Posts Tagged ‘majesté

Le répertoire méconnu du Grand Siècle français : l’oeuvre de clavecin de Nicolas Lebègue (ca 1631 – 1702)

08juil

Ce jour,

Jean-Charles Hoffelé consacre son article de Discophilia,

intitulé Grand Siècle,

à un triple CD

des Pièces de clavessin (de 1677) et du Second Livre de Clavessin (1687) de Nicolas Lebègue (ca 1631 – 1702),

interprétées par AgustÍn Álvarez,

en un triple album Brilliant 95671

sur un clavecin d’Andrea Restelli (Milan, 2005), d’après Pascal Taskin (1769).

GRAND SIÈCLE

Étrange. Le deux Livres de Nicolas Lebègue _ Laon, 1631 – Paris, 6 juillet 1702 _ n’auront _ en effet _ guère reçu les faveurs des clavecinistes, Bibiane Lapointe se risquant en 1997 à une fugitive anthologie _ chez Pierre Verany ; et en voici le podcast…  _, puis plus rien _ sinon un autre CD, par Paola Erdas : le CD Stradivarius 33673, enregistré en 2002 ; cf l’article de Cédric Costantino, Nicolas-Antoine Lebègue par Paola Erdas, De la Gravité dans la musique française, sur le site de Res Musica, le 26 mai 2005. Les claviéristes auront décidément préféré son œuvre d’orgue, premier fruit de son art et de sa charge : sa vie durant, Lebègue fut l’organiste de Saint-Merri.

Agustín Álvarez grave donc en première mondiale l’intégrale de son œuvre de clavecin, je m’étonne de le retrouver devant le si sonore Restelli d’après Taskin, sorti des ateliers du facteur en 2005, je le savais surtout pianiste, élève d’Esteban Sánchez, j’avais oublié qu’il avait appris à toucher du clavecin auprès de Christophe Rousset.

Son Premier Livre ne manque pas d’aplomb, très Grand Siècle, marquant les rythmes des danses, préludant avec une éloquence dont Bach se souviendra, mais il va plus loin encore dans les Suites plus libres (adieux aux Préludes) du Second Livre, incarnant le ballet de cour que semble animer ces Sarabandes et ces Passacailles si nobles de traits, si majestueuses de gestes : chez Lebègue, même les Gigues sont aristocratiques.

Le coffret sera indispensable _ oui ! _ aux amoureux du premier clavecin français. Écoutant la Passacaille de la Suite en sol du Second Livre et sa déclamation lullyste, je me dis que cette musique aurait trouvé une interprète idéale en Blandine Verlet ; que le clavecin hardi d’Agustín Álvarez m’y fasse songer est le plus beau compliment que je puisse adresser à son admirable travail.

LE DISQUE DU JOUR

Nicolas Lebègue (1630-1702)


Pièces de clavecin, Livres I & II (1677, 1687)

Agustín Álvarez, clavecin
(clavecin A. Rastelli, 2005, d’après P. Taskin, 1769)

Un coffret de 3 CD du label Brilliant Classics 95671

Photo à la une : la page de garde du manuscrit du Premier Livre, de 1677 – Photo : © DR

Ce mercredi 8 juillet 2020, Titus Curiosus – Francis Lippa

Savoir interpréter les Lieder et Mélodies de Liszt : André Schuen, baryton, après Cyrille Dubois, ténor

17déc

Le mardi 5 novembre dernier

en mon article  ;

puis le lundi 25 novembre suivant,

en mon article ,

j’ai souligné la délicieuse performance du jeune ténor français Cyrille Dubois _ né en 1985, il a 34 ans _

dans un magnifique récital O lieb ! _ soit le CD Aparté AP200 _, accompagné par l’excellent pianiste Tristan Raës.

Et voici que nous est proposé un nouveau très remarquable CD de Lieder et Mélodies de Liszt,

intitulé Franz Liszt Petrarca Sonnets 47 – 104 – 123 _ le CD Avi-music 8553472 _

par le non moins jeune baryton allemand André Schuen _ né en 1984, il a 35 ans _,

accompagné par le non moins remarquable pianiste Daniel Heide.

Ces deux CDs ont en commun

les Tre Sonetti di Petraca

ainsi que la mélodie française, sur des vers de Victor Hugo, Oh ! Quand je dors.

A cette nuance près qu’André Schuen interprète les deux versions, de 1842-46 et de 1864-82,

de ces Tre Sonetti di Petrarca pour voix et piano

_ Daniel Heide interprétant la version pour piano seul de ces Tre Sonetti di Petrarca, extraites de la Deuxième année : Italie, des Années de pèlerinage, de Liszt ; cf mon article du 27 juin dernier à propos de l’interprétation par Francesco Piemontesi (CD Orfeo C 982 191) de ces mêmes Tre Sonetti di Petrarca pour piano seul : _,

alors que Cyrille Dubois en interprète seulement la première version (de 1846).

Quant à la mélodie Oh ! Quand je dors,

André Schuen en interprète la version de 1842 revisitée en 1859,

alors que Cyrille Dubois en interprète la seconde version, de 1859.

Et voici ce qu’a dit du CD d’André Schuen et Daniel Heide

Maciej Chiżyński en un article sur le site de Res Musica du 14 décembre dernier,

intitulé Tre sonetti del Petrarca de Franz Liszt dans trois versions du compositeur :


Tre sonetti del Petrarca de Franz Liszt dans trois versions du compositeur

 


Une confrontation d’interprétations passionnante,

pour deux très remarquables CDs.

Ce mardi 17 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un délicieux petit livre en hommage à un très grand photographe : Willy Ronis (1910-2009)

22sept

Pour saluer l’immense Willy Ronis qui vient de nous quitter (14 août 1910-12 septembre 2009),

ce tout simple mais magnifique volume « Willy Ronis« , par Paul Ryan, de la très soignée collection « 55«  (c’est-à-dire comportant 55 photos ; et paru en mai 2002) des très soignées Éditions Phaidon ; dont chacune des photos est accompagnée d’un très remarquable commentaire, précis et sobre (et juste !), indiquant les circonstances et la particularité de chacune de ces « saisies » _ « J’essayais juste de surprendre le temps« , disait très humblement Willy Ronis de son activité de photographie…

Je retiendrai tout particulièrement, parmi les 55 images de ce recueil, les photos de son épouse, Marie-Anne Lansiaux (1910-1991) : celle de 1949 _ Marie-Anne a trente-neuf ans _, en leur maison de Gordes, « Le Nu provençal« , page 51 et choisie, aussi, pour la couverture du volume, tel un Bonnard (avec Marthe) en noir et blanc : une splendeur de lumière

_ je m’avise en relisant le texte de présentation de Paul Ryan, pages 3 à 15, que la comparaison (avec Bonnard et avec Marthe) vient aussi à la plume de Paul Ryan :

« Sa photographie la plus célèbre, « Le Nu provençal«  (page 51), peut rappeler les portraits de Marthe par Bonnard, mais l’analogie va bien au-delà du sujet et du cadre. Par son caractère familier authentique et sa réelle intimité, l’image évoque ces moments à couper le souffle, nés d’un regard négligent posé sur un être aimé, qui soudain comble le cœur. Comme chez Bonnard, dont les peintures de Marthe, sa femme, la montrent toujours dans l’éclat de sa jeunesse, Ronis photographiant son épouse, Marie-Anne, la maintient dans le temps et la garde dans son éternelle jeunesse. Là se trouve _ en effet ! et je sais combien Bernard Plossu m’approuvera ! _ le vrai point commun avec Bonnard : l’acte de mémoire et d’amour«  _ ;

ainsi que celles de leur fils Vincent (1940-1988 : « Vincent se tue en 1988 dans un accident de deltaplane » ; « et Marie-Anne, dont Ronis a si lumineusement fixé le souvenir par un après-midi provençal, succombe en 1991, frappée par la maladie d’Alzheimer« , page 14) :

« Vincent endormi, Paris, 1946« , page 33 ;

« Vincent aéromodéliste, Gordes, 1952« , page 55 ;

« Montmartre, Paris, 1960« , page 77.

Tout un destin se lit dans cette séquence de trois photos ; et tout particulièrement dans celle, merveilleuse d’élan et de lumière, de 1952 (Vincent, lançant l’avion blanc, a douze ans) :

de même que la maquette d’avion lancée ici par l’enfant allait « s’abîmer » « sur les rochers _ juste en contrebas du jardin de la maison de vacances de Gordes _ lors de l’atterrissage« , en cet été 1952,

Vincent se tuerait en un accident de deltaplane en 1988 :

je lis le commentaire de Paul Ryan, page 54 :

« Voilà un exemple fort rare de photo mise en scène par Ronis. Pendant des vacances familiales, il espérait prendre son fils Vincent, alors âgé de douze ans, en train de lancer une maquette tout juste terminée. Mais Vincent, redoutant les rochers situés au-delà du jardin, refusait. Ronis dut lui promettre de lui faire un cadeau spécial s’il acceptait de lancer son modèle. Il ne prit que deux clichés. Le premier, en extérieur, n’était pas satisfaisant. Pour celui-ci _ de cette page 54 _, Ronis décida de prendre pour cadre la fenêtre de la cuisine de la maison de vacances. Les craintes de Vincent se révélèrent fondées, et l’avion s’abîma sur les rochers lors de l’atterrissage« …

Et le commentaire « Montmartre, Paris, 1960 » de la page 76 :

« Il s’agit là d’un autre exemple _ rare, il est vrai _ de mise en scène. Alors qu’il faisait des portraits de Vincent, qui en avait besoin pour son portfolio de jeune comédien, Ronis vit un jeune couple qui s’embrassait dans une rue de Montmartre. Il demanda à Vincent de s’asseoir sur un banc et de prendre l’air triste « comme s’il venait de constater l’infidélité de sa belle »… »

Qualifier de « photographie humaniste » l’œuvre de Willy Ronis

ne fait que témoigner de la non-humanité _ grossière, vulgaire _ de tant d’autres, seulement ; et hélas…

Titus Curiosus, ce 22 septembre 2009

Post-scriptum :

Je complète, ce 23 septembre, l’aperçu _ sur l’œuvre merveilleux  (des trois-quart du XXème siècle ! « 1925-2002« , dit-il lui-même) de Willy Ronis _ de cet article

par une brève évocation _ en quatre photos d’intimité familiale, encore _ de ce petit bijou que donna à Willy Ronis l’occasion de nous offrir Colette Fellous dans sa magnifique collection « Traits et portraits » du Mercure de France _ et ressorti en Folio en octobre 2008 _ :

« Ce Jour-là«  ;

dans lequel Willy Ronis commente lui-même sa sélection de (54) photos.

Je retiens
, encore, celles de Marie-Anne et de Vincent,

soient :


« Marie-Anne dans un village du Tessin, 1962« , pages 62-63 :

un chef d’œuvre de grâce !

en « un petit village du bout du monde, qui s’appelle Mergoscia« , page 64, Willy et Anne-Marie logeant en « une maison paysanne, où vivait un vieux couple« , page 65 ; « ce couple était tellement gentil qu’on a eu envie de rester encore un peu ici. C’est au moment où nous avons décidé de passer une nuit de plus dans cette maison que j’ai soudain voulu garder un souvenir et photographier Marie-Anne« , page 65 aussi : le portrait de Marie-Anne reposant sur l’escalier de pierre de la maison montagnarde « du bout du monde » est sublime !!!

« La Sieste, Gordes, 1949« , page 112 :

« j’ai soudain été saisi par le calme de ce moment, découpé dans l’après-midi. Sa beauté, presque sa majesté«  _ absolument ! la scène est irénique !!! _, pages 113-114…

« La corvée d’eau, Gordes, 1948« , page 118…

« La Vieille dame dans un parc, Nogent-sur-Marne, 1988 » _ il s’agit d’Anne-Marie, atteinte de la maladie d’Alzheimer… :

« Anne-Marie donnait des signes de fatigue« , page 159 ; « Marie-Anne _ presque indiscernable ici _ fait partie de la nature, du feuillage, comme un petit insecte dans l’herbe« , page 160… ; « ma photographie dirait le retour à la terre, imminent« , page 159 _, page 161…

« Marie-Anne et Vincent jouant aux boules de neige, 1954« , page 184 :

« le décor est un peu baroque et fait penser à certains dessins japonais ou chinois » _ vraiment ! _, page 185 : une danse entre des branches !.. « Ce jour-là _ celui-là même du titre retenu, « Ce Jour-là« , pour ce merveilleux immense petit livre de la collection « Traits et portraits » ! _ ;

ce jour-là, j’ai arrêté la voiture près d’une clairière et j’ai demandé à Marie-Anne et à Vincent d’aller jouer dans la neige. Il avait neigé tout le week-end _ ce fut la mémorable grande chute de neige de 1954 ! _ et nous étions allés nous promener à la campagne, dans les environs de Paris. C’était un jour heureux. (…) Une petite scène-surprise, comme ça, au cœur de l’après-midi« Tout est dit (et splendidement sobrement montré) !

Chercher sur mollat

parmi plus de 300 000 titres.

Actualité
Podcasts
Rendez-vous
Coup de cœur