A propos de Claudio Magris : petites divergences avec Pierre Assouline _ sur son blog « la république des livres »
29déc
Un article de Pierre Assouline en son blog de « la république des livres« _ sur le site Internet du « Monde »_ m’avait fait presque prendre la plume, pour émettre une protestation _ toute littéraire… _ quant à sa position à l’égard de l’œuvre de ce « géant » qu’est le triestin (et immense européen) Claudio Magris :
il s’agissait d’un article du 13 décembre
_ jour de ma propre conférence à Aix _
intitulé
_ pas très joliment ; et surtout de manière un peu trop « équivoque » _
« Claudio Magris n’en sort pas« ,
quand Magris publie (à L’Arpenteur) un livre, « Vous comprendrez donc« , tournant autour d' »Eurydice », disparue (demeurée aux Enfers) _ et Orphée qui, échouant de l’en ramener, bien difficilement lui survit _ avant de « finir » sauvagement déchiré par les Ménades :
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Marisa Madieri, son épouse (1938 – 1996 _ auteur, notamment, du magnifique « Vert d’eau » _ paru en traduction française aux Editions L’Esprit des péninsules en janvier 2002 :
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Vert d’eau Marisa Madieri , l’Esprit des péninsules , 2002 |
« Sous la forme d’un journal, Marisa Madieri rappelle, avec pudeur et subtilité, l’exil des Italiens d’Istrie, chassés par les Yougoslaves après la Seconde Guerre mondiale. Elle y cherche ses racines, dans une démarche qui tisse, en remontant le temps, un fil d’Ariane vers le passé. Rien n’y resurgit spontanément : « ce magma indistinct, qui, au long des années, s’était accumulé en un fond sombre et refoulé » demande un effort pour être redécouvert.
L’écriture représente cet effort, cette lente gestation confiée au regard de tous. Il en ressort un message clair : la nécessité de cultiver la mémoire, sous peine d’oublier les drames de l’Histoire et se perdre soi-même. Marisa Madieri s’attarde bien volontiers sur le destin des femmes du clan Madieri, plutôt qu’à celui des hommes. Elle passe rapidement sur ce père qui transformait sa vie « en un roman de cape et d’épée, riche d’épisodes, d’aventures, d’exploits, auquel il finit par croire« .
Le livre se construit ainsi : à chaque jour d’écriture correspond un épisode lointain et son pendant dans le présent. Seul l’avenir semble écarté d’emblée : il faut d’abord savoir d’où l’on vient et qui l’on est avant d’entreprendre quoi que soit. Les souvenirs personnels ne sont pas forcément la chose à retenir de ce livre. Il s’agit plutôt d’un discours de la méthode, communiqué comme en testament. Entre l’essai personnel et le récit historique, « Vert d’eau« dénote une grande audace. »
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Frank Mannoni, Le Matricule des anges, 2002.
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Fin de l’incise sur Marisa Madieri – auteur)
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Marisa Madieri, son épouse, n’étant plus de ce monde-ci depuis douze ans,
Claudio Magris donne,
en ce récit qui paraît maintenant en français,
la parole à une Eurydice, choisissant, elle, de demeurer aux Enfers… ;
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Un article intitulé, donc, de manière un peu trop « équivoque » : « Claudio Magris n’en sort pas« …
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De quoi donc ne sort-il donc pas ?
de son deuil ? de son veuvage ? de la douleur de demeurer, Orphée, sans son Eurydice ?
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Qu’on écoute le célèbre air de Gluck « Que faro senza Euridice » _ par exemple par Kathleen Ferrier, ou Janet Baker…
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Que nenni !
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C’est de l’image du succès éditorial de « Danube«
_ vite : les chiffres, s’il vous plaît !.. Et dans le monde entier, toutes langues de traduction (et édition) comprises (!..) _,
que le lecteur « se représentant » l’auteur « Claudio Magris »
_ en sa « marque » de « vente » en quelque sorte, sur les étals _ et en piles, par-dessus le marché !!! _ des librairies (et des super- et hyper- marchés !!!),
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que le lecteur, donc, le lecteur-lambda,
ne parviendrait pas à sortir,
en essayant de lire ce qui a succédé à « Danube« , depuis 1986 (chez Garzanti, en italien) et 1988 (aux Éditions Gallimard)…
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Voici donc le courrier dont je me suis fendu, illico presto :
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De : Titus.Curiosus
Objet : A propos de l’œuvre de Claudio Magris (au-delà de « Danube« ) ; et loin de Bernard Schink
Date : 29 décembre 2008 13:42:37 HNEC
À : Pierre Assouline
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(…)
D’autre part,
je vous ai trouvé passablement injuste, cher Pierre Assouline,
avec Claudio Magris :
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aussi délicieux et probe
en tant qu’auteur
qu’en tant que personne…
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Le juger « auteur d’un seul livre« (fut-ce le riche « Danube« )
est confondre
valeur d’auteur ;
avec succès d’édition _ souvent sur bien des malentendus, ces succès-là, qui plus est !..
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Ainsi qu’injuste
à le lier à un auteur tel que Bernard Schlink (« Le liseur« ) :
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Ce qui revient à en rajouter, si je puis me permettre, au petit-bout de la lorgnette
par lequel vous regardez Claudio Magris
et le présentez
à vos lecteurs !
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Re-lisez donc _ et faites lire !!! _ le merveilleux « Microcosmes« (disponible en Folio) ;
et l’ensemble des essais littéraires de Claudio Magris,
des merveilles d’acuité, finesse, probité et justesse…
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Ainsi, traduits en français :
« Trieste, une identité de frontière« (avec Angelo Ara), au Seuil (en 1991) ;
« Utopie et désenchantement« , à l’Arpenteur (en 2001) ;
« L’Anneau de Clarisse _ grand style et nihilisme dans la littérature moderne« , à L’Esprit des péninsules (en 2003) ;
et aussi « Déplacements« , dans la collection « Voyager avec » _ édité par la Quinzaine Littéraire et Louis Vuitton (en 2001)…
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Tous immenses livres !
A (vingt) mille lieues au-dessus de quelque « Liseur » que ce soit..
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Un très grand Monsieur,
bien cher Pierre Assouline,
et un immense auteur,
que Claudio Magris :
peut-être « le plus grand écrivain européen vivant »…
si jamais pareille appellation avait sens, car le quantitatif _ régnant sur l’ordre du marché et de la marchandise _ n’a pas grand sens, projeté dans la sphère du qualitatif…
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Claudio Magris :
à ne pas trop abîmer,
parmi le tout-venant du reste
de la scène éditoriale
(ou autre)…
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Fidèlement, votre lecteur,
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Titus Curiosus
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Titus Curiosus, ce 29 décembre 2008