Importance de la reparution de l’édition en traduction française des « Ecrits » de Bela Bartok, par Peter Szendy, aux Editions Contrechamps
10juin
Vient de re-paraître en traduction française par Peter Szendy, aux Éditions Contrechamps, la quasi intégralité des « Écrits » de Bela Bartok, ce compositeur génial et essentiel de la première moitié du XXème siècle…
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Voici la présentation qu’en a réalisée, le 6 juin dernier, sur le site de ResMusica, Agnès Simon, sous l’intitulé « Les écrits de Bartók, une source essentielle en français » :
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Édités en 2006 chez Contrechamps, les écrits de Béla Bartók traduits en français font l’objet d’une réimpression. Ils donnent aux curieux et aux chercheurs une source essentielle _ oui ! _ pour aborder ce compositeur _ majeur…
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En dépit d’une certaine popularité dans les salles de concert, les publications en français sur le compositeur hongrois étaient, pendant longtemps, très lacunaires. La postérité de son œuvre fut d’ailleurs biaisée par les récupérations politiques ; et en grande partie ignorée par la génération de compositeurs d’après-guerre. Cette publication participe donc d’un renouveau dans la connaissance du compositeur, auprès de la monographie de Claire Delamarche chez Fayard ou de celle, plus courte, de Laetitia Le Guay chez Actes Sud.
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Laissant de côté la correspondance (en projet) et les écrits sur l’éthnomusicologie, Philippe Albèra, éditeur reconnu de nombreux textes de compositeurs du XXe siècle, et Peter Szendy (Béla Bartók, un abécédaire ennuagé, Philharmonie de Paris édition _ un ouvrage que je possède _ ), ont édité la quasi totalité de ses écrits (articles, conférences, notes de programmes…) portant sur la musique composée, parmi lesquelles les conférences d’Harvard, écrites à la fin de sa vie, et dont il ne prononça que trois sur les huit initialement prévues, terrassé par la maladie. Aux côtés des présentations de ses propres œuvres, au demeurant laconiques, le compositeur aborde les démarches des compositeurs qui l’ont marqué (Debussy, Strauss, Liszt, Ravel) et de ses contemporains (Stravinsky, Schoenberg, Kodály _ bien davantage qu’un contemporain… _), ainsi que les recherches formelles de son époque, parmi lesquelles la musique atonale, dont il se rapproche dans les années 1915-20 (Le problème de la nouvelle musique, La musique d’Arnold Schoenberg en Hongrie) avant de s’en écarter, pour proposer sa propre voie, principalement celle de la polymodalité, qu’il explique en détail dans ses Conférences d’Harvard.
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Mais le sujet récurrent est _ en effet _ celui de la musique paysanne hongroise et de ses apports aux compositions. Il s’attache sans relâche à distinguer la « musique paysanne » ou « primitive », ayant échappé à toute influence urbaine, à la « musique d’allure populaire » (selon la traduction choisie par Szendy) ou à la musique dite tzigane. Il revient sur sa quête _ absolument _ intransigeante de musiques paysannes authentiques en Hongrie, dans les pays voisins et jusqu’en Afrique du Nord et en Turquie, parle même des apports et les risques des nouvelles techniques d’enregistrement (La Musique mécanique). Sa charge contre les éditeurs qui s’avisent de publier des musiques populaires hongroises truffées d’erreurs (Musique tzigane ? Musique hongroise ?) est symptomatique de sa défense d’un travail d’ethnomusicologue à la fois sérieux et vivant _ voilà.
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Les textes, présentés de manière chronologique _ oui _ de 1904 à 1945, se caractérisent donc par une homogénéité dans les sujets abordés. Le ton évolue cependant au gré du contexte historique, qu’il s’agisse de son texte sur La pureté raciale en musique, « lancé à la face des fascismes européens » (Albèra), ou du portrait cinglant de la situation musicale de la Hongrie, ou des conditions matérielles d’exercice de la musique et de la musicologie sous la Russie stalinienne. Quel que soit le sujet ou le ton, Bartók s’exprime toujours avec précision et clarté, une forme d’honnêteté _ voilà ! _, comme l’expression d’une intime conviction.
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Outre le gros travail de traduction, cette édition présente plusieurs compléments bienvenus : deux portraits touchants par Béla Balázs, son ami et l’auteur du livret du Château de Barbe-bleue, des annotations explicitant les choix de traduction ou de sources, une _ très _ éclairante préface de Philippe Albèra, une _ très précieuse _ bibliographie précise des écrits de Bartók (en hongrois, anglais, ou allemand), et quelques reproductions de photographies et de manuscrits.
Béla Bartók (1881-1945). Écrits. Traduction et annotation : Peter Szendy. Édition scientifique : Philippe Albèra et Peter Szendy. Contrechamps Éditions, 2022. 340 p.
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Un outil de connaissance, par conséquent, incomparable !
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Ce samedi 10 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa