Posts Tagged ‘Prague

Revoir Tůma, ou plutôt redécouvrir et réécouter la splendide musique de František Ignác Antonín Tůma (Hradec Králové, 1704 – Vienne, 1774)…

26déc

Le très vif plaisir pris à l’écoute du CD « František Tůma » _ cf mon trop bref  article «   » du 21 novembre dernier… _ d’Andreas Scholl et le Czech Ensemble Baroque dirigé par Roman Valek _ soit le CD Aparté AP340, enregistré à Znojmo du 2 au 6 juin 2023 _,

m’a conduit à faire un point récapitulatif sur ma discothèque personnelle comportant des œuvres de cet important _ et très prenant _ compositeur tchèque _ disciple du merveilleux Jan Dismas Zelenka (1679 – 1745) _, František Ignác Antonín Tůma (Hradec Králové, 2 octobre 1704 – Vienne, 3 février 1774),

soient les 11 CDs suivants,

classés ici dans l’ordre de leur enregistrement, de 1990 à 2023 : 

1) à Prague, en 1990, le CD Panton  81 0953 « Fr. A. I. Tůma – J. Myslivecek – L. Kozeluh « ,

par le Suk Chamber Orchestra dirigé par Josef Vlach :

2) à Prague, en 1993, le CD Rosa Classic RD 103 « Fr. I. Tůma – Missa C Dur – J. D. Zelenka – Lamentationes Jeremiae Prophetae« 

par le Prazsky komorni sbor & l’Olomoucky komorni orchestr dirigés par V. Podrazil ;

3) à Hoeven (Pays-bas) en 1995, le CD Accent ACC 95108 D « František Tůma – Miserere Mei Deus – Stabat Mater« 

par l’ensemble Currende dirigé par Erik Van Nevel ;

4) à Hradec Králové (Tchéquie), en 2004, le CD Supraphon SU 3806-2 « Jan Dismas Zelenka – Die Responsorien zum Karfreitag – František Tůma Sonatas in A minor & E minor – Sinfonia in B major« 

par Boni Pueri  & Musica Florea dirigés par Marek Štryncl ;

5) à Rome, en 2006, le CD naïve OP 30436 « Tůma – Partite, sonate & sinfonie« 

par le Concerto Italiano dirigé par Rinaldo Alessandrini ;

6) à Prague, en 2013, le CD Supraphon SU 4160-2 « Zelenka – Sanctus – Agnus Dei ZWV 34 & 36 – Sub Tuum Praesidium ZWV 157 – Tůma – Stabat Mater« 

par le Collegium 1704 dirigé par Václav Luks _ en écouter ici les sublimes 17′ 16 du podcast de cette magistrale interprétation… _ . ;

7) à Gedinne (Belgique), en 2019, le CD Ramée RAM 1914 « Tůma – Stabat Mater –  Biber – Requiem – Animam gementem cano« 

par le Pluto-Ensemble dirigé par Marnix De Cat & le Hathor Consort dirigé par Romina Lischka ;

8) à Znojmo (Tchéquie), en 2021, le CD Supraphon SU 4300-2 « Tůma – Requiem. Missa della morte in c (1742) – Miserere in c« 

par le Czech Ensemble Baroque dirigé par Roman Válek ; 

9) à Znojmo (Tchéquie), en 2022, le CD Supraphon SU 4315-2  « Tůma – Te Deum – Missa Veni Pater Pauperum – Sinfonia ex C » par le Czech Ensemble Baroque dirigé par Roman Válek ; 

10) à Znojmo (Tchéquie), en 2023, le CD Aparté AP 340 « František Tůma – Motets – Sinfonia a quattro – Dixit Sominus« 

par Andreas Scholl et le Czech Ensemble Baroque dirigé par Roman Válek _ apprécier ici la petite vidéo (de 2′ 37) de présentation de ce très beau CD par Andreas Scholl et Roman Válek à l’œuvre…

Post-scriptum du mercredi 27 décembre :

En fouillant encore un peu mieux dans les recoins des rangées et piles de CDs de ma discothèque personnelle,

j’ai retrouvé un onzième CD comportant, lui, 2 autres œuvres de Frantisek Tůma :

un « Inno per il festo di Santa Teresia » _ en écouter ici les 4′ 09 _

et des « Vesperae de la B. M. V. » _ en écouter ici les 9′ _,

soient les pages 8 et 9 du CD Ricercar 135 « Cantate ad Alto solo« , enregistrées à Heverleen (Belgique) entre le 11 et le 28 mai 1991 par James Bowman et le Ricercar Consort

Et je me suis aperçu aussi que j’avais laissé passer le CD Ramée RAM 1304 « Fede e Amor » de l’ensemble La Fontaine et Alex Potter, paru le 25 septembre 2013,

qui comportait la « Sonata a 2 Violini e 2 Tromboni in E minor » de Frantisek Tůma _ écoutez-en ici les 3′ 18 de la plage 7… 

Ce mardi 26 décembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Dans la filiation des Vents mozartiens, avec une pointe d’esprit plus acide : quelques oeuvres pour Vents de Bohème-Moravie de l’Entre-Deux-Guerres-Mondiales (1924 et 1929)…

10nov

C’est dans la filiation des Vents _ telle la merveilleuse « Gran Partita« , mais aussi des pièces beaucoup plus légères et très plaisantes… _ de ce Mozart qui s’est, d’ailleurs, tellement plu à Prague,

que l’Orsino Ensemble (avec l’apport de la clarinette de Peter Sparks, du basson de Llinos Owen, et du piano de James Baillieu _ tiens, tiens, le revoici, cet excellent pianiste... _) vient nous offrir un très plaisant « Echoes of Bohemia – Czech Music for Wind« , le CD Chandos CHSA 5348,

comportant,

outre le « Quintette » Op. 88 N°2 (de 1811-17) d’Antoine Reicha (Prague, 26 février 1770 – Paris, 28 mai 1836), trois œuvres de compositeurs tchèques composées en 1924 :

_ »Mladi« , de Leos Janacek (Hukvaldy, 3 juillet 1854 – Ostrava, 12 août 1928),

et 1929 :

_ le « Quintette«  Op. 10 de Pavel Haas (Brno, 21 juin 1899 – Auschwitz, 17 octobre 1944),

_ ainsi que le « Sextuor » H 174 de Bohuslav Martinu (Polička, 8 décembre 1890 – Liestal, 28 août 1959) ;

composées au mitan _ du moins pour nous… _ de l’entre-deux-guerres-mondiales…

Trois œuvres à la fois emplies d’un vent rapide et frais de joyeuse gaieté _ à la Mozart _, mais aussi mâtinées de pointes d’acidité et de quelques accents d’inquiétude morose ou narquoise _ un peu à la Gustav Mahler (Kaliště, 7 juillet 1860 – Vienne, 18 mai 1911), ce viennois qui a passé son enfance à Iglau (aujourd’hui Jihlava) en cette Moravie où paradaient festivement de martiales fanfares, aux échos si fréquents dans sa marquante musique…

Ces années 1924 et 1929, la patrie de ces musiciens se nommait « Tchécoslovaquie« .

Un CD original et bien intéressant,

qui nous touche par ces divers accents-là, entremêlés et fondus.

Ce vendredi 10 novembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Une étincelante pépite Martinu : le double concerto pour violon, piano et orchestre (de 1953), par le violon de Josef Spacek, le piano de Miroslav Sekera et l’Orchestre Symphonique de Radio-Prague dirigé par Petr Popelka, un lumineux et profond CD Supraphon…

17oct

Une étincelante pépite Martinů :

le sublime « double concerto pour violon, piano et orchestre » (H. 342, composé à New-York _ et quelque part cela se ressent… _ en 1953), par le violon de Josef Špaček, le piano de Miroslav Sekera, et l’Orchestre Symphonique de Radio-Prague dirigé par Petr Popelka,

en un lumineux et profond CD Supraphon (SU 4330-2) _ avec la « Sonate pour violon n°3 » H. 303 (de 1944), et les « 5 Pièces brèves pour violon et piano » H. 184 (de 1930) de Martinů ; enregistré du 31 octobre au 2 novembre 2021 au Studio 1 de la Radio tchèque à Prague, pour le « double concerto« , et dans la salle Dvořák du Rudolfinum, du 11 au 14 mai 2020 pour la « Sonate n°3« , et le 23 octobre 2022 pour les « 5 pièces brèves«  _ :

voilà ma découverte éblouie de ce jour,

tout innocemment présent sur la table des nouveautés du rayon Musique de la librairie Mollat.

Or, Bohuslav Martinů (Polička, 8 décembre 1890 – Liestal – Suisse, 28 août 1959) est un compositeur que depuis longtemps je porte au pinacle de même que j’adore pas mal de compositeurs tchèques et moraves, Antonín Dvořák, Josef Suk, Leoš Janáček, par exemple, dont la musique me parle tout spécialement…

Ce « Double Concerto pour violon, piano et orchestre » de Martinů qui n’est pas sans me rappeler d’une certaine façon le somptueux « Double Concerto pour violon, violoncelle et orchestre » (Op. 102, de 1887), de Johannes Brahms (1833 – 1897), que je viens de chroniquer avec une intense admiration aussi le 12 octobre dernier : « « …  

De cette œuvre admirable _ archivée H. 342 _ d’un Martinů de la maturité accomplie _ en 1953, le compositeur est dans sa 63e année de vie, et va bientôt revenir des États-Unis, pour résider à nouveau en cette France de son épouse Charlotte… _,

nous disposons aussi d’une splendide vidéo d’un enregistrement _ d’une durée de 27′ 07 _ en concert, en la salle Dvořák du merveilleux Rudolfinum de Prague, le 9 octobre 2021, par ces mêmes admirables interprètes, Josef Špaček, Miroslav Sekera, et l’Orchestre Symphonique de Radio-Prague dirigé par Petr Popelka, qui l’enregistreront bientôt en studio  _ en une durée de 26′ 10, au CD _ peu après : du 31 octobre au 2 novembre suivants…

Ma discothèque recèle aussi, en un coffret Hyperion de 4 CDS _ intitulé « The complete music fir violin and orchestra« , par Bohuslav Matousek, le Czech Philharmonic Orchestra, sous la direction de Christopher Hogwood, paru en 2019 ; cf mon article du 21 mars 2019 : « «  _, une autre interprétation _ elles ne sont pas nombreuses _ de ce même « double concerto pour violon, piano et orchestre » (H. 342, de 1953) de Bohuslav Martinů,

par Bohuslav Matoušek au violon, Karel Košarek au piano, et Christopher Hogwood dirigeant le Czech Philharmonic Orchestra…

Et d’autre part,

on peut aussi accéder ici même à une vidéo _ d’une durée de 26′ 47 _ d’un précédent et lui aussi merveilleux, très touchant, « double concerto pour violon, piano et orchestre » de Bohuslav Martinů, de 1910 cette fois _ Martinů n’avait même pas 20 ans… _, et archivé H 13, en une interprétation de Bohuslav Matoušek au violon et Petr Adamec au piano _ assez étrangement nulle part ne sont indiqués ni le nom de l’orchestre, ni celui du chef qui l’a dirigé ; et je ne possède hélas pas le précieux coffret de 4 CDs qui le comporte… _qui vient nous offrir une passionnante et très belle mise en perspective du parcours musical de Bohuslav Martinů, de 1910 à 1953…   

Enfin, il me faut aussi et bien sûr faire l’éloge du brillant violoniste très attachant de ce CD Supraphon de l’automne 2021 : Josef Špaček ; dont je possède déjà les belles interprétations du CD Supraphon SU 1482-2 « Dvořák, Suk, Janáček – Violin Concertos« , paru en 2015, avec l’Orchestre Philharmonique tchèque dirigé par le grand Jiří Bělohlávek…

On peut aussi découvrir Josef Špaček en cette brève vidéo (d’une durée de 3′ 21) de présentation, avec son compère violoncelliste  Tomáš Jamník, d’un très séduisant CD Supraphon SU 4304-2 « Paths« , de Duos pour violon et violoncelle de Leoš Janáček, Gideon Klein, Bohuslav Martinů et Ervín Schulhoff…  

Que de splendides musiques tchèques et moraves !

Et que de merveilleux interprètes idoines en ce si sensible et émouvant répertoire…

Ce mardi 17 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Francesco Piemontesi une fois encore au sommet : en un magistral double album Pentatone « Liszt Transcendantal Etudes & Piano Sonata » _ ou la perfection de l’interprétation la plus subtilement incarnée d’un immense compositeur…

19sept

Le merveilleux pianiste Francesco Piemontesi _ né à Locarno le 7 juillet 1983  _ nous conduit à nouveau au sommet en un magique magistral double album Pentatone PTC 5187 052 « Liszt Transcendantal Etudes & Piano Sonata« , enregistré à Lugano en avril-mai 2021,

et tout juste paru le 1er septembre dernier…

Les titres de mes 6 précédents articles sur le génie _ mais oui ! _ d’interprétation de Francesco Piemontesi témoignent de ma constante superlative admiration pour son piano, dans Mozart, Schubert, comme Liszt _ et aussi Debussy _ :

_ le 26 décembre 2018 : «  » ;

_ Le 6 juin 2019 : «  » ;

_ le 27 juin 2019 : «  » ;

_ le 25 septembre 2019 : «  » ;

_ le 29 octobre 2019 : «  » ;

_ et le 24 octobre 2020 : «  » ;

C’est l’article de Jean Lacroix, très justement intitulé « Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source« , paru avant-hier 17 septembre, sur le site de Crescendo, qui m’a appris l’existence _ ignorée jusqu’alors ! _ de ce double CD publié par l’excellent label Pentatone ; et m’a fait me précipiter chez mon disquaire préféré  pour me le procurer _ ce double CD « Liszt – Transcendantal Etudes & Piano Sonata – Francesco Piemontesi«  du label Pentatone, d’ailleurs, ne se trouvait pas sur la table des nouveautés, mais était tout simplement rangé, et en tête, sur une étagère au rayon « Liszt«  ; je n’ai donc pas eu de peine à le dénicher…

Voici donc cet article efficace et très juste, « Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source« , de Jean Lacroix :

Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source

LE 17 SEPTEMBRE 2023 par Jean Lacroix

Franz Liszt (1811-1886) :

Études d’exécution transcendante S. 139 ; Sonate pour piano en si mineur S. 178.

Francesco Piemontesi, piano. 2021.

Notice en anglais et en allemand.

96.00.

Un album de deux CD Pentatone PTC 5187 052.

Depuis sa troisième place au Concours Reine Elisabeth 2007, remporté cette année-là par Anna Vinnitskaya, le pianiste suisse Francesco Piemontesi (°1983) a fait son chemin, ô combien ! Né à Locarno, il a étudié à Hanovre avec Arie Vardi, mais a aussi pu travailler avec Alfred Brendel, Murray Perahia ou Alexis Weissenberg. Crescendo a suivi son parcours de façon régulière (lire l’entretien avec Pierre-Jean Tribot du 21 octobre 2020 _ publié sous le titre « Francesco Piemontesi, pianiste réflexif et discophile« … _). Piemontesi a enregistré pour plusieurs labels (Avanti, Naïve, Claves), notamment des pages de Mozart, Debussy, Dvořak ou Schumann. Pour Pentatone, il a gravé des œuvres de Schubert, un « Bach Nostalghia », ou un programme qui regroupait Schoenberg, Messiaen et Ravel. Avec ce dernier label, il prolonge son exploration du répertoire de Liszt, entamée avec brio pour Orfeo en 2017 _ cf mes propres articles des 26 décembre 2018 et 6 et 27 juin 2019 auxquels je viens de donner ci-dessus les liens… _ par les deux premières Années de pèlerinage et Deux Légendes, deux albums élégants agrémentés par des DVD, dont un documentaire aux superbes images, signé par Bruno Monsaingeon. Le nouveau programme Pentatone est non seulement alléchant, il est aussi audacieux.

La genèse des Études d’exécution transcendante s’étend sur près de vingt-cinq ans, cinq lustres au cours desquels, au fil du temps, Liszt a creusé la technique, fait des choix et insisté sur le développement. La vision aboutit en 1851 à un résultat fascinant : ces douze pages sont devenues un redoutable exercice de virtuosité, nourri du bagage littéraire et poétique que le génie hongrois du piano a accumulé. Tout ici est de haut vol _ et pas seulementent l’exécution qu’a en donner l’interprète… _, des frénétiques et mystérieux Feux follets (n° 5), à une valeureuse Chasse sauvage (n° 8) aux rythmes syncopés, ou encore, aux Harmonies du soir (n° 11). C’est l’étude la plus célèbre du recueil, une véritable incarnation poétique remplie de paix, de bonheur spirituel, de cohérence contemplative qui fait penser à la plénitude lamartinienne ; une musique d’une grande pureté _ voilà. On n’oubliera pas non plus la quatrième étude, Mazeppa, dédicacée à Victor Hugo, magistrale _ oui _ évocation d’un poème des Orientales ; très dramatique, c’est la substance du futur poème symphonique du même titre, et d’une version pour deux pianos et à quatre mains. Avant la découverte de l’ensemble sous les doigts de Piemontesi, il faut aller en plage 11 du premier disque et s’enivrer de ces Harmonies du soir pour se persuader que le pianiste suisse, technicien impeccable, possède le sens de la couleur, la fluidité des accents habités, l’élégance généreuse et la capacité expressive, le tout mêlé à une concentration de jeu phénoménale _ tout cela est de la plus haute justesse.

En 1964, lorsqu’il écrivait sa biographie sur Liszt pour les éditions Seghers (n° 5 de la collection « Musiciens de tous les temps »), Alfred Leroy avait souligné à quel point les Études d’exécution transcendante sont redoutables pour ceux qui s’affrontent à ce monument d’une durée dépassant l’heure : Elles doivent être exécutées avec un art fait de sensibilité, de nuances, de demi-teintes habilement ménagées, de grandioses orchestrations et de colorations délicates. Point d’acrobaties spectaculaires et vaines, point d’inutiles et fausses apparences, mais une pénétration de tout ce que ces Études enclosent de raffinement et de subtilité _ oui. À cette ligne directrice, qui convient tout à fait _ parfaitement _ à la vision de Piemontesi, le musicologue aurait pu ajouter, s’il avait connu le Suisse, des qualités qui sont les siennes : l’art des contrastes qui apparaît dès le Prélude et le Molto vivace qui suit, le dépouillement tendre ou rêveur _ c’est là un trait de jeu très présent chez ce subtil et magistral interprète _ qui parcourt le Paysage (n° 3) ou la Vision (n° 6), l’atmosphère entre ombre et lumières, proche de l’improvisation _ oui _, qui saupoudre la Ricordanza (n° 9). Piemontesi invite l’auditeur à un parcours exaltant, avec un piano très présent, capté à Lugano au printemps 2021 dans l’Auditorium Stelio Molo de la Radio Suisse Italienne (RSI). Lorsque le voyage s’achève sur le Chasse-neige, ce tableau d’un lyrisme si parfait qui marque la fin d’une aventure vécue intensément avec un artiste à la sensibilité épanouie _ oui ! _, on éprouve une vraie tristesse à le quitter… On n’oublie pas les versions déjà historiques de Claudio Arrau, Lazar Berman, Alfred Brendel ou György Cziffra, pour ne citer qu’elles, ni des signatures plus récentes, celles de Bertrand Chamayou, Marie-Claire Le Guay, Vesselin Stanev ou Gabriel Stern. Mais la vision de Francesco Piemontesi ne peut que susciter d’absolus éloges _ parfaitement ! Notre plaisir d’écoute est de cette hauteur d’intimité et grandeur à la fois…

Autre monument, autre réussite, la Sonate en si mineur, achevée à Weimar le 2 février 1853, qui occupe seule le deuxième disque _ écouter et regarder aussi cette superbe prise vidéo (d’une durée de 29′ 35) de Francesco Piemontesi interprétant cette célèbre Sonate en si mineur en concert à Prague le 1er novembre 2020, au magnifique Rudolfinum ; le double CD Pentatone, lui, a été enregistré, 6 mois plus tard, à l’Auditorio Stelio Molo de la Radiotelevisione Svizzera (RSI) à Lugano en avril et mai 2021… La dimension introvertie _ assez stupéfiante ! _ avec laquelle Piemontesi entame _ et l’oreille et le goût doivent aussitôt s’y adapter !.. _ ce long propos met en place une architecture qui va peu à peu _ oui _ installer un climat où la virtuosité, la véhémence, la dynamique et la netteté _ elle est très importante, et m’enchante dans le jeu d’interprète ultra-exigeant envers le respect le plus grand de la partition qui est celui de Francesco Piemontesi… _ vont s’imposer. Cette musique à couper le souffle _ en effet _ prend sous les doigts du pianiste suisse un caractère qui allie la sidérante beauté plastique _ voilà _ imaginée par le génie lisztien à une tension qui ne se relâche pas _ voilà. Ce piano peut se nimber d’une grande pudeur _ oui, et tendresse _, comme se réclamer d’un appel à une dimension grandiose _ vers le sublime _ au sein de laquelle la démesure _ aussi _ se laisse libre cours. Mais Piemontesi n’oublie jamais, et c’est en cela qu’il nous séduit, de veiller à conserver une sonorité qui sait combiner le murmure (Andante sostenuto) à une intense réflexion _ oui. Il manie les plans sonores avec une habile science des contrastes _ jamais artificielle ni poussée _ et une noble sensibilité _ c’est essentiel ! _, qui va conclure la sonate comme si elle s’effaçait, à la manière d’un baisser de rideau.

Ici aussi, la discographie est riche. On chérit les grandes réussites d’Argerich, Arrau, Brendel, Cziffra, Horowitz et ses sorcelleries, Pogorelich, Pollini, Richter, Rubinstein trop oublié, Zimerman… Mais on s’attarde aussi à de plus proches de nous : Colom _ cet immense pianiste catalan que j’apprécie énormément (c’est lui qui, en 1995, m’a fait découvrir et adorer la merveilleuse musique à nulle autre pareille de Manuel Blasco de Nebra ; et écouter un Mompou aussi beau qu’interprété par Federico Mompou lui-même : cf notamment mon article « «  du 23 avril 2022…) _, Dalberto, Grosvenor, Hamelin, Hough ou Yundi Li. Francesco Piemontesi rejoint cette pléiade qualitative en servant _ voilà ! _ Liszt avec toute la passion et la grandeur qu’il mérite. Pour la petite histoire, on signalera que la notice de ce superbe _ oui, oui, oui _ double album est signée par Nike Wagner, arrière-arrière-petite-fille de Liszt et fille de Wieland Wagner _ en effet.

Son : 9  Notice : 7  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

À nouveau,

une merveilleuse et indispensable réalisation discographique du décidément parfait, chaque fois, Francesco Piemontesi.

Ce mardi 19 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

A propos de l' »Andenken » (1803) de Hölderlin, de Bordeaux (en 1802, 1965, 2000), et de l' »Andenken, je pense à vous », le film-documentaire (2000) de Christine Baudillon : un envoi à l’ami Pascal Chabot à Bruxelles

28nov

En mon parcours de visionnage de plusieurs très remarquables vidéos liées au travail de penser de l’ami Pascal Chabot,

cet envoi-ci, ce lundi 28 novembre 2022 :
Je viens de regarder cet « Andenken, je pense à vous », de Christine Baudillon (en 2000), avec, intégrées dans le film, des vues d’un assez surprenant Bordeaux de 1965,
l’année même où j’étais en Hypokhâgne au lycée Michel-Montaigne, dont le proviseur était …M. Lacoue-Labarthe,
le père de Philippe le philosophe,
mais aussi d’Antoine, qui était mon condisciple en cette classe d’Hypokâgne à Montaigne.
Oui, bien des fils viennent se croiser, se nouer, se filer…
Un peu plus tard, à la Fac, 
c’est Jean-Marie Pontévia _ ami de Michel Deguy, avec lequel je me suis entretenu chez Mollat (cf le podcast de notre entretien du 9 mars 2017 à propos de son magnifique « La Vie subite« …) ; et de Gérard Granel… _ ;
Pontévia, remarquable prof de Philo ainsi que d’Esthétique qui nous a fait connaître ce poème, « Andenken« , de Hölderlin,
et l’usage que fait Heidegger de ces mots : « Ce qui demeure, les poètes le fondent »…
J’ai conservé tous les cours d’Esthétique de Pontévia.
 
 
Ce qui avec quelques corrections et ajouts en rouge, donne ceci :
Je viens de regarder cet « Andenken, je pense à vous », de Christine Baudillon, avec, intégrées dans le film, des vues d’un assez surprenant Bordeaux, noir, de 1965,
l’année même où j’étais en Hypokhâgne (1964-65) au lycée Michel-Montaigne, dont le proviseur était …Jean Lacoue-Labarthe (Paris, 3 octobre 1914 – La Teste de Buch, 14 juin 1999),
le père de Philippe le philosophe (Tours, 6 mars 1940 – Paris, 28 janvier 2007),
mais aussi d’Antoine (né en 1946 ou 47) , qui était mon condisciple en cette classe d’Hypokâgne à Montaigne.
Oui, bien des fils viennent se croiser, se nouer, se filer…
Un peu plus tard, à la Fac, 
c’est Jean-Marie Pontévia (Montreux-Château, 27 janvier 1930 – Bordeaux, 27 octobre 1982) _ ami de Michel Deguy (Draveil, 23 mai 1930 – Paris 5, 16 février 2022), avec lequel je me suis entretenu chez Mollat le 9 mars 2017, sur son « La Vie subite » : podcast à écouter… ; et de Gérard Granel (Paris, 3 janvier 1930 – Cornebarrieu, 10 novembre 2000)… _ ;
Jean-Marie Pontévia, remarquable prof de Philo ainsi que d’Esthétique, qui nous a fait connaître ce poème, « Andenken« , de Hölderlin,
         et l’usage que fait Heidegger de ces mots : « Ce qui demeure, les poètes le fondent »…
         J’ai conservé tous les cours d’Esthétique de Pontévia.

Je commence par donner quelques précisions _ les ajouts ici en rouge _ à mon trop rapide courriel d’hier soir.
Et ensuite, plus tard, je commenterai ce très émouvant film-documentaire « Andenken, je pense à vous » de Christine Baudillon (avec la voix de Philippe Lacoue-Labarthe, en 2000),
et avec quelques images noir-et-blanc de Bordeaux _ avant tout ravalement de la ville… _ prises par Sylvain Dupasquier, en 1965 (!!!), qui n’ont pas manqué de me surprendre,
car on y voit les Allées de Tourny et la statue de Tourny, Place Tourny, sans y voir (!?!), justement, cet Hôtel Meyer, qui occupe tout le fond des Allées de Tourny, et tourne le dos à la Place Tourny (et à la statue de l’Intendant Tourny), où a résidé Hölderlin une partie des 102 jours qu’il a passés à Bordeaux en 1802,
entre le 28 janvier de son arrivée à Bordeaux et le 10 mai de son départ de Bordeaux pour retourner, à pied, en Allemagne…
Mais Sylvain Dupasquier, photographe, ne pouvait pas prévoir, en 1965, que c’est cet Hôtel Meyer qui nous intéresserait, toi, Pascal, et moi-même, en novembre 2022…
Cet Hôtel Meyer que je t’ai désigné d’un peu loin, mardi dernier, vers 16h 15, au coin, très aigu, du Cours du XXX juillet et des Allées de Tourny,
avant même de savoir, tout de suite après, que la pensée de la Garonne évoquée par le poème de Hölderlin, occupait à ce moment précis ton esprit !..
Wow !
Le consul Meyer disposait aussi d’une propriété à la campagne, le château de Fongravey, à Blanquefort, un peu au nord de Bordeaux : Hölderlin a dû y résider aussi, avec ses petites élèves.
Et très visiblement Hölderlin connaissait bien aussi cette colline de Lormont, avec quelques vestiges-ruines d’une tour du Prince-Noir, qui surveillait, de son surplomb autrefois guerrier, la Garonne ;
là où Christine Baudillon est venue planter sa caméra _ en quelle année ? en 2000 ! _ et a filmé ses deux panoramiques sur Bordeaux et la courbe de la Garonne, tout près de l’actuel Pont d’Aquitaine…
Quand avec mes parents et mon frère nous avons voyagé en Allemagne un peu plus tard que 1965, l’été 1967, en route vers Prague et la Bohème (dont Karlsbad), puis Vienne, 
nous sommes passés par Tübingen et avons vu, et j’y tenais beaucoup, la tour du menuisier Zimmer où Hölderlin (1770 – 1843) a séjourné les 36 années qui lui restaient de vie.
Voilà quelques uns des fils, tiens et miens, qui se recoupent donc…
À suivre,
Francis
P. s. : Entendre la voix de Philippe Lacoue-Labarthe, lisant sa traduction personnelle du poème de Hölderlin, c’est assez impressionnant… Et une voix qui parle, c’est important…
Surprenants sont donc ces divers chemins de nos mémoires respectives qui viennent de se croiser, une fois encore, généreux et impérieux Kairos aidant, à Bordeaux…
Ce lundi 28 novembre 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa
P. s. :
en regardant très attentivement le lendemain matin, le très riche et passionnant film « Philippe Lacoue-Labarthe Altus« ,  produit en 2013, de Christine Baudillon et François Lagarde, consacré à Philippe Lacoue-Labarthe _ Tours, 6 mars 1940 – Paris, 28 janvier 2013 _, aux Éditions Hors Œil,
et dans lequel Philippe Lacoue-Labarthe
_ filmé le 20 juin 2000 au Centre Chorégraphique National de Montpellier ;
filmé en janvier 2001 sur la route menant à Waldesbach, au Ban de la Roche, dans les Vosges ;
enregistré le 7 mars 2001 dans les salons Albert-Mollat de la Librairie Mollat à Bordeaux ;
enregistré le 24 avril 2001 au téléphone depuis le Centre médical La Rouvière, à Valleraugues, dictant le texte du film… ;
filmé en juin 2001 à Montpellier ;
filmé en juillet 2001 à l’ïle Saint-Pierre, au bord du Lac de Bienne ;
et filmé le 13 juillet 2004 rue des Aiguerelles à Montpellier ;
et aussi,
mais en des prises de vue qui n’ont pas été datées dans le déroulé du générique final du film :
à Corniglia, sur les hauteurs de Saint-Moritz ;
à l’Université d’Iéna ;
à Sils-Maria, dans la maison où logeait Nietzsche ; à Surlèj, au bord du lac de Silvaplana, sur le rocher de l’Eternel Retour ; sur le lac de Sils, jusqu’à la presqu’île de Chasté, et à la pierre où est gravé le texte de « l’autre chant de la danse«  ;
et à Tübingen, sur les bords du Neckar, en face de la maison Zimmer dans laquelle Hölderin a vécu 36 ans…  _,
parle presque continument,
je découvre d’autres vues de Bordeaux _ que celles, moins nombreuses, retenues au montage du film de 2020 « Andenken, je pense à vous » _ prises par Sylvain Dupasquier en 1965, alors que celui-ci était élève de Philippe-Lacoue-Labarthe au Lycée Michel-Montaigne à Bordeaux.
Et sur ces images-là du film « Philippe Lacoue-Labarthe Altus« , cette fois, et à plusieurs reprises, nous pouvons enfin apercevoir, et sous plusieurs angles, le fameux Hôtel Meyer du bout des Allées de Tourny.
J’en déduis que l’absence _ un peu curieuse _ de ces images de l’Hôtel Meyer, où avait séjourné Hölderlin lors de son séjour à Bordeaux en 1802, provenait seulement d’un un peu malencontreux montage, qui, de façon assez surprenante, justement nous privait de lui, de sa belle et noble façade, dans le film tourné en 2000, mais achevé de réaliser et produit en juin 2020 : « Andenken, je pense à vous« …
Chercher sur mollat

parmi plus de 300 000 titres.

Actualité
Podcasts
Rendez-vous
Coup de cœur