Au sein de mon tropisme tchèque, le vif plaisir du CD Supraphon « Jan Novak – Concertos » : une musique de joie, dynamique, heureuse, qui fait aimer la vie…

— Ecrit le vendredi 5 avril 2024 dans la rubriqueBlogs, Musiques”.

C’est un article du magazine Crescendo en date du 11 janvier dernier « Le tchèque Jan Novak honoré par l’authenticité familiale« , sous la plume de Jean Lacroix, qui m’a mis sur la voie de ce superbe CD Supraphon SU 4331-2 « Jan Novak – Concertos« 

_ regarder ici une éclairante rapide vidéo de présentation de ce CD par leurs excellents interprètes : ainsi Clara Novakova qualifie-t-elle la musique de son père Jan Novak d’« optimistic and splendid, conveying a positiv approach to life «  ; son père dont elle dit même qu’il était « a springtime person«  ; le chef Tomas Netopil parlant, quant à lui, d’un style « truly dynamic, very modern, very dancey« …  _,

à propos de l’œuvre de Jan Novak (1921 – 1984), un compositeur assez mal connu de moi jusqu’ici _ toutefois je l’avais découvert avec un précédent CD dirigé par ce même Tomas Netopil à la tête du Prague Radio Symphony Orchestra, le CD « Bohuslav Martinu – Bouquet of Flowers – Jan Novak – Philharmonic Dances« , le CD Supraphon SU4220-2, paru en 2017… _, mais disciple fervent de Bohuslav Martinu (1890 – 1959), que personnellement j’apprécie beaucoup…

Et une nouvelle fois, cela, dans l’attraction de mon fervent tropisme musical tchèque…

Le Tchèque Jan Novák honoré par l’authenticité familiale

LE 11 JANVIER 2024 par Jean Lacroix

Jan Novák (1921-1984) :

Concentus biiugis pour piano à quatre mains et orchestre à cordes ; Choreae vernales, pour flûte, orchestre à cordes, harpe et célesta ; Concerto pour deux pianos et orchestre.

Dora Novak-Wilmington et Karel Košárek, pianos ; Clara Nováková, flûte ; Orchestre symphonique de la Radio de Prague, direction Tomáš Netopil.

2022.

Notice en anglais, en allemand, en français et en russe.

71’ 46’’.

Supraphon SU4331-2.

Né en Moravie _ le 8 avril 1921 à Nová Říše _, le compositeur tchèque Jan Novák étudie la composition au Conservatoire de Brno, cursus contrarié par la guerre qui le contraint au travail obligatoire en Allemagne pendant plus de deux ans. Après le conflit, il poursuit sa formation à l’Académie des Beaux-Arts de Prague avec Pavel Bořkovec (1894-1972), un élève de Josef Suk _ 1874 – 1935. Une bourse lui permet de se perfectionner aux Etats-Unis dès 1947 auprès d’Aaron Copland à Tanglewood, puis de Bohuslav Martinů, exilé à New York, dont Novák est, selon Guy Erismann, le seul élève _ et c’est bien sûr à remarquer. Une rencontre fondamentale _ voilà _ pour ce jeune musicien que l’on retrouve ensuite à Brno, où, bientôt marié, il forme un duo de piano avec son épouse Eliska Hanouskovi, tous deux s’attachant à promouvoir l’œuvre de Martinů, en disgrâce avec le pouvoir. L’épouse se consacre à des concerts, pendant que le mari compose et écrit aussi de la poésie en latin. Mais il est souvent en opposition avec le régime en place, et il est même exclu de la Société des compositeurs tchèques. Lors du Printemps de Prague en 1968, il choisit l’exil au Danemark, avant d’opter pour l’Italie, à Rovereto dans le Trentin, jusqu’en 1977, puis de s’installer en Bavière jusqu’à son décès.

Novák laisse un catalogue orchestral de plusieurs concertos, de la musique de scène, de la musique vocale, dont l’oratorio Didon d’après Virgile que Rafael Kubelik a enregistré (Audite, 2001), de la musique de chambre et des pièces pour clavecin et orgue. On peut découvrir son art à travers des productions assez récentes, grâce aux labels Gallo (musique de chambre, 1999), Horizons (œuvres pour flûte par sa fille Clara Nováková, 2007), Supraphon (pages chorales, 2017), Dux (musique de chambre, 2022), Da Vinci Classics (Balletti a 9, en couplage avec Zandonai, 2023). Il est aussi souvent associé à des pièces de Martinů, et Toccata Classics a proposé en 2022 un premier volume de sa musique orchestrale, où figure le Concentus biiugis par des interprètes tchèques. C’est ce concerto au titre sibyllin qui ouvre le programme du présent album, qu’il faut considérer comme un hommage familial puisque ses filles, la pianiste Dora Novak-Wilmington, qui a étudié avec Vitaly Margulis à Freiburg et à New York avec Rudolf Firkusny, et la flûtiste Clara Nováková, qui a été soliste dans l’Orchestre de chambre de Paris, en sont les interprètes  _ voilà !

Le Concentus biiugis de 1977 est proposé ici en première mondiale dans une version révisée pour orchestre à cordes par Dora Novak-Wilmington. Jan Novák le destinait au duo formé avec son épouse, le terme « biiugis », comme l’explique la notice du compositeur Martin Flašar, étant un mot latin désignant deux animaux attelés ensemble. La fille du compositeur explique : Ce n’est pas une œuvre à quatre mains habituelle, écrite en divisant le clavier, avec le primo qui joue dans l’aigu et le secondo dans le grave : les deux pianos jouent sur le clavier entier. Il faut donc mettre au point une chorégraphie cohérente pour qu’on ne s’emmêle pas les mains et pour que les coups de coudes mutuels soient maintenus dans une limite supportable. Sans aller jusqu’à considérer qu’il s’agit d’une partition pour « adversaires » virtuoses sur un même clavier, l’énergie et la fougue qui s’en dégagent, alliées à des réminiscences de Strawinsky, de Martinů et de folklore morave, sont communicatives _ oui _ et créent un climat jubilatoire _ voilà _, qu’un Lento lyrique avec évocation d’un cymbalum, atténue à peine, alors qu’un réel optimisme semble émerger de cette partition originale qui se termine de façon brillante.

Autre partition pour le clavier que le talentueux couple Novák créa en duo en 1955 à Brno, et dont on possède une émoustillante version live des époux, le 29 mars 1957, avec la Philharmonie tchèque sous la direction de Karel Ančerl, disponible dans un passionnant coffret consacré au chef (Supraphon, 15 CD, 2021). De facture plus classique, inscrit dans la tradition postromantique, le brillant et virtuose Concerto pour deux pianos et orchestre, écrit par un compositeur de 34 ans, installe une joie communicative _ lui aussi _, avec ses grands effets contrastés, ses rythmes emballants et son lyrisme parfois songeur. Bien accueilli par le public de l’époque mais malmené par la critique qui l’estimait conservateur, ce concerto, comme le Concentus biiugis, est magistralement mené par Dora Novak-Wilmington, qui a à chaque fois pour complice Karel Košárek (°1967), qui s’est lui aussi perfectionné aux Etats-Unis après sa formation praguoise.

C’est l’autre fille du compositeur, Clara Nováková qui est l’interprète des Choreae vernales ( ”Danses de printemps”), partition composée en 1977 après le long séjour en Italie du compositeur, qui aimait s’inspirer de poètes latins _ voilà : Catulle, par exemple, était lui aussi un familier du lac de Garde, comme les Novak…. Dédié au départ à Clara, alors adolescente, et à un ami guitariste, Novák l’a ensuite arrangée pour flûte et cordes, avec harpe, célesta. La dédicataire explique que l’on y retrouve la beauté ensoleillée et le parfum d’épices du lac de Garde. Une inspiration venant d’une ode d’Horace cisèle une inspiration largement bucolique, raffinée, rythmée avec élégance, qui procure un vrai plaisir d’écoute _ en effet.

Cet hommage familial, bien épaulé par l’Orchestre symphonique de la Radio de Prague, dirigé avec clarté par Tomáš Netopil (°1975), s’inscrit dans la discographie de Jan Novák comme une référence qui coule de source.

Son : 8,5  Notice : 10  Répertoire : 9  Interprétation : 10

Jean Lacroix

Une très belle réalisation que ce CD « Jan Novak – Concertos » : une splendide musique de joie, heureuse, d’éveil qui fait aimer la vie…

Ce vendredi 5 avril 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

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