appartenu à Reinhard Goebel à l’époque des plus grands succès de Musica Antiqua Köln – par une articulation agile, précise et, à la fois, élégante _ à la française. Les phrasés « chantants » de Johannes Pramsohler impressionnent autant par la délicatesse et la densité que par la clarté, voire la luminosité du timbre _ mais oui. On doit admettre que cet instrument a trouvé un digne successeur ! _ à Reinhard Goebel…

Voici une belle proposition discographique _ oui _ dont ne peuvent se passer les amoureux de la musique instrumentale baroque _ en un des pans méconnus. En trouvant le plaisir d’écouter les enregistrements offerts par le tandem de luxe Philippe Grisvard-Johannes Pramsohler, il faut espérer que ce répertoire continuera à être exploré.


Merci à Maciej Chiżyński de cette qualité d’écoute,

au service de l’intelligence de sa propre curiosité musicale.

..

Et la passion de la curiosité est immensément féconde.

Et merci à Res Musica.

Ce dimanche 13 mai 2018, Titus Curiosus – Francis Lippa

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