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Quelques premières précisions sur quelques personnages (et événements) apparaissant un peu floutés dans le récit de François Noudelmann en son passionnant et très beau « Les enfants de Cadillac » : les noms floutés de plusieurs femmes…

22mai

En une sorte de second Avant-propos,

après celui d’hier 21 mai en mon article « « ,

et conformément à la méthode de lecture-enquête _ sainte-beuvienne _ dont je suis coutumier, « en cherchant bien« , en creusant un peu plus les détails,

voici ce jour de premières précisions _ d’identité de personnes, de lieux, ou de dates laissés un peu flous dans le récit donné par l’auteur… _ en réponse à quelques unes de mes questions,

au fil et au terme _ provisoire _ de mes lectures successives _ au nombre de 3 jusqu’ici… _ de ce récit _ « roman » continue de passablement me gêner, en dépit du constat que, en son entretien (un peu trop rapide, et même un peu trop sec, à mon goût…) sur France-Culture, le 5 décembre 2021, avec l’ami Mathias Enard _ cf le podcast de mon entretien avec lui du 8 septembre 2010 ; et mon article du 21 septembre 2008 à propos de son stupéfiant chef d’œuvre « Zone » : « « … _, François Noudelmann l’assume, et même fermement _, qu’est ce passionnant « Les enfants de Cadillac« …

Pas mal d’éléments laissés flous dans le fil souvent rapide du récit s’éclairant davantage quand on s’avise de les relier à d’autres détails situés plus loin dans le récit, et dans notre lecture de parties ultérieures de ce récit, et eu égard à d’autres aspects de ces mêmes éléments rapportés, dans le cadre parfois un peu chahuté de la chronologie _ historique _ des éléments de ce réel évoqué ;

et si, bien sûr, le lecteur un peu curieux de tels éléments et faits, opère effectivement de telles un peu éclairantes mises en relation, et cela sans que l’auteur ait cherché vraiment à nous les cacher :

comme par exemple la plupart de ce qui concerne sa mère.

Et plus généralement aussi les compagnes de trois générations (Chaïm, Albert, François) de Noudelmann :

_ 1) Marie Schlimper, la grand-mère paternelle de François, née à Lemberg _ Lviv aujourd’hui : désormais en Ukraine… _ en 1881 et inhumée au cimatière de Bagneux _ j’ignore la date de son décès _, épouse _ en secondes noces : elle était veuve de Hersch Friedmann (j’ignore ses dates et lieux de naissance et de décès), dont elle avait 4 enfants : Jacques (Paris 18e, 7 novembre 1902 – Livry-Gargan, 1er juin 1978), Rachel (Paris 18e, 25 août 1904 – Dreux, 2 août 1999), Raymonde (Paris 18e, 3 avril 1907 – Villiers-le-Bel, 1er avril 1995) et Bernard (Paris 18e ?disparu entre 1941 et 1945…) : demi frères et sœurs d’Albert Noudelmann (Paris 18e, 24 juin 1916 – Limoges, 16 juillet 1998)… _, puis veuve, de Chaïm Noudelmann (1891 – Cadillac, 21 février 1941), et de dix ans plus âgée que lui, et la mère bien peu maternelle d’Albert _ ce qui éclaire pas mal de choses qui vont s’ensuivre en la vie de son fils Albert, et peut-être aussi, bien qu’il ne l’ait probablement pas connue, de son petit-fils François, les liens étant rompus entre Marie Schlimpel, veuve Noudelmann, et son fils Albert Noudelmann. Celui qui conservera les liens, documents familiaux, dont des photos, est un cousin _ j’ignore par quels liens précis : était-il un neveu de Hersch Friedmann, le premier mari de Marie Schlimper ?… _, Henri Friedmann (Metz, 22 décembre 1925 – Suresnes, 9 novembre 2019) ; et c’est de ce cousin Henri Friedmann que François Noudelmann reprendra le flambeau de l’entretien de la tombe de sa grand-mère paternelle, dans le carré juif du cimetière de Bagneux : « La mort d’Henri Friedmann, ce cousin vigilant, m’a imposé la responsabilité d’entretenir à mon tour cette tombe que je ne connaissais pas et que mon père n’honorait pas, bien que sa mère y reposât. (…) Le  passage de témoin eut lieu lorsque Henri fut inhumé _ en novembre 2019, donc _ dans une sépulture sur laquelle est écrit le nom de ses parents « morts en déportation ». Le jour où ils furent raflés, le 16 juillet 1942, la maîtresse d’école le somma de ne pas rentrer chez lui. Elle lui donna une adresse dans la Drôme et il réussit à franchir la ligne de démarcation pour passer le reste de la guerre à travailler chez des paysans. C‘est lui, Henri l’orphelin, maroquinier de son état, qui garda la mémoire de la famille, en conserva quelques photos et honora ses tombeaux« , peut-on ainsi lire, page 53..

_ 2) les trois épouses successives _ dont la mère de François : demeurée sans nom ni prénom tout le long du récit : elle quittera brutalement son mari Albert (et son fils François) pour suivre un autre homme (non nommé précisément, un médecin de province, un notable…), qu’elle épousera ; et François, après le jugement de divorce de ses parents, la verra deux week-ends par mois jusqu’à sa majorité…d’Albert Noudelmann, après Huberte Bordes, la première, et avant la troisième, non nommée elle non plus _ une fois l’union entre cette dernière et Albert réalisée (en 1972 semble-t-il…), et la nouvelle famille installée dans un pavillon de la banlieue de Limoges, « je passai brutalement du bonheur à deux _ avec son père Albert, à Lyon _à l’enfer à six » _ à Limoges _, résume François Noudelmann… _, elle dont la conduite accula François, « après quatre années de galère » _ familiale malencontreusement recomposée et de fait affreusement toxique, de 1972 à 1976 _, à prendre « la fuite, à dix-sept ans _ en 1976, donc : François est né le 20 décembre 1958. La rupture avec mon père _ écrit ainsi François Noudelmann page 184 _ fut violente et définitive, à la mesure de l’amour trahi _ lire ici les sublimes pages 172 à 174 à propos de la vie (de « paradis » de tendresse paternelle et filiale), entre 1967 et 1972 (entre ses huit ans et ses treize ans), de François avec son père Albert « devant élever seul un enfant depuis ses huit ans » (en 1967, donc ; page 169), entre le départ de l’épouse et mère (« un père et son fils abandonnés par une femme qui était partie avec un autre homme« , page 171), en 1967 donc, quand François a huit ans, et la catastrophe du père se remariant, en 1972 (François a alors 13 ans), avec une épouse (de substitution) qu’il n’aurait absolument pas fallu, ni au mari Albert, ni à l’enfant François ; et mettant alors fin à la vie « plus conjugale que familiale« , que mena, entre 1967 et 1972, François avec son père : « Depuis mon jeune âge, j’avais pris en effet l’habitude de dormir avec lui et de chercher son contact, restant sur ses genoux après le déjeuner, reniflant l’odeur de son pyjama dans le lit. » L’auteur de 2020 commentant  malicieusement : « Il faut dire aux lecteurs suspicieux qu’un père juif est souvent une mère normale« , page 172… On comprend donc bien ce que peut ici signifier l’expression puissante d’« amour trahi« , page 184, sous la plume magnifiquement subtile du narrateur rétrospectif (et pardonnant tout à son père suicidé : le 16 juillet 1998) de 2020 Avant de partir _ en 1976 _, je brûlai toutes les lettres que je lui avais écrites et je ne revins jamais chez lui, ou plutôt chez eux » _ à Limoges, donc, tant que dura ce troisième et ultime mariage d’Albert (« Ce mariage fut un désastre qui dura longtemps _ de 1972 à 1977-78, probablement _, la supposée mère révélant son instabilité mentale par des crises cycliques, provoquant des hurlements et des insultes nocturnes, prolongés par des actes de violence. Rien n’échappait à sa fureur destructrice« , lit-on, pages 182-183 ;  cependant, c’est probablement après la fin de ce troisième mariage d’Albert, fin advenue probablement avant 1980 (voir plus bas), que François recueillera, probablement en 1980, si l’on se fie aux « quarante années«  écoulées qui sont évoquées, au présent du récit du narrateur en 2020, entre l’enregistrement des 10 heures de confidences d’Albert à son fils, et ce présent du récit de 2020, selon cette indication de la page 61, en ces si précieuses 10 heures d’enregistrement sur un petit magnétophone à cassettes, de l’extraordinaire récit des six ans de guerre d’Albert, le père prisonnier et s’évadant et étant repris à plusieurs reprises, principalement en Silésie aujourd’hui polonaise : « Nous avions pris nos distances, toi et moi _ c’est au présent de son récit, en 2020, que François Noudelmann s’adresse ici par la pensée à son père disparu, par suicide (avec « un pistolet à grenailles« , page 158), le 16 juillet 1998 _, lorsque je voulus forcer ta vérité _ c’est donc François qui prit l’initiative de cela, retournant alors, peut-être à cette fin, chez son père, demeuré en Limousin… Je cherchais _ voilà, en 1980, François Noudelmann a alors 21 ans… _ le cadavre planqué sous le parquet de ta vie _ enfin, désormais, depuis qu’Albert étaist redevenu solitaire… _ bien rangée _ et même quasi vide _, et ne me contentais pas du mot de résilience qui rassure et qui écrase. Pour quelle raison tu acceptas de déroger à ce mutisme tellement maîtrisé qu’il passait inaperçu autour de toi, je ne le sais toujours pas. Tu consentis à une parole fleuve qui fut une « confidence », car elle supposait à la fois du secret et de la confiance _ envers François, son fils. As-tu voulu retrouver ainsi notre intimité _ voilà : filiale, d’entre 1967 et 1972 _ trahie _ par le calamiteux remariage d’Albert, en 1972, et le départ du domicile de Lyon pour Limoges… _, ou as-tu cherché à réintégrer _ en une identité décidément malmenée… _ une part de ton existence que tu avais soigneusement comprimée, empaquetée, refoulée ? Tu délivras ce récit en un seul flot, dix heures durant, et une fois pour toutes, sans plus jamais le répéter, et le petit magnétophone à cassettes que tu m’avais offert pour mes dix ans _ en décembre 1968, donc _ servit _ douze ans plus tard ; et François, le récipiendaire de ce récit tellement important, avait alors vingt-deux ans… _ à l’enregistrer. Pendant quarante années _ en remontant à partir de cette écriture-ci, en 2020, cela fait 1980... _, je n’ai jamais songé à le transcrire, ni à le transmettre, parce qu’il fut un geste confidentiel _ et comme de réconciliation, à travers la distance de leurs vies désormais séparées l’une de l’autre _, accompli d’un père à un fils, non communicable. Peut-être n’avais-je pas envie de le partager, conservant ainsi la complicité exclusive _ voilà _ que j’avais entretenue avec toi depuis l’enfance _ voilà, voilà. Peut-être ne voulais-je pas non plus m’identifier à ce vécu _ de Juif ostracisé _, soucieux de maintenir à mon tour l’innocuité de ce passé clandestin _ et vigoureusement tu, de victime de sa judéité. Alors que cette parole devait rester entre toi et moi, je l’entends autrement à présent _ en cette écriture pensante et creusante, si finement, de 2020 _ et sans doute fallait-il que mes oreilles se tapissent d’abord d’une couche de temps qui rende ta voix un peu étrangère, et que la poigne des affects se desserre. Tel est le paradoxe de pouvoir accéder au discours transmissible d’un père lorsqu’on s’en est détaché, ce qui s’appelle, probablement, devenir adulte _ oui _, et il n’est jamais trop tard pour y arriver _ en effet : penser vraiment possède un tel pouvoir de « reprise » correctrice et comprise. Afin de te comprendre aujourd’hui _ en 2020 _, et d’entendre _ en vérité _ ce que tu dis et ce que tu caches, je dois te ventriloquer _ en cette expérience d’écriture exploratrice et révélatrice magnifique, de 2020 _, parler pour toi en continuant de m’adresser à toi, car cette confidence ponctuelle  _ de 1980 _, non destinée à la publication, ne s’adressait à personne d’autre _ que le fils, François _ et n’avait pas vocation à entrer dans une enquête _ nous y voici ! _  sur l’identité française » _ ce qu’est fondamentalement ce magnifique et si profond livre qu’est ce « Les enfants de Cadillac«  _, a-t-on pu découvrir, pages 60-61-62, pour ce qui concerne cette intimité quasi conjugale entre Albert, le père, et François, le fils… _ ;

_ 3) et les compagnes (?) du très discret François Noudelmann, dont, surtout, la mère des deux enfants qui l’ont accompagné et se sont installés au moins une année avec lui aux États-Unis (à New-York ?), peu après le suicide d’Albert, qui avait eu lieu, à Limoges, le 16 juillet 1998 : « à la fin du siècle dernier, nous _ comment s’appelle-t-elle donc ? Cela demeure tu… _ nous y sommes installés en couple _ voilà _ avec nos deux enfants _ non prénommés dans le récit, eux non plus ; tout au plus « mes enfants jouaient au base-ball« , lit-on page 217… _, vivant pour la première fois dans une maison _ et non plus en un appartement, comme jusqu’alors… _, comme des pionniers imaginaires, prêts à mener la vie conventionnelle de nouveaux arrivants qui veulent s’intégrer au melting pot. Tout en cherchant à fuir le souvenir du suicidé _ de 1998 _, ayant résolu de bannir toute photographie ou lettre de mon père – ce qui fut le cas jusqu’à aujourd’hui -, je me rejouais le film des immigrants juifs arrivant à New-York _ via le sas d’Ellis Island. Le scénario généalogique m’attendait _ déjà alors, avant 2000 _ comme le bonbon qu’un enfant ne résiste pas à croquer« , lit-on aux pages 216-217.

Mais « Cette vita nuova _ new-yorkaise de 1999 ? _ se nourrissait d’un récit contradictoire qui visait, dans le même temps, à oublier une parenté disparue et à retrouver une impulsion généalogique lointaine _ celle du grand-père Chaïm fuyant, vers l’Ouest, les pogroms de Lithuanie, en 1909. Et lorsque la mythologie gouverne une existence, la névrose n’est jamais loin, surtout quand elle se pare d’une recherche de l’origine authentique, la meilleure alliée de la mauvaise foi « , lit-on ensuite, page 218.

Avec cet aboutissement immédiat-ci : « Sans doute n’étais-je pas prêt à imposer cette fiction personnelle à mon entourage _ épouse et enfants, voilà… _ et, pendant les vingt ans _ dates à préciser : 2000 -2020 ?.. _ qui suivirent le retour à Paris _ en 2000 ? _, je me suis mais sans mon entourage, demeuré, lui, sinon à Paris, du moins en France… _ divisé entre la France et les États-Unis, par d’incessants allers-retours et séjours temporaires _ universitaires là-bas… La vie pendulaire avait du bon, avec ses départs enthousiastes _ là-bas, loin, en Amérique… _ et ses douces rentrées _ ici, en douce France…

 (…) 

Je trouvais mon chemin entre l’idéal des voyageurs que décrit Baudelaire, ceux qui « partent pour partir«  _ cf son beau poème « Le Port«  _, et l’expérience de l’altérité préférée _ et expérimentée _ par Lévi-Strauss _cf, pour commencer, le récit de « Tristes tropiques«   _, qui recherchait la plongée dans des cultures différentes. La joie de changer de perspective _ d’abord géographique _ correspond, à une échelle modeste, au regard éloigné des anthropologues. Briser ses propres représentations, se rapprocher du plus distant puis, en retour, percevoir ce qui était proche avec les yeux du lointain, voilà qui déracine l’esprit et le libère de ses stéréotypes » _ soit l’hygiène la plus saine et la plus juste du penser, du ressentir et du vivre, découverte, élaborée et construite-déconstruite peu à peu par François Noudelmann toutes ces années-là… _, lit-on, superbement exprimé ainsi, page 219.

Voilà pour débuter cette recherche de précisions factuelles _ selon ma méthode de curiosité de lecture sainte-beuvienne, du qui ? où ? quand ? comment ?.. _, ce lundi.

Et à suivre, bien sûr…

Ce lundi 22 mai 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

En retombant sur un article du 14 juin 2019 comparant podcast et vidéo de mon entretien du 23 mai 2019 avec Hélène Cixous autour de son « 1938, nuits » : une remarque au passage sur une bien intéressante théâtralité ouverte naturelle de l’autrice…

12avr

En retombant sur un de mes anciens articles (du 14 juin 2019)
concernant l’un peu étrange différence entre écoute du podcast et regard de la vidéo de mon entretien avec Hélène Cixous du 23 mai 2019 à à propos de son « 1938, nuits »
il me semble que les remarques que j’’y faisais autour d’une certaine « théâtralité naturelle » – de l’autrice ? de la personne ? de leur articulation même, plus fondamentalement… – pourraient un peu largement intéresser…
 
Ce qui m’apparaît comme une certaine singularité-Cixous au cœur de sa poîétique même me semble ainsi assez fascinante…
 
Peut-être du fait de mon angle d’approche – sainte-beuvien en son départ du moins – des liens, mais non réducteurs bien sûr, entre « l’œuvre et la personne », et son histoire singulière…
Mon article effleurant déjà un peu cela…
 
Bref, l’œuvre-Cixous toujours et toujours poursuivi et continué-rabouté offre un passionnant profus trésor de lectures…
Comme l’inépuisable œuvre-Montaigne, et l’inépuisable œuvre-Proust, pour commencer…
 
Pour d’infinis entretiens en miroirs ouverts, inscrits dans l’écriture même, déjà :
« Indiligent lecteur, quitte ce livre » dans et par lequel je viens aussi m’adresser à toi…
Ce mercredi 12 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Ravel et le rare trésor des correspondances privées : d’étranges réticences à la recherche des cousinages cibouro-luziens du génial (et si discret et si humble) compositeur basque

07avr

La passion des correspondances privées m’est arrivée par surprise :

par l’idée-désir de participer très activement (et assez originalement _ dans les pas d’un Sainte-Beuve s’intéressant aux liens secrets entre l’œuvre et la vie d’un créateur _ à la composition d’un programme de concert et de disque, à l’occasion du 300e anniversaire de la mort de Jean de La Fontaine, en 1995, à un moment où j’étais « conseiller artistique » de La Simphonie du Marais et son chef, Hugo Reyne, et sur la proposition qui en était faite, en ma présence _ j’étais récitant pour un concert de La Simphonie du Marais dans l’abbatiale de Saint-Michel-en-Thiérache _, par Jean-Michel Verneiges, pour le Conseil général de l’Aisne, le département de naissance de La Fontaine (natif de Château-Thierry, à l’extrémité méridionale de ce département…)  ;

soit bâtir tout un programme _ de concert et de disque _ sur le fil conducteur de sa très puissante passion, avérée toute sa vie, de sa première à sa dernière lettre (toutes deux adressées à son ami de jeunesse Maucroy), pour la musique…

En conséquence de quoi, j’ai commencé par lire les biographies existantes de La Fontaine, et, surtout, j’ai entrepris de relever très méthodiquement, dans les deux volumes des Œuvres complètes de La Fontaine, tout _ absolument tout ! _ ce qui concernait, sous la plume de l’écrivain-poète, et sous le moindre des rapports, la musique.

Et en ont résulté plusieurs importants concerts _ à l’Auditorium de la Bibliothèque Nationale, pour la clôture de l’année La Fontaine ; à Laon, la préfecture du département de naissance de La Fontaine, l’Aisne ; etc. _, pour cette « année La Fontaine« , 1995 ;

et le CD _ tout simplement merveilleux ! _  EMI-Virgin « Un Portrait musical de Jean de La Fontaine« .

Puis, j’ai entrepris un semblable travail de recherche, à partir des biographies de Madame de Sévigné, et surtout des trois volumes de la Bibliothèque de la Pléïade de sa Correspondance _ principalement, mais pas exclusivement, à sa fille, Madame de Grignan _ pour ce qui concernait sa passion, à elle aussi, la marquise _ qui adorait chanter ! _, comme pour La Fontaine _ tous deux étaient des amis fidèles de cet homme de très grand goût qu’était le Sur-Intendant Nicolas Fouquet _ de la musique,

en vue d’un semblable projet de programme de concerts et de CD : au fil des jours de la marquise…

Le projet, in fine, n’a pas abouti jusque là ; ne s’est pas réalisé _ pas de concerts, ni de CD _ ;

mais j’avais découvert pour toute ma vie la valeur inestimable des correspondances intimes et privées, pour obtenir un juste regard « de côté« , profond, sur un créateur singulier, à côté de son œuvre principale même…

Quand est parvenue entre mes mains la Correspondance de Maurice Ravel réunie et publié par Manuel Cornejo,

c’est une nouvelle fois un angle un peu de biais que j’ai choisi pour orienter mon regard sur Ravel : relever tout ce qui relevait, en ces lettres, de la présence, et sous quelque forme que ce soit, du pays basque ; soit le pays (presque par hasard) natal de Maurice Ravel, né le 7 mars 1875 à Ciboure, la ville natale de sa mère, Marie Delouart (Ciboure, 24 mars 1840 – Paris, 5 janvier 1917), qui avait fait, enceinte, le voyage de Paris, où elle était domiciliée auprès de son mari, Joseph Ravel, à Ciboure, probablement pour revoir une dernière fois sa mère Sabine Delouart (Ciboure, 11 mars 1809 – Ciboure, 22 décembre 1874) très gravement malade _ celle-ci est décédée à Ciboure le 22 décembre 1874 : soit 2 mois et 13  jours avant l’accouchement, par Marie Delouart, du petit Maurice Ravel, à Ciboure… _, puis s’occuper de ce que sa mère laissait ;

et ensuite demeurer à Ciboure auprès de la tante de sa mère, Gachucha Billac (Ciboure, 15 mai 1824 – Saint-Jean-de-Luz, 17 décembre 1902) ; au domicile de laquelle (une loge de concierge dans la superbe maison Estebenia) Marie Delouart-Ravel accouchera du petit Maurice le 7 mars 1875…

L’intérêt inestimable et magnifique des correspondanes privées et intimes, est qu’en elles, en effet, tout de la vie, des préoccupations, sentiments et pensées de leur auteur, se mêle et s’entremêle, joliment ; et qu’y abondent, au passage, de sublimes détails qui n’intéressent en rien la plupart des lecteurs, et même des biographes, focalisés qu’ils sont sur ce qu’eux jugent constituer l’essentiel de la vie, de la personne et de la personnalité, ainsi que de l’œuvre admirable de leur auteur ; mais qui sont autant d’infiniment précieux trésors pour celui qui, parvenant à les extraire de leur gangue de grise banalité apparente,vient les faire palpiter de merveilleux éclats de lumière _ ou l’art du biographe…  

Je suis donc un traqueur de détails, et même de micro-détails ;

qui me feront de passionnants judicieux indices afin de découvrir un peu plus loin et un peu à côté de ce que beaucoup de biographes jugent le principal, des facettes un peu plus secrètes de l’auteur de la lettre, au-delà de la quotidienneté prosaïque apparemment inessentielle de celle-ci…

Dans le cas de la vie et de l’œuvre de Maurice Ravel, et de son ancrage familial,

par l’ancrage foncièrement basque de sa mère, Marie Delouart,

je demeure tout simplement stupéfait que personne jusqu’ici n’a jamais manifesté, à Ciboure comme à Saint-Jean-de-Luz, la moindre curiosité envers ce que je nomme « les cousinages cibouro-luziens » de Maurice Ravel ;

même si, et j’y viens, l’affaire était ici un peu délicate dans la mesure où la mère de Maurice Ravel, Marie Delouart, était née (le 24 mars 1840, à Ciboure) de père inconnu ; où la grand-mère maternelle de Ravel, Sabine Delouart, était née (le 11 mars 1809, à Ciboure) de père inconnu :

son arrière-grand-mère maternelle, Marie-Baptiste Delouart (née le 29 juin 1782) étant la première _ en remontant vers l’amont la lignée féminine dont Maurice Ravel est le fruit (à Ciboure, le 7 mars 1875) _ à être née d’un père connu et légitime : Gratien Delouart (Ciboure, 1er mai 1748 – Ciboure, 21 août 1798), marin, fils de marin… 

Cette stupeur mienne étant renforcée du peu _ et c’est un euphémisme pour signifier son absence absolue ! _ de coopération rencontrée de la part de la pourtant extrêmement active Association de recherche patrimoniale Jakintza, dont le siège se trouve à Ciboure, et au rez-de-chaussée de la maison même où est né Maurice Ravel !, en ma recherche patiente et assidue _ et féconde ! _ de ces « cousinages cibouro-luziens » de Maurice Ravel..

Ce qui laisse émerger, en quelques recoins de mon cerveau, peut-être d’autres raisons, non dites _ solidement retenues _, à pareille réticence de leur part à une telle recherche des cousins basques de ce génial _ et modeste, humble, discret, secret _ artiste musicien qu’a été Maurice Ravel…

À suivre…

Ce mercredi 7 avril 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

Mathias Enard, ou le creuseur pudique : face à l’énigme de l’oeuvre et les secrets du coeur (à partir de l’exemple de Michel-Ange à Rome _ et Istanbul !!!)

11sept

Voici, ce jour, une réflexion sur la présentation par Mathias Énard de son roman-fable-enquête Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants

soit un essai _ de réflexion artistique, entée sur des recherches d’érudition, tant à Rome (Mathias Énard fut pensionnaire de la Villa Médicis en 2005-2006) qu’à Istanbul, et très « en profondeur« , la réflexion artistique comme la recherche documentaire, de la part du probe, fin et patient Mathias Énard _ pour combler un trou de quatre mois dans la biographie de Michel-Ange :

d’avril 1506

_ quand, fuyant Rome (« Michel-Ange a quitté Rome sur un coup de tête, le samedi 17 avril, la veille de la pose de la première pierre de la nouvelle basilique San Pietro« , page 13), suite à une mésentente grave avec son employeur-commanditaire l’assurément peu commode pape-guerrier Jules II (« Il était allé pour la cinquième fois consécutive prier le pape de bien vouloir honorer sa promesse d’argent frais. On l’a jeté dehors« , ibidem…), le sculpteur, florentin, vient se réfugier à Florence, auprès des Médicis _,

à septembre 1506

_ on retrouve en effet le sculpteur à Bologne (possession pontificale, mais à ce moment-là en révolte contre l’autorité du pape), au mois de septembre 1506 ; deux mois plus tard, le 10 novembre 1506, Jules II reconquiert par les armes cette cité (qu’il connaît bien pour en avoir été jadis le cardinal-évêque : de 1483 à 1499) ; et très vite le pape et l’artiste se seront réconciliés ; mais, plutôt que de continuer à faire travailler en priorité le sculpteur au projet de son gigantesque tombeau pour la nouvelle basilique Saint-Pierre, Jules II préfère (l’architecte Bramante souhaitant aussi éloigner Michel-Ange _ un rival _ du chantier de la reconstruction de Saint-Pierre) lui confier la mission _ titanesque _ de peindre l’immense plafond de la chapelle sixtine : Jules II s’en soucie tout spécialement, en effet, car la chapelle sixtine, construite de 1477 à 1483, est une création de son oncle, le pape Sixte IV della Rovere (pape de 1471 à 1484) ; mais le bâtiment vient de souffrir d’importants dégâts causés par de récentes constructions adjacentes (d’une part, l’édification des appartements Borgia, pour le pape Alexandre VI ; d’autre part, le chantier _ colossal _ de la réfection de Saint-Pierre, qui avait débuté le 18 avril 1506) ; et c’est Michel-Ange, le peintre, qui va se consacrer à ce plafond de la Sixtine, de mai 1508 à octobre 1512…

présentation

donnée le mercredi 8 septembre 2010, dans les salons Albert-Mollat,

en dialogue avec Francis Lippa…

Rencontrer _ in vivo ! _ un artiste qu’on a un peu essayé de bien lire _ et qu’on va continuer d’essayer de bien lire : car en ce cas de l’artiste (« vrai« , donc !) Mathias Énard, l’œuvre (vraie ! ainsi qu’elle se révèle à l’épreuve de cette lecture…) ne se réduit certes pas à ce qui pourrait, d’elle, se résumer : elle y résiste et tient la route « vraiment«  ! c’est en cela qu’elle est, chose toujours un peu rare (et digne d’admiration !), une « œuvre vraie« _ ;

et avoir la chance, en plus, de disposer d’un peu le temps afin de s’entretenir (un peu, ici encore : une bonne heure et demi…), de dialoguer avec lui _ le podcast de l’entretien dure 62 minutes _, sur ce qui anime la démarche d’où sourd, jaillit, procède son propre créer,


c’est avancer un peu sur ce que Gaëtan Picon et Albert Skira formulèrent, naguère _ magnifiquement ! _, comme « les sentiers _ ce ne sont pas des boulevards ! _ de la création«  _ et que s’efforce de prospecter, modestement et en douceur (forcément ! rien ne s’y obtient en « forçant«  !), la poïétique :

sur ce chantier, j’essaie de mettre quelques petits pas, ici-même, en ce blog-ci, dans ceux, si fins, d’un Paul Valéry, ou d’un Gaston Bachelard, hier, d’une Baldine Saint-Girons, aujourd’hui (cf son tout récent et très important Le Pouvoir esthétique, aux Éditions Manucius : une analyse ultra-fine et lumineuse des pouvoirs sur la sensibilité !)… _ ;

et qu’ils entamèrent d’éclairer-explorer, avec une merveilleuse délicatesse _ quels trésors recèle la collection de ce nom, « les sentiers de la création« , aux Éditions Skira ; hélas interrompue ; et somnolant désormais sous une pellicule plus ou moins fine de poussière dans les bibliothèques, quand elle ne sollicite pas plus activement les « actes esthétiques«  _ pour reprendre le concept de Baldine Saint-Girons en son précédent maître-livre, L’Acte esthétique, aux Éditions Klincksieck _ d’un peu actives mises à contribution, fécondes, d’une culture vive : en chantier (musaïque) de création…

Eh bien voilà la chance qui m’est échue en l’espèce de la rencontre,

mercredi après-midi dernier, 8 septembre, sur l’estrade des salons Albert-Mollat,

en l’espèce d’un dialogue (nourri de curiosités ajointées)

avec l’auteur

et de Zone, et de Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants,

ce creuseur d’énigmes magnifique

qu’est le très patient et tranquille, solide, posé, Mathias Énard…

En ce dernier opus _ dont le chantier lui a pris au moins deux années, depuis l’amorce de l’« idée« , lors de son séjour romain (en 2005-2006) à la Villa Médicis, nous a-t-il confié, en mettant la main, en la (belle) bibliothèque de la Villa, sur le volume des Vies… de Vasari comportant le récit de la vie de Michel-Ange, puisque c’est ainsi que démarra l’enquête !.. ; et dont le fruit, ce livre-ci, Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants, vient de paraître ce mois d’août aux Éditions Actes-sud _,

c’est à l’énigme de la création si puissante de Michel-Ange _ sculpteur, peintre, architecte ; ainsi que poète : ses Sonnets et (autres Poésies : Madrigaux, Poésies funéraires, Épigrammes, Élégies, Canzone, ainsi que Stances…) franchissent trop peu le seuil de la connaissance (et a fortiori celui de la délectation) des amateurs d’Art : considérablement moins que son œuvre plastique, en tout cas ! _ que vient se confronter la curiosité probe, patiente, et plus encore profonde, du chercheur-artiste, ou artiste-chercheur _ puisque c’est surtout ce processus-là que les circonstances de son parcours l’ont un peu amené à privilégier, désormais, comme lui-même, en parfaite simplicité, l’a indiqué, spontanément mercredi, en prenant des distances avec les missions universitaires auxquelles il s’était d’abord plié et adonné _, Mathias Énard.

A qui se demande

comment l’auteur-artiste passe du souffle formidable, (quasi) d’un seul tenant

_ ou d’une seule « tenue«  de la part de qui narre : en une phrase unique, « dans le souffle« , d’un narrateur (tel que celui de Zone…), qui (se) repasse (mentalement) en revue, lors d’un voyage en train (récapitulatif !), entre les gares de Milan et de Rome, toute la complexité où s’est faite (construite) et défaite (déconstruite) sa vie _ a-t-il une œuvre, lui ?.. c’est un agent auxiliaire, de grade subalterne… _, et, en particulier, ses relations (complexes et parfois d’une violence extrême) aux autres, de travail _ pas mal en Orient : voilà pour l’« éléphant«  ! _, de guerre _ voilà pour les « batailles«  et pour les « rois«  ! _, et aussi (avec ses trois compagnes successives, en particulier) d’« amour«  _ « et autres choses semblables« , ainsi que Rudyard Kipling se l’est entendu dire de son interlocuteur l’aède indien, dans Au hasard de la vie ; ainsi que le rapporte l’épigraphe de Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants _ : mais avec quelles finesses d’inflexions (d’hémioles, dirait-on en musique) : c’est un chef d’œuvre walt-whitmanien que cette coulée une et unique de souffle ! _,

comment l’auteur-artiste passe du souffle formidable, (quasi) d’un seul tenant

_ de narration se confrontant (lui et son Soi en gestation) à l’étrangeté poignante (et difficultueuse) de l’altérité ! quasi monstrueuse, en son pouvoir de fascination… _

des 516 pages de Zone,

au feuilletage discret, léger, rapide _ mais toujours aussi fort et puissant ! _,

des feuilles de carnet (de recherche de traces _ en vue d’approcher, lui, d’un peu mieux éclairer, sinon percer à jour vraiment, pour lui, les énigmes de sens d’une œuvre si riche en une vie d’artiste si étendue et si féconde en chefs d’œuvre, et si divers, que l’œuvre colossal de Michel-Ange… _ en bibliothèques et archives, principalement à Rome _ aux Archives vaticanes _ et, ensuite aussi, à Istanbul _ aux Archives de l’empire ottoman _) du narrateur-chercheur-reconstitueur (en son penser),

mais qui apprend à méditer aussi _ pour lui ; et pour nous lecteurs, à sa suite, qui sommes conviés au récit tout à fait provoquant de sa recherche, en la curiosité stimulée, à notre tour, de notre lecture… _, sur les signes évanescents

_ presque complètement silencieux (ils ne sont pas bavards d’eux-mêmes : il faut y être attentif pour espérer accéder à si peu que ce soit de ce qu’ils laissent transparaître, tout de même, de leurs puissants secrets…) _,

de l’Art,

des 155 pages, allegro vivace, de Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants,

à qui s’interroge, donc,

la réponse de l’auteur-artiste,

dans l’en-direct vivant du dialogue improvisé,

se fait toute simple (et sans le moindre chi-chi, a fortiori) :

chaque livre a le nombre de pages

et le style

que lui donne, tout simplement, son sujet _ c’est-à-dire le questionnement à propos d’une énigme ! _ qui vient s’emparer de lui _ devenant l’enquêteur _,

et qui l’attelle, un bon moment, à sa mission de le mettre (= donner, offrir, rendre), ce sujet « prenant » _ cette énigme à éclairer un peu ! puis l’enquête sur elle, en l’altérité de ce à quoi celle-ci ose venir se mesurer… _, par écrit, en son écrire (de narration) :

musical _ d’où la verve du rythme du récit…

Ainsi,

si Zone a été l’achèvement en forme d’apothéose faulknérienne (à mes yeux, du moins) de la recherche de Mathias Énard à propos de l’énigme si profondément entée en nous, en leurs séquelles qui paraissent ne plus bien vouloir accepter d’en finir « vraiment« , des guerres (intestines fratricides) du XXème siècle sur le continent européen (et ses appendices sud- et est- méditerranéens…),


ainsi, donc,

voici qu’aujourd’hui Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants apparaît _ au lecteur passionné (et fouilleur patient aussi : mobilisé…) que je suis… _ comme la confrontation de la curiosité probe et ultra-fine de Mathias Énard

avec l’énigme des liens entre

le Grand Art du génie de l’artiste-à-l’œuvre connu de nous sous le nom de Michel-Ange,

d’une part ;

et,

d’autre part,

les frémissements secrets _ tant aux autres (l’homme est un taiseux) qu’à lui-même aussi, pour le plus enfoui… _ du cœur de l’homme de chair, avec ses puissantes pulsions (dans les parages de l’Autre !), qu’il était

en sa vie d’homme…

L’homme et l’artiste ;

la vie et l’œuvre _ en tensions complexes à démêler à l’infini ;

sus au simplisme !

Cf

et apprendre à méditer sur cela,

par exemple, le célèbre mais trop mal compris trop souvent

Contre Sainte-Beuve de Marcel Proust…

Car

c’est l’Art qui crée en partie importante _ ça n’est jamais ex nihilo, non plus… _ la singularité

qui va se construire (mais pas mécaniquement !) de l’artiste !

L’artiste découvrant lui aussi peu à peu ce processus _ expressif, sur ces denses et compliqués aventureux « sentiers de la création«  _ de métamorphose _ de son Soi _ qui le traverse et le déborde _ lui, son (petit) Moi, ainsi que les pulsions (sauvages) de son Ça ; et aussi son Sur-Moi… ; cf aussi Nietzsche : sur « la petite«  et « la grande raison« , in l’important Aux Contempteurs du corps, au livre premier d’Ainsi parlait Zarathoustra _ et lui échappe en grande partie _ aussi lucide s’efforce-t-il de devenir ! Bataille qualifie très justement ce processus de création d’« impouvoir«  (de l’artiste)_,

en son regard, plus ou moins acéré, et questionnant _ interrogateur _ aussi ce qu’il fait _ et pas seulement l’altérité à laquelle il ose, aventurier, se confronter…


C’est avec infiniment d’humilité (et douceur tranquille, en son intranquillité même ! _ à l’écritoire…) que Mathias Énard approche la lumière de sa bougie

(artisanale : il la compose de tout ce qu’il peut assembler-rassembler _ en partie, aussi, comme il se doit (et cela comme pour tout un chacun d’entre nous tous), de bric et de broc : avec les divers moyens du bord !.. _ en sa culture et historique et artistique : très fouillées et très fines, les deux _ un travail de micro-chirurgie !)

Mathias Énard approche la lumière de sa bougie

_ avec tout ce que lui a appris sa propre longue et lente fréquentation, intense, passionnée, infusée et murie, et de la Perse

et de la Turquie :

d’où la rencontre, ici, sur ces pages au moins, de Michel-Ange

avec le calligraphe-poète

(et secrétaire, au Divan, du grand vizir Atik Ali Pacha),

Mesihi :

Mesihi dont il pense, même, identifier les traits

en la figure et le corps déployé

d’Adam

sur le sublime plafond de la Sixtine… ;

Mathias Énard nous a-t-il ainsi confié en cette belle conférence de mercredi ! et c’en fut là un temps très fort !!! _


Mathias Énard approche la lumière de sa bougie, donc

_ je reprends et poursuis _,

de cette énigme de l’œuvre _ sidérant, il est vrai _ michel-angelesque _ quelle poigne ! _,

sans chercher _ certes pas ! _, à réduire _ nous sommes ici à mille lieux d’un réductionnisme grossier et  vulgaire ! _ cet Art _ de l’artiste ! _

au misérable « petit tas de secrets » de l’homme en sa vie,

et ses rencontres (de tous genres !),

avec leur part (déjà) ombreuse,

sinon sombre _ voire carrément noire… _

d’altérité.


C’est à l’aune de l’Idéal d’Art,

très haut, et très puissant,

bien au contraire,

que Mathias Énard envisage et aboute les brindilles des rencontres _ glanées en sa recherche d’archives, ou bien imaginées : par les secours conjugués de sa culture et de son propre imaginer d’écrivain ! _ de la vie d’homme de notre « Michelagnolo Buonarroti« …

Au-delà des circonstances, déjà hautes en couleurs et batailleuses, des rapports de l’artiste commandité avec ses très hauts et très puissants commanditaires (chefs de guerre manieurs de sabre : comme le furent et Jules II della Rovere et Bayazid II de la dynastie des Osmanli),

c’est au côtoiement (et aboutage) incommensurablement plus fin et plus complexe des sensibilités du poète et calligraphe _ Mathias Énard met l’accent sur cette part fondamentale de cet art, dont hélas rien (de son pinceau et de sa main…) n’aura été préservé-conservé, pour nous _ Mesihi (né à Pristina, au Kosovo, vers 1470 ; et mort le 30 juillet 1512 à Istanbul : moins d’un an après la mort sur le champ de bataille de Gökçay, le 5 août 1511, de son protecteur le grand vizir Atik Ali Pacha)

et de l’artiste multiforme Michel-Ange (né au château de Caprese, près d’Arezzo, le 3 mars 1475 ; et mort à Rome le 18 février 1564)

_ Mesihi avait environ trente-six ans ; et Michel-Ange, trente-et-un _

que nous fait nous approcher, en son écriture _ d’enquête _ précise, rapide et légère, probe _ très loin tant de la moindre complaisance à la rhétorique que de l’hystérie _ le pudique, mais très patiemment curieux chercheur de sens et de beauté _ les deux conjoints : c’est un artiste ! _, Mathias Énard,

en ce superbe bijou qu’est Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants

Et l’auteur lui-même de se pourlécher à l’avance _ avec nous _ de ce que la gent _ un peu trop, parfois, ou souvent _ pressée _ par utilitarisme ! _ de la meute journalistique _ ah l’inculture du résultat !.. _

va très bientôt _ « un mois« , a-t-il même estimé mercredi 8 septembre… _ intégrer désormais dans sa bio officielle de Michel-Ange

le séjour stambouliote et le début de construction de « son » pont sur la Corne d’Or,

à la façon dont des lecteurs des Onze de Pierre Michon ont accouru en nombre contempler au Louvre le tableau qui y était décrit en ses plus menus détails… ;

ou à celle dont le malheureux _ pressé et sectateur de l’utilitarisme de l’efficacité, probablement, lui aussi : Time is money ! _ expert en économie internationale (des Affaires) qui fréquente les allées du pouvoir, a plagié, à propos de l’œuvre rédigé de Spinoza, notre confrère philosophe bordelais, Patrick Rödel, pour son Spinoza, ou le masque de la sagesse (aux Éditions Climats : la couverture prévenait pourtant : « biographie imaginaire » !) : ouaf ! ouaf ! ouaf !



Tel est donc, avec deux jours et deux nuits (de réflexion-méditation) de recul,

ce que je puise

dans ma rencontre-conversation avec ce créateur-artiste passionnant important qu’est Mathias Énard.


Titus Curiosus, ce 11 septembre 2010

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