Le délicieux et passionnant « Montaigne à contrepied » de Philippe Desan, à l’occasion du départ de celui-ci de la carr!ère universitaire : de lucidissimes aperçus incisifs sur le monde de la recherche et les querelles d’enjeux de carrière des universitaires… Un jeu de fantaisie et érudition jubilatoire !
Achevant ce matin de bonne heure ma minutieuse seconde lecture _ cf mes précédents articles « Qu’attendre de la surprise de la fiction que vient nous proposer Philippe Desan avec son « Montaigne – La Boétie – Une ténébreuse affaire » ?..« et « Le très brillant possible adieu à la recherche de Philippe Desan – alias Jacques Saint-Maur – en son diabolique vertigineux roman-récit « Montaigne – La Boétie, une ténébreuse affaire »…« cliquer sur ces deux titres afin de les lire…) des 11 et 13 septembre derniers … _ du passionnant récit de fiction « Montaigne – La Boétie – une ténébreuse affaire » (paru le 28 août dernier aux Éditions Odile Jacob),
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je tiens à re-dire ici mon véritable enchantement de cet incisif très détaillé _ en un effectivement très riche, de mille détails absolument passionnants (tant sur Montaigne, sa vie, son œuvre, que sur les contextes compliqués et arcanes à chausse-trappes, de la recherche et des milieux et carrières universitaires) récit hâletant à la lecture de 376 pages _ travail de fiction de Philippe Desan, au moment de prendre sa retraite universitaire _ il quitte, le 14 décembre 2023, son poste de professeur à l’université de Chicago (Illinois) pour jouir, délivré de soucis professionnels permanents, du climat festif des montagnes de Boulder dans le Colorado…
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Et au moment même où j’achevai cette seconde lecture, je reçois, ce matin à 7 h 10, un courriel de mon ami B., à B. _ auquel j’avais chaudement recommandé ce livre jubilatoire _, comportant, en fichier-joint, un article d’Hortense Dufourcq intitulé « Montaigne en assassin impuni« , à paraître vendredi prochain dans le supplément littéraire du Monde des Livres :
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« Montaigne-La Boétie, une ténébreuse affaire », de Philippe Desan : Montaigne en assassin impuni
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Le spécialiste de la Renaissance française livre un polar historique aussi attachant qu’érudit.
Par Hortense Dufourcq
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« Montaigne-La Boétie, une ténébreuse affaire », de Philippe Desan, éd. Odile Jacob, 384 p.
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« Parce que c’était lui ; parce que c’était moi... » Peut-être l’amitié entre Montaigne (1533-1592) et La Boétie (1530-1563) n’est-elle qu’une idée reçue _ de Montaigne lui-même, et exclusivement… _, transmise au fil des siècles au détriment d’une vérité plus sombre. C’est l’hypothèse qu’explore le nouveau livre de Philippe Desan, un roman historique cette fois, une première _ en effet ! _ pour le professeur à l’université de Chicago (Illinois), spécialiste de la Renaissance française et de l’auteur des Essais.
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La référence balzacienne du titre, Montaigne-La Boétie, « une ténébreuse affaire« , ne laisse pas de doute : l’ouvrage emprunte aux codes du roman policier et met en scène un complot criminel, une enquête et l’ébauche d’une mise en accusation _ voilà. Montaigne aurait assassiné _ rien moins ! _ son ami La Boétie, son rival en politique _ au parlement de Bordeaux _ et le mari de sa maîtresse _ Marguerite de Carle (ca. 1517 – 1580), épouse en secondes noces d’Etienne de La Boétie (1530 – 1563). Ce meurtre, resté impuni, aurait toutefois laissé des indices matériels et textuels _ en petit nombre… _ qui auraient traversé les siècles, jusqu’à tomber entre les mains d’un universitaire américain _ Jacques Saint-Maur _ et de sa brillante étudiante _ Diane Osborne _, qui ensemble mettent tout en œuvre _ par leurs recherches matérielles comme textuelles _ pour faire éclater la vérité.
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Cette fiction historique _ voilà _ parvient habilement à conjuguer érudition et frisson _ en effet… Lecteurs profanes ou connaisseurs des Essais y découvriront maintes anecdotes _ superbement détaillées _ sur la vie de Montaigne et ses écrits, mais aussi concernant la conservation matérielle des œuvres _ qui constituent aussi de très précieuses réserves d’indices… A n’en pas douter, le « seiziémiste » s’est servi _ et combien magistralemet !!! _ pour son roman de ses propres recherches. Il brode son intrigue criminelle sur des faits historiques _ parfaitement avérés, eux _ et y joint des éléments de théorie littéraire, laissant entrevoir dans certains passages du récit un état de la recherche – par exemple sur la question de la place des études de genre dans l’analyse des textes anciens, plus importante aux Etats-Unis qu’en France.
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Rien, cependant, du ton _ certes… _ d’un essai d’histoire littéraire. La narration se fait souvent _ en permanence, bien plutôt… _ ironique, jouant de la variation des discours direct et indirect, et creuse la psyché de ses personnages comme lors d’un véritable travail _ oui _ d’investigation ou de profiling. Dans une amusante mise en abyme, l’auteur semble d’ailleurs se mettre en scène à travers un double fictionnel, le personnage du professeur français enseignant en Amérique (Jacques Saint-Maur, pour un Philippe Desan né à Saint-Maur-des- Fossés, dans le Val-de-Marne). Adoptant son point de vue et celui de son étudiante, il brosse avec humour _ proprement décapant ! _ des caricatures de grands pontes de la Sorbonne, symboles d’un monde académique et universitaire français attaché plus que tout _ et surtout que la justesse de la vérité ! _ au prestige des figures canoniques de sa littérature.
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C’est ce qui ressort de cette stimulante _ et délicieuse, oui ! _ lecture : à son terme, le lecteur partage l’enthousiasme de l’auteur pour ses écrivains fétiches, tout en constatant que la littérature permet parfois une – réjouissante – désacralisation des idoles.
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De sa science montaignienne de toute une vie de chercheur infiniment sérieux et méticuleux, Philippe Desan se prend à follement s’amuser ici, en explorant toujours très méticuleusement d’autres questionnements un cran plus iconoclastes _ et en complet à rebours de la doxa montaignienne la mieux établie _,
envisageant carrément une totale mauvaise foi de la part de Montaigne en l’écriture de son livre _ présenté pourtant par l’auteur comme « consubstantiel« à sa personne… _, et osant mettre en cause la présentation affichée par lui-même de sa quasi-sainte amitié avec La Boétie ;
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en total à rebours, par conséquent, des thèses puissantes et admises jusqu’ici comme indélébiles, de son magnifique essai d’ouverture, anti-machiavélien, du Livre III, « De l’utile et de l’honnête« ;
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et nous, lecteurs fidèles de Philippe Desan, à notre tour de nous laisser _ presque… _ prendre à ce parfait jeu d’écriture de cette fantaisie _ solidement entée sur son abyssale érudition… _, jusqu’au vertige, cette fois-ci aussi !
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Le vertige du choc déboulonnant d’un Montaigne empoisonneur à l’arsenic de son faux-ami La Boétie…
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Mais le livre de Philippe Desan comporte aussi bien de solides vérités sur les démarches nécessairement audacieuses _ ce que je baptise personnellement « imageance« … _ de la recherche…
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Chapeau, l’artiste !
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Et à suivre…
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Ce mercredi 18 septembre 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa
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