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En forme de post-scriptum à mon article d’hier soir sur l’expérience bouleversante de lire vraiment le « Toute la nuit » de Philippe Forest, relire l’article sur « l’urgence et la liberté de l’expérience du vivre » que constitue la lecture de son magistral « Le Siècle des nuages », de 2010…

09oct

Hier soir,

au moment d’achever de rédiger _ il était tard _ mon article-courriel « « ,

je n’ai pas pris le temps de relire cet autre article, en date du jeudi 28 octobre 2010 _ je me suis simplement contenté de donner le lien pour renvoyer à sa lecture… _ « « ,

que j’avais consacré à mon expérience _ très intense _ du lire son formidablement puissant, mais cette fois, en 2010, bien plus détaché _ des émotions originaires qui en étaient la source ardente, vive ; d’où mon expression significative de « à ce degré de tension calme«  _, mais tout autant, oui, simplement d’une autre façon _ plus apollinienne, si l’on veut, moins dionysiaque ; mais chaque grande œuvre n’a -t-elle pas son mode de vie singulier, voire absolument singulier ? unique même ?  mais oui !… _,  admirable, « Le Siècle des nuages » de 2010par rapport à son extraordinairement subjuguant « Toute la nuit » de 1999 ;

et donc second _ à mes yeux _ et à nouveau absolu chef d’œuvre de Philippe Forest, paru donc en 2010.

Revoici donc le lien à ce très détaillé _ et rétrospectivement, à sa relecture aujourd’hui dimanche 9 octobre 2022 (soit quelques 12 ans plus tard, assez éclairant _ article du 28 octobre 2010,

« « ,

sur ce chef d’œuvre absolument majeur, à nouveau, après le « Toute la nuit » de 1999, qu’est « Le Siècle des nuages » de 2010…

la vive lumière, au milieu du brouillard, du « Siècle des nuages », de Philippe Forest : une oeuvre majeure sur l’urgence et la liberté de l’expérience du vivre

— Ecrit le jeudi 28 octobre 2010 dans la rubriqueHistoire, Littératures

Philippe Forest

_ cf mon article d’avant-lecture de ce prodigieux roman qu’est Le Siècle des nuages, le 19 septembre dernier : Sur l’écrivain Philippe Forest : un très grand ! A propos des nuages, la transcendance au sein de (et avec) l’immanence _

est un écrivain absolument majeur _ nobélisable ! si l’on préfère : au moins je serai clair ! et en espérant que ce soit là un compliment ! Il y a là une telle dose difficilement supportable de « politiquement correct«  si superficiellement circonstanciel.. _ d’une lucidité confondante assez rare _ à ce degré tant d’intelligence que de sensibilité : l’une l’autre s’éclairant réciproquement magnifiquement à ce degré de tension calme _ dans la littérature française,

avec pareille intensité, ampleur et justesse, à la fois, de vue _ admirables : tant de finesse que de puissance ! _ à l’ère de l’empire _ commercial, lui… _ des petits formats que l’édition met bien obligeamment à la disposition de lecteurs désireux de divertissements légers et confortables pour rien qu’une heure, ou à peine plus, « à tuer« … : la marge d’hédonisme dilettante _ soit, un minimum de plaisir à l’exclusion, surtout, de la moindre peine ! _ des dits-lecteurs-consommateurs (d’entertainment !) n’en supportant pas plus…

 

En 556 pages, réparties en neuf chapitres

autour de 9 dates concernant et l’histoire de l’aviation durant le vingtième siècle, et _ fortement tissée à elle… _ l’histoire de son père, Jean V. Forest, né le 17 septembre 1921, à Mâcon, et mort le 26 novembre 1998, à Paris ; et pilote pour la compagnie Air-France de février 1946 au 30 septembre 1981,

quand, pour « son soixantième anniversaire passé depuis une dizaine de jours, mais profitant jusqu’au bout du sursis que lui laissait la compagnie, il se pose pour la dernière fois sur l’une des pistes de l’aéroport Charles-de-Gaulle, faisant rouler son appareil jusqu’au pied de l’un des satellites qui entourent le terminal« , page 472 du Siècle des nuages

_ neuf chapitres,

plus un prologue et un épilogue : cruciaux ;

le prologue, du côté du silence (et de la mort du père, Jean Forest : le 26 novembre 1998 : « en fin de matinée, il était sorti pour promener son chien, et, à quelques pas de la porte de l’immeuble, il s’était soudainement et sans raison apparente écroulé sur un des trottoirs de la rue de la Procession. Couché face contre terre« .., page 503) ;

et l’épilogue, du côté de la mère, née Yvonne Feyeux ;

et des conversations que le narrateur, Philippe Forest, leur fils (le quatrième d’une fratrie de cinq : Marie-Françoise, Patrick et Claude, nés entre 1946 et 1952, avant Philippe ; puis Philippe, né le 18 juin 1962 ; et enfin, le petit dernier, Pierre, né en 1964), va avoir et poursuivre avec elle, en la vieillesse tardive (elle est née le 2 novembre 1922) de sa mère (vieillesse marquée, notamment, par trois opérations importantes, qui la remettent à peu près sur pied en lui rendant et quelque chose d’une démarche de jeunesse, et la vision des couleurs !) dans la première décennie du nouveau siècle (qui n’est plus celui des nuages !) : la clé de tout, bien sûr !!! _,

et en des phrases souvent _ délicieusement _ très longues _ comme je les aime : à tiroirs et avec incises ; à la façon d’opérer de la mémoire… _ et _ somptueusement ! _ précises _ comme il le faut aux plus beaux des livres : ceux de Proust, Joyce ou Faulkner ; et Claude Simon… _ ;

l’auteur multipliant, et à son rythme (sans jamais ni de longueur, ni de précipitation : par quelque prurit de coupure !) les reprises, variantes, corrections ou inflexions de son narrer-penser (c’est prodigieux de puissance de vérité !!! tout en souplesse et justesse, par l’infini des nuances, de précision), infiniment scrupuleux de la probité de la vérité de ce qu’il sait nous révéler-témoigner, ainsi, de l’expérience se formant du réel !!! à rebours des clichés facteurs (et fauteurs) d’illusions, qui courent les consciences pas assez rigoureuses…

D’abord, on se laisse entraîner à penser qu’il pourrait bien s’agir, ici, avec ce livre-hommage, d’une sorte de « tombeau de mots » que l’écrivain _ à deux ou trois reprises, même s’il a la délicatesse de ne pas se l’appliquer à lui-même, l’auteur du  emploie le mot on ne peut plus clair (et juste !) de « poète«  _ élève _ en l’espèce de ce livre-ci, Le Siècle des nuages, donc _ à son père disparu :

mort, écroulé, face contre le sol, rue de La Procession, le 26 novembre 1998 ; et dont les cendres ont, quelques mois plus tard, été inhumées (« déposées ») « dans le vieux caveau suintant et délabré«  (page 514) familial _ du côté de la mère de Jean, la belle Isabelle, aux allures de Marianne : la fille du riche « soyeux«  demeuré toute sa vie anti-dreyfusard… _, au cimetière (page 31) de Vieu-d’Izenave, non loin de leur propriété du Balmay (page 79), « à proximité du lac de Nantua, dans ce que l’on nomme « la montagne à vaches » », dans l’Ain : Jean Forest y rejoignant ainsi les restes de ses parents…

Et selon un geste (d’écriture, donc : Philippe Forest, le fils, n’est-il pas un écrivain ?!..) que le narrateur-auteur compare, tout à la fin de son prologue, à la pratique _ catholique : la foi de Jean… : je vais y revenir ; c’est un élément crucial pour comprendre le geste (du fils, auprès de son père, disparu) qu’est ce livre… _ de l’ »ondoiement«  (le mot se trouve à la page 32) :

« Contemplant ce corps, constatant l’évidence ordinaire du désastre, pas plus ému qu’il ne convient devant une telle mort, celle d’un homme étant réglementairement allé au bout de ses presque quatre-vingts ans de vie, se disant cependant que cette dépouille ne suffisait pas, qu’il y manquait des mots _ même insignifiants ou impropres. Car ce n’est pas le corps par quoi tout commence ou tout finit, mais les mots que l’on dit sur lui« , commence-t-il par constater, pages 29-30 ;

ajoutant aussitôt encore, page 30 :

« Des mots, les mêmes pour recevoir les vivants dans le jour et puis les congédier vers la nuit. Mots de prêtre ou de poète _ le poète : un substitut de la sacralité en temps d’un peu plus (à peine… Cela se mesure en degrés infiniment fins ; l’important demeurant la visée du fondement !) d’incroyance ; ou tout du moins d’une croyance un peu plus inquiète (ou exigeante, en terme de rationalité) de ses propres assurances de fondement ; un poil moins naïve, peut-être, sur ses propres fondations : cf ce mot de ce profondément juste que fut Spinoza : « la religion, une philosophie pour le peuple« … _ qu’à défaut tout le monde, et même le premier venu, peut prononcer car ils ne dépendent ni de la dignité ni du talent de celui qui les dit, paroles emphatiques appelant pathétiquement au secours n’importe quelle divinité, n’importe quelle fiction dans le ciel vide de façon qu’une histoire existe malgré tout, même si on la sait mensongère _ c’est-à-dire pas tout à fait vraie, et donc, dans l’absolu, impropre _ :

non pas dans l’espoir de vaincre l’oubli ou d’obtenir de lui un sursis

mais seulement _ voilà ! avec une humilité ferme ! _ de manifester une fois, une seule fois _ voilà ! et là est le miracle de la poiesis éclaboussante de la survenue de et par l’écriture  _ que quelque chose _ simplement, parmi la foule des autres choses qui peuplent les vies _ aura été dans le temps contre quoi le temps lui-même, quand il aura _ du fait de son simple passage : les jours et les nuits, comme les générations de vivants, se succèdent les uns aux autres, et quasi se remplacent ainsi les uns les autres… _ effacé cette chose, n’aura rien pu _ voilà : contre le mot de Staline (et de tous les cyniques), il importe de réaffirmer que, non, ce n’est pas « la mort qui, à la fin, gagne« complètement ! Jusqu’à pouvoir nier ce qui a été ! et jusqu’au fait même que cela a jamais été ! Non ! Cela ne peut pas devenir rien que mots, rêve, imagination, fumée (cendres, ce serait encore trop : de l’ordre de l’éventuelle « trace« ; là-dessus, cf l’important « Mythes emblèmes traces _ Morphologie et histoire«  de Carlo Ginzburg, qui vient de reparaître en une édition augmentée, et avec une traduction revue, par Martin Rueff, aux Éditions Verdier : un livre passionnant !), pur et simple néant… _,

n’aura rien pu _ le mot, ou plutôt l’expression, est ainsi répété(e) dans le texte ! _contre le fait _ voilà : indéniable et ineffaçable : in-anéantissable ! _ qu’elle ait été« , page 30, donc : c’est admirable de délicatesse et probité dans la justesse !..

_ Spinoza nomme cela, ce constat-là, cette « manifestation« , cette déclaration, voire cette proclamation (fût-ce seulement rien qu’à soi-même) -là, pourvu qu’elle ait été formulée en des mots constituant quelque chose comme une phrase, et quasi proférée, fût-ce dans le presque silence d’une pensée n’allant peut-être même pas jusqu’à se matérialiser en une parole sonorement audible, de fait ;

eh bien, Spinoza, dis-je, nomme ce fait solennel-là, quand c’est nous-même qui le ressentons, la conscience (doublant celle de la temporalité, qui la conditionne !), ressentie et expérimentée, de l’éternité : « Nous sentons et nous expérimentons que nous sommes éternels« , dit-il ainsi, très précisément, en son Éthique,

tout en ne cessant, bien évidemment pas, nous qui le ressentons en nous-même, alors, à cet instant vertical-là, d’être et de demeurer, nous (ou soi !), et tout le temps de notre vivre, on ne peut plus effectivement temporels aussi, d’un seul et même mouvement de ce vivre, c’est-à-dire des vivants-mortels ;

en éprouvant, de ce sentiment d’éternité (et c’en est même là le signe : c’est par là qu’il se signale expressément à nous !) les effets bienfaisants et féconds dans l’expérience rayonnante (immédiatement !) de la joie,

onde calme et profonde, dans la vibration discrète de laquelle nous ressentons, en effet, et on ne peut plus positivement, tels des pics qui surviennent et, d’un coup, vigoureusement, nous portent, transportent, soulèvent, verticalement, en effet, à l’occasion, qui n’est pas forcément fréquente (ce n’est pas tout à fait sur commande !) ;

dans la vibration de laquelle, donc, nous ressentons le (radieux !) passage transfigurant de nos capacités (natives) à une puissance véritablement supérieure s’épanouissant ainsi bienheureusement alors : Spinoza nommant cette expérience-là de transfiguration de soi, à terme, « béatitude« …

Mais bien sûr, nous une fois mort, ce ne peut être qu’un autre qui témoigne, ou vienne témoigner, pour nous, que nous avons ainsi été,

nous-même venant, et irréversiblement, de nous absenter, voilà, de la vie (passagère),

à jamais, le pur instant du disparaître (-mourir…), re-converti en ce néant (de poussière : d’étoiles ou d’humus, glèbe) dont nous avons un jour été tiré, par le hasard fécondant de la conjonction amoureuse, ou aimante, de nos deux parents…

Le pluriel de ce « nous«  désigne à la fois le pluriel du genre (= celui de la communauté d’appartenance des individus à une espèce, biologique), et un pluriel de majesté (= celle de la dignité, humble, mais noble, très haute, de la personne, morale, si l’on veut)…

Et fin, ici, de cette (trop) longue incise spinozienne sur le moteur, si puissamment merveilleux, pour les heureux qui connaissent, y ayant inoubliablement accédé, son étrangeté peu banale, rien à voir avec le plaisir ! qui lui se commande.., de la « joie« 

Et reprise de (ou retour à) la présentation du prologue

_ moins serein, lui, plus sombrement inquiet, pour ne pas être tout à fait, ni en permanence, « de l’intérieur de«  cette radieuse « béatitude«  blanche (spinozienne) -là, mais « au milieu du brouillard«  épais et tournoyant, tirant à l’aventure sur le noir le plus violemment dense de l’Érèbe, des plus gros des nuages, lui…du Siècle des nuages, que je cite à la page 31 maintenant,

Philippe Forest poursuivant le récit, intense, au participe-présent, de sa décision de témoigner de ce que fut son père _ soit « ce qu’a pu être une vie« , selon la formulation inquiète de la page 29 : celle de son père, achevée certes, son corps « affalé en plein air sur un trottoir parisien » et « le visage tourné vers le sol » (page 29), rue de la Procession, le matin du 26 novembre 1998, mais telle qu’elle a bel et bien été ! _ :

« N’espérant _ certes _ aucune consolation des mots. N’ayant d’ailleurs pas besoin d’être consolé. Sachant qu’aucun secours n’existe qui vienne d’eux _ voilà. Mais qu’ils exigent _ voilà ! voilà ce qu’est l’humanité de l’humanité ; ou sa non in-humanité, ainsi que le dirait Bernard Stiegler _

qu’ils exigent

pourtant d’être dits _ ne serait-ce que sous la forme mutique _ humble et probe _d’une prière faite par n’importe qui et pour personne« , page 31 : c’est sublime de justesse !

« Un signe ? Oui, en somme. Ni celui du baptême, reçu il y a bien longtemps, ni l’extrême-onction qu’un prêtre, à la demande de ma mère, avait accepté de lui donner sur le brancard où il gisait déjà mort dans l’un des couloirs de l’hôpital,

mais peut-être ce sacrement que l’Église nomme l’« ondoiement »

et dont le vieux catéchisme dit que n’importe qui, si c’est nécessaire, peut le prononcer _ en effet _, sans même avoir à être baptisé ou seulement croyant, et peut-être longtemps après qu’il est en principe trop tard pour le faire ou dans d’autres circonstances que celles pour lesquelles il est prévu, car l’Esprit saint n’est _ généreusement ! _ pas très regardant, les formalités _ non plus que la mesquinerie _ ne sont pas son fort, et il lui suffit que quelqu’un fasse à peu près le geste qu’il faut, se dispensant des rites, n’ayant aucune foi en eux ou presque, pour qu’il descende malgré tout _ voilà _ dans un battement d’ailes, inaperçu, déguisé en pigeon parisien _ par exemple _, son plongeon en piqué le faisant tomber d’en haut d’où il vient et vers où il retourne aussitôt, ayant fait seulement briller un instant _ cela humainement suffit _ la gloire invisible de sa chute _ la gloire sacrée ! _ sur la scène _ ici de mort, plutôt que de crime _ insignifiante _ sous d’autres aspects… _ où un médecin et quelques ambulanciers s’agitent autour d’un corps étendu dont le cœur a soudainement cessé de battre », page 32.

« Alors quand ? Maintenant ?

Oui, allons-y pour maintenant _ en cette sorte de roman-ci qui s’écrivait alors, qu’est Le Siècle des nuages.., et pour ces phrases-ci, page 33 _ s’il faut commencer.

Sur le front de chacun de nous, mes deux frères, mes deux sœurs, moi, sur nos crânes de nouveaux-nés lorsqu’il avait pu nous prendre pour la première fois dans ses bras, notre mère le raconte, il avait fait chaque fois ce même geste discret _ = très humblement sacré _ de la main droite, le pouce traçant comme un évasif signe de croix, nous marquant ainsi pour le cas où la mort nous aurait réservé la mauvaise farce de nous enlever avant qu’un prêtre ait pu procéder avec nous dans les règles.

Et lui rendre ce geste _ voilà ! _ était donc la moindre des choses

maintenant que, lui, il franchissait dans l’autre sens la frontière qui sépare du néant _ et de sa nuit totale _,

ni plus lourd ni plus léger de péché qu’au premier jour, puisque la tache originelle d’être né pèse d’un poids tel que tous les vices et toutes les vertus d’une vie ne l’allègent ni ne l’alourdissent vraiment _ puisque c’est là, et demeure, le credo, même athée, de Philippe Forest…

Non pas à la manière d’un viatique vers le ciel _ car il en connaissait mieux que quiconque, et certainement mieux que moi, le chemin.

Plutôt comme une sorte de grande et dérisoire _ voilà l’oxymore… _ parole _ à peine prononcée, ou même muettede compassion _ humaine, donc ! pour avoir supporté le poids (et l’épreuve : tourmentée) de cette vie mortelle (qui vient de s’achever) ! _

dont la valeur ne dépend donc ni de celui qui la dit ni de celui auquel elle s’adresse car elle concerne en vérité tous les vivants à la fois, elle les prend ensemble _ elle le leur doit ! afin de témoigner simplement et humblement, mais dignement et sacrément, aussi, de leur inaliénable dignité de sujets humains ayant vécu une vie… _ dans sa miséricordieuse merci

_ « Frères humains qui après nous vivez, N’ayez les cœurs contre nous endurcis, Car si pitié de nous autres avez, Dieu en aura plus tôt de vous merci« , dit, à propos de la « miséricorde« , Villon en sa ballade… _

et elle signifie aux innocents comme aux coupables le même _ absolument universel et absolument singulier, à la fois _ et inutile _ puisqu’il n’est en rien de l’ordre de l’« intérêt«  ! _ pardon pour la faute _ et en est-ce donc une ? et si pesante ? _ exclusive d’avoir vécu » _ aurait-il donc mieux valu n’être jamais né, et n’avoir pas vécu ? Non ! _, page 33 ;

et sur ces mots _ puissants _ s’achève le prologue…

Mais l’épilogue, donnant aussi,

un peu comme à celle que l’on peut nommer « le contre » (par rapport à la narratrice principale, Thérèse), au milieu, cette fois-là

_ et pas à la fin, comme ici, et in extremis, dans l’épilogue : une manière, pour l’auteur-narrateur-enquêteur qu’est Philippe Forest, de justifier in fine sa principale source de témoignage : au point que celui précise, page 543 : « ce livre que d’une certaine façon elle me dictait (…), « son roman », et non le mien, puisque au fond chacun des quelques livres que j’avais signés avait toujours été celui d’une autre« .., et au féminin : celui de sa fille Pauline (L’Enfant éternel), ceux de sa femme (Toute la nuit et Sarinagara), ou celui de son Nouvel amour, donc,

au milieu des puissantes Âmes fortes de Giono _,

l’épilogue donnant aussi la parole

à sa mère :

« Non, disait-elle, de tout cela elle ne se souvenait pas. Cela ne lui rappelait absolument rien. Encore que, maintenant que je lui en parlais, il était bien possible que cela évoque vaguement quelque chose en elle » (page 531) ;

« Non, cela ne s’était pas du tout passé, disait-elle, comme moi _ son (et leur) fils, Philippe ; et signataire du roman _  je l’imaginais.

Et d’ailleurs elle se demandait bien où j’avais pu aller chercher toutes ces anecdotes dont aucune ne lui rappelait rien et dont elle doutait que je puisse les tenir de mon père. Parce que lui il n’avait absolument aucune mémoire et que c’était elle qui devait toujours lui rappeler les événements les plus importants de leur vie. Et même lorsqu’il se les rappelait (…), il ne racontait jamais rien (…).

Mais d’où, protestais-je un peu, aurais-je tiré tout cela s’il ne m’en avait pas parlé lui-même ?

Alors elle concédait que ce n’était pas impossible. Qu’elle-même, à l’âge qu’elle avait, finissait par oublier beaucoup de choses« , pages 543-544.

Et les choses se compliquent encore quand on mesure, avec l’auteur-narrateur (de tout cela), combien, et sans qu’aucun des deux protagonistes majeurs de ce livre, et le père et la mère de l’auteur-narrateur-enquêteur, ne soit _ bien loin de là ! leur honnêteté est même fondamentale, à tous deux ! et le père, et la mère ! _ un menteur ou un falsificateur _ alors que pas mal des espèces variées de ces derniers semblent courir les rues (et les postes) par les temps qui, eux aussi, courent, si je puis (ou/et ose) dire… _,

combien le jeu des facultés (composant l’expérience : la conscience, la mémoire, l’imagination, les désirs _ et leur fruit immédiat : les illusions, et tant collectives qu’individuelles, qui en procèdent _),

se surajoutant à celui, déjà, des points de vue (partiels, mais aussi, qui plus est, très largement partagés sans trop _ ou assez aller, soi-même _ y regarder),

complexifie encore _ pardon d’un tel gros mot ! _ la donne _ mais c’est là le donné commun, sinon général, voire universel…

Car, si la mémoire, par exemple, est, certes _ et par essence ! _ sélective

_ et Jean Forest, par exemple, le père de Philippe, refuse, très tôt, d’en faire « trop« usage quant à « retrouver«  (ou « cultiver« , a fortiori, les souvenirs de) son enfance ; cf son sentiment à cet égard, reconstitué par son fils, page 108 : « les linges de l’enfance n’ont plus de charme _ une fois « franchi le gué de l’âge adulte« , a-t-il pu dire ! _ que pour les mères et les poètes« : voilà l’alliance (qu’il aurait bien pu, lui, le père, stigmatiser : s’il avait vraiment mis, ou aspiré à mettre, en paroles ce qu’il pensait ; ou cherché à faire la leçon…)… _,

que dire de notre faculté, plus importante encore sans doute _ en plus, déjà, de notre inconscience et de notre capacité de déni du réel ! des atouts déjà bien redoutables !!! _, d’oubli ?..

Même si « l’oubli doit aussi à son tour avoir été oublié pour que son œuvre se trouve à son tour totalement accomplie« , page 217…

Sur l’oubli, un des acteurs-clé de ce grand livre,

ceci de très important :

« L’Histoire _ en ce qui était la seconde après-guerre du vingtième siècle _recommençait aussitôt, comme elle l’avait fait autrefois, de la même manière amnésique qui est toujours la sienne, effaçant ses traces à mesure qu’elle avance, sans autre but que cette perpétuation d’elle-même qui sacrifie _ pragmatiquement _ sans cesse le pathétique passif du passé à la pure promesse d’un présent sans contenu.

Rendue possible par cette seule faculté d’oubli qui congédie automatiquement toute conscience accumulée, laissant à peine subsister le simulacre lointain de quelques souvenirs si peu spécifiques qu’ils pourraient être ceux de n’importe qui, une vague rumeur de mémoire qui rumine derrière soi, à laquelle on tourne le dos et dont on échoue à repérer d’où elle vient, jetant parfois un regard par dessus son épaule et n’apercevant rien d’autre que quelques morceaux _ épars, isolés, déconnectés de contextes : absurdes ! _ de mirages, aussi peu dignes de foi que les épisodes d’un vieux roman dont personne ne se soucie ni ne sait plus l’intrigue« , page 394.

Et que dire de la propension de chacun à s’illusionner,

sur le réel, sur les autres, comme sur soi ?..

Cf ici cette belle remarque, page 365, à propos des lettres d’amour (et des retrouvailles _ et noces… _ de Jean et Yvonne à Marseille, le 29 janvier 1946 _ ils s’étaient mariés « à distance« , lui dans le Michigan, elle à Mâcon, le 5 août 1945, la veille de la bombe d’Hiroshima ; cf là-dessus les pages 351-352 _, sur le grand escalier de la gare Saint-Charles, sans s’être revus _ lui, parti d’abord en Algérie, puis aux États-Unis ; elle, demeurée à Mâcon _ depuis plus de trois ans de guerre !..) :

« Chacun sait bien _ et elle aussi _ qu’une lettre d’amour, on ne l’adresse jamais qu’à soi-même, prenant simplement l’autre à témoin du roman _ encore : ce livre-ci étant un assez terrible projecteur sur les effets du romanesque dans la constitution, par chacun et tous, de l’expérience même de nos vies… _ qu’on se fabrique tout seul _ fictivement ! _ pour soi, et qu’elle crée _ voilà ! _ de celui à qui l’on écrit une image rêvée _ aïe !!! _ dont personne _ d’aussi lucide et probe qu’un Philippe Forest, du moins… _ n’est assez dupe _ la générosité de la formulation est assez magnifique _ pour croire qu’elle existe autrement et ailleurs que dans la fiction _ activement : la voilà ! _songeuse _ = irréaliste, peut-être mensongèrement alors… _ de ses propres illusions« 

_ sur la différence entre vrai, faux et fictif, lire le très important recueil d’essais (sur l’historiographie) Le Fil et la trace, de Carlo Ginzburg, dont le sous-titre est précisément « vrai faux fictif« , que vient de traduire l’ami Martin Rueff, aux Éditions Verdier…

La phrase se poursuivant magnifiquement ainsi, pages 365-366 :

« Certes, elle a été folle _ sa mère le lui a dit _ de se marier ainsi, avec quelqu’un qu’elle connaissait à peine, qu’elle n’a pas revu depuis plus de trois ans et qui, sûrement, est devenu très différent de celui dont elle se souvient si peu et dont elle se demande, dans le train qui la conduit de Mâcon à Marseille, si dans la foule de Saint-Charles elle saura seulement le reconnaître«  ;

mais cette folie amoureuse qui est la leur à tous deux perdurera toute leur vie ; et donnera cinq enfants, dont Philippe, seize ans plus tard, en 1962 (un 18 juin)…

Et, que dire, plus encore, peut-être _ et c’est un éclairage tout à fait majeur du livre ! _,

de la part des fables _ et de la forme même du roman ! _ :

« il n’y a pas lieu de s’étonner ce de que toute vie a l’air d’un roman, puisque raconter _ même silencieusement, à et pour soi-même _ sa vie, ou bien celle d’un autre, revient très exactement à lui donner cette allure de roman _ voilà ! _ qui la fait seule _ on lit bien ! _ exister _ à soi-même, l’énonçant, la mettant en phrases et en intrigue ; comme aux autres, l’écoutant… Et que, sauf à se résoudre au silence, sauf à renoncer à tracer dans le vide le signe _ bien sonore déjà à l’esprit _ d’une parole, il n’existe aucun moyen _ en effet ! _ de se soustraire à cette loi« , page 101,

tant dans nos récits (aux autres comme à soi -même!)

et dans la constitution même, déjà, avant celle de nos souvenirs, de notre expérience (ou l’activité de la conscience) elle-même,


que dans l’Histoire officielle,

tant celle (d’Histoire) écrite _ à des fins d’éclaircissement-simplification pédagogique par l’élision du superflu, par les Historiens : ici, et à plusieurs reprises, de superbes analyses !

Par exemple, celle-ci, pages 122-123 :

« L’Histoire étant précisément cela : cette ligne que _ par son récit _ l’on trace dans le temps , une fois celui-ci _ temps, res gestae… _ définitivement passé, ramenant _ bien trop grossièrement ! le récit… _ à une seule dimension _ grossie _toutes celles _ fines et ultra-fines, à l’infini… _ qui le composaient, de manière à disposer _ très schématiquement _ par rapport à cette ligne droite quelques vagues vestiges _ détails secondaires, annexes, marginaux : très estompés… _ à l’aide desquels raconter un récit dont l’intrigue égale en simplicité mensongère celle des romans

_ toujours le mensonge des gros rails ou grosses ficelles du romanesque, et ses effets en dominos :

lire ici et la Morphologie du conte, de Vladimir Propp, et les Fragments d’un discours amoureux, pourtant très fins, de Roland Barthes : des classiques indispensables de l’école de la conscience… ; lire aussi Paul Ricœur, La Métaphore vive… ;

mais lire aussi Carlo Ginzburg, contre le danger du scepticisme, cette fois, quant à la visée de vérité de l’Histoire, en son très important Le Fil et la trace _ vrai, faux, fictif : par exemple sur la pertinence et la complexité féconde du concept de « cas« , a contrario des généralisations abusives… _

que l’on donne à lire aux petits _ oui, oui : Le Dernier des Mohicans, L’Île au trésor, La Case de l’Oncle Tom, etc… _ et dans lesquels ils se forment _ voilà ! naïvement… _une image trop sensée _ ordonnée, unifiée, simplifiée, avec un ordre et une cohérence _ du monde, croyant naïvement _ = trop neuvement : mais il faut bien commencer ! _ que celui-ci a une queue et une tête quand il n’est rien d’autre qu’une insignifiante avalanche d’événements inconséquents _ les uns par rapport aux autres _ emportés en désordre par la coulée indifférente _ cf le clinamen lucrécien… ; Philippe Forest l’évoque superbement page 189… _ de la durée dégoulinant vers l’aval, poussée _ par le seul effet du temps qui passe et « pousse« , massivement, ainsi, par conséquent ! _ dans plusieurs directions à la fois, s’éparpillant _ entrechoqués _ partout, soumise à la loi de la gravitation, à moins que ce ne soit au principe d’entropie, l’une et l’autre aboutissant au même résultat puisque tout finit par verser vers le bas _ et la décharge terminale _ et dans le désordre le plus grand«  ;

_ sur ce clinamen forestien-là (a contrario de ce que narrent les livres d’Histoire, du moins certains !, pas assez scrupuleux sur leur propre démarche tâtonnante, à base d’hypothèses et de recherche de preuves : cf Ginzburg…), voici cette sublime page, page 189, donc :

« Et tandis que les livres d’Histoire disent ce qui a effectivement été, conférant à chaque chose qui fut son intangible place au sein des annales intouchables du monde, et donnant à ces annales leur définitive et inflexible facture,

la vérité _ nous y voici : et c’est celle-ci qu’ose se proposer pour but l’entreprise d’écriture forestienne, chaque fois, et toujours ! sans relâche ! _ consisterait à en rêver l’envers à jamais indécis _ voilà : son essentiel tremblé ! _, restituant à chaque moment vécu cette sensation de halo immotivé _ oui ! _ à l’intérieur duquel flottent _ mais oui ! _, fugitivement visibles à travers les lumières _ il les faut ! _ toutes les poussières du possible _ voilà ! dans ce que Chateaubriand nomme l’« admirable tremblement du temps » (et qu’a si bien relevé, naguère, un Gaëtan Picon)… _ soufflées dans le vent _ toujours présent ! _, choses qui ne furent pas, ou bien qui furent mais restèrent et resteront inconnues, instantanément irréalisées dès lors qu’elles prennent place dans le songe insistant _ malgré tout _ du passé,

poussières qui pleuvent parallèles dans le vide _ voici le clinamen lucrécien du De natura rerum ! un livre fondamental, bien sûr ! _

comme des atomes _ ceux de Démocrite _ tombant selon la trajectoire verticale de leur chute et tomberaient ainsi à jamais

si une infime déclivité _ le clinamen, donc ! _

ne les faisait parfois _ voilà ! _ se heurter, s’unir et se repousser, ricochant dans l’espace,

particules se bousculant et puis dispersant de proche en proche toutes les autres,

produisant une catastrophe d’où se déduit le fait que _ car c’en est un ! et d’irréfragablement indéniable ! _

plutôt que rien, quelque chose a été« … Fin de cette incise lucrécienne : cruciale, on le mesure… _ ;

ou celles-là, pages 100-101,

et à propos du père de l’auteur-narrateur, qui, « à un moment donné de sa vie« , très tôt, lui si vite tellement « sérieux » et si peu « infantile« .., avait « choisi de tout oublier » de son enfance,

juste en amont de la remarque sur l’implacabilité de la « loi » même de tout récit :

« considérant que sa propre existence, tout comme l’Histoire autour d’elle _ la voilà ! en un simple cas particulier, ici (au sens d’« exemple«  représentatif d’une généralité ; et pas au sens d‘ »anomalie«  un tant soit peu problématique imposant de « penser« …), « exemplaire« , si l’on préfère, d’une « loi«  plus générale : celle de tout « récit«  !.. _, n’était jamais qu’un ramassis d’épisodes insignifiants _ hors de la concrétion de l’instant (singulier), du moins _, éparpillés dans le temps comme les fragments _ fracassés et tout dépareillés _ d’une épave depuis longtemps naufragée et dont les morceaux _ déchiquetés _ nécessitaient une bonne fois pour toutes d’être abandonnés là _ par l’intelligence pratique ! enfin  émancipée du joug sans sérieux des « enfantillages«  de la petite enfance qui ne faisait, elle, rien de plus que jouer… _ où l’accident les avait laissés. Que l’on entreprenne d’en faire la collecte (…) ne lui serait certainement jamais venu à l’esprit _ pragmatique, lui, « ingénieur« … Et s’il n’avait jamais réprouvé ce projet _ de récit récapitulatif et nostalgique du passé _, du moins aurait-il eu le sentiment qu’il ne le concernait pas. Car raconter n’est jamais l’affaire de ceux qui ont vécu _ et actifs ! _ et qui abandonnent à la manie mélancolique _ intempestivement (et maladivement , sans doute) contemplative et rêveuse (= vaine !) : sans utilité pratique _ de quelques autres  _ des mères, ou des poètes !.. _ le soin de faire à leur place le récit pour rien _ voilà : infantile, quasi parasite… _ de leur vie.

Leur vie ? Pas même. Puisqu’en parler ainsi revient déjà à lui prêter une apparence de légende, faisant comme si le scintillement _ voilà leur réalité psychique : clignotante ! _ de souvenirs qui subsistent du passé avait la cohérence exacte _ voilà  _ d’un conte _ nous y revoici ! _ où chaque épisode entraîne _ tel un déterminisme net (sinon, pire, tel un « destin«  !..)… _ l’épisode suivant tandis que même l’événement le plus important n’y a jamais que la valeur esseulée d’une anecdote ne témoignant que pour elle-même, dépourvue de toute relation vraie _ réelle, factuelle (positive !) et pas imaginée ! _ avec ce qui vint avant ou avec ce qui viendra après.

Si bien que c’est celui qui raconte, et lui seul, qui arrange _ ad libitum… (= à sa pure fantaisie : irrationnelle !) _ toutes ces anecdotes, prétendant _ bien vaniteusement !_ dire la réalité de ce qui a été mais taisant que cette réalité, dès lors qu’il la relate, prend par lui _ arbitrairement et falsificatricement ! j’ose ici ce néologisme… _ la forme _ bien trop ordonnée et bien rangée _ d’une fiction, falsifiant ainsi  _ voilà l’immanquable effet ! _ la formidable inconsistance _ bien réelle, elle ! _ du passé _ faits d’éclaboussures sans suites : incohérent qu’il est ! _ et lui conférant la méthodique, mensongère et solide logique d’une intrigue » _ trop bien ficelée ; illusoire… _ ;

ou encore celles-là, pages 112-113 :

« Comme si le temps, en vérité, était fait de plusieurs histoires imperméables les unes aux autres, et dont la réunion _ forcée _ en un seul récit _ lui-même intégré au récit plus grand de l’Histoire majuscule _ serait à la fois fidèle à la vérité _ en montrant comment tous ces gens furent effectivement contemporains _ et infidèle à celle-ci _ en taisant à quel point _ non moins effectivement ! _ ils ignoraient l’être _,

faisant comme la somme forcée _ voilà ! _ de toutes ces expériences de hasard

comme s’il allait de soi que la réalité est une _ et indivisible, si l’on poursuit sur la lancée… _ et ressemble aux mauvais romans populaires, aux feuilletons télévisés qu’on en tire, donnant du temps une mensongère image homogène,

disposant au sein d’une intrigue unique des destins _ bien trop _ exemplaires _ par généralisation (= ici confusion !) abusive _, les leurs _ ici, celui de Jean et celui d’Yvonne _ et ceux de leurs familles _ ici les Forest (de la pâtisserie-confiserie « Aux Fiançailles« ) et les Feyeux (libraires et anciens instituteurs) _ avec eux, dont l’opposition illustre trop explicitement _ à son tour _ l’image toute faite _ soit un cliché ! _ de ce que fut le passé« ..,

tant celle (d’Histoire) écrite _ et  je reprends ici l’élan de ma phrase entamée plus haut _,

que celle (d’Histoire, toujours), et en extension de la première,

des archives filmées et documentaires

qui nous sont servies et resservies _ au cinéma, à la télévision, à l’école… _comme documents faisant foi…


Philippe Forest s’en donneici ainsi par exemple, à cœur joie

avec le récit de l’écœurement _ « fatiguée de tous ces documentaires et de toutes ces fictions, recyclant sans fin les mêmes images« -clichés, page 335 _ de sa mère très âgée (mais toujours très lucide !) devant la fossilisation de la mémoire officielle de la Libération _ comparée par lui à des gravures anciennes, du XIXème siècle, en noir et blanc… _, confrontée à la fraîcheur encore, en couleurs, elle, de son souvenir (de peintre ! sa « vocation« , à elle ! admiratrice pour l’éternité des couleurs « méditerranéennes » de Van Gogh…) tout vivant encore, lui, de la Libération de sa ville, Mâcon, le 4 septembre 1944 _ même s’il faut lutter toujours et encore contre la pression envahissante du danger de confusion et amalgames (falsificateurs) quant aux images de sa propre imageance, pour reprendre le terme-concept que j’avais proposé à mon amie Marie-José Mondzain…

D’où, a contrario, la joie (quasi miraculeuse !) de sa vieille mère, quand, après deux opérations dangereuses du cœur, qui lui ont comme miraculeusement rendu quelque chose de l’allure d’une jeune fille _ capable de descendre faire ses courses au bas de son immeuble à quatre-vingt-cinq ans _,

une opération des yeux lui a « rendu« , avec la vision restituée des formes, celle des couleurs, et notamment celle du rouge !

Cf page 554 :

« Tous les meubles, les objets ayant réinvesti leurs contours anciens, ayant repris leurs formes d’autrefois.

Le monde ayant retrouvé ses couleurs. Le rouge, disait-elle, surtout le rouge, j’avais oublié ce qu’était le rouge. Comme si je le voyais pour la première fois.

Alors, pensais-je _ commente ici l’auteur-narrateur, son fils, Philippe, le soulignant ainsi pour lui-même sans doute… _, oui, sans doute cela valait-il la peine d’avoir vécu jusque là (…) pour recevoir enfin le don _ formidablement joyeux ! Alleluiah ! _ de cette révélation-là.

S’il n’y en avait pas d’autre,

ce miracle _ voilà le terme _ suffisait. Comme si le brouillard _ celui qui lui voilait jusque là, depuis plusieurs années, le regard _ s’était dissipé d’un coup à la faveur d’une éclaircie soudaine, venu d’on ne sait où, et puis le vent l’ayant dispersé et soufflé au loin.

Le soleil, injustifiable et splendide _ voilà ! _, brillant subitement sur le monde, à travers une trouée de bleu parmi les nuages.

Et bien sûr, elle le savait, cela ne durerait pas. Le beau temps ne dure jamais très longtemps.

Mais maintenant, même un instant était déjà assez« , page 554, donc ; deux pages avant la fin…

Se révèle aussi, en filigrane et extrêmement discrètement _ c’est moi, lecteur, qui ose ici le déduire _, quelque chose des origines de la « vocation«  _ idiosyncrasique ! cf page 399 _ d’artiste et écrivain de Philippe Forest, par rapport

et à son père _ dont il possède (de même que ses frères, aussi, nous dit-il) « les mêmes yeux, et la même voix (…) Comme si, de génération seuls les yeux ne changeaient pas, autour desquels l’âge transforme le visage. Des intonations aussi « (page 413)auquel, cependant, avec « une notoriété (d’écrivain ! lui n’est ni ingénieur, ni pilote !) qui ne reposerait que sur le vide et le vent des mots » (page 494), il s’oppose _ cf page 494, aussi : « mû certainement par ce désir qu’ont parfois les fils de ne pas faire mieux que les pères«  _ ;

et à sa mère, du côté du tempérament transmis, cette fois, sa mère « au tempérament inquiet et mélancolique«  (page 539) ; et, mais pas, me semble-t-il, du seul fait de l’âge, « avec sa lucidité intacte et pourtant vaguement absente » (page 545)…

La « vocation » de Philippe Forest est en effet, du côté _ par certains aspects, assez terribles, même… _ du témoignage de la vérité ; et de la dénonciation qui peut paraître virulente _ quasi « impudique«  (cf le mot page 541, dans la bouche de sa mère…) ; alors que lui-même est si calme, si doux et si posé…des faux-semblants, jusqu’aux plus innocents et les moins pervers : sur lesquels son éclairage férocement tranquille est implacable !

Et c’est par là aussi que Philippe Forest est un écrivain si puissant !

Car la vérité au service de laquelle se place l’artiste vrai et probe, on en trouve l’analyse, aux pages 70-71 du roman, face à ce que l’auteur qualifie du trop confortable « tribunal des siècles«  _ qui construit, lui, « un récit très édifiant à l’intention exclusive de ses propres contemporains« , page 70… _ :

« La vérité _ tâche et mission de fond de l’auteur vrai ! _ consiste à montrer dans quel brouillard ils se trouvaient tous _ face aux événements, surtout, de la guerre et de l’occupation, ici _, ceux qui ont eu _ au final _ raison comme ceux qui ont eu tort, et parfois ils ont été tour à tour de l’un et de l’autre côté, déroutés par hasard ou par chance vers l’erreur ou bien la vérité, tâtonnant dans une épaisseur de brume qui leur dérobait toute vision du passé comme du futur, limitant même le présent au sein duquel ils erraient à une vague poche de visibilité

semblable à celle qui entoure un avion lorsque celui-ci tourne dans le vide opaque d’un ciel dépourvu de repères et où même les étoiles semblent s’être éteintes« , pages 70-71…

Ou à celle qui manquait terriblement à Fabrice dans l’épaisseur des poussières de la mitraille de Waterloo, dans le roman de Stendhal…

Ce n’est donc pas seulement à un « tombeau » _ de mots _ à son père que se livre ici, en ce si beau et si profond Siècle des nuages, dans lequel il s’emploie à « la tâche de résoudre la charade de se demander au fond ce qu’a pu être une vie » (page 29) enfuie, Philippe Forest,

puisqu’en ce livre-ci le fils (de son père

_ qui lui a légué, au-delà de ce que tout père lègue à ses fils (ainsi le grand-père paternel, Fleury Forest, mort, encore jeune, pendant son sommeil, le 10 novembre 1940, à l’égard de ses deux fils, Jean et Paul, aux pages 196-197 : « Ne leur léguant rien : aucune vérité, aucun précepte pour guider leur existence. Ou plutôt leur léguant ce « rien » qui est la seule chose qu’un père puisse transmettre à ses fils. Nul enseignement sinon celui, silencieux, qui oblige ceux-ci à refaire eux-mêmes, et pour leur propre compte la vaine et perpétuelle expérience inchangée de la vie«  ;

et aussi : « la vérité, (…)  précisément le seul trésor, dès lors qu’on le sait, est le rien dont procède toute vie et avec lequel elle s’achève.

Et c’est bien pourquoi les pères toujours se taisent. Du moins lorsqu’ils en ont l’intelligence et la délicatesse« .., page 197) _,

son père, Jean Forest,

qui lui a légué, plus personnellement _ page 456, Philippe Forest parle de son propre « sentiment de détachement intense et infini« : quel merveilleusement juste, je n’en doute pas, oxymore, pour caractériser sa propre idiosyncrasie !.. _sans doute, son formidable goût de la liberté :

« Libre, oui. Et d’une manière un peu mélancolique _ c’est ici de la manière de Jean, le père, qu’il s’agitSéparé du reste des vivants. Établi dans le ciel où le soleil brille toujours quelque part, franchie la frontière des nuages et une fois rejoint le bon côté de la planète.

Un père ne pouvant enseigner à ses fils, aucune croyance, aucune valeur, sinon en leur donnant l’exemple d’une liberté vide à laquelle il leur appartiendra plus tard de donner la forme vaine qu’ils voudront _ « vide«  (pour la vacuité) et « vaine« (pour la vanité), étant deux mots majeurs du vocabulaire de Philippe Forest. (…)

Taisant qu’il n’y a pas plus de trésor à trouver _ au ciel comme dans la terre _ que de sens à découvrir. Sinon que le trésor consiste précisément en l’absence de sens _ qui serait imposé ; du jeu demeure forcément…

Et que tout ce qu’un père peut faire, c’est transmettre à ceux qui le suivent la promesse _ pédagogiquement : selon le modèle du questionnement ironique socratique ! _ mensongère d’une fortune dont il leur faudra éprouver à leur tour l’émerveillante _ par l’apport de la découverte personnelle de cette vérité ! _ déception _ libératrice !!! : encore un oxymore significativement forestien _ qu’elle n’existait pas : finalement, c’était cela la vie…

Laissant comme seul legs un tel arpent d’air« , page 443…

Alors « les nuages » constituent bien, pour Philippe Forest « une patrie« ,

« une patrie comme une autre, et dont jusqu’à aujourd’hui, fidèle à ma foi d’enfant, si je dois faire cet aveu naïf, j’ai toujours considéré (moi né le 18 juin 1962, sous le signe des Gémeaux, d’un père pilote de ligne) qu’il s’agissait de ma vraie terre natale.

Convaincu d’être chez moi dès lors que j’ouvre la paupière du volet intérieur posé sur le hublot d’un avion croisant dans le ciel. Ou bien que je lève, n’importe où, les yeux vers les nuages, contemplant de tous mes yeux le vide azuré dont je suis né et vers lequel je sais que je vais« , pages 443-444 ;

et « recevant de lui _ ce père pilote _ cette leçon de liberté _ voilà ! _ qui enseigne qu’il n’y a rien à craindre dans le monde, que nous sommes tous des visiteurs qui passent parmi ses paysages (…).

Éprouvant ainsi _ une fois et à jamais _ un sentiment de détachement intense et infini _ voilà ! _ : tout cela est à vous, rien ne vous appartient.

En tirant une indéfectible confiance dans la vie _ quoi que celle-ci réserve de malheur par la suite _, puisqu’il reste qu’un autre temps, qu’un autre lieu existent _ soit une part (aérienne) de jeu dans les rouages du réel… (…)

Avec cette certitude étrange et parfois un peu amère de pouvoir être partout et de ne se trouver nulle part. Semblable soi-même à une sorte de nuage soufflé par le vent. Pas grand-chose. A peine quelqu’un. Un touriste en somme.

Étant entendu que le tourisme est l’art de jouir du monde en passant. Comme la vie« , page 456.

Fin de la longue incise sur le legs de liberté du père à son fils) ;

puisqu’en ce livre-ci le fils (de son père)

donne aussi _ et bien plus que cela ! _ la parole _ je veux dire le livre entier ! qui est ainsi « le livre de sa mère«  !!! _ à sa mère ;

celle-ci démontant avec une verve assez réjouissante le « romanesque » de l’aviation dans lequel son mari a « donné«  _ elle, se chargeant de faire « tourner«  au quotidien, et sur terre, pas dans les airs, la famille (c’est-à-dire leurs cinq enfants, puis les nombreux petits-enfants qui trouvèrent en elle, et chez elle, un appui très concret) !.. : « elle élevant seule ses cinq enfants et quelques uns des enfants de ses enfants, tandis que lui était à des milliers de kilomètres, il ne fallait pas escompter d’elle qu’elle fasse l’éloge de l’aéronautique«  ; ayant, pour son lot de mère de famille (le plus souvent « vierge et sainte« , dit même quelque part son fils…) ; et cela dit de sa part à elle sans la moindre nuance d’acrimonie, mais avec un immense humour : c’est une généreuse ! ; « la routine des repas, des courses, des lessives, des bulletins scolaires qu’elle signait, des sorties de classe qu’elle accompagnait, la trop grande propriété qu’ils avaient achetée sur les bords de l’Yonne et qui lui donnait encore plus de tracas, avec le jardin à entretenir, les déjeuners de famille à préparer, et des tablées chaque fois dignes d’un banquet de communion solennelle« , page 549 _,

au point de célébrer _ lui, l’auteur, et son fils, Philippe _ magnifiquement la distance ironiquement lucide et très perspicacement réaliste (et pratique) de son intelligence et de sa générosité !

Lui, Philippe, page 543 :

« me disant donc que je devais rendre _ à chacun des deux : et son père, disparu, et sa mère, toujours vivante ; et cela par l’écriture même de ce livre ! qui est une offrande (gracieuse) !.. _ ce que j’avais reçu :

_ de lui,

le signe qu’à la naissance il avait tracé sur mon front ;

_ d’elle,

l’histoire avec laquelle, depuis l’enfance, elle m’avait accompagné dans le noir de la nuit.

Pas pour acquitter une quelconque dette. 

Car la mort délie de toute obligation et rend blanches les pages sur lesquelles s’inscrit la comptabilité éphémère du temps.

Mais simplement afin de me débarrasser enfin et à mon tour _ par l’écriture de cet immense livre-offrande, qu’est Le Siècle des nuages _

de l’encombrant fardeau _ tant qu’il n’est pas posé, donné, offert, livré ! _ d’une vérité vide, sans objet ni usage »

_ puisqu’il revient, et seulement, à chacun de personnellement et singulièrement « faire« , à son corps défendant seulement, et quand le temps y vient, seulement aussi (= ni avant, ni après !), son expérience propre et du temps, et de la vie.

Et chacun qui atteint « le milieu de sa vie« , ou à peu près _ soit aux alentours des quarante ans… _, passe par de semblables questions,

sans pour autant avoir toujours autant le talent _ rare ! admirable ! et que j’admire beaucoup, beaucoup !de penser et d’écrire de Philippe Forest.

Même si je ne partage pas la vision de ce que lui nomme le « long, amer et inexpiable chagrin de la vie« , page 194 ; mais préfère ces mots, en conclusion de la visite _ celle-là même que désirait accomplir son père ! et que le fils réalise, comme par procuration, pour lui ! Et c’est un épisode magnifique de ce grand livre !, aux pages 515 à 529 _, à Istanbul, des très belles fresques _ et elles m’ont, moi aussi, émerveillé ! _ du Jugement dernier (en grec « Anastasis« …) à Saint-Sauveur-in-Chora,

donnant à regarder-contempler, « risquant de nouveau _ après les regards sur « l’immense vaisseau de la nef » de Sainte-Sophie ! _ le torticolis pour observer le détail des vastes fresques figurant le Jugement dernier « au plafond de la chapelle annexe du Paracclésion, pages 523-524,

comment « le Christ triomphant prend par la main et tire de son cercueil à l’allure de navire ou de nacelle » Adam _ ainsi que Ève _  « flottant dans le noir _ bleuté ici, d’un bleu très sombre _ de la nuit, tandis que l’entourent la cohorte des élus et la troupe des réprouvés« , page 524.

Istanbul - Kariye Museum / Chora Church - Anastasis / Resurrection

 Anastasis / la Résurrection (à Saint-Sauveur-in-Chora, à Istanbul) :

Jésus relevant Adam et Ève du tombeau en les tirant par les mains

Et « soudainement, je parvenais à comprendre un peu mieux ce qu’une telle espérance avait pu signifier pour lui. Et en particulier au cours de ses dernières années où il s’était mis à considérer le vide _ décidément un amer de l’idiosyncrasie forestienne ! _ vers lequel il allait avec davantage d’angoisse et de perplexité » ;

« la mort étant pour chacun ce néant _ infigurable ? _ dont personne ne sait rien.

Si bien que toutes les fables qu’on s’en fait _ = tente, chacun, avec les autres, de se figurer ? _dès lors qu’elles restent fidèles _ avec le moins de projections illusoires que l’on puisse… _ à la tragique et inexpiable déchirure du vrai,

se valent sans doute« …

Avec, encore, ces mots-ci de commentaire, de la part de l’auteur-narrateur, au participe présent, dans le même mouvement de réflexion, toujours page 524,

qui me rappellent _ et surtout annoncent ! dans le flux (normal) de la lecture du livre, pour le lecteur _ ce que Philippe Forest dira un peu plus loin, dans le décisif épilogue de son livre, cette fois _ conclusivement, donc _de ce qu’il désire, aussi, « rendre » _ en fait très simplement continuer, poursuivre : après (et d’après) elle… _, en action d’infini remerciement, à sa mère :

« Chaque homme qui meurt à son heure méritant que l’on respecte les récits qui l’accompagnent dans le vide,

comme des paroles de rien _ et moi, je le savais bien _ l’escortant à la façon d’un enfant inquiet sombrant le soir dans son sommeil « .., page 524, donc…

Voilà !

« Les récits qui l’accompagnent dans le vide, comme des paroles de rien l’escortant à la façon d’un enfant inquiet sombrant le soir dans son sommeil « …

À confronter avec ce que Philippe-le fils désire, donc, et dans la mesure de ses moyens propres : ceux de l’écrivain, pas si « impudique » que cela qu’il est devenu !,

« rendre » ici aussi _ en ce « tombeau«  à son père _

à _ l’œuvre propre : de paroles ; en plus de sa personne à jamais vivante… _ sa mère :

« je devais rendre _ à chacun des deux : et le père, disparu, et la mère, toujours vivante, elle _ ce que j’avais reçu :

de lui, le signe qu’à la naissance il avait tracé sur mon front ;

d’elle, l’histoire avec laquelle, depuis l’enfance, elle m’avait accompagné dans le noir de la nuit « .

« L’histoire avec laquelle, depuis l’enfance, elle m’avait accompagné dans le noir de la nuit » : voilà !

Mais, cela,

et pour lui maintenant _ en ce second versant, donc, de sa propre existence (de vivant-mortel) : passés les quarante ans… _,

dans toute la vérité, exigeante, qu’il pense, sans illusion _ sinon le moins possible… _ de fable, désormais, être la sienne :

par cette littérature,

moyen, en _ et par _ ses longues phrases déployées, si souples, mais aussi si précises _ si probes et scrupuleuses, sans jamais la moindre lourdeur didactique : tant tout y est, d’un même mouvement, et poésie, et vérité ! par la pure grâce de son magnifique et si juste style ! _, dans la diaprure presque infinie tant des nuances des précisions données, que du souffle sien, long, beau et tranquille,

instrument _ artistique, mais pas technique…d’une approche sans fard _ mais pas tout « impudique » : seulement « vraie » ! _ de la réalité ! « rendue« , ainsi, en toute la richesse diaprée et juste de sa complexité…

C’est sans doute cela que Philippe Forest, à côté du goût et des nuages et de la liberté (qu’il doit à son père), doit à sa mère : sa vocation d’écrivain ;

et d’écrivain du vrai,

dans la vérité forte et belle, puissante du déploiement de ses nuances diaprées :

par-dessus les fables mêmes _ et figures _ qui l’ont _ durablement _ nourri et formé…

Répondant ce matin à un courriel de mon ami Bernard Plossu, voici ce que je lui disais à ce propos, et au passage _ il faut partager les bonnes choses ! _du Siècle des nuages de Philippe Forest :

De :   Titus Curiosus

Objet : « Le grand Bernard Plossu » + un grand livre sur l’expérience
Date : 28 octobre 2010 05:50:38 HAEC
À :   Bernard Plossu


Merci de ce texte en effet bien intéressant _ je le donne plus bas en post-scriptum…

Et qui te situe à la place
de référence _ sans didactisme aucun _
que ta seule liberté et probité
t’a donnée, sans rien rechercher de cet ordre (les places…),
puisque tu ne te soumettais (et continues de ne te soumettre…)
qu’à ta liberté et ta probité
face à ce que ton acte _ artiste _ de photographier
te donnait (et te donne : toujours !..)
face au réel, face aux autres,
dans le respect aimant de la seule beauté vraie
de leur altérité…
Soit une pureté.

C’est peut-être elle, cette pureté,
qui te fait à ce point unique…

Et cela, en un seul adjectif de ce texte,
même s’il n’est pas petit, ni mince (« grand » !)…

Thibaut Cuisset est en effet, aussi, un photographe de qualité…

J’utiliserai peut-être cela, à ma « façon« ,
dans l’article que je ferai _ voilà qui est fait ! du moins à moitié…

à propos des « 101 éloges »
quand j’aurai entre les mains et sous les yeux
un exemplaire du catalogue de l’exposition de Carcassonne.


Parfait, tout ça…

En ce moment, je suis dans la rédaction d’un article
sur le très très beau livre
d’un écrivain que, déjà, j’adore, Philippe Forest (l’auteur du sidérant « Toute la nuit » : à la NRf),
consacré à son regard sur la vie
passé « le milieu de la vie »
dans son rapport à ses parents, son père mort en 1998,
sa mère, née en 1922 toujours vivante et témoignante… :

ce livre superbe (de 556 pages : mais rien de trop ! ses longues phrases _ ce sont des paroles de pure confidence _ creusent en parfaite souplesse et justesse
_ liberté et probité sont aussi les mots qui me viennent pour l’écriture de Philippe Forest face au réel _
l’essentiel de l’humain ! et de l’intimité
_ c’est-à-dire du rapport le plus près et le plus vrai à l’autre _

s’appelle Le Siècle des nuages :
ou comment on se forme son expérience
en regardant vivre et vieillir (et mourir)
ses parents !


= son rapport au temps, autrement dit…

A lire, donc !

Même si on peut penser cela
un peu moins mélancoliquement que lui…

Bordelais, je suis un fidèle du voisin gascon Montaigne

_ et de son plus heureux « art de passer le temps«  : au final des Essais, dans le décisif et sublime (!) essai conclusif (III, 13), De l’expérience _,

pour ce qui me concerne ;
Forest, de filiation bourguignonne

(Mâcon _ mais aussi le Forez, la Franche-Comté, la Bresse, le Jura : bref, l’est de la France (cf ton propre, si beau, Versant d’Est !) ; le soleil s’y couche plus tôt que du côté de notre Atlantique… _),

est lui parisien _ comme le Baudelaire des « nuages, les merveilleux nuages« 


Ce sont probablement les lumières diverses de nos contrées
qui marquent notre vision
_ faisant beaucoup de notre regard
sur le visible…

Merci de cet envoi !

Titus


Voici donc aussi l’envoi de Bernard Plossu,

d’un texte qu’un ami lui a adressé :

un ami m’envoie ça

b

—–E-mail d’origine—–
De : Ami
Envoyé le : Jeudi, 28 Octobre 2010 0:32
Sujet : ELOGES DE MAGALI JAUFFRET A BERNARD !

À :   Bernard Plossu

Voici des éloges de MAGALI JAUFFRET ! A ton égard !

CULTURE –  le 26 Octobre 2010
culture
Thibaut Cuisset, l’épure d’un paysage sans exotisme


Le photographe expose « Campagne française» à l’académie des Beaux-Arts et « Syrie, une terre de pierre» à la galerie des Filles du Calvaire.

Dans La modification, Michel Butor décrit les paysages qui défilent derrière la fenêtre du train comme des « paysages intermédiaires ». Ce sont ceux-là qui intéressent Thibaut Cuisset, 52  ans, lauréat de la 3e édition du prix de la photo de l’académie des Beaux-Arts. Grâce à ce prix, ce photographe, qui occupe une place singulière, respectée, a déambulé dans les plaines et moyennes montagnes de Haute-Loire, de Lozère, du Cantal, de l’Allier. Auparavant, il avait arpenté le pays de Bray pour le pôle image de Haute-Normandie et la Syrie pour son centre culturel français.
Son œil, formé aux images d’Antonioni, de Pasolini, de la nouvelle vague, à la manière dont ces derniers filmaient les arrière-plans, les lumières en extérieur, a scruté ces lieux antispectaculaires que l’on regarde peu, que l’on dit à tort « sans qualité », mais qui font une campagne encore bien vivante, en évolution constante. « À l’heure où l’on regarde la planète de manière globale, c’est sur le local que je voudrais me pencher, explique Thibaut Cuisset. Car je pense qu’affirmer la singularité de toute terre, c’est aussi s’interroger sur notre monde. »

Le règne du noir et blanc

Les rares photographes français qui, comme le grand Bernard Plossu, s’intéressent au paysage, cette construction faite de représentations, de valeurs, de repères culturels, partent avec un handicap. Bien sûr, il y a eu les grandes missions initiées par l’État et les institutions pour « encourager à la culture du paysage en France » et auxquelles restent attachés les noms de Jean-Louis Garnell, Pierre de Fenoyl, Raymond Depardon, Sophie Ristelhueber… Mais en France, on ne peut se revendiquer d’une lignée comme, par exemple, en Amérique. Partant en terra incognita, Thibaut Cuisset s’est donc lancé, en plein règne du noir et blanc, en pleine emprise de la photo humaniste, le défi de traduire l’éblouissement, l’aveuglement des lumières du Sud.

Du Maroc à la Namibie et à l’Australie, il a voyagé, pratiquant l’errance, s’imprégnant des lieux, absorbant leurs vibrations, s’arrêtant dans la banlieue romaine de Nani Moretti ou dans le Japon d’Ozu. Là, comme dans les campagnes françaises, comme en Syrie, où sa vision des ruines tranche, il a choisi des paysages qui n’apparaissent pas seulement en toile de fond du geste de l’homme, qui ne sont pas davantage des idéaux bucoliques de la nature.

Sans État d’âme ni pathos

Pour choisir ces lieux, Thibaut Cuisset a besoin que soient articulés un sujet, une lumière (très haute) et des couleurs (douces, en demi-teintes). C’est alors par « un travail d’élimination et d’épure » qu’il cherche à représenter « l’essence du paysage où ni l’anecdote, ni l’exotisme, le pittoresque ou le pathos n’ont leur place ». « J’essaie, explique-t-il, de procéder sans trop bouleverser l’ordre des choses, sans y projeter mes états d’âme, sans excès de signature, ni de style ». Mais il ajoute : « En même temps, c’est moi qui photographie. Or, je suis quand même davantage dans le percept (ensemble des sensations et émotions survenant à celui qui l’éprouve _ NDLR) que dans le concept ».

Aux termes d’un processus sensoriel et esthétique certainement aussi saisissant que le fameux instant décisif d’Henri Cartier-Bresson, son image de paysage à la chambre est à la fois objet documentaire, plastique et poétique. Une façon rare de renouer avec l’expérience directe du paysage…

« Campagne française », exposition à l’académie des beaux-arts, dans le cadre du Mois de la photo. Au 23, quai de Conti, Paris 6e, Jusqu’au 17 novembre.
«Syrie, une terre de pierre », galerie des Filles du Calvaire, 17, rue des Filles-du-Calvaire, Paris 3e, jusqu’au 6 novembre.
« Une campagne photographique, la boutonnière du pays de Bray », 64  pages, 27  euros, Filigranes  éditions, 2009.

Magali Jauffret

Et pour finir,

le souvenir encore ébloui _ j’avais dix ans ! _ de l’éblouissante découverte des fresques de la Résurrection de la chair, d’un autre très grand,

Luca Signorelli (Cortona, 1445 – 1523),

à la Capella San Brizio, du Duomo d’Orvieto (1499-1502) ;

dont voici encore, ultimement, une image _ éblouissante toujours !.. en son éclaboussement de blanc pur ! _,

quand

« Ils sortent de la mort comme l’on sort d’un songe« ,

pour reprendre la poésie si puissante, elle aussi _ autre souvenir, très intense encore, au lycée, cette fois, j’étais en classe de seconde ; mon professeur de Lettres était M. Alain Sicard… _, d’Agrippa d’Aubigné,

en ses « Tragiques« .

Voici l’œil de Signorelli,

celui-là même

qui, l’été 1502 _ comme le narre Vasari en ses Vies des peintres célèbres _ osa saisir les traits en voie de rigidification, déjà, par la mort (de la peste), de son fils Antonio… :

http://www.casasantapia.com/images/art/orvietolsignoresurr700.jpg

Luca Signorelli, Capella San Brizio, Duomo, Orvieto

L’événement était advenu chez lui, à Cortone, cet été-là, de 1502 ;

le père venait à peine de terminer les fresques d’Orvieto (1499-1502)…

Titus Curiosus, le 28 octobre 2010

 

 

Ce dimanche 9 octobre 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un premier essai de synthèse sur les membres de la famille Echepare apparentés à la famille de Marie Delouart et son fils Maurice Ravel ; et leurs domiciliations à Ciboure…

25nov

En gardant à l’esprit la remarquable lettre _ à la page 266 de l’Intégrale de la Correspondance de Maurice Ravel publiée par Manuel Cornejo aux Editions Le Passeur, en octobre 2018 _ de Maurice Ravel à son amie luzienne Marie Gaudin, en date du 22 juin 1911, 

lettre dans laquelle Maurice Ravel prie sa chère amie luzienne de bien vouloir trouver un logement de vacances à Ciboure pour sa mère, lui-même, et aussi, au moins un moment, son frère Edouard Ravel :

« Vous avez bien voulu vous charger de nous trouver un logement à Ciboure. Je vous demanderai donc de vous en occuper de suite, si vous en avez le temps. (…) Donc, si c’était possible, nous irions là-bas à partir du 15 juillet, et resterions 3 mois. (…) Il faut 2 chambres, dont l’une puisse contenir 2 lits. Bien entendu, pension comprise : je ne veux pas que maman fasse autre chose que se reposer. Nous préfèrerions que ce soit chez des parents. Les repas pris en commun seraient moins embêtants que chez des étrangers. Cherchez donc pour commencer chez Sabadin Quinior, si elle vit encore ; chez Eslonta Maicourné (c’est comme ça que ça s’écrit ?), chez Marie-Dominique Anchochoury ; chez les Goyenague… ou bien autre part. Inutile de vous dire qu’une simplicité économique nous conviendra particulièrement. Aussitôt que vous aurez trouvé quelque chose, vous serez bien gentille de nous écrire. Il faut que nous ayons le temps de consulter le budget et de préparer le départ. Sans doute à bientôt.« 

À part le nom bien connu des cousins Goyenague _ Paul (Ciboure, quartier de la Place, maison Ganichicarrenia n° 139, 19 août 1854 – Ciboure, 6 mars 1929) et son épouse Nicolasse (Ciboure, Bordagain, maison n° 38, 11 juillet 1864 – Ciboure, 1er juin 1945) ; Paul, le fils de Simon Goyenague (Ciboure, rue Pocalet, n° 117, 24 novembre 1821 – Ciboure, rue du quai n° 6, 18 avril 1890), le cousin qui a tenu Maurice Ravel sur les fonts baptismaux de l’église Saint-Vincent de Ciboure, le samedi 13 mars 1875 _,

ainsi que celui, bien connu, lui, aussi de Marie-Dominique Anchochoury _ née à Ciboure, rue du quai, n° 28, le 19 avril 1888 _,

nous ignorons encore quelles personnes figurent ici sous ces deux noms plutôt étranges _ retranscrits par Maurice Ravel de ce qu’il percevait un peu difficilement de la prononciation de sa mère… _ de « Sabadin Quinior » et de « Eslonta Maicourné » ;

et qui tous sont indiqués ici par Maurice Ravel comme étant des « parents« …

Et surtout, jusqu’ici,

le patronyme d’Etchepare ne figure pas dans l’index des noms répertoriés par Manuel Cornejo en son édition de la Correspondance connue jusqu’ici de Maurice Ravel…

Maurice Ravel ne parle donc pas explicitement d’eux, tout au moins dans sa correspondance accessible jusqu’ici…

Voilà donc pour le socle-préambule de ce premier essai de synthèse concernant les membres de la famille Etchepare apparentés à la famille de Marie Delouart et son fils Maurice Ravel ; ainsi que les domiciliations de chacun d’entre eux…

À suivre, donc…

Ce jeudi 25 novembre 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

En poursuivant ma lecture de mes notes de l’été 2018 sur l’installation des Bioy en Argentine au XIXe siècle…

10août

En poursuivant ma lecture de mes notes de l’été 2018 sur l’installation des Bioy en Argentine au XIXe siècle,

j’ai retrouvé ce que j’avais relevé alors de l’histoire de l’arrivée en Argentine de divers parents Bioy venus d’Oloron…

L’histoire des Bioy en Argentine débute avec la venue d’Antoine Bioy Croharé (Oloron, 7 décembre 1809 – Oloron, 5 août 1883) en 1834-1835.

Peu après son mariage, à Préchacq-Navarrenx _ lieu de résidence de l’épouse (ainsi que de la famille Lanusse)… _, le 23 septembre 1834 avec Marie-Anne Casamayou (1809 – 1889) _ à laquelle le liait peut-être (ainsi qu’aux Lanusse, de ce village) certains ancêtres communs : Poey, Mirande ?.. La chose deseure toujours à creuser… _ ;

et peu après la conception de leur premier enfant, Claire Elisabeth Bioy, qui naîtra à Oloron (maison Herrou, rue de la Sablière _ future rue Chanzy, puis rue Louis Barthou… _), le 8 juillet 1835 ; cette enfant décèdera dix jours plus tard, le 18 juillet 1835 ;

mais juste avant le retour d’Antoine Bioy Croharé chez lui à Oloron, et la conception du second enfant d’Antoine Bioy Croharé et son épouse Marie-Anne Casamayou : la petite Marie Clotilde Bioy (Oloron, 3 juin 1836 – Oloron, 1914), qui a été conçue _ à Oloron _ fin août 1835 , et qui naîtra à Oloron (maison Poey, rue la Sablière) le 3 juin 1836 _ veuve Lezla, Marie Clotilde Bioy décèdera à Oloron en 1914 (sans plus de précision jusqu’ici) ; et elle est inhumée au cimetière de Sainte-Croix, dans la tombe de Henri Bourgeade, auprès de sa fille Marie Antoinette Joséphine (dite Mariquita) Lezla (1867 – 1936) et de son gendre Jean-Baptiste Eugène Bourgeade (1854 – 1910)… (sans plus de précisions, non plus ; ajout du 18 novembre 2023).

Entre temps, en Argentine, à Pardo (sur le territoire de Las Flores), Antoine Bioy construira une maisonnette, qui existe toujours, et qui porte la date de 1835 sur son fronton, sur un terrain qu’il avait « arrendado » (loué). Le lieu portera plus tard le nom de « El Rincon Viejo » ; et sera la propriété de son fils _ le troisième enfant du couple _ Jean-Baptiste Bioy Casamayou (Oloron, 6 août 1838 – Buenos Aires, 20 septembre 1919) ; puis de son petit-fils Adolfo Bioy Domecq (Pardo, 27 juillet 1882 – Buenos Aires, 26 août 1962) ; puis de son arrière-petit-fils Adolfo Bioy Casares (Buenos Aires, 15 septembre 1914 – Buenos Aires, 8 mars 1999) ; et maintenant du fils aîné de Marta Bioy Ocampo (New-York ? ou bien en France ?, 8 juin 1954 – Buenos Aires, 4 janvier 1994), Florencio Basavilbaso Bioy (Paris, 27 juillet 1973)…

Une ambiguïté demeure quant à un éventuel retour (en 1850) ou pas d’Antoine Bioy Croharé en Argentine et à Pardo : les récits d’Adolfo Bioy Domecq et d’Adolfo Bioy Casares divergent sur ce point _ d’importance…

Toujours est-il que c’est le fils d’Antoine, Jean-Baptiste Bioy Casamayou, ou Casamajor _ dit aussi Juan Bautista Bioy Poey dans certaines généalogies argentines… _ qui, fin 1853 – début 1854, fit, avec ses amis _ et probablement lointains parents _ Lanusse (de Préchacq-Navarrenx), le voyage du Béarn vers l’Argentine ; et qui est venu à Pardo, retrouver _ puis agrandir _ la maison construite en 1935 par son  père. 

À suivre…

A titre d’information,

voici un riche et dense courriel que j’avais adressé, le 22 août 2018, à Bruno Lucbéreilh,

membre d’une famille oloronaise apparentée aux Bioy :

Voici cher Monsieur,
un aperçu de mes recherches sur Adolfo Bioy Casares et sa famille
tant en Béarn qu’en Argentine.
 
C’est surtout sur quelques points encore un peu obscurs de la généalogie des Bioy
ainsi que leurs diverses demeures à Oloron
que des lumière béarnaises (et même oloronaises) me seraient d’un certain secours…
J’espère ne pas être trop confus dans le compte-rendu de ces recherches…
 
Récapitulatif de courriels (du 9 juillet au 21 août) :

 
1) à Françoise : « Parenté des Bioy et des Lucbéreilh » 9 juillet 2018 à 9h 30
2) « Rectification : Les Bioy, les Noblet, les Daguzan, etc. » 10 juillet, à 10h 01
3) à Françoise : « Questions sur Antoine Bioy (1809-1883) et Marie Anne Casamayor (1809-1889) : identités des personnes et des maisons à Oloron + Hervé Lucbéreilh » 21 juillet, à 11h 56
4) à Jacques : « Ajouts et corrections à mon message « Avancées de mes recherches sur les Bioy en Argentine » du 15 juillet » 23 juillet, à 10h 53
5) à Agnès Lanusse« Les parentés Lanusse-Bioy », 23 juillet, à 15h 47
6) à Jacques : « Rappel : autres générations Bioy et Daguzan et liens avec les Supervielle et les Lucbéreilh » 24 juillet, à 7h 47
7) à Agnès : « les frères Pierre & Antoine Lanusse-Larroudé et Jean-Baptiste Bioy » 26 juillet, à 14h 32
8) à Françoise : « Louise Domecq à 14 ans en Argentine, en 1858 » 28 juillet , à 8h 30
9) à Françoise :  « Mes avancées de recherche de ce matin : les frères Bioy Domecq suicidés et les bisaïeules Bioy (Casamayou, Lanusse…) en Béarn » 30 juillet, à 15h 16
10) à François : « Estacion Erize (suite) + nom du village d’origine des Erize en Navarre : Las- iur » 21 août, à 10h 17
 
1) « Parenté des Bioy et des Lucbereilh »
L’ancêtre commun aux Bioy et aux Lucbereilh
est Jean Bioy, Bidos, 22 avril 1699 – Bidos, 20 septembre 1771 (époux de Marie Casenave)
père de Jean-Baptiste Bioy, Bidos, 11 septembre 1737 – Bidos, 7 novembre 1785 (époux d’Isabeau Muchadaa)
& de Geneviève Bioy, Oloron, 3 janvier 1746 – Oloron, 19 mai 1838 (épouse de Jacques Guillaume Noblet).
Entre Jean Bioy et nous, il y a 6 générations :
1) Jean-Baptiste Bioy (Bidos, 1737),
2) Jean-Baptiste Bioy (Bidos, 1768),
3) Antoine Bioy (Oloron, 1809),
4) Marcelin Bioy (Oloron, 1840),
5) Paul Bioy (Oloron, 1878),
6) Marcelle & Marie-France Bioy (Nantes, 1912 & Tarbes, 1918),
7) Francis Lippa (Libourne, 1947) & Françoise Morin (Talence, 1950)
et entre Jean Bioy et Hervé & Bruno Lucbereilh, il y a 8 générations :
1) Geneviève Bioy (Oloron, 1746),
2) Elisabeth Noblet (Oloron, 1772),
3) Marie Elisabeth Josèphe Montaut (Oloron, 1798),
4) Bernard Capdevielle (Oloron, 1821),
5) Mélanie Capdevielle (Agnos, 1847),
6) Catherine Loustalot (Agnes, 1866),
7) Jean Marcel Emile Lucbereilh-Laborde-Lacoste (Lomas de Zamora, 1896),
8) François Joseph Marie Lucbereilh-Laborde-Lacoste (?),
9) Hervé Marcel François Marie Lucbereilh-Laborde-Lacoste (1958) & Bruno Lucaereilh-Laborde-Lacoste.
 
2) « Rectification : Les Bioy, les Noblet, les Daguzan, etc. »
 
En me relisant,

je m’aperçois que j’a fait une erreur parmi l’entrecroisement des parentés des familles d’Oloron.
 
Voici ce que j’ai écrit hier :
 
Et dans mes recherches,
je m’aperçois de plus en plus de l’importance des épouses des Bioy,
et de l’entrecroisement de ces familles d’Oloron…
 
Par exemple,
l’épouse de notre ancêtre Jean-Baptiste Bioy (1737 – 1785) était Isabeau Muchadaa (1756 ou 1741 – 1809)
dont la nièce Marie-Josèphe Muchada (Oloron, 14 mars 1759 – Oloron, 15 décembre 1796) était l’épouse de Jacques-Guillaume Noblet (c. 1740 – 3 mai 1776), écrivais-je.
Non, ici je fais erreur : le mari de Marie-Josèphe Muchada n’était pas Jacques-Guillaume Noblet, mais un Daguzan,
Jean-Pierre Daguzan (1753 – 20 janvier 1832) :
fils de Jean Daguzan (Bidos, 3 août 1718 – ) et Jeanne Baron,
petit-fils de Pierre Daguzan dit Toulouse (Bidos, c. 1659 – Bidos, 20 novembre 1763) et Jeanne Loustau-Comeig,
et arrière petit-fils de nos ancêtres (Daguzan) Jean Daguzan et Marie Bonnecaze ;
dont descend notre arrière-grand-mère Marie Isabelle Daguzan (Oloron, 15 août 1847 – Oloron, 28 février 1900),
épouse le 23 août 1871 à Oloron de Marcelin Bioy (Oloron, 14 avril 1840 – Oloron, 1917).
 
L’épouse de ce Jacques-Guillaume Noblet (c. 1740 – 3 mai 1776)
était Geneviève Bioy (3 juin 1746 – 9 mai 1838) _ dont descendent Hervé et Bruno Lucbéreilh _,
la fille de Jean Bioi (22 avril 1699 – 20 septembre 1771) et Marie Casenave,
et sœur de ce Jean-Baptiste Bioy (11 septembre 1737 – 7 novembre 1785), époux d’Isabeau Muchadaa (Oloron, 1741 – Oloron, 12 septembre 1809),
arrière-grands-parents (Bioy) de notre arrière-grand-père Marcelin Bioy.
 
Jacques-Guillaume Noblet (c. 1740 – 3 mai 1776) était
membre d’une famille de peintres connus
(son père Pierre Noblet est né à Boulogne sur Mer en 1715 et est mort à Mirande en 1774) ;
et qui a très probablement un lien de parenté avec François Noblet (1868 – 1933),
l’époux d’Anna Bioy (1877 – 1952),
et elle-même sœur des frères Jean-Baptiste et Célestin Bioy d’Hasparren ; ainsi que de Julie Bioy, épouse Plumet).
François Noblet et Anna Bioy sont les parents de Marie-Amélie (Mimi) Noblet, épouse de Robert Erize ;
et de Xavier Noblet, le pharmacien de Biscarrosse.
 
Mais je n’ai pas encore réussi à établir le lien entre Jacques-Guillaume Noblet (mort en 1776)
et  François Noblet (né en 1868).
 
Jacques-Guillaume Noblet a eu au moins deux fils :
Pierre Joseph Noblet (25 novembre 1773 – 23 avril 1813) 
et François Noblet (26 juillet 1785 – 5 janvier 1864) ;
mais je n’ai pas pu identifier leurs descendants…
La petite-fille de François Noblet (et Anna Bioy),
et fille aînée de Xavier Noblet,
Marie Claire Noblet,
a été, succédant à son père, pharmacienne à Biscarrosse.
Elle a pris sa retraite ; et je lui ai rendu visite à Biscarrosse le 4 août dernier.
 
La veuve de Xavier Noblet, Marie-Thérèse Bardet, est décédée à Biscarrosse le 18-10-2016.
Marie-Claire Noblet a deux sœurs :
Marie-Christine Noblet est mariée à Patrice Ménard ;
et Nicole Noblet est la compagne de Frédéric Vastel.
3) « Questions sur Antoine Bioy (1809-1883) et Marie Anne Casamayor (1809-1889) : identités des personnes et des maisons à Oloron + Hervé Lucbereilh »
Dans la généalogie des Bioy que vous, Jacques et François Bioy, avez établie,

les parents de Marie Clotilde Bioy (1836-1914), Jean-Baptiste Bioy (1838-1919), Marcelin Bioy (1840-1917) et Xavier Bioy (1842-1931)
sont nommés Antoine Bioy (1809-1883) et Marie Anne Casamayou (1809-1889).
Et ils se sont mariés à Préchacq-Navarrenx le 23 septembre 1834.
 
Mais dans une généalogie argentine
(d’après La Descendencia de Francisco de Paula Saubidet de Marcelo Aubone Ibarguren, Ed. Buenos Aires 2007),
les parents de Jean-Baptiste Bioy (né à Oloron en 1838)
sont nommés cette fois Juan Bioy et Margarita Poey
_ Marguerite Poey dont les parents pourraient être
Jean-Baptiste Poey (Gurs 23 septembre 1783 – ?)
et Marie Marguerite Casamayor Rey (Sainte-Marie 17 juillet 1770 – Sainte Marie, maison Lichets, 19 mars 1840).
 

Existe probablement un lien de famille entre les Casamayor (ou Casamayou, ou Casamajor) et les Poey ; 

il me semble avoir lu quelque part que Marie Anne Casamayou était une enfant naturelle ; 
son père était-il un Poey, de Gurs ? Ou d’Oloron
(c’est dans une maison Poey, rue de la Sablière, que naît le 3-6-1836 le second enfant d’Antoine Bioy et son épouse Marie Anne Casamayou, Marie Clotilde Bioy _ l’année précédente, le 8 juillet 1835 (et alors qu’Antoine Bioy se trouvait parti en Argentine, à Pardo, où il construisit l’amorce de ce qui sera bien plus tard, complétée par son fils Juan Bautista Bioy, la maison nommée, en 1868 El Alambrado, puis, en 1871, El Rincon Viejo), était née maison Herrou, rue de la Sablière, à Oloron, leur premier enfant, mais qui décède à l’âge de dix jours : Claire Elisabeth Bioy….

Cf cette généalogie des Casamayor :
 
Ce que pourrait corroborer l’indication du nom de la maison de naissance (le 3-6-1836) de Clotilde Bioy,
la maison Poey rue Sablière, à Oloron.
 
L’année précédente, le 8 juillet 1835, était née une sœur Claire Elisabeth Bioy (qui décèdera à l’âge de dix jours) maison Herrou rue de la Sablière à Oloron.
Et le 24 mai 1844 naîtra maison Bonnecaze rue Sablière à Oloron un frère Clément Bioy, qui décèdera deux mois et demi plus tard, le 9 août 1844.
 
Le nom de la maison de naissance de Jean-Baptiste Bioy (le 6 août 1838) n’est pas indiqué dans la généalogie réalisée par Jacques Bioy ;
non plus que le nom de la maison de naissance de Marcelin Bioy (le 14 avril 1840) ;
En revanche, est indiqué le nom de la maison de naissance de Xavier Bioy (le 3 décembre 1842) : la maison Croharérue des Maisons Neuves..
 
S’agirait-il en 1835 (pour Claire Elisabeth), 1836 (pour Marie Clotilde) et 1844 (pour Clément), de la même maison, rue de la Sablière ?
 
Et même s’agit-il de la maison qui deviendra la maison Bioyau 28 de la rue devenue rue Chanzy ?
Cette rue Chanzy qui deviendra ensuite la rue Louis Barthou, et avec un autre numérotage.
Cf l’indication maison Bioy 28 rue Chanzy donnée lors du décès de l’épouse de Marcelin Bioy, Marie Isabelle Daguzan, le 28 février 1900…
 
Est-de ce mariage d’Antoine Bioy et de Marie Anne Casamayor Poey (?) que date l’installation des Bioy à Oloron,
auparavant résidant à Bidos ?..
 
La maison Croharé se trouvait à Oloron rue des Maisons Neuves _ je ne sais pas la situer…
 
Francis
P. s. : je recherche aussi qui pouvait bien être la « abuela o bisabuela de mi padre » dont parle Adolfo Bioy Domecq en son premier livre de Souvenirs, Antes del 900, page 185,
et qui serait, écrit-il, une Lanusse…
 
Du côté du grand-père paternel d’Adolfo Bioy Domecq, Antoine Bioy (Oloron, 7 décembre 1809 – Oloron, 5 août 1883),
voici les noms des épouses Bioy :
Jeanne Claire Croharé Pachabat (épouse de Jean-Baptiste Bioy Muchadaa ; et fille de Marie Pachabat),
Isabeau Muchadaa Lagarde (épouse de Jean-Baptiste Bioy Casenave ; et fille d’Anne Lagarde),
Marie Casenave (épouse de Jean Bioy Loupon).
 
C’est donc du côté des ancêtres de sa grand-mère paternelle,
Marie Anne Casamayor (ou Casamayou), ou Marie Marguerite Poey,
 qu’il faut probablement rechercher une aïeule qui serait une Lanusse _ ou apparentée ; existent des liens entre les Mirande (de Castetnau-Camblong : le grand-père maternel de Louise Domecq ), et les Poey (de Gurs)…
 
Parmi les ancêtres Lanusse et les ancêtres Bioy
se trouvent bien en commun des Lafore…
Mais jusqu’ici je n’ai pas encore trouvé l’identité précise de cette « abuela o bisabuela Lanusse » de Juan Bautista Bioy Casamayor (ou Poey),
le père d’Adolfo Bioy Domecq… 
Cf aussi cet article à propos d’une réunion des descendants Lanusse le 11 novembre 2017 à San Isidro :
Je vais tâcher d’en savoir un peu plus auprès d’Agnès Lanusse, à Pau,
épouse de Benoît Larradet.
4) « Ajouts et corrections à mon message « Avancées de mes recherches sur les Bioy en Argentine »
Antoine Bioy (Oloron, 7 décembre 1809 – Oloron, 5 août 1883) :
 
Antoine Bioy, se serait rendu en Argentine vers 1835 (il s’est marié à Préchacq-Navarrenx le 23 septembre 1834, avec Marie Anne Casamajor, née le 24 juin 1812),
et aurait alors créé la propriété à Pardo,
qui prendra le nom d’ El Alambrado en 1868, puis d’ El Rincon Viejo, en 1871 ou 72. Antoine engendrera à Oloron sa fille Marie Clotilde qui naît le 3 juin 1836 ; il était donc rentré d’Argentine à la fin août 1835…

Des ambiguïtés demeurent sur l’identité (et la filiation paternelle) de cette conjointe d’Antoine Bioy (leur mariage a eu lieu le 23 septembre 1834 (ou le 22) à Préchacq Navarrenx ; Claire Elisabeth naîtra à Oloron le 8 juillet 1835 ; elle a été conçue fin septembre 1834 ; consulter les dates !),

qui est nommée Marie Marguerite Poey dans certaines généalogies argentines.
Ce qui concorderait avec le nom « Poey » de la maison située rue Sablière à Oloron
dans laquelle est née la fille d’Antoine et Marie Anne : Marie Clotilde Bioy le 3 juin 1836 !
L’épouse d’Antoine Bioy, Marie Anne (née en 1809), pourrait être fille de
Marie Marguerite Casamayor Rey (Sainte-Marie, 17 juillet 1770 – Sainte-Marie, maison Lichets, 19 mars 1840)
et de Jean-Baptiste Poey (Gurs, 23 septembre 1783 – ?)
qui se sont mariés à Gurs le 11 février 1806… Pourquoi au moment de son mariage à Préchacq-Navarrenx le 23 septembre 1834, est-elle déclarée fille naturelle de sa mère?

 
Mais Antoine Bioy
_ s’est-il entendu à Pardo avec les membres _ indigènes natifs et occupants du lieu _ de la famille Pardo ? : c’est plus que probable !!! _,
revient vite à Oloron _ pour ne plus repartir en Argentine ? ainsi que le dit Adolfito dans un entretien avec Maria Saenz Quesada _,
où naissent _ c’est bien sûr à noter ! _ tous ses enfants, entre 1835 et 1844 :
Claire le 8 juillet 1835 ; Clotilde le 3 juin 1836 ; Jean-Baptiste, le 6 août 1838 ; Marcelin, le 14 avril 1840 ; Adolphe, le 15 octobre 1841 ; Xavier, le 3 décembre 1842 ; Clément, le 24 mai 1844.
 
Antoine Bioy serait peut-être brièvement revenu à Pardo en 1850 _ mais je ne retrouve plus dans mes notes où j’ai trouvé mention de cela…
 
Et c’est son fils Juan Bautista (né à Oloron le 6 août 1838 ; et venu en Argentine en 1854, avec Pierre et Antoine Lanusse, de Préchacq-Navarrenx) qui fit poser en 1868 (Antes del 900, page 52 ! « En aquella época se llamo « El Alambrado »  a la estancia »)
la toute première clôture en cette région.
Cette estancia ne prenant son nom de « Rincon Viejo » que « tres o cuatro ans despues » (soit en 1871 ou 72), page 52.
L’histoire de Juan Bautista Bioy Casamayou (ou Casamajor, ou peut-être Poey, comme l’indiquent les généalogies argentines),
comme celle de son épouse Louise Domecq Mirande (originaire de Jasses, un village situé entre Navarrenx et Dognen ; et proche aussi de Préchacq-Navarrenx),
demande(-nt) à être considérablement précisée(s) ! Et c’est même une priorité pour fixer l’historique de l’installation des Bioy en Argentine… Il semble que tous deux aient un lien fort avec Pardo : où Antoine avait construit une maison ; et Louise étant amie au collège à Buenos Aires avec Gregoria Pardo, originaire de Pardo !
 
Le mariage de Jean-Baptiste et Louise a-t-il eu lieu en Argentine ?.. Très probablement... Et à quelle date ? et en quel lieu ? À Las Flores, le 18 août 1866 (ajout du 18 novembre 2023)…
Leur premier né, Emilio Juan Javier Bioy Domecq, est né le 6 mai 1867 à Las Flores _ à l’estancia de Pardo probablement,
qui ne s’appelait encore ni « El Rincon Viejo » (en 1871). ni même « El Alambrado » (en 1868)…
 
Louise Domecq Mirande (née le 15 janvier 1844, à Jasses)
est allée au collège à Buenos Aires (avec Gregoria Pardo, la fille de don Felipe Pardo), écrit Adolfo Bioy Domecq à la page 18 de Antes el 900.
Les Pardo (Lino 1, Felipe, Lino 2, Pascasio, Remigio, Gregoria) _ indigènes de Pardo _ avaient donc des liens non seulement avec Antoine Bioy,
mais aussi avec les Domecq (au moins Louise, sinon ses oncles Mirande, ou ses frères Domecq) !!!
Ces liens passent-ils seulement par le collège de Buenos Aires dans lequel Gregoria Pardo et Louise Domecq furent condisciples ?

Juan Domecq, l’aîné des oncles Domecq (Juan, Enrique et Emilio) d’Adolfo Bioy Domecq était né à Jasses (de même que Louise Domecq, en 1844) le 28 février 1826 ; et il revint mourir à Jasses.

Emilio Domecq, lui aussi né à Jasses, en 1846, est revenu mourir à Jasses, en 1887.
Seul Enrique Domecq, né à Jasses le 16 avril 1838, est décédé (d’un cancer) en Argentine : « en su quinta de Barracas », écrit Adolfo Bioy Domecq à la page 93 de son Antes el 900.
A quelle date ces Domecq vinrent-ils donc sinstaller en Argentine ?
 
Et en effet ont vécu aussi en Argentine 3 frères Domecq de Louise :
Juan, l’aîné, « nacido antes de 1830 », page 93 de Antes el 900 (le 28 février 1826, à Jasses) ; et mort à Jasses, une fois retourné en France pour se soigner, page 94 (le 9 décembre 1882) ;
Enrique (« murió de cancer a los 42 anos », page 93 (né à Jasses le 16 avril 1838, et mort en su quinta de Barracas en 1880) ;
et Emilio (1846 – 1887), le parrain de baptême de son neveu Adolfo Bioy Domecq, page 92.
Cette fratrie Domecq Mirande était donc bien installée en Argentine ; et peut-être même, au moins pour certains, à Pardo ou dans les environs…
 
Juan Bautista Bioy « tenia veinte anos (en 1858) cuando se conocieron _ à Pardo ! _ con don Lino (Pardo) », écrit Adolfo Bioy Domecq à la page 15 d’Antes el 900.

Et ce sont les Pardo qui ont donné leur nom au village, où fut commencé de construire en 1835 par Antoine Bioy ce qui deviendra El Rincon Viejo de son fils Juan Bautista…

Ce qu’attestent diverses photos conservées dans la famille (cf page 67) :
« Había también sobre esa mesa un daguerreotipo de mi padre a los decinueve o veintiuno anos (a uno de las veinte _ et il était né le 6 août 1838 à Oloron : ce qui donne en 1857 ou 1859 pour cette photo ! _)
que conservo actualmente (en 1953) en mi poder » ; etc.
5) « Les parentés Lanusse-Bioy »
Dans le premier volume de ses Souvenirs, intitulé Antes del 900
Adolfo Bioy Domecq  évoque,
outre un ancien lien de parenté (en Béarn) entre les Bioy et les Lanusse
la abuela o bisabuela de mi padre _ son père : Juan Bautista Bioy Casamayor (ou Poey) _ era una Lanusse », page 185 : je cherche à l’identifier !)
la très grande amitié qui unissait la casa Bioy et Pedro Lanusse (Larroudé), en Argentine, pages 181-182.
 
Si bien que le jour de la mort de Pedro Lanusse Larroudé, le 6 novembre 1897,
la porte de la casa Bioy calle Alsina à Buenos Aires a été recouverte de noir.
« El afecto era tan hondo y tan puro que superaba cualquier vinculo de sangre », page 185.
 
Je note aussi que « durante el verano de 1899-1900, estábamos en Pardo. (…)
Acompanaban a mi madre _ née Louise Domecq Mirande, à Jasses le 15 janvier 1844, et épouse de Juan Bautista Bioy _ en el veraneo
Malena e Isabel Lanusse », page 153 :
c’est-à-dire Maria Magdalena Lanusse Fernandez (née à Buenos Aires le 23 avril 1852)
et Isabel Lanusse Fernandez (née à Buenos Aires le 19 novembre 1860),
laquelle épousera Emilio Juan Javier Bioy (né à Las Flores le 6 mai 1867),
le fils aîné de Juan Bautista Bioy (Oloron, le 6 août 1838 – Buenos Aires, 1919) et Mathilde Louise Domecq (Jasses, le 15 janvier 1844 – Buenos Aires, 1913).
 
Maria Magdalena et Isabel Lanusse Fernandez
sont filles de Jean Philippe Lanusse Mouras (Préchacq Navarrenx, le 1er mai 1814 – Buenos Aires, le 22 août 1869)
et Maria Ramona Fernandez Martinez (San Antonio de Areco, le 31 août 1818 – Buenos Aires, le 25 février 1874), qui se sont mariés à Buenos Aires le 20 mai 1848.
 
Jean-Philippe Lanusse Mouras (1814 – 1869) était l’oncle paternel de Pierre Lanusse Larroudé (1839-1897),
dont le père Pierre Lanusse Mouras (Préchacq Navarrenx, le 26 février 1808 – Préchacq Navarrenx, le 16 mars 1883) était le frère aîné.
Vers 1854, le neveu Pierre Lanusse Larroudé (et son frère Antoine) a rejoint l’oncle Jean-Philippe Lanusse Mouras
qui l’avait précédé en Argentine, et s’y était marié en 1848. Pierre et Antoine firent le voyage avec Jean-Baptiste Bioy !!!!
Encore un autre lien familial entre les Bioy et les Lanusse,
en plus du mariage entre Javier Bioy Domecq (né le 6 mai 1867) et Isabel Lanusse Fernandez :
le mariage entre Juan Bautista Bioy Domecq (né le 2 juin 1874 – Buenos Aires, 2 mai 1938)
et Margarita Lanusse Cazenave (Buenos Aires, le 1er juin 1881 – Buenos Aires, le 15 janvier 1964),
fille de Pierre Lanusse Larroudé (1839-1897) et de Marie Cazenave Larralde (c. 1851 – Buenos Aires, le 4 juin 1929).
6) « Rappel : autres générations Bioy et Daguzan et liens avec les Supervielle et les Lucbereilh »
voici,
parmi le rappel d’autres généalogies Bioy que j’ai élaborées récemment,
les liens de parenté qui existent entre les Bioy, les Daguzan et les Supervielle à Oloron.
 
L’arrière-grand-père Bernard Xavier Supervielle (Oloron, 30 avril 1848 – Paris, 2 juillet 1901) de Silvia Baron Supervielle
a pour arrière-grand-mère Marie Jeanne Daguzan (c. 1751 – Oloron, 21 septembre 1819),
dont la fille Marie Véronique Bergez
est l’épouse de Bernard Supervielle (Oloron, 12 juillet 1786 – 21 novembre 1838)
et la mère de Romain Dominique Supervielle (7 août 1807 – 7 janvier 1889).
 
Et la mère de mon grand-père Paul Bioy (Oloron, 25 avril 1878 – Bordeaux, 6 décembre 1954),
est Marie Isabelle Daguzan (Oloron, 15 août 1847 – Oloron, 28 février 1900) _ cousine germaine de Monseigneur Auguste Daguzan (1884 – 1956).
 
L’ancêtre commun côté Daguzan (à Oloron) est
Jean Daguzan, époux de Marie Bonnecaze,
dont les deux fils Antoine (c. 1672 – 1749), époux de Marie Cassou
et Pierre (c. 1689 – 1763), époux de Jeanne Loustau Comeig,
sont à la racine de nos 2 lignées (disons Supervielle et Bioy), que voici :
 
Lignée de Pierre Daguzan (c. 1789 – 1763) : Lignée d’Antoine Daguzan (c. 1672 – 1749) :
 
Jean Daguzan (1718 – ), époux de Jeanne Baron, Pierre Daguzan (1717 – 1790), époux de Catherine Gourgues,
Marie Jeanne Daguzan (c. 1751 – 1819), épouse de Joseph Bergès, Pierre Daguzan (1758 – 1815), époux de Marie Anne Estoucou,
Marie Véronique Bergès (1781 – 1840), épouse de Bernard Supervielle, Urbain Daguzan (c. 1783 – 1849), époux de Magdelaine Fourcade,
Romain Dominique Supervielle (1817 – 1889), époux de Anne Etchehon, Jean Daguzan (1816 – 1854), époux de Marguerite Bastide,
Bernard Xavier Supervielle (1848 – 1901), époux de Mariana Munyo, Marie Isabelle Daguzan (1847 – 1900), épouse de Marcelin Bioy (1840 – 1917),
Ana Supervielle Munyo (1881 -1969) épouse de Jean Etienne Baron, Antoine Bioy (1872 – 1950), époux de Stéphanie Durcudoy,
Paul Bioy (Oloron, 25 avril 1878 – Bordeaux, 6 décembre 1954), époux de Léontine Leroy (Bordeaux, 28 décembre 1882 – Castillon-la-Bataille, 1960),
Andres Baron Supervielle (1905 – 1999), époux de Raquel Garcia Arocena, Edouard Bioy (Buenos Aires, 18 mai 1908 – Pau, 23 novembre 1999), époux de Jeanne Marre
Marie France Bioy (Tarbes, 11 février 1918 – Bordeaux, 27 octobre 2018), épouse de Benedykt Lippa,
Silvia Baron Supervielle Garcia Arocena (Buenos Aires, 10 avril 1934) Francis Lippa (Libourne, 12 décembre 1947)
 
Côté Bioy, cette fois,
existe un autre lien de parenté entre les familles Bioy et Supervielle :
 
Clotilde Marie Bioy (Oloron, 3 juin 1836 – Oloron, 1914), épouse d’Auguste Antoine Camille Lezla (3 février 1824 – Oloron, 14 janvier 1870) _ et dite Maman Lezla _,
sœur aînée de Jean-Baptiste Bioy (dont Adolfo Bioy Domecq est un fils ; et Adolfito Bioy Casares, le petit-fils)
et de Marcelin Bioy (dont Paul Bioy, mon grand-père, est le fils, ma mère Marie France Bioy, la petite-fille, et moi-même, Francis Lippa, l’arrière-petit-fils,
 
Clotilde Bioy, donc,
est la mère de
Marie Antoinette Joséphine (dite Mariquite) Lezla (1867 – 1936), épouse de Jean Baptiste Eugéne Bourgeade (1854 – 1910)
et la grand-mère de
Marie Augusta Anna Bourgeade (Bordeaux, 26 novembre 1895 – 21 mars 1963),
épouse d’ Auguste Romain Nicolas Supervielle (Oloron, 3 avril 1890 – Oloron, 1984),
fils de Ferdinand Hilarion Supervielle,
et neveu de Bernard Xavier Supervielle, l’arrière-grand-père de Silvia Baron Supervielle.
 
Anna et Auguste Supervielle ont eu un fils, Jean Supervielle,
père de trois enfants : 
Jacques, Hervé et Catherine Supervielle.
 
Dans nos archives familiales,
se trouve une lettre (de Buenos Aires, datée du 28 avril 1948)
du frère aîné, Antoine Bioy (Oloron, 9 avril 1872 – Buenos Aires, 31 août 1950 ; grand-père paternel de Jacques et François Bioy),
à son frère Paul (Oloron, 26 avril 1878 – Bordeaux, 6 décembre 1954), mon grand-père,
lettre mentionnant Auguste Supervielle (Oloron, 3 avril 1890 – Oloron, 1984)
et surtout un de ses cousins _ Supervielle ? lequel ? _ à Buenos Aires :
 
« Aujourd’hui, nous sommes allés _ Antoine Bioy avec son fils Edouard, cardiologue, 40 ans alors, en 1948chez un cousin lequel ? d’Auguste Supervielle, le banquier _ époux de la cousine des Bioy née Anna Bourgeade _, qui voulait connaître Edouard _ excellent médecin (Buenos Aires, 18 mai 1908 – Pau, 23 novembre 1999), et chez lequel, une fois qu’Edouard fut revenu en France, à Pau, descendit régulièrement Adolfito, à chacune de ses venues en Béarn et à Oloron. Mes cousins François (né à Pau le 22 septembre 1945) et Jacques (né à Pau le 30 novembre 1941) Bioy possèdent toujours, en plus de propriétés dans la Pampa (à Erize), l’appartement que leur grand-père Antoine Bioy avait acheté Calle Pueyrredon (n° 939 2° piso A). Il lui a dit qu’il le prendra comme médecin. Auguste lui avait certainement parlé de lui lors de son dernier voyage à Paris. »
 
Si l’on prend strictement à la lettre l’expression « un cousin d’Auguste Supervielle, le banquier »,
conviennent
le cousin Luis Julio Supervielle (1879 – 1951)
et le cousin Jules Louis (1884 – 1960), le poète !
Auquel cas Antoine n’aurait vraisemblablement pas manqué de préciser l’état civil de ce cousin illustre…
Mais existaient peut-être aussi d’autres cousins d’Auguste Supervielle à Buenos Aires…
 
 
L’autre fille de Marie Clotilde Bioy-Lezla _ et l’aînée par rapport à Mariquite Bourgeade _,
est Anna Marie Lezla (Oloron, 3 juillet 1864 – 1945),
partie très jeune en Argentine,
épouse, en 1883 à Las Flores, de Francisco Erize (Oloron, 2 août 1862 – 16 juillet 1935),
le fondateur de l’estancia d’Erize.
 
Leur fils aîné Javier Erize Lezla (18 avril 1889 – 31 mars 1959), époux d’Amelia Arrechea Carricart,
a eu lui-même pour fils aîné Francisco Erize Arrechea (1916 – 1990), époux de Jeannette Arata Rufz (Buenos Aires, 30 juin 1922 – Buenos Aires, 8 août 2013).
Et eux-mêmes sont les parents de
Francisco Javier Erize Arata (Buenos Aires, 13 mai 1943 ; et décédé le 8 mars 2021, je le découvre ce 18 novembre 2023)
et Luis Alberto Erize Arata (Buenos Aires, 1er janvier 1946),
bien connus tous les deux à Buenos Aires…
 
Au tout début des années 30, Javier Erize (1889 – 1959) est venu rendre visite à mon grand-père Paul Bioy (1878 – 1954) à Bordeaux. Leur fils Francisco (1916-1990) était lui aussi de ce voyage en Europe, qui s’est achevé par leur retour en Argentine par Vigo.
 
 
Quant à Adolfito Bioy Casares (Buenos Aires, 15 septembre 1914 –  Buenos Aires, 8 mars 1999),
il est le fils d’Adolfo Bioy Domecq (Pardo, 27 juillet 1882 – Buenos Aires, 26 août 1962), époux de Marta Casares Lynch
et le petit-fils de Jean-Baptiste Bioy (Oloron, 6 août 1838 – 1919), époux de Mathilde Louise Domecq,
et frère de Marie Clotilde Bioy (Oloron, 3 juin 1836 – 1914)
et de Marcelin Bioy (Oloron, 14 avril 1840 – Oloron, 1917).
 
Mon grand-père Paul Bioy et son frère Antoine Bioy sont donc les cousins germains d’Adolfo Bioy Domecq,
de même que ma mère Marie-France Bioy (1918 – 2018) et son cousin palois le Dr Edouard Bioy (1908-1999) sont cousins au second degré d’Adolfito Bioy Casares (1914-1999).
 
C’est Juan-Bautista Bioy qui le premier, après son père Antoine, en 1835, a fait le voyage du Béarn vers l’Argentine _ en 1854, il se rend en Argentine avec « Pedro y Antonio Lanusse », de Préchacq-Navarrenx
(Interview d’ABC avec Maria Saenz Quesada, publiée en 2012 dans Los Estancieros _ desde la epoca colonial hasta nuestros dias) _ Jean Baptiste Bioy et ces Lanusse étaient probablement parents, via Marie Anne Casamayou : les frères Lanusse étaient de Préchacq-Navarrenx ; et le mariage d’Antoine Bioy et Marie Anne Casamayou a eu lieu aussi à Préchacq-Navarrenx…
C’est en 1858, semble-t-il, que Juan Bautista Bioy _ qu’a-t-il fait depuis son arrivée à Buenos Aires en 1854 ? _ fait la connaissance à Pardo de don Lino Pardo (déclare Adolfo Bioy Domecq, à la page 15 d’ Antes de 900) _,
rejoint par sa nièce Anna Marie Lezla (née à Oloron le 3 juillet 1864), très jeune lors de son propre départ vers l’Argentine (avant 1883),
et qui épouse, à Las Flores, en 1883 (à l’âge de 19 ans), Francisco Erize, âgé de 21 ans, et lui aussi originaire d’Oloron…
7) « les frères Pierre & Antoine Lanusse-Larroudé et Jean-Baptiste Bioy »
En poursuivant mes recherches,

j’ai trouvé un entretien donné par Adolfo Bioy Casares à Maria Saenz Quesada
(aux pages 397 à 403 du livre de celle-ci Los Estancieros _ dès de la exposa colonial hasta nuestros dias)
dans lequel ABC déclare que « Su hijo (c’est-à-dire celui de son « bisabuelo Bioy » Antoine)
Juan Bautista Bioy _ né à Oloron le 6 août 1838, peut-être maison Poey rue Sablière _ vino al pais junto con otros jóvenes bearneses,
los hermanos Pedro (Préchacq-Navarrenx, 2 mars 1839 – Buenos Aires, 6 novembre 1897) y Antonio Lanusse, contadores como el ».
 
Je ne parviens pas à préciser l’identité de cet Antoine Lanusseau sein de cette fratrie Lanusse Larroudé :
Didier, né à Préchacq-Navarrenx le 13 février 1835 ;
Pierre (Préchacq-Navarrenx, 1839 – Buenos Aires, 1897) ;
Jean-Henri (Préchacq-Navarrenx, 14 juillet 1844 – 8 juin 1915) ;
Marc ;
François. 
 
J’essaie de déterminer la date de l’arrivée de ces trois-là _ Jean-Baptiste Bioy, Pierre et Antoine Lanusse Larroudé : en 1854 ! _ en Argentine,
sachant que « mi abuelo _ Juan Bautista Bioy, précise en son entretien Adolfo Bioy Casares _ trabajo un tiempo en la casa de comercio de Udaondo ;
y antes de 1860 compro el terreno que había arrendado su padre _ Antoine Bioy en 1835.
Se caso _ j’en ignore la date et le lieu, en Argentine ! _ con una Domecq _ Mathilde Louise, née à Jasses le 15 janvier 1844 : Louise Domecq Mirande est-elle apparentée aux Lanusse ? Peut-être via la parenté entre des Mirande (de Castetnau-Cablong) et des Poey (de Gurs)… À creuser… _
y siguió muy unido con sus compañeros de travesía : fue de los primeros clientes de la finca Lanusse » _ savez-vous où se trouvait cette finca Lanusse ?.. 
 
Pierre Lanusse Larroudé, lui, a épousé à Buenos Aires le 28 septembre 1867 Marie Cazenave Larralde (native de Saint-Jean-de-Luz vers 1851).
 
Le premier né de JeanBaptiste Bioy et Louise Domecq, Xavier Bioy Domecq, est né à Las Flores le 6 mai 1867 ;
et le premier né de Pierre Lanusse Larroudé et Marie Cazenave Larralde 
est Romulo Diego Lanusse Cazenave, né à Buenos Aires le 17 février 1869.
 
Je me demande si ce Pierre Lanusse Larroudé et Jean Baptiste Bioy n’avaient pas un lien de parenté,
puisque Adolfo Bioy Domecq écrit, à la page 185 de son Antes del 900,
« la abuela o bisabuela de mi padre _ Antoine Bioy _ era una Lanusse » !
 
Bien à vous,
 
Francis Lippa, à Bordeaux
Tél. : 06 70 63 43 93
P. s. : j’ai découvert qu’existait un Los Lanusse _ mas de 150 anos de historia argentina,
par Miguel Ricardo Lanusse et Augusto Golletti Wilkinson,
Editorial Sudamericana, 1991.
8) « Louise Domecq à 14 ans en Argentine, en 1858 »
Quelques remarques sur l’installation des Bioy à Pardo, et Louise Domecq Mirande,
l’épouse de Jean Baptiste Bioy,
la mère d’Adolfo Bioy Domecq
et la grand-mère paternelle d’Adolfito…

Ayant racheté les Romans d’Adolfo Bioy Casares en Bouquins,

je découvre, dans l’Introduction générale de Michel Lafon, page X,
que c’est en 1858, à l’âge de 14 ans, que Louise Domecq, accompagnée de sa sœur aînée (laquelle ?), débarque à Buenos Aires,
où se trouvent déjà ses oncles maternels Mirande (« qui travaillent aux chemins de fer français » :
le premier Ferrocarril, le Ferrocarril Oeste de Buenos Aires, a été ouvert le 29 août 1857 ; ses actionnaires étaient anglais…).
 
Dans Antes del 900, pages 91 à 95, Adolfo Bioy Domecq, évoque longuement 3 frères de Louise,
ses oncles Emilio (1846 – 1887 : « su estancia El Candil » se situait « en el partido de Tapelque » ), 
Enrique (1838 – 1880 : sa maison était « en el pueblo de Las Flores » ; et il est mort dans « su quinta en Barracas ») 
et Juan Domecq (1826 – 1882 : « en el pueblo de La Guardia del Monte tenia casa, y también en la estancia (en El Monte) y también en Buenos Aires »),
tous les trois eux aussi installés en Argentine _ mais à partir de quand ?
Emilio et Juan Domecq sont retournés mourir chez eux à Jasses, en Béarn : chacun était rentré en France afin de se soigner…
 
Adolfo Bioy Domecq parle aussi, page 39, de « la gran amiga de mi madre Elena Lanusse de Conde » :
il s’agit d’Elena de Los Dolores Lanusse Fernandez, épouse de Francisco Conde Perez,
fille (née le 3 août 1842 à Buenos Aires) de Jean Lanusse Mouras (né à Préchacq-Navarrenx le 15 octobre 1811)
et Marcelina Fernandez Martinez (née en Argentine le 2 juin 1814)
qui s’étaient mariés à Buenos Aires le 9 novembre 1839 _ probablement le premier Lanusse à avoir fait le voyage d’Amérique du Sud; et qui put y accueillir des neveux de Préchacq-Navarrenx…
 
Et page 153, durant « el verano de 1899 – 1900 », « acompanaban a mi madre Malena e Isabel Lanusse »,
c’est-à-dire Magdalena Lanusse Fernandez (née à Buenos Aires le 23 avril 1852)
et Isabel Basilia Lanusse Fernandez (née à Buenos Aires le 19 novembre 1860)
_ qui épousera le 4 avril 1904 Javier Bioy Domecq (né à Las Flores le 6 mai 1867), le fils aîné de Louise et Juan Bautista Bioy.
Apparemment, ils n’auront pas de descendance.
Et je n’ai pas pu trouver la date de leur décès _ peut-être par suicide dans le cas de Javier Bioy Domecq…
Ce Javier Bioy Domecq _ l’aîné de la fratrie _ est-il, ou pas, le 3éme des frères (avec Pedro Antonio et Enrique) d’Adolfo Bioy Domecq
à s’être suicidé ? Probablement… Fin de l’incise.
Cette fois, avec Magdalena et Isabel Basilia Lanusse Fernandez,
il s’agit là de deux (doublement) cousines d’Elena de Los Dolores Lanusse Fernandez,
car filles, cette fois, de Juan Felipe Lanusse Mouras (né à Préchacq-Navarrenx le 1er mai 1814 et frère de Juan)
et Maria Ramona Fernandez Martinez (née en Argentine le 31 août 1818 et sœur de Marcelina) ;
les deux frères Jean et Jean-Philippe Lanusse Mouras ayant épousé les deux sœurs Marcelina et Maria Ramona Fernandez Martinez.
 
Et c’est le neveu de ces deux frères Lanusse Mouras,
et fils de leur frère aîné Pierre Lanusse Mouras (né à Préchacq-Navarrenx le 25 décembre 1808),
Pierre Lanusse Larroudé (né à Préchacq-Navarrenx le 2 mars 1839),
qui sera le grand ami de Juan Bautista Bioy (né à Oloron le 6 août 1838) :
 
c’est ensemble _ et avec Antonio Lanusse _ que Jean Baptiste Bioy (Casamayor _ Daniel Martino lndique en une note à un texte d’ABC de 1952 : « Marie Casamayou, de Navarrenx, fue una de las bisabuelas paternas de Bioy Casares », plutôt que Poey ?) et Pierre Lanusse Larroudé
ont traversé l’Atlantique pour venir s’installer en Argentine : la date demeurant à préciser ! Probablement 1854.
 
Pierre Lanusse Larroudé épousera à Buenos Aires le 28 septembre 1867 Maria Cazenave Larralde
et Jean Baptiste Bioy épousera _ lieu et date à préciser : à Las Flores, le 18 août 1866 (ajout du 18 novembre 2023) _ Louise Domecq Mirande…
 
Autre chose encore, page 18 d’Antes del 900 :
Louise Domecq Mirande (née à Jasses le 15 janvier 1844 ; et débarquée avec sa sœur aînée à Buenos Aires à l’âge de 14 ans en 1858)
est allée « a la escuela en Buenos Aires » « junta » avec la « hija Gregoria » de don Remigio Pardo
_ un des fondateurs « en el ano 1829 o en el 30 » (page 14) du village de Pardo, et qui lui ont donné leur nom !
 
« Dona Gregoria (Pardo, et qui épousera Santana Ramirez) era exactamente de la misma edad que mi madre,
habian estado juntas en la escuela, en Buenos Aires,
por lo que la llamaba Luisa, simplemente, y no Misia Luisa como todos los demás. »
Et « Don Remigio tenia devoción por mi padre » _ Juan Bautista Bioy _, écrit encore Adolfo Bioy Domecq, le père d’Adolfo Bioy Casares.
 
Je m’interroge donc sur les liens qui passent par Louise Domecq Mirande
avec Pardo, le village de la famille Pardo,
celui-là même où Antoine Bioy avait en 1835 commencé à construire la maison qui deviendra, par son fils Juan Bautista, en 1868 « El Alambrado »
et en 1871-ou 72 « El Viejo Rincon ».
9) « Mes avancées de recherche de ce matin : les frères Bioy Domecq suicidés et les bisaïeules Bioy (Casamayou, Lanusse…) en Béarn »
Voici ce que j’ai pu établir dans mes recherches d’hier et de ce matin

sur l’histoire des Bioy :
 
Les 3 oncles suicidés d’Adolfo Bioy Casares sont 
l’aîné Emilio Juan Javier Bioy Domecq (né à Las Flores le 6 mai 1867, et époux, le 4 avril 1909 à Buenos Aires, d’Isabel Basilia Lanusse Fernandez, née à Buenos Aires le 19 novembre 1860 ; apparemment sans descendance) ; j’ignore encore le lieu et la date du suicide de Javier Bioy (ajout du 18 novembre 2023) ;
le 5e de la fratrie Pedro Antonio Bioy Domecq (né en 1876 ; apparemment sans descendance ; suicidé le 11 juillet 1923)
et le 6e de la fratrie Enrique Bioy Domecq (né le 21 octobre 1879 , et suicidé à Buenos Aires  le 26 novembre 1917), suite surtout à une rupture sentimentale (sans descendance).
Très peu de renseignements sur  Emilio Juan Javier Bioy et sur Pedro Antonio Bioy.
 
Les 2de et 3e de la fratrie Bioy Domecq sont les tantes
Maria Luisa Bioy Domecq (née en 1869, épouse de Pedro Cazenave, décédée en 1960 ;
et mère de 7 enfants Cazenave Bioy : Marguerite, Albert, Pierre, Marie Louise dite Licha, Hector, Rodolphe et Henri Cazenave Bioy) ;
et Marcelina Bioy Domecq (née en 1870 ou 71, épouse de Juan Jose Lemos Villanueva, décédée en 1961 ;
et mère de 6 enfants Lemos Bioy : Virginie, Jean Louis, Marie Odile, Ernest, Guillaume et Eduardo Lemos Bioy).
 
Adolfo Bioy Domecq (Pardo, 27 juillet 1882 – Buenos Aires 26 août 1962, époux, le 10 octobre 1913, de Marta Ignacia Casares Lynch, née en 1888, et décédée à Buenos Aires le 20 août 1952 ;
et parents d’un fils unique Adolfito Bioy Casares, né à Buenos Aires le 15 septembre 1914 et décédé à Buenos Aires le 8 mars 1999)
est le 8e de cette fratrie _  le 7e étant Emilio, né le 18 mars 1878 et décédé un an plus tard, le 23 avril 1879 (ajout du 18 novembre 2023).
 
Avant lui,
le 4e de la fratrie Bioy Domecq est
Juan Bautista Bioy Domecq (né le 2 juin 1874 et décédé à Buenos Aires le 2 mai 1938, époux de Margarita Lanusse Cazenave, née à Buenos Aires le 1er juin 1881
_ fille de Pierre Lanusse Larroudé (le grand ami de Juan Bautista Bioy Domecq : ils vinrent ensemble en Argentine en 1854 !!!) et de Marie Cazenave Larralde _, 
et décédée à Buenos Aires le 15 janvier 1964 ;
parents de 4 enfants Bioy Lanusse :
un fils Juan Bautista Bioy Lanusse dit El Cabito (sans descendance, lui aussi)
et trois filles, Margarita Bioy Lanusse, dite Margot, épouse de Juan Cruz Saubidet Duffy (5 enfants Saubidet Bioy : Juan Cruz, Margarita, Enrique, Carlos Maria et Pedro Saubidet Bioy),
Luisa (sans descendance),
et Maria Mercedes Bioy Lanusse, épouse de Leandro Matienzo Garcia (3 enfants Matienzo Bioy : Mercedes, Ana Luisa et Juan Bautista Matienzo Bioy).
 
Et le 8e (ou plutôt 9e) et dernier de la fratrie Bioy Domecq est Augusto Clément Bioy Domecq (né à Oloron le 27 septembre 1885, époux de Nina Gorostiaga ; lesquels sont les parents de Ninita Bioy Gorostiaga, laquelle est décédée à Buenos Aires le 7 février 2018 ; Ninita est l’épouse de Jorge Gallart Jorba ; lesquels ont eu deux enfants : Matias et Alejandra Gallart Bioy…).
 
Jusqu’ici, je n’ai pas découvert les dates des suicides de Javier et Pedro Antonio Bioy Domecq : le 11 juillet 1923 pour Pedro Antonio (ajout du 18 novembre 2023).
 
Ce n’est pas Juan Bautista Bioy Domecq _pas plus qu’Augusto Clément Bioy Domecq _ qui héritera de l’estancia El Viejo Rincon del Pardo,
mais Adolfo Bioy Domecq, au moment du partage entre les frères des diverses estancias Bioy ; et de la crise qui va ruiner beaucoup d’entre eux.
 
Au moment de la crise de 1929 qui ruine les membres restants de la famille Bioy, qui vendent alors leurs estancias,
Adolfo Bioy Domecq, en effet, choisit, lui, de ne pas vendre El Rincon Viejo, mais plutôt de le louer.
En 1930-31, il occupera divers postes gouvernementaux.
 
Ce qui fait qu’en 1936, Adolfito, âgé de 22 ans, demandera à son père de devenir le gestionnaire de l’estancia du Rincon Viejo.
Il y vivra jusqu’en 1940, y lira et y écrira beaucoup (notamment L’Invention de Morel), y recevra fréquemment Borges et Silvina Ocampo,
qu’il épousera à Las Flores le 15 janvier 1940…
 
 
D’autre part,
une note de bas de page, page 581, ligne 31 du Premier Volume de l’Obra Completa d’Adolfo Bioy Casares réalisé par Daniel Martino aux Ediciones Emecé en 2016,
à propos de l’expression d’Adolfo Bioy Casares dans son Homenaje a Francisco Almeyra (en son Historia prodigiosa , publiée en 1956)
« señores Casamayou, unos franceses de Navarrenx »
indique ceci :
« Marie Casamayou, de Navarrenx, fue una de las bisabuelas paternas de Bioy Casares ».
 
Les deux grand-mères paternelles d’Adolfo Bioy Domecq (et arrière-grands-mères paternelles d’Adolfito)
étaient
Marie Anne Casamayou _ et pas Marguerite Poey _, épouse d’Antoine Bioy et mère de Juan Bautista Bioy Casamayou
et Marie Mirande, épouse de Pierre Domecq  et mère de Louise Domecq Mirande.
 
Reste à expliquer l’affirmation d’Adolfo Bioy Domecq à la page 185 d’Antes del 900 :
« la abuela o bisabuela de mi padre _ J B Bioy Casamayou _ era una Lanusse »…
 
Du côté Domecq-Mirande
(les Domecq habitant Jasses (commune limitrophe de Navarrenx, au sud-est), et les Mirande, habitant Castetnau-Camblong (sur la rive opposée à Navarrenx sur le gave d’Oloron, au nord-ouest),
les bisaïeules sont 
Marie Capdevielle (née en 1769 – ?), mère de Pierre Domecq Capdevielle (Jasses, 31 juillet 1799 – Jasses, 10 juin 1869)
et Marie Lascaray (épouse de Pierre Mirande), mère de Marie Mirande Lascaray (de Castetnau-Camblong).
 
Antoine Bioy Croharé (Oloron, 1er décembre 1809 – Oloron, 5 décembre 1883) a épousé Marie Anne Casamayou (père : Poey, de Gurs ? voire un Lanusse ?) le 13 septembre 1834 à Préchacq-Navarrenx,
le village des Lanusse !!!
 
Ce qui justifierait peut-être la venue conjointe en 1854 en Argentine des deux Lanusse (dont Pierre) avec Jean Baptiste Bioy
Puis leur très grande proximité dans la durée ; et mariages de leurs descendants…
 
Et du côté Bioy,
les bisaïeules sont 
la mère d’Antoine Bioy Croharé et épouse de Jean-Baptiste Bioy Muchadaa : Jeanne Claire Croharé Pachabat ;
et la mère de Marie Anne Casamayou : Marie Casamayou… Un personnage-clé !
10) « Estacion Erize (suite) + nom du village d’origine des Erize en Navarre : Las- iur »
Voici quelques articles
concernant les frères Juan Erize (Oloron, 1857 – Pau ,1957)
et Francisco Erize (Oloron, 2 août 1862 – 16 jullet 1935)
et leur installation (en 1873, pour l’aîné, en 1883, pour le cadet) à Erize.
 
… 
 

Un article sur les frères Juan et Francisco Erize à la Estacion Erize :

 

6

Nuestra Familia / Puan, Octubre de 2013

Ecos de nuestro pasado

por Tito Jacquier

“Villa Castelar” – Estación Erize F.C.S. – Partido de Puan

Posiblemente todo comenzó aproximadamente en el año 1873, cuando Juan Erize se establece en el paraje, con una posta lindera a la Zanja de Alsina, en tierras que el Gobierno Nacional luego de finalizada la llamada campaña del Desierto comienza a vender en subasta pública, que dieron comienzo al nacimiento de grandes latifundios, entre ellos y que en el presente artículo nos ocupa, un importante lote de 10.000 hectáreas que fueron adquiridas por Alejandro y Antonio Leloir, que contaban como vecinas al Fortín Escudero.

El lugar, vaya a saber por qué circunstancias, es elegido por este inmigrante, y en el levantó un rancho donde se establece, naciendo así un punto de referencia: una posta que sin duda fue el inicio y concentración de un precario comercio al cual comenzaron a concurrir criollos, los primeros pobladores del paraje -la mayoría extranjeros- todos conviviendo en paz y tranquilidad con los aborígenes nativos del lugar.

La posta fue incrementando su actividad y Juan Erize, en 1883, incorpora a su hermano Francisco para trabajar en conjunto, quién más adelante compra algunos terrenos cercanos a la misma, seguramente antes de 1900. Este es el inicio y gestación, por parte de Leloir, de lotear a la vera de la huella e incipiente camino de Puan a Carhué varios terrenos con vistas a fundar un pueblo.

Para ello recurre a una firma agrimensora en Buenos Aires llamada “Villa Castelar”. Posiblemente de ahí proviene el nombre otorgado al lugar. Logrado y aprobado el loteo, Leloir comienza a vender, siendo los primeros compradores Teodoro Otazú, Miguel Marcos, José Zanarini, Francisco Castellanos, Marcelino Rodil, José Bentancour, Francisco Hasperen, Manuel López, Gaspar del Campo, José P. Robilotte y Jorge Abraham.

Esta edificación contaba con una importante comodidad : un hall, seis habitaciones, tres cocinas, dos baños, tres locales de negocio, una oficina o escritorio tres locales o depósitos.En este edificio Rodil tuvo una importante actividad comercial.

El lugar contó con un numeroso grupo de familias, entre las que se rescatan: Almada, Aldecoa, Bicartt, Ba- rragán, Bentancour, Briani, Bargas, Cas- tiñeiras, Candia, Di Bella, Días, Erman- traut, Eberarth, Finoia, Guevara, Ikes, Izzoli, Klein,Lik,Lucero, Otarola, Pilo, Rodil,Sandoval, Strack, Tizera, Wagner… Veintisiete hogares, el primer horno de ladrillos de Manuel Arias, el conventillo edificación en ladrillos con un aljibe en el centro del patio, varias piezas cielorraso de bolsas de alpillera y piso de tierra, la modista Amelia Bentancour, la carnicería de Sandoval, el almacén de Klein y la comadrona (partera) Doña María de Bicartt y, además en época de cosecha los peones golondrina fueron los que en esos lejanos años le dieron presencia y vida social a Castelar.

Toda una población comprendida en las tareas rurales trabajando en las chacras vecinas, mensuales, alam- bradores, reseros, las cuadreras también estaban presente periódicamente, las que se realizaban en el campo de Berardi.

El movimiento cooperativo también tuvo cabida y actividad. Un grupo de productores agropecuarios fundaron la Cooperativa Agrícola Ganadera Limitada de Erize, con sede en esta Villa, que con el tiempo se fusionó a la Cooperativa de Adolfo Alsina (Carhué).

Pero el transcurso del tiempo y el avance del progreso trajo aparejado una inevitable realidad. Comenzó la emigración de la juventud en busca de nuevos horizontes y el lugar fue notando paulatinamente el decaimiento de la población hasta que hoy, de ese conjunto de casas y familias, queda solamente el recuerdo para propios y eventuales allegados de, seguramente gratos momentos de sus vidas en “Villa Castelar”.

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Varias edificaciones surgieron a partir de esa fecha, entre ellas un importante edificio, que sin poder precisar con certeza su data, se estima que fue construido por Gaspar del Campo y Antonio C. Leloir, a su venta en 1910 y adquirido por Marcelino Rodil.

Nuestra Familia / Puan, Octubre de 20

Un autre extrait d’article :
 
Para entender mejor el panorama de Erize es necesario retroceder  en el tiempo y, en perspectiva, ver hoy la cruda realidad que atraviesa el poblado. Realidad común a cientos de parajes que hoy sobreviven a duras penas, víctimas finales del cierre de los ramales ferroviarios y del progreso. En 1873 Juan Erize llegó de Francia, escapando del hambre español. Como tantos inmigrantes, buscaron su camino y el de Juan resultó en Castelar, un poblado que se estaba gestando a pocos metros de lo que hoy es Erize. Allí levantó “La Posta de Erize”, un almacén de ramos generales que se convirtió pronto en el eje de la actividad comercial y social de toda la región, hizo fortuna porque se llevaba bien con los indios –que asolaban la región- y con la paisanada.  Pronto aquel lugar perdido en la pampa bonaerense, sobre la Zanja de Alsina, le resultó chico y se fue a Bahía Blanca, su hermano Francisco se hizo cargo del almacén, al tiempo que compró 300 hectáreas en el espacio donde el Ferrocarril del Sud planeaba hacer una estación del ramal que iba a unir 25 de Mayo con Saavedra. El 17 de abril de 1899 –día que se toma como nacimiento de Erize- se inaugura la estación al tiempo que Francisco traslada su Posta en donde hoy se halla emplazado el pueblo que lleva su apellido y que llegó a tener mil habitantes y un movimiento comercial sin igual. Llegamos entonces a nuestros días, los restos de aquel Erize hoy se pueden ver en construcciones señoriales que permanecen en pie, sin techo, en ruinas pero de pie, como si fueran mudas y orgullosas wwwigos de aquellos años. El paraje hoy está aislado, llegar hasta él implica transitar un camino por lo menos peligroso, sin señalización, sólo apto para baqueanos.

Des photos de Erize aujourd’hui :
 
Un article sur les Fortins de la Zanja de Alsina (dont le Fortin Ayudante Escudero, sur le rivage ouest de la Laguna Erize) :

FORTINES

Un total de 26 fortines correspondía a la División Costa Sur, cuyo frente se extendía: desde 2 leguas al norte del actual pueblo de Erize hasta una legua al sur de las lagunas Las Encadenadas en el actual límite entre los partidos de Saavedra y Tornquist.
Para su construcción se usaban los elementos que la naturaleza ponía a disposición del hombre. El mismo soldado era el artífice fundador de estos ranchos, humildes que servían para cobijarse de las inclemencias del tiempo. Foso externo, zanja y parapeto conformaban su diseño.
El soldado estuvo aquí en la plenitud de la soledad y con el deber de patria por cumplir….
-FORTIN MORALES: a tres leguas al norte de Erize sobre la margen izquierda del camino a Carhué
-FORTIN MAYOR BALDOMERO DIAZ: a 1 legua al norte de Erize sobre el mismo camino a Carhué. Lleva el nombre del oficial muerto en el Campamento Puan.
-FORTIN AYUDANTE ESCUDERO: sobre la costa oeste de la laguna de Erize. Lleva el nombre del oficial muerto por los indios en 1875.
-FORTIN MATEO MARTINEZ: en el campo del señor Jorge Vázquez sobre el alambrado de la calle, señalado con un monolito.
-FORTIN SARGENTO SEGOVIA: en el campo de Brizzola
-FORTIN LEGION MILITAR: a la vera de la laguna de Brizzola. Lleva su nombre por la Legión Agrícola Militar.
-FORTIN CATALAN: en el campo de Félix Villasuso. Lleva el nombre del oficial Amaro Catalán, fallecido en combate en Santa Rosa ( Mendoza) en 1874
-FORTIN JUSTO REYES: señalado con un monolito en el campo que perteneciera a Néstor Castaño. Fue construido por orden directa de Alsina. Se presupone que su forma era de una estrella.
-FORTIN REGIMIENTO PRIMERO: En el campo “ La Grampa chica” sobre el alambrado de la calle.
-FORTIN RIO BAMBA: en la cúspide del cerro de Puan, donde actualmente se erige el Millennium.
-FORTIN CORONEL RUIZ: en el campo que fuera de don Pedro Alazard ( próximo a la Colonia Santa Rosa).
-FORTIN GENERAL VEDIA.

A suivre…
 
Pour se repérer sur la carte :
 
Villa Castelar et Estacion Erize se trouvent au nord de Puan
et de Bahia Blanca.
Et au sud de Carhue.
Et Espartillar se trouve à l’est d’Estacion Erize.
 
Pardo se trouve loin au nord-est d’Estacion Erize…
 
Francis
 
P. s. : sur le document indiquant le village d’origine des Erize en Navarre, au nord de Pamplona et non loin d’Irurzun,
manquent une ou deux lettres Las- ? -iur.
 
J’ai cherché sur une carte de la région,
je n’ai rien trouvé qui s’en approche.
 
Existent plusieurs villages nommés Erice dans le coin : un sur la route nationale Pamplona-Irurzun, un autre au nord de Pamplona, en une zone plus montagneuse…
 
 
 
 
 
Bien sûr, je viens de relire tout cela,
mais il faudrait réaliser une synthèse claire…
 
Francis Lippa
68 rue Jules Ferry 33200 Bordeaux
Tél. : 06 70 63 43 93
 
Voici aussi, sur mon blog Mollat En cherchant bien,
un listing de podcasts et vidéos d’entretiens que j’ai eu chez Mollat avec divers auteurs :
 
Le jeudi 20 septembre prochain,
je m’entretiendrai chez Mollat, au Studio Ausone, à 18 heures
avec le philosophe belge Pascal Chabot 
à propos de sa pièce L’Homme qui voulait acheter le langage (qui paraît aux Presses Universitaires de France, PUF).
 
Notre objectif est d’aider à faire connaîtrait apprécier l’œuvre de notre cousin Adolfo Bioy Casares,
en Béarn et Aquitaine…

Ce mardi 10 août 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

et révisé le samedi 18 novembre 2023…

Nouvel aperçu récapitulatif sur la poursuite de mes recherches sur les cousinages cibouro-luziens de Maurice Ravel (avec l’ajout du 6 septembre 2020 au 11 octobre 2020)

14oct

En prolongement de mon déjà exhaustif  du 2 septembre dernier,

voici, ce jour, mercredi 14 octobre 2020,

un bref nouvel ajout récapitulatif de mes recherches ravéliennes cibouro-luziennes,

comportant 5 nouveaux articles,

à partir du 6 septembre, et jusqu’au 11 octobre compris :

_ le 6 septembre :  ;

 _ le 4 octobre :  ;

_ le 5 octobre :  ;

_ le 6 octobre :  ;

_ le 11 octobre :  .

Rechercher des faits à découvrir, établir et valider,

implique

en plus d’une certaine culture, déjà _ mais cela se forge peu à peu, avec la constance d’un peu de patience _, du domaine à investiguer,

et d’une relativement solide mémoire _ potentiellement infinie en ses capacités de se repérer à (voire retrouver) des éléments faisant maintenant fonction d’indices… _ grâce à laquelle se trouver en mesure de puiser et se connecter avec efficacité et si possible justesse

une capacité, fondamentale _ très au-delà de la paresse des simples compilations de travaux antérieurs ! _, de forger _ par audace (voire génie : en toute humilité !) d’imageance (cf ici les travaux de mon amie Marie-José Mondzain)… _ des hypothèses _ si peu que ce soit vraisemblables en leur très essentielle visée de justesse… _ de recherche

accompagnées, bien sûr, aussi, de processus pragmatiques afin de, le plus (et le mieux) possible, valider-confirmer ces hypothèses _ Montaigne, lui, parlait d’« essais«  ; un mot que lui a repris, avec la fortune que l’on sait, Francis Bacon, en son Novum organum, en 1620… _,

c’est-à-dire prouver _ avec rigueur _ leur validité de vérité !

_ cf ici le Popper bien connu de La Logique de la découverte scientifique ;

et aussi les si fins travaux, pour ce qui concerne plus spécifiquement les démarches des historiens, de Carlo Ginzburg :

Le Fil et les traces, Mythes, emblèmes, traces, Rapports de force : histoire, rhétorique, preuve, A distance, Le juge et l’historien, etc.

Un minimum de culture épistémologique ne fait jamais de mal en pareilles entreprises

pour mieux asseoir qualitativement l’effort de découvrir de l’insu (ou même du caché)…

Ce mercredi 14 octobre 2020, Titus Curiosus – Francis Lippa

Face à l’énigme du devenir (poïétiquement) soi, l’intensément troublant « Dialogue avec les morts » (et la beauté !) de Jean Clair : comprendre son parcours d’amoureux d’oeuvres vraies

27mar

Dialogue avec les morts, de Jean Clair,

qui paraît ce mois de mars aux Éditions Gallimard,

est un livre (de vérité ! _ par sa profonde probité ! _) rare à ce degré d’intensité (!!!)

de trouble… :

tant de son auteur l’écrivant,

que des lecteurs qui le découvrent _ et partagent !

et s’en enchantent !!! _,

au fil de ses chapitres,

dont voici les titres successifs :

l’âge de lait (pages 13 à 50),

l’âge de craie (pages 51 à 91),

les mots (pages 93 à 116),

la ville morte _ c’est Venise ! splendidement analysée : un labyrinthe (sans perspectives…) pour métamorphoses (carnavalesquement et très discrètement, à la fois…) secrètes !.. _ (pages 117 à 135),

Hypnos (pages 137 à 153),

l’âge de fer (pages 155 à 178),

la débâcle (pages  179 à 205),

l’âge de chair (pages 207 à 234),

Eros (pages 235 à 254) ;

et, enfin (pages 255 à 280) _ c’est le chapitre ultime du livre : le cinquième et dernier volume de l’autobiographie de Thomas Bernhard, porte (après L’Origine, La Cave, Le Souffle, Le Froid…) presque le même titre : Un Enfant, lui… _,

une enfance

Il s’agit,

en l’aventure intensément troublante de cette écriture (de rare probité : celle à laquelle nous a accoutumés Jean Clair ! de livre en livre, comme de commissariat d’exposition en commissariat d’exposition…) en dialogue avec des voix désormais tues

_ mais lumineusement audibles à qui ose se rendre (et se tendre…) vers elles, et les recevoir (accueillir, écouter) : humblement « dialoguer«  _ oui, voilà… _, enfin… ; si loin, mais en même temps si près, ces « voix«  ombreuses-là, pour peu que l’on ait appris (et consenti) à devenir, silence fait autour (et muri…), enfin « véritablement«  attentif à leur ténue et essentielle musique

qui, encore, s’adressant à nous, toujours, persiste… _

il s’agit, donc,

d’un face à face rétrospectif,

l’âge venu _ celui des rétrospections : « Je suis né le 20 octobre 1940. Ce jour-là, à Paris, pouvait-on lire dans les journaux, il n’y avait plus une seule patate à vendre _ ni, surtout, à pouvoir acheter et se mettre sous la dent… _ sur les marchés. C’était la débâcle. On m’envoya à la campagne«  : en Mayenne, le pays d’origine de sa mère ; ainsi débute le livre, page 15… _,

avec _ ce face à face, donc, rétrospectif… _

avec la formation de lui-même _ de Jean Clair _,

en ses enfance, adolescence et jeunesse

_ du temps que son prénom n’était pas Jean, et que son nom, reçu de son père, morvandiau, était Régnier : mais on trouve aussi des Régnier, et en Flandres, et à Venise (Ranier, ou Ranieri…) ; cf à la page 264 : « Quel étrange détour par l’écriture me faisait réexhumer des passages et réinscrire des palimpsestes que des arrière-parents, dont je ne savais rien, avaient autrefois tracés, quelque part entre Bruges et la Sérénissime ?«  ; avec ce résultat, majeur !, page 265 : « L’écriture est un refuge et un foyer : ce qu’elle désigne, c’est précisément l’impossibilité d’en appeler au Père. Elle trace les repères d’une topographie imaginaire _ où Venise est alors, dans le cas de Jean Clair, à la façon de New-York pour d’autres transhumants encore, un passage (de ressourcement créatif !) crucial ; et pour toujours ! _, dans l’espoir insensé _ malgré tout ! _ d’y découvrir une toponymie familiale« … : j’y reviendrai ! ce point est capital ! _ :

rétrospection

de la naissance (le 20 octobre 1940) jusqu’à la mort de son père (en 1966 ou 1967),

quand le jeune homme passablement turbulent et « en colère » qu’il avait été (en cette jeunesse

_ « quelque temps même ce purgatoire _ celui de son enfance mayennaise, à la Pagerie : cf les premiers chapitres : « l’âge de lait« , « l’âge de craie«  _ devint un enfer« , page 237 : « je devenais la proie de colères violentes » ;

au point qu’« on m’envoya consulter dans ce qu’on appelait alors un dispensaire public d’Hygiène sociale. J’y fus accueilli par une jeune psychologue qui, un peu désemparée, m’adressa à un « psychanalyste », mot nouveau, étrange, inconnu, qui cachait sans aucun doute des savoirs étonnants« , page 237 toujours. « C’était une femme d’une cinquantaine d’années, l’une des premières en France à avoir imposé en hôpital public cette spécialité et à pouvoir l’exercer » : une rencontre déterminante ! « Elle avait été comme ma seconde mère » (celle qui « avait appris la parole » (page 240), même si « les mots ne me viendraient jamais comme il faut _ « faute d’une aisance de naissance que je ne posséderais jamais«   _, comme si je n’avais _ jamais _ pu _ in fine… _ tout à fait _ voilà ! _ me réconcilier« … : j’y reviendrai aussi : c’est l’épisode-seuil sur le chemin de soi, en critique d’art exigeant !, de Jean Clair !.. _),

quand le jeune homme passablement turbulent et en colère, donc, qu’il avait été

_ et demeure, d’une certaine façon (mais contenue et polissée…) encore ! : « la seule rage qui m’habite encore, c’est celle du malappris que je suis resté, et qui parfois explose en mots orduriers. Comme un réflexe primitif, l’enfance remonte en moi. La colère, je crois, ne me quittera jamais« .., voilà !, page 240 _

perdit

_ lui-même était alors en sa vingt-septième année : « à vingt-six ans, quand il _ le père, donc _ avait disparu _ soit en 1966, ou 67 _, j’avais quitté mes études, et, mal à l’aise, n’avais rien décidé de mon avenir, perdais mon temps et multipliais les échecs.

Beaucoup de mon comportement et de mes décisions ultérieurs serait dicté par l’angoisse de réparer _ voilà ! _ cette impression _ laissée au père _, alors qu’il avait dû, en vérité _ tous les mots comptent ! _ emporter sa tristesse et ses craintes dans sa tombe, irrémédiablement », page 254 : voilà ce à quoi il faut donc impérativement et  comme cela se pourra, « remédier«  ! et ce qu’accomplit, probablement, ce livre !!!

même si on lit, page 279, soit à peine vingt-cinq lignes avant le mot final (« les armoires fermées à clef de son enfance« , page 280..), ceci : « J’imagine en ce moment que mon père frappe à la porte, que je lui ouvre et qu’il me dit : « Pardonne-moi, je suis en retard »… Sans prendre le temps d’être saisi, je me précipiterais vers lui et je l’enlacerais, et ce baiser serait si long, pour dissiper le silence et l’absence de toutes ces années d’enfance où il était là et où je ne lui parlais pas, qu’il y faudra tout le temps _ voilà ! _ qui me sépare de ma propre mort« _

quand le jeune homme

turbulent et en colère

perdit, donc,

son père…

Jean Clair entre maintenant _ le 20 octobre 2010 _ en sa septième décennie de vie :

quel nom donne-t-il à ce nouvel « âge » sien-ci de vie ?..

Peut-être celui _ tant qu’il est encore temps : de l’écrire ! Jean Clair est (toujours, encore…) un homme davantage de l’écrire que du parler… : « parler, c’est toujours un peu commander, au moins imposer le silence autour de soi. C’est un travers. Pourquoi parler en tout cas, quand ce n’est pas pour demander ou pour commander ?« , lit-on page 96… _

du « règlement de la dette« 

envers ceux auxquels

l’homme accompli qu’est devenu Jean Clair

doit le plus…

_ cf le commentaire au cadeau paternel de « la tourterelle grise et rose, attrapée dans les champs de son pays« , le Morvan (ce récit, avec cette expression, se trouve page 252 ; cf aussi La Tourterelle et le chat-huant ; ainsi que mon article du 27 mars 2009 : Rebander les ressorts de l’esprit (= ressourcer l’@-tention) à l’heure d’une avancée de la mélancolie : Jean Clair…) : « C’est la colombe qui, succédant au corbeau, vient annoncer aux passagers de l’Arche que la terre approche, et avec elle le salut. Symbolisant le vol de l’âme, serrée dans la main tendue par-dessus le vide, l’oiseau blanc assure la transmission des générations _ voilà ! _, le geste d’amour qui permettra aux enfants de reconnaître la dette et de la diminuer peut-être« , aux pages 252-253 : des éléments cruciaux, comme on voit…

Car « retrouver l’écho _ voilà ! persistant ! et non repoussé… _ des voix de ceux qui ont disparu

me retient désormais _ voilà ! _ avec une force que j’ignorais autrefois _ tant inconsciemment que consciemment : les deux !

C’est sans doute que,

le temps aidant _ il faut le prendre à la lettre : le temps peut, et très effectivement !, « aider » ! si on y met aussi un peu du sien : à travailler avec lui, en ses forces… _,

le fait de me rapprocher d’eux

et de m’éloigner des vivants

_ en proie à bien des « débâcles« , tant et tant (même si pas tous : beaucoup trop !..) ; cf la terrible vérité des croquis de personnes dans le très beau chapitre « La Débâcle«  ; par exemple, à côté de ceux des S.D.F., celui, pages 195-196, du « monomaniaque du mobile« , avec cette conclusion-ci : « ce dialogue avec les spectres, où un individu dans le désert des hommes ne connait que lui-même, me paraît plus inquiétant que celui du bigot ou du fou quêtant son salut ou apprenant sa damnation d’une voix qui sort de bien plus loin que du petit cercle de ses semblables. Cette clôture _ étroitissime ! _ de l’homme sur l’homme seul et parmi les hommes, c’est ce qu’on appelait jadis, probablement, l’Enfer«  _

me les fait entendre plus distinctement _ oui _, et sur un ton plus grave _ et comme profond : d’« élévation« , en fait et plutôt : « monter, accéder à la lumière, élucider, maîtriser les apparences, ce sont des images qui me paraissent préférables à celles qui supposent de se laisser couler vers on ne sait quel abîme _ profond ! et sans fond… _ de l’être, qui n’est que ténèbres, étouffement et solitude« , précise Jean Clair, page 100… _,

par un phénomène spirituel _ voilà _ guère différent de l’effet Doppler en physique« ,

peut-on lire page 97…

Et Jean Clair de préciser, un peu plus bas, pages 97-98 :

« Ce dialogue _ avec réciprocité : davantage qu’autrefois, moins timide… _ avec les morts,

une fois qu’on ne peut plus les entendre _ in vivo _,

prend une forme singulière quand il devient un dialogue avec ses parents ou ses proches

_ Jean Clair évoquera aussi, même si ce sera fort discrètement et très, très rapidement, et à l’occasion du goût

(voire de la cuisine _ cf page 247, en un passage, du chapitre « Eros« , intitulé « L’Apprentissage du goût«  : « Les femmes que l’on a aimées vous ont ouvert avec douceur le royaume des sensations nouvelles jusqu’à pousser la porte de la cuisine. La mère nourricière se confond avec l’amante attentive, dans l’apprentissage _ voilà ! être homme, c’est apprendre ! _ qu’elles offrent l’une et l’autre, au palais du jeune homme que l’on fut, des saveurs, des douceurs et des amertumes d’un genre plus domestique que celles de l’amour des corps, et néanmoins aussi précieux. « Ici aussi les dieux sont présents », avait dit Héraclite près de son four _ une citation qui m’est aussi très précieuse ! C’est une autre version de la Madone au bol de lait, ou à l’auréole d’osier, avec l’ange qui vient familièrement s’inviter à la table« , page 247, donc… _ ),

en de furtifs superbes portraits à peine crayonnés _ à la Fragonard… _,

Jean Clair évoquera aussi, donc,

les femmes qu’il a aimées,

et ce qu’elles lui _ ainsi « conduit par de jeunes fées« , dit-il, page 246 _ ont

merveilleusement généreusement donné

_ le livre lui-même est dédié, page 9, « A la jeune fille«  ;

de même, qu’a pour titre « La Jeune fille«  une partie (très courte) du chapitre « Eros«  ;

que voici, même, in extenso :

« Plus elle avance dans la vie _ voilà ! _

et plus,

sur le cliché qu’on a pris d’elle un jour, bien avant que je la rencontre,

et où elle apparaît radieuse, les mains tendues vers un inconnu demeuré hors champ,

je la vois rajeunir,

me semble-t-il,

comme si les années qu’elle additionne de ce côté-ci du temps

lui étaient à mesure retirées de la photo ancienne,

au point qu’elle finira par m’apparaître sans doute comme cette adolescente

que je regretterai toujours de n’avoir pas connue« 

On échange _ enfin ! _ avec eux

_ « ses parents ou ses proches« , donc,

je reprends le fil de la citation, après l’incise de « La Jeune fille«  _

on échange avec eux

les mots qu’on aurait aimé leur adresser quand ils étaient vivants

et qu’il n’était pas possible _ = trop difficile, alors ! On n’en avait encore acquis la force d’y parvenir ! _ de leur dire.

Ces mots, on les imagine _ maintenant ; et désormais.

Et comme ils ne provoquent pas de réponse _ nette _,

ils se fondent dans un silence embarrassé« …

_ voilà qui m’évoque le dialogue (bouleversant de probité, lui aussi !) avec son épouse disparue, Marisa Madieri,

de l’immense (triestin

_ et Trieste, sinon Magris lui-même, est présente dans ce livre-ci de Jean Clair : aux pages 257 à 266… ;

ces pages, intitulées « Les Miroirs de Trieste« , ouvrent même l’ultime chapitre du Dialogue avec les morts de Jean Clair , « Une enfance« )

voilà qui m’évoque, donc,

le dialogue (bouleversant de probité, lui aussi !) avec son épouse disparue (en 1997), Marisa Madieri,

de l’immense (triestin) Claudio Magris,

en son si intensément troublant (et étrange, et profondément grave), lui aussi,

et sublime,

Vous comprendrez donc :

...

Dialogue avec les morts et Vous comprendrez donc : deux immenses livres

intensément troublants

qui s’adressent à la plus noble (et formatrice : civilisatrice !) part d’humanité des lecteurs que nous en devenons…

De Marisa Madieri,

séjournant de l’autre côté de l’Achéron depuis 1997,

lire le lumineux Vert d’eau, édité en traduction française à L’Esprit des Péninsules…

Et sur la Trieste de Claudio Magris,

courir au merveilleux Microcosmes !!

Et, un peu plus bas encore, page 98,

face à la difficulté de,

en ce quasi impossible dialogue à rebrousse-temps (irrémédiablement passé !), avec les disparus,

face à la difficulté, donc,

de partager (avec eux, les années ayant passé…) la pratique d’une même langue :

« Mais la plupart du temps, comme dans les rêves,

il n’est pas besoin de parler,

la présence suffit

_ voilà !

précise Jean Clair ; parmi un monde de fuyards s’absentant (frénétiquement ou pas) de tout, à commencer d’eux-mêmes et de l’intimité (charnelle) aux autres ; cf ici le beau livre (important !) de Michaël Foessel, La Privation de l’intime ; et mon article du 11 novembre 2008 : la pulvérisation maintenant de l’intime : une menace envers la réalité de la démocratie

On parle le langage des sourds-muets.

On ne signifie rien,

on ne signale pas,

on signe, simplement« …

_ on fait (enfin ; et pleinement !) simplement acte (plénier)

de reconnaissance : de sujet humain à sujet humain ;

de visage à visage

_ sur la « visée du visage« ,

à partir de l’exemple de la peinture d’Avigdor Arikha (« une peinture qui dit tout, rien que tout, mais tout du tout qui se présente aux yeux« , page 59…),

et débouchant sur une « histoire (…) qu’il faudrait enseigner dans les écoles« , celle qui lie et relie Monet, Bonnard, Balthus et Lucian Freud : « de Monet à Freud, une chaîne s’est formée d’individus qui se reconnaissaient _ voilà _ et qui cherchaient à se parler _ oui ! _ et à transmettre un métier« … : c’est tellement précieux !

Et « de Balthus à Lucian Freud : toute une famille de peintres a rappelé, après la guerre comme avant, qu’un visage était sans prix _ voilà !

Les trois derniers _ soient Bonnard (1867-1947), Balthus (1908-2001) et Lucian Freud (né en 1922) _ ont été les témoins d’une époque où, mû par une idéologie démente, on s’était mis à immatriculer les gens. Ces gens qu’on dénombrait, après les avoir dévisagés, et dont on inscrivait le chiffre sur la peau à l’encre indélébile, craignait-on qu’on n’arrive plus, au Jugement dernier, à les reconnaître et à les distinguer ?

Ce fut l’entreprise la plus meurtrière que l’homme _ individus, un par un, comme l’espèce entière ! _ ait affrontée.

Les vivants ont le nez droit ou recourbé, court ou allongé, mais la mort a le nez camus ; tous les morts ont le nez camus. Pour les distinguer à nouveau, il faut leur refaire un visage. Le peintre y répond _ en peintre ! _ comme il peut : les gens se reconnaissent, non pas à leur numéro d’abattage comme les brebis, mais à leur visage, à leurs traits. Et les nommer, les peindre un par un, les transformer en personne, c’est les tirer _ en leur irréductible singularité ! de sujet ! et pour jamais !!! cf, déjà, les (sublimes) visages du Fayoum… ; là-dessus, lire, de l’excellent Jean Christophe Bailly, le très fin et très puissant L’Apostrophe muette _ de la mort« , page 63 ;

sur la « visée du visage« , donc,

lire (et méditer : longtemps !) l’admirable passage qui court de la page 60 à la page 63 :

par exemple,

« L’homme, en tant que personne, ne se remplace pas. Il n’est pas interchangeable, ni renouvelable, il est unique à chaque fois ; et c’est bien là le mystère auquel le peintre doive s’affronter, et qui suffit à occuper _ certes ! _ toutes ses forces«  ;

et « Dénommer, appeler, rappeler les apparences, c’est sauver l’homme de la mort. Dénommer et non pas dénombrer, désigner et non pas mesurer ou quantifier. Dire et peindre, c’est rappeler les êtres à la vie, c’est le contraire de les précipiter dans le nombre » _ soit le contraire du (stalinien) « à la fin, c’est la mort qui gagne !« 

« Représenter un visage humain et lui donner sa valeur unique, est (…) rare et compliqué puisqu’il est là, devant soi, embarrassant, et qu’on ne peut pas ruser _ voilà ! _ avec sa présence » : c’est elle qu’il faut ainsi, et pour jamais, ressentir et donner…

Et lire aussi l’admirable passage intitulé « Les Guichets« , aux pages 198 à 201 du chapitre « La Débâcle«  :

« On ferme l’un après l’autre les guichets qui étaient à l’homme laïque des temps républicains ce qu’étaient les confessionnaux à l’homme pieux des temps religieux. (…) J’imagine l’homme solitaire, la veuve, la petite vieille, l’étudiant célibataire ; ils vont rester des jours sans pouvoir _ de fait, simplement _ adresser la parole à quiconque.

La disparition lente et sournoise des bistrots où l’on allait prendre un petit blanc au zinc, moins pour se désaltérer que pour acheter le droit, moyennant trois sous, d’échanger quelques propos avec des inconnus, semble le point final de cette métamorphose _ régressive : barbare ! _ urbaine.

(…) Nous nous apprêtons à vivre dans un monde _ psychotique _ de solitaires contraints au silence,

qui, n’auront pas, contrairement aux ordres contemplatifs, le consolant espoir d’une vie dans l’autre monde.

Parallèlement à ce retrait de l’art _ mais oui ! _ de la conversation _ ce fut un art français… _ ,

la multiplication du « self-service »

_ , qu’il s’agisse de se restaurer, de faire un plein d’essence, de réserver un billet de train ou de poster un paquet, il n’est plus possible de s’adresser _ si peu que ce soit _ à quelqu’un ayant face humaine… _

est assurément la trouvaille la plus cynique de l’esprit _ dit : auto-proclamé ! _ moderne,

qui réussit à faire passer _ et le tour est joué ! _ pour une libération

ce qui n’est qu’une servitude _ et comment ! _ supplémentaire.

Plus éprouvante encore que cet effacement _ avec la dé-subjectivation qui l’accompagne ; cf Michel Foucault… _ de la personne,

est l’imposition d’une voix sans visage.

Dois-je me faire livrer un bien, louer une voiture, requérir un service,

je serai « mis en relation » avec un inconnu dont je n’ai jamais vu et dont je ne verrai jamais le visage, et qui, à distance, m’adressera les règles nécessaires et m’adjoindra _ et quasi m’enjoindra : on est au bord de l’injonction !.. _, sans trop de politesse, d’y satisfaire sans trop tarder _ sinon, tant pis pour moi !..

Aucun recours bien sûr _ la marge du recours est un critère déterminant du degré de civilisation… _ s’il se produit, par accident, une confusion ou une erreur.

Si nul ne vous voit,

nul non plus n’est jamais vu

et nul par conséquent _ pas vu, pas pris _

n’est jamais responsable _ ne répond jamais,

en effet.

La relation est devenue immatérielle.

Le visage a disparu.

Vous êtes décidément seul et sans secours.

Maladie mortelle de la société,

la prosopagnosie généralisée _ voilà ! _

d’un monde où les visages pullulent,

mais où nul n’est plus jamais connu, ni reconnu.

(…)

Dans le même temps pourtant,

comme il semble que nous sommes passés insensiblement du visuel à l’abstrait,

pour satisfaire au besoin de la mise en chiffres,

jamais les visages n’auront été aussi continûment photographiés, identifiés, enregistrés et mis en fiche,

de l’aéroport au magasin de mode.

(…)

A peine aurai-je acheté quelques brimborions dans une entreprise de ci ou de ça

que je me verrai envahi d’un courrier promotionnel à mon nom commençant par « Cher client » ou pourquoi pas « Cher ami »,

et que ma boîte électronique débordera de « spams » à mon intention toute « personnelle ».

Anonyme, invisible, inexistant là où je réclame une parole, une aide, un mot,

 je suis enregistré, diffusé, sollicité, sommé et menacé partout où je ne demande rien« ,

lit-on en ces magnifiques lucidissimes « Guichets« , aux pages 198 à 201…

Et voici _ pages 100-101 _

ce qu’apporte

(ou pourrait apporter : à l’écrivant Jean Clair, ici),

et tant bien que mal _ infiniment modestement, en effet ! _,

l’écriture

(en l’occurrence de ce qui peut-être deviendra le livre, soit ce Dialogue avec les morts-ci…) :

« J’écris pour (…) me prouver que j’existe.

Écrire me rassure,

plus qu’une parole ou une rencontre, toujours trop incertaines.

Quand je doute,

de moi, des autres, de la réalité des choses,

je me mets à écrire,

et le maléfice se défait,

le lien _ qui nouait et entravait (tout)… _ se dénoue : je peux vivre à nouveau.

Dans le désarroi du matin,

la langue apporte sa certitude«  _ elle tient !

(…)

Écrire « est le dernier artifice avec lequel se protéger de la tyrannie de la durée que la mécanique puis l’électronique ont numérisée _ à entier rebours de la durée (qualitative !) vivante qu’analysait Bergson _,

dénombrée


_ cf aussi, page 111 : « la dénumération détruit à mesure la réalité sensible que la dénomination avait si patiemment créée. Les nombres détruisent les images _ mentales et spiritualisées , quand les images sont des œuvres !

On croit, par la mesure, comprendre le monde. Vanité des sociologues, de leurs chiffres, de leurs courbes et de leurs statistiques.

Vanité pire encore des psychologues, de leurs graphiques, de leurs pourcentages.

Les chiffres livrent peu _ et c’est un euphémisme ! _ de la réalité singulière des choses _ elles la nient !..

L’étape ultime est la digitalisation,

qui vide peu à peu les rayons des magasins de leurs disques, et les rayons des bibliothèques de leurs livres.

Triomphe d’un monde virtuel où nous appelons des spectres au secours de notre mémoire défaillante.

La philosophie du rationalisme _ en son appendice du pragmatisme utilitariste _ a pour fin, ici comme dans le domaine de l’art et de son marché, d’éliminer le problème des valeurs _ par un coup de baguette magique ! mais ultra-efficace !!! par ses effets dé-civilisationnels sur la foule de plus en plus majoritaire d’esprits bel et bien dé-subjectivisés : l’ignorance et la désinformation coûtent tellement moins cher que l’instruction et le travail de culture… _ pour se limiter au domaine du quantifiable et du mesurable » _ et monnayable… _,

jusqu’à la rendre _ cette « tyrannie de la durée numérisée«  _ insupportable _ et vainement fuie dans la vanité (symétrique !) du vide de l’entertainment aujourd’hui mondialisé : ah les profits expansifs de l’industrie du divertissement (efficacité de l’amplitude de la crétinisation aidant !)… _ comme la goutte d’eau du supplice chinois« …

(…)

« Au contraire de la langue de bois, si bien nommée,

qui flotte à la surface des eaux, qui monte et qui descend mais qui n’avance pas,

les mots que l’on ose et que l’on dépose _ dans le silence pacifié du recueillement _ sur la page

sont des mots singuliers _ voilà ! on y arrive peu à peu… _,

jetés par milliers

_ un trésor infini (« trésor des mots« , dit à plusieurs reprises Jean Clair, par exemple page 112) que celui de la générativité de la parole en le discours qu’offre au parlant la langue reçue, partagée et ré-utilisée, avec du jeu… cf Chomsky… ;

quand il ne s’agit pas de la misérable « langue de bois«  de la plupart des médias (tant la plupart y sont tellement complaisants !), en effet… ; et des « clichés«  que celle-ci répand et multiplie de par le monde… _

comme les laisses du langage sur l’estran du temps,

qui vous pousse et qui vous soutient » _ les deux : à la fois…

« Quand tout a disparu, quand tout est menacé,

il n’y a que les mots que l’on voudrait sauver encore,

l’un après l’autre _ et en leur singularité, en effet ! _,

mesurant _ certes ! _ le dérisoire aspect de l’entreprise,

et cependant convaincu _ qu’on est : aussi ! et plus encore ! _ que

le fil des mots _ voilà : en sa dynamique et son ordre… ; et à rebours des clichés ! _,

si on réussit à le conserver _ il y faut du souffle, et un peu de constance : cela s’apprend, avec le temps, et un peu de vaillance et de courage ! en le travail de subjectivation de soi (et du soi)… _,

suffirait _ et, de fait, il suffit ! _ à tirer du néant _ = ramener et retrouver _

tout ce qui s’y est englouti

_ et en sauver ainsi peut-être, si peu que ce soit, quelque chose,

même si c’est (passablement) encore ridiculement :

en osant espérer que cela ne soit, tout de même, pas trop

ridicule :

« Honneur des hommes, saint langage !« , a proposé le cher Paul Valéry…

J’en viens alors à l’apport plénier, à mes yeux, tout au moins, de ce très grand livre :

comment on apprend _ tel Jean Clair ; ainsi qu’un nouveau Montaigne en ses propres « essais« _ à se former

_ ce que Michel Foucault appelle le processus de subjectivation _,

se donner un peu plus de consistance,

selon une exigence de « forme« , en effet,

de vérité et beauté,

tournant, in fine, plus ou moins à un style un peu singulier,

mais « vraiment« ,

sans pose, posture,

ni, a fortiori, imposture…

En toute vraie modestie…

Déjà, dans la Mayenne de l’enfance de Jean Clair, dans la décennie des années quarante,

« il n’était pas rare, dans cette campagne, qu’on gardât dans la maison une pièce plus belle, plus claire, plus apprêtée que les autres, fournie de quelques meubles et de bibelots gagnés dans les foires et que l’on croyait précieux. Elle était aussi balayée, dépoussiérée, cirée, mais elle demeurait fermée à clef et les rideaux tirés. (…) C’était plutôt une chambre idéale _ voilà ! _, la projection imaginaire, « comme à la ville », d’un lieu où l’on remisait ce qui était jugé « beau » _ voici une première approche de l’« idée«  _, et d’une beauté qui interdisait donc qu’on en fît usage _ ni encore moins commerce, échange.

Même ici, je le découvrais, la vie se déroulait selon deux plans bien distincts : le temps long et éreintant des journées ; et puis un autre temps, à la fin du jour, où l’on imaginait ce que pouvait être une existence autre _ et supérieure _, à laquelle on avait sacrifié _ noblement _ un espace et laissé quelques gages matériels, comme des offrandes à un dieu lare« , page 27…

« Cette permanence d’un monde invisible qui doublait le monde réel était sans doute nécessaire pour supporter la dureté du quotidien. Elle offrait l’attrait d’un au-delà plus sensible et plus simple à imaginer que celui dont parlaient les mystères de la messe dominicale.

Cette chambre vide était en fait un tombeau (…) qui permettait de rêver _ déjà _ à une vie supérieure«  _ voilà ! une vie plus et mieux accomplie ! _, page 28…

En venant de ce monde de « taciturnes » (page 240) « taiseux« , sinon de « rustres » (page 252),

« un doute m’en est resté pourtant.

A l’Université, on me demanda un jour comment quelqu’un comme moi, à peine sorti des champs, avait eu l’envie de consacrer sa vie à un domaine aussi futile et féminin que le goût de la beauté et l’inclination pour les arts.

(…) Il m’en est resté un malaise. Le sentiment ne m’a jamais tout à fait quitté d’avoir _ étant à jamais, en quelque sorte, un « déplacé«  _ trahi, abandonné un front _ celui du plus dur labeur _, gagné _ lâchement _ le confort _ paresseux _ des arrières.

Plus encore quand le soupçon m’a pris, confronté à des œuvres en effet trop souvent inutiles et fort laides, que j’avais lâché la clarté d’un Désert habité par des sages pour gagner paresseusement l’ombre des musées peuplés de gens frivoles et de dandys.

J’ai toujours eu une double identité.

Je demeure un assimilé _ voilà : imparfaitement… _,

parlant un langage emprunté _ voire chapardé _,

traître à ma foi _ avec quelque culpabilité… _

comme un marrane au judaïsme« , pages 45-46 :

à relier à la remarque des pages 242-243 à propos de la psychanalyste qui fut à Jean Clair comme « ma seconde mère » (page 240),

en lui ouvrant le « trésor des mots _ voilà ! _,

un coffre des Mille et Une Nuits,

un Wortschatz possédant la magique propriété de s’agrandir _ oui ! _ à mesure qu’on puisait en lui, et de rendre au centuple _ voilà ! _ l’emprunt qu’on lui faisait » (page 241)

_ « Finalement je me retrouvais _ en cette psychanalyse _ jubilant _ rien moins ! _,

au sortir de l’adolescence comme au sortir de mon mutisme,

prêt à franchir le seuil de ce qui me semblait l’antichambre d’un Paradis« , lit-on aussi, page 238 ; et ce fut bien, en effet, cela qui advint !!! _ :

« Cette femme qui écoutait l’adolescent que j’étais

avec tant de patience et tant d’attention,

venait elle aussi du Peuple élu.

Elle m’avait proposé cette analyse sans rien me demander,

là où l’argent, la « passe », le billet furtivement glissé comme honteux dans la main du praticien deviendraient monnaie courante chez la plupart de ses confrères« …

Fin de l’incise sur ce sentiment de « déplacé »

_ et d’à jamais « en colère« … : « la colère, je crois bien, ne me quittera jamais« , page 240 aussi _

de Jean Clair…

Autre élément éminemment déclencheur de la vocation

au goût de la beauté (et de l’Art)

de Jean Clair,

cette toute première « rencontre » avec la peinture,

à l’école primaire, au final de la décennie _ pauvre ! _ des années 40,

par la grâce d’un instituteur de campagne

de la Mayenne profonde…

A l’école, dans la salle de classe,

première rencontre, donc,

avec « deux peintures dont je me souviens » :

« une nature morte de Braque » et « un paysage de Matisse » :

« Cette Annonciation de la Beauté, comme un ange en Visitation, si inattendue dans la grisaille et la pauvreté d’une classe de l’après-guerre,

cette lumière plus vive qui soudain traversait la salle,

furent une énigme qu’il me faudrait saisir« , page 54…

« Que peut donner la peinture

que le reste du visible ne vous offre pas,

et dont cette expérience enfantine me proposait l’énigme ?« , re-pense ainsi, rétrospectivement, Jean Clair, page 55…

Et puis,

force est aussi de constater que « ce _ tout premier _ don avait, à mes yeux, faibli _ ensuite _ avec le temps« …

« La question ne s’était pas posée aussi longtemps que la peinture avait eu pour mission _ lumineuse ! _ de célébrer _ voilà ! _ la gloire de Dieu et d’en donner l’idée. Elle participait de sa lumière et elle avait par ailleurs la capacité  de nous en faire un peu comprendre les mystères.

Mais, une fois rendue à elle-même, la peinture « libérée » des modernes, (…) coupée du ciel, rendue à l’ici-bas, la peinture finissait par paraître bien pauvre. Plus pauvre encore quand, se détournant de son devoir de représenter le visible pour annoncer l’invisible, elle prétendait à elle seule se représenter, s’auto-représenter, représenter non pas les apparences de telle ou telle chose, mais représenter la façon même dont elle les peindrait s’il lui prenait par hasard la fantaisie de les peindre, cette peinture finissait par cabrioler dans le vide _ voilà ! _ et quêter les applaudissements d’un public _ bien trop _ complaisant.
Ces tours de force forains
_ de bateleurs imposteurs _ m’apparurent finalement dérisoires, répétitifs, lassants et arrogants à la fois« , pages 55-56…

« Le malheur de l’art contemporain _ ensuite ! _, c’est de défendre des théories sur les pouvoirs de l’homme tout en les privant de leur theos, et par conséquent en les rendant impuissantes _ un défaut rédhibitoire ! pour un faire…  _ à illustrer, comme autrefois aux yeux des Anciens la sidération _ voilà ! cf le concept d’« acte esthétique«  selon la merveilleuse Baldine Saint-Girons, in L’Acte esthétique ! un must ! je ne le dirai jamais assez ! _ des formes et des couleurs, ou l’acte de contemplation _ même remarque ! _, ce qui glorifiait Dieu, comme premier et seul Créateur, et la beauté de l’univers qu’il avait créé à leurs yeux, entre six soirs et six matins« , pages 56-57…

Cependant, déjà,

« la petite chambre fermée à clef, à la ferme, qui ne servait à rien,

était un exemple _ un modèle : une première intuition… _

de ce discret appel vers le haut _ voilà _

qui permettait d’échapper à l’ennui répété des jours et de rêver à des vies _ supérieures : plus et mieux accomplies ! _ dont on imaginait mal _ au départ _ les aspects _ précis et détaillés _ et la félicité _ qui serait très effectivement ressentie : une aisthesis

Cela valait l’offrande,

et donnait _ déjà ! _ aux gestes les plus simples et les plus communs

une apparence de nécessité et une obligation de perfection » _ voilà ! voilà ! avec une extrême et permanente (voire perpétuelle) rigueur !, en ce qui se découvrira, plus tard, du travail de l’œuvre de l’artiste « vrai«  ! Jean Clair le découvrira ! Page 58.

Plus généralement,

« C’est du temple _ en effet ; au sens étymologique : un espace élu… _ que le monde se contemple.

Les dieux ne sont pas seulement les protecteurs des frontières, ils sont aussi les gardiens de la forme.

Ils sont là pour protéger du chaos, du monstrueux, et de l’illimité _ tel Apollon terrassant Python sur le territoire de Delphes.

Pareille croyance devient peu à peu incompréhensible en un monde qui se veut sans frontière et sans limite,

comme il est sans norme _ hélas _ dans la construction des formes _ du n’importe comment capricieux _ qu’il propose à notre appréciation.

Celles-ci sont proprement _ en effet ! _ devenues inhumaines si l’on rappelle que l’humus est et la terre nourricière et le mot fondateur _ oui ! _ de notre humanité _ un oubli payé au prix le plus fort !

Ce culte originaire, lié au sacré,

Cicéron l’appelait cultura animi, la culture de l’âme.

Cette belle expression s’est atrophiée sous le raccourci de « culture » _ cf aussi de Jean Clair, L’Hiver de la culture ; ainsi que mon article du 12 mars 2011 : OPA et titrisation réussies sur “l’art contemporain” : le constat d’un homme de goût et parfait connaisseur, Jean Clair, en “L’Hiver de la culture”

Mais cultura animi se retrouve encore chez saint Ambroise…

La suite n’est guère qu’une lente décadence _ certes _ du sens original si riche, profane ou sacré, de « culture ».

Nous n’habitons plus guère _ que dirait Hölderlin ?.. _ le monde _ émondé ! au profit de l’immonde ! _ ;

et les paysans qui le cultivaient

ont à peu près tous disparu _ aujourd’hui : survit une minorité de producteurs de produits agricoles.

La culture de l’âme elle aussi a disparu, du coup.

Dans son Docteur Faustus, Thomas Mann fait dire à Méphisto que « depuis que la culture s’est détachée du culte pour se faire culte elle-même, elle n’est plus qu’un déchet. »

La culture au sens où nous l’entendons aujourd’hui, n’est qu’un culte _ minimaliste _ rendu à l’homme par l’homme seul, une fois que les dieux se sont éloignés. C’est une idolâtrie _ voilà _ de l’homme par lui-même, une anthropolâtrie.

Méphisto, dans le récit de Thomas Mann, en tire la conséquence, avec un sourire ironique : la culture dont vous vous glorifiez est moins qu’un résidu, une ordure, l’émission à jets continus d’un « moi » malodorant ».

(…) La culture laïque, et ses produits, livres, œuvres d’art, musique profane, tout occupée de ne célébrer que l’individu, est allée au désert« , pages 66-67…

« Il n’y a _ a contrario de ces pentes nihilistes _ qu’un dialogue qui vaille _ vraiment : il est sans prix ! _, (…) c’est celui qu’on engage avec les voix des morts.

Ce dialogue ne prétend pas abolir l’espace mais plonge _ avec fécondité : il l’embrasse vraiment… _ dans le temps, discret et silencieux,

et ne réclame de l’interlocuteur qu’un peu de connaissance et de bienveillance.

Chaque fois que j’ouvre un livre _ « vrai« , du moins ; œuvre d’un « vrai«  auteur, qui le signe « vraiment«  !.. _,

se renouvelle un petit miracle _ mais oui ! _ qui me fait entendre, inaudibles à l’enregistreur électronique mais perceptibles à mes propres sens _ voilà : en un « acte esthétique«  _, les voix singulières, jamais confondues _ quand ces voix accèdent à un vrai style, qui soit « vraiment«  (tout naturellement) le leur : pas par artifice de « décalage«  calculé ! _, d’écrivains que je n’ai jamais vus et que je n’ai jamais entendus, parmi tant d’autres perdus dans les siècles.

Ils sont loin,

et pourtant dans les modulations et le rythme de leur style respectif _ et effectivement singulier, sans artifice ! _,

je les distingue _ oui ! _,

je comprends d’emblée _ oui ! _ ce qu’ils veulent dire,

je mesure à chaque ligne le pouvoir indéfiniment renouvelable _ de l’écriture « vraie«  de l’auteur _ et transmis par le simple geste de la main qui sort le livre des rayons _ suivi de l’acte (attentif) de ma lecture… _ qui, sans artifice et sans contrainte, me fait goûter leur présence _ voilà _ et partager leur génie«  _ à l’œuvre, se déployant dans les phrases, irradiant dans les lignes, dans le tracé qui est demeuré, et que je puis toujours contempler… _, pages 70-71…

« La beauté, autrefois, c’était la politesse de la forme« , dit ainsi Jean Clair, page 90, à propos de la statuaire _ dont celles d’Aristide Maillol (1861-1944), Arturo Martini (1889-1947), Raymond Mason (1922-2010) _ quand elle sait se tenir…

Et sur la forme,

cette « belle réflexion de Paul Valéry dans Tel Quel :

« La forme est essentiellement liée à la répétition. L’idole du nouveau est donc contraire au souci de la forme« .

Le drame de la modernité, dans sa composante hystérique, est là résumé.

La forme, en musique, du grégorien à Bach, est répétition ; comme en peinture la forme en écho, des figures des vases grecs à celles de Poussin.

Vouloir innover, ce n’est jamais que casser la forme, faire voler en éclats la plénitude de l’objet sonore ou plastique, qui relève en effet de la répétition, comme d’une loi de la biologie qui répète les formes« , pages 101-102…

Une autre initiation et impulsion à l’Art

(et au goût de la beauté),

fut l’exemple de la psychanalyste des quinze ans

de celui qui n’était pas encore Jean Clair,

à propos de ce qui allait _ « vraiment«  _ devenir son goût de l’Art…

D’abord à propos de la personnalité de cette psychanalyste elle-même :

« Je devais aussi remarquer assez vite que,

parallèlement à la collecte et à la pesée des mots,

il y avait chez elle le goût de la collection et l’amour de l’art _ voilà !

C’était la première fois que je voyais accrochés aux murs d’une maison,

outre la petite gravure de Rembrandt

_ « Au-dessus du divan où j’étais allongé, il y avait, je me souviens _ a-t-il déjà noté, page 239 _, Les Trois Arbres. Je fixais sur eux mon regard. Ils me semblaient d’une infinie solitude. Ce n’était pas les Trois Croix et moins encore la sainte Trinité, c’était les spécimens végétaux d’une triade naturaliste, pleins d’une vie que je devinais riche, emplie d’ombres et d’odeurs, mais qui n’avait pas encore éclaté au milieu de la plaine immense et déserte des polders »  _,

des tableaux de peintres dont je connaissais un peu les noms.

Je me souviens d’un Marquet, d’un Kisling.

Les liens secrets qui unissent l’art et l’or,

je passerais bien plus tard ma vie à en deviner les ressorts,

à en analyser la puissance ou la perversion,

sans doute pour donner quelque raison et quelque apparence de sérieux à une activité, la critique d’art, jugée si étrange _ par d’autres _ quand elle se manifeste chez quelqu’un qui vient d’ailleurs.

Ils avaient pris _ ces liens-là… _ leur forme parfaite

chez ceux sur qui pesait encore l’ancien interdit de la figuration :

la collection de beaux objets,

comme la pratique quotidienne de la lecture

et l’usage des langues

demeuraient essentiels

pour mieux se fondre

et se fonder

là où ils s’établiraient.

Éloigné de mes origines
_ campagnardes _,

j’ai pu me sentir proche _ en effet _ de ceux-là

dont la patrie,

située en nul lieu de l’étendue

mais au cœur même du temps,

se recrée,

non pas dans un terreau appelé « nation »,

mais partout où sont,

mêlés au texte saint,

les livres et les tableaux« , page 243…

Et ceci, encore, sur la psychanalyse même, cette fois,

à la page 244 :


« L’effacement lent de la psychanalyse

et les attaques forcenées dont elle fait aujourd’hui l’objet

ont accompagné ce que, faute de mieux, je ne peux appeler que la débâcle de l’intelligence  _ voilà !


La petite voix sourde,

si vulnérable et si précieuse

de l’analyse,

nul ne peut plus l’entendre aujourd’hui.

Et ce qu’elle dit,

nul ne veut plus l’écouter.

Elle était la dernière sagesse d’un monde

après qu’il a repoussé Dieu,

ou du moins avait-elle été sa dernière discipline.

Thomas Mann l’avait très tôt écrit, je crois, dans sa conférence de 1938.

Bien plus que l’existentialisme de Sartre,

la psychanalyse de Freud avait été un humanisme.

Le dernier sans doute.

Refusée, oubliée, moquée,

elle laisse aux fanatismes du jour,

et d’abord aux fondamentalismes religieux ou idéologiques, nourris de la bêtise du temps,

tout le loisir de reprendre la main

et de faire entendre à nouveau leurs vociférations« , page 244…

Par là,

« la société moderne ne peut fonctionner qu’à l’amnésie« , page 245 :

ce que ne peut certes pas faire un artiste tant soit peu « vrai » ;

tels

un Monet,

un Bonnard,

un Balthus

ou un Lucian Freud (cf pages 62-63) ;

ou, encore, un Avigdor Arikha (cf pages 59 à 61) ;

et un Zoran Music (cf pages 129 à 133), aussi…

Dernier élément que j’aimerais relever :

le rapport (complexe, enchevêtré…) entre création et filiation ;

et la question adjacente du pseudonyme et de la signature…

J’ai déjà relevé, page 265, cette remarque

que

« l’écriture est un refuge et un foyer :

ce qu’elle désigne, c’est précisément

l’impossibilité d’en appeler au Père« …


Jean Clair va creuser plus avant et profond ce point-là…

D’abord, aux pages 268-269 :

« Le désir du retour dans la patrie

n’est pas que la nostalgie du retour à une matrice originelle,

c’est la nostalgie du Vaterland,

autant que celle de la Heimat.

Malade, on est rapatrié,

on n’est pas ramatrié.

On y regagne son feu et son lieu. Hic est locus patriæ.

Pervers, celui qui ne retrouve pas sa voix dans le père,

celui qui se croit,

dans l’excès de ses actes et de ses manifestations,

sans égal et sans pair.« 

Mais : « Rechercher la terre du père, c’est trouver la mort : « Quid patriam quaerit, mortem invenit. »

Était-ce si sûr ? » _ les questions vont bon train…

Jean Clair continue donc de creuser…

Et il en arrive à ceci, vers la conclusion de ce livre,

aux pages 276-277, d’un livre qui en compte 280 :

« Prendre à quinze ans un pseudonyme et rejeter le patronyme _ voilà… _,

ce n’était pas seulement, comme on l’a dit, vouloir attenter à la vie du père.

C’était affirmer l’inutilité de signer une œuvre.

C’était du moins rappeler la vanité de vouloir attacher son nom à ce que l’on fait.

Ce que l’on fait, n’importe qui en ce bas monde, le pourrait faire«  _ pense-t-on alors, à quinze ans…

« Non que les êtres soient interchangeables,

mais que chacun vient en son temps, appelé par la nécessité du moment _ de l’époque, en quelque sorte _,

et non pas mû par la vocation d’un génie _ jugé probablement alors comme une illusion romantique…

Pourquoi donc vouloir « illustrer » son nom _ son patronyme : le nom, aussi, donc, de son père… _ lorsque la création est d’essence anonyme ?

Rien dans ce que faisais _ alors, vers 1955 et après… _, ne justifiait mon patronyme.

Aucune origine _ ni filiation, donc _ n’expliquait mon besoin de tracer des lignes jusqu’à les ratifier _ voilà : par une due signature ! _ d’un nom,

à la façon dont la noblesse justifie ses titres de propriété en exhibant ses armoiries… »

« Qui exactement fait ceci ou cela

dans cette chaîne ininterrompue d’échanges, d’emprunts, de citations, de calques, de moules et de copies _ ouf ! _

dont une œuvre se constitue ?

L’originalité d’une œuvre est sans origine.

L’homme passait _ tout simplement, en un pur et simple relais _ la main.

Et c’était là son pouvoir,

que la femme n’avait pas _ nous étions là dans les années cinquante...

Et c’était ainsi _ et pas autrement ! _,

cette _ pseudo _ nuée ardente de la création :

le nom n’était que la diffusion dans la nuit d’une lumière dont la source serait à jamais inconnue« , page 276…

« Un pseudonyme imposait en revanche ses obligations,

comme si le nom _ que l’on s’attribuait, ex nihilo _ portait avec lui des responsabilités égales à celles qu’on s’engage à assumer envers un enfant qu’on adopterait.

J’avais pu croire le mien _ « Jean Clair« , donc… _ le plus innocent.

Sa sonorité lunaire et transparente, son côté un peu niais,

auraient dû m’assurer l’impunité de l’anonymat.

Mais non : je ne commençai d’écrire que lorsque ce nom prit consistance et force,

prit son vrai sens à vrai dire,

qui est d’avoir le tranchant et la transparence du matériau dont il est fait.

On ne troque les responsabilités héritées de la filiation

que pour mieux assumer les devoirs entraînés par une paternité d’adoption« , page 277… 

Pour conclure, toujours page 277,

et à propos de l’étymologie :

« A défaut d’un lignage, d’un historial, d’une chronique ou d’un récit familial,

je veux,

fils de paysans sans nom et sans renommée,

dans le développement d’une langue aussi commune que celle de la gens d’où je viens,

trouver dans l’origine de ses mots _ de cette langue partagée _,

les traces d’une histoire et d’un

lieu,

les racines mêmes des raisons _ voilà _

pour lesquelles je vis ici et aujourd’hui« …

Et pour en revenir, enfin, au « goût des formes » de Jean Clair

et conclure là-dessus,

encore ce passage-ci, page 253, à propos de son père :

« Cet homme, mon père, d’une grande pudeur et d’une bonté désarmée

_ mais un paysan a-t-il le droit de se montrer tendre ? _,

je l’avais méprisé.

Que les fils tuent les pères

et qu’ils quittent les mères,

oui,

cela se sait, depuis toujours.

Mais au moins, comme on dit, il convient d’y mettre les formes.

Je l’avais fait avec violence _ voilà !

De là peut-être

que,

dans ce qui suivit,

je fus attentif

à reconnaître et à aimer,

sinon à respecter _ on notera la nuance _ les formes.

Bien sûr, ma plus grande peine

est _ et demeurera _ de penser

que mon père est mort avec l’impression

que le fils dont il était si fier,

et pour lequel il avait travaillé bien au-delà de son temps,

était en réalité quelqu’un

qui ne valait rien de bon« …

Voilà,

avec ce beau et grand Dialogue avec les morts,

l’hommage

_ et la réparation ! _

du(s),

par un homme (et auteur) de très grande probité,

à ce père

« d’une bonté désarmée« …


Titus Curiosus, le 27 mars 2011

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