Un retour de trop long exil de Henry Desmarest (1661 – 1741), et de sa « Circé », sa tragédie en musique de 1694 : par les Nouveaux Caractères, de Sébastien d’Hérin…

— Ecrit le mardi 4 avril 2023 dans la rubriqueHistoire, Musiques”.

Le très remarquable compositeur qu’est Henry Desmarest (Paris, février 1661 – Lunéville, 7 septembre 1741), a subi un durable exil _ de 1699, en Espagne, à la cour de Philippe V, puis en Lorraine, à partir de 1707, et jusqu’à son décès, à Lunéville, en 1741 _ hors du royaume de France,

et a eu, en conséquence, une carrière de compositeur hélas pour lui _ et pour nous aujourd’hui : beaucoup de ses musiques sont perdues… _, un peu compliquée…

De même sa belle tragédie en musique « Circé« , créée à l’Académie royale de musique, à Paris, le 1er octobre 1694,

vient seulement de reparaître, d’abord sur la scène de l’opéra de Versailles, et maintenant au disque,

avec ce précieux double album _ « World Premiere Recording«  _ du label Châtean de Versailles Spectacles CVS 085 _ numéro 16 de sa collection « Opéra français« .

Voici l’article « Les Enchantements » que lui a consacré, sur son site Discophilia le 31 mars dernier, Jean-Charles Hoffelé : 

LES ENCHANTEMENTS

Avant sa disgrâce qui l’aura _ en 1699 _ contraint à l’exil en Espagne puis _ à partir de 1707 _ à ses années lorraines, Henry Desmarest reprit en quelque sorte le flambeau de Lully _ décédé en 1687. Circé devait renouveler _ en octobre 1694 _ le succès de Didon qui _ en 1693 ; cf l’accès à la vidéo donné plus bas…  _ avait sacré Desmarest, tout juste trentenaire, nouveau maître de la tragédie lyrique, mais la demi-teinte de l’accueil, qui n’autorisa que sept représentations, empêchera l’ouvrage d’être repris.

Injustice !, lorsque l’on entend l’alliage d’enchantements et de passions que le sujet autorise, coulant dans la veine lullyste une fantaisie supplémentaire et un élargissement des affects. Les Nouveaux Caractères s’en saisissent avec finesse, se gardant bien d’en faire trop, animant les danses avec esprit et détaillant tous les charmes dont Desmarest a habillé le beau livret de Madame de Saintonge.

Pour Circé, pour l’amoureuse voluptueusement tourmentée et la magicienne dangereuse, pour sa colère qui détruit son royaume à l’Acte V, il fallait bien une tragédienne aussi saisissante que Véronique Gens. Peu importe qu’elle ne soit pas dans sa meilleure voix, ses mots tranchants, son sens des affects, la profondeur de son incarnation laissent pantois _ voilà.

Face à elle, l’Ulysse de Mathias Vidal sauve le personnage que Madame de Saintonge n’a guère gâté. Émouvant Elphénor, élégiaque, blessé, selon Nicolas Courjal, face à la parfaite Astérie de Caroline Mutel, mais cherchez la perle, écoutez au début de l’Acte III « Désirs, transports, cruelle impatience » d’Eolie ; c’est Cécile Achille : impossible qu’elle ne vous tire pas des larmes.

Et si demain Les Nouveaux Caractères redonnaient vie à Théagène et Cariclée _ de 1695 _ ?

LE DISQUE DU JOUR

Henry Desmarest
(1661-1741)


Circé

Véronique Gens, soprano (Circé)
Mathias Vidal, ténor (Ulysse)
Caroline Mutel, soprano (Astérie, Minerve)
Cécile Achille, soprano (Éolie)
Romain Bockler, baryton (Polite, Phantase)
Nicolas Courjal, basse (Elphénor)

Les Nouveaux Caractères
Sébastien d’Hérin, direction

Un album de 2 CD du label Château de Versailles Spectacles CVS085

Photo à la une : les gravures pour un décor au second acte de Mirame (1741) de Henry Desmarest – Photo : © DR

Henry Desmarest est un merveilleux compositeur,

que j’ai personnellement découvert en 1998 avec l’enregistrement enchanté de « La Diane de Fontainebleau » (de 1686) par La Simphonie du Marais et Hugo Reyne _ dont j’étais alors conseiller artistique…

Et, depuis, ma discothèque comporte la plupart des CDs consacrés à l’œuvre fine, vive et délicate de Henry Desmarest…

Et je suis toujours très curieux de découvrir des œuvres injustement oubliées jusqu’ici de notre pourtant très riche patrimoine,

plutôt que d’assez inutiles ré-interprétations des toujours mêmes œuvres rabachées à destination du plus grand public…

Et, pour le plaisir,

voici aussi un accès à la vidéo (de 157′) d’un superbe enregistrement en version de concert de la « Didon » (de 1693) de Desmarest, par Christophe Rousset et ses Talens lyriques, à l’opéra royal de Versailles, le 9 octobre 1999…

De la bien belle musique !!!

Ce mardi 4 avril 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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