Mai réhabilité ? ou pas ?

— Ecrit le jeudi 1 mars 2018 dans la rubriqueHistoire”.

Ce soir 1er mars 2018,

une intéressante chronique de Laurent Joffrin, dans Libération,

intitulée Mai Réhabilité.

La voici :

C’est un pavé dans la mare nostalgico-réac : Mai 68, contre toute attente zemmourienne, est populaire. Dans un sondage publié par le Nouveau Magazine littéraire, qui défend courageusement la culture progressiste malmenée de toutes parts, on apprend que 79% des personnes interrogées pensent que Mai 68 a eu des conséquences positives _ bien que très générale (et vague), la formule comporte du sens. Après tant de philippiques, de dénonciations, de pseudo-démythifications _ à la Luc Ferry et consorts _, le chiffre apporte un démenti cinglant aux procureurs de la révolte. A bien y réfléchir, cette surprise _ voilà _ s’explique. Il faut pour la comprendre, revenir à la réalité _ historique, en son contexte très précis _ de la révolte, et non aux interprétations cacophoniques qui ont fleuri depuis.

Mai fut une révolte culturelle à l’origine : la jeune génération, étudiante, d’abord, ouvrière ensuite, ne supportait plus les coutumes autoritaires et les préjugés surannés qui dominaient la société française _ en effet. Comme personne ne souhaite, en fait, y revenir _ à cette situation -là d’avant… _, en dehors que quelques éditorialistes passéistes _ proprement réactionnaires _, la libération des mœurs et le refus des hiérarchies autoritaires ont été massivement ratifiés par les Français _ il le semble.

Mai fut aussi, et c’est ce qui fait sa singularité parmi les mouvements contestataires de l’époque, une vaste révolte ouvrière _ oui _, avec à la clé la plus grande grève de l’histoire de France. Plus lucides que bien des analystes, les Français s’en souviennent et approuvent _ probablement _ tout aussi massivement les revendications présentées à l’époque : de meilleurs salaires, une plus grande liberté syndicale, des rapports patrons-salariés moins rigides, une réduction du temps de travail, une association des travailleurs à la marche de l’entreprise. Là encore, personne ne souhaite revenir en arrière _ pas même les ultra-libéraux d’En Marche ?…

Cette approbation ultramajoritaire des conquêtes de 68 _ c’est à discuter-méditer ! _ fait passer au second plan les réserves que suscite l’événement : les errements d’un certain individualisme libertaire, qui donne involontairement la main à l’idéologie libérale _ certes _, les schémas révolutionnaires plaqués _ grossièrement _ par l’extrême gauche sur ce vaste mouvement qui réclamait surtout des réformes _ probablement _, un anti-gaullisme mécanique _ rigide _ qui faisait bon marché du rôle historique de l’homme de la France libre, l’idée naïve et courte selon laquelle une société peut se passer de tout héritage _ oui. Ces excès, au vrai, n’étaient pas au cœur de la révolte _ vraisemblablement. Ils en étaient les scories, les illusions, les outrances _ sans doute. L’essentiel n’était pas là : il s’agissait d’exiger une société plus juste et plus libre _ oui… Le reste n’était que palinodies transitoires complaisamment gonflées par une certaine pensée réactionnaire _ oui. Manifestement _ est-ce aussi évident, cependantt ? _, les Français l’ont compris.

 

Nul doute que ces interrogations vont s’amplifier  dès maintenant, en cet anniversaire d’un demi-siècle.

Pour ma part, je me sens toujours le jeune homme comme j’étais ce mois de joli mois de mai – là…

Ce jeudi 1er mars 2018, Titus curiosus – Francis Lippa

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