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Découverte de la touchante « Rusalka » d’Antonin Dvorak, par le DVD de la production du Teatro Real de Madrid, sous la direction d’Ivor Bolton, en novembre 2020…

16juin

Ce dimanche de Fête des Pères,

j’ai découvert _ car je l’ignorais jusqu’ici… _ l’opéra « Rusalka » d’Antonin Dvorak (créé à Prague le 31 mars 1901), grâce au DVD Unitel (et Nicolas Bartholomée) de la production du Teatro Real de Madrid, en novembre 2020, sous la direction du chef Ivor Bolton, avec la Rusalka d’Asmik Grigorian et le Prince d’Eric Cutler _ cf ici un article de réception de ce DVD par Pierre Degott, sur le site de ResMusica, en date du 26 février 2022 : « Rusalka transposée dans le monde du théâtre et de la danse«  _,

que m’ont offert ma fille Marianne et mon gendre Sébastien…

Rusalka transposée dans le monde du théâtre et de la danse

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Intéressante relecture du mythe de la Petite Sirène. Dans un spectacle habile et globalement cohérent, la soprano se détache d’une distribution de haute tenue.

Le présent Blu-ray est le reflet des représentations de l’opéra de Dvořák données à Madrid en novembre 2020, au moment où le deuxième confinement avait mis un terme, presque partout en Europe, à la programmation de nombreux spectacles lyriques. La mise en scène de fait partie de ces nombreuses lectures destinées à révéler les sens cachés _ voilà _ qui, selon les spécialistes des contes de fée _ tel Bruno Bettelheim _, se dissimulent dans les multiples plis du texte. Oublions donc les lac, dryades, clair de lune et château princier des mises en scène traditionnelles, remplacés ici par une explicitation des nombreux désirs et substrats psychanalytiques _ voilà : Eros et Thanatos… _ qui parcourent le livret.

Le parti pris proposé par cette production consiste ainsi à situer l’action dans le monde de l’art et du ballet. C’est donc le foyer ou le hall d’entrée d’un théâtre XIXᵉ siècle que représente l’imposant dispositif scénique de Johannes Leiacker, dont l’environnement aquatique original est à peine suggéré par des statues de sirènes ornant quelques colonnes. Il est plus difficile d’interpréter les importantes coulées de lave qui s’échappent de l’extérieur de la salle. Cristallisations des non-dits de l’histoire ? Marques informes des désirs inconscients _ et pulsions érotiques _ des différents personnages ? Quoi qu’il en soit, le théâtre est clairement vu comme la métaphore des difficultés de communication entre deux mondes qui s’opposent tout en coexistant, le monde du réel occupé par les humains « normaux » (le Prince, la Princesse étrangère, le Garde-forestier, le Marmiton …), et le monde du rêve, du fantasme et de l’art, celui qu’habite, tout particulièrement, le personnage éminemment « féérique » de Rusalka _ oui. Cet univers mystérieux est parcouru par des figures énigmatiques liées à l’univers des arts du spectacle (Pagliaccio, Charlot). Dans un tel contexte, le Roi des Eaux Vodník est vu comme un directeur de théâtre tyrannique et presque malfaisant (relation incestueuse avec sa fille ?) tandis que la sorcière Ježibaba, avec qui il est apparemment marié, engrange les recettes du théâtre _ derrière son guichet. Rusalka est montrée comme une jeune femme infirme munie de béquilles laquelle ne songe, pour être distinguée _ et aimée _ du Prince, qu’à danser aussi bien que ses trois sœurs et les autres nymphes qui parcourent la scène. Le concept est plutôt séduisant et l’on ne saurait remettre en cause la cohérence de la proposition, même si certaines outrances scéniques – la chorégraphie _ violemment désinhibée, hard et quasi trash : nous sommes loin de l’état du monde de Dvorak en 1901… _  à la fin du deuxième acte – pourraient parfois compromettre la clarté du discours. En tout cas, le parti pris est globalement convaincant et certainement préférable aux mises en scène « premier degré » qui continuent à être affichées dans certains théâtres.

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La distribution réunie sur le plateau du Teatro Real est très nettement dominée par la formidable présence _ très émouvante, en effet, en sa sobriété et son partiel mutisme… _de la soprano . Sans être intrinsèquement belle ou soyeuse, sa voix est puissante et expressive et se joue des difficultés vocales du rôle. Scéniquement, elle incarne à la perfection toutes les aspirations et frustrations _ voilà _ de ce personnage simple qui, finalement, ne demande qu’à être aimé. Scéniquement, elle parvient également à faire illusion en tant que danseuse, notamment par son aisance avec les pointes. N’allez pas chercher un énième degré dans les béquilles arborées par le ténor . Elles ont été nécessaires à l’artiste, victime d’un accident lors des répétitions _ ah ! bon... On n’en appréciera pas moins le chant franc et direct du jeune chanteur, peu nuancé certes, mais toujours ardent et vaillant. Beau chant également du côté du Vodník de la basse , artiste plus jeune que les figures paternelles que l’on voit d’habitude dans ce rôle. Faut-il voir un lien _ je me le suis aussi demandé… _ dans la blondeur de Ježibaba et celle de la Princesse étrangère ? Ainsi que dans le choix de sopranos dramatiques pour incarner ces deux personnages, qui seraient chacune la rivale de Rusalka dans ses deux mondes parallèles ? Contentons-nous de saluer l’extraordinaire performance vocale et scénique de et de , la fulgurance de la deuxième, en vamp sur-vitaminée, comptant parmi les grands moments _ théâtraux, au moins… _ de ce spectacle. Tous les autres interprètes parviennent à proposer un portrait convaincant de leur personnage, parfaitement inséré dans la conception globale du spectacle. On aura presque gardé pour la bonne bouche l’excellence de la réalisation musicale _ oui _ proposée par le chef d’orchestre , qui sait rendre justice à la fois à la composante folklorique de la partition de Dvořák et aux déferlements quasi wagnériens _ parfois, en effet _ de l’écriture orchestrale. L’enivrement musical issu de la fosse est en tout cas parfaitement en phase avec la fébrilité scénique affichée sur le plateau, même si l’on ne peut s’empêcher de trouver encore davantage de maîtrise du côté musical.

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Antonín Dvořák (1841-1904) : Rusalka, conte lyrique en trois actes sur un livret de Jaroslav Kvapil.

Mise en scène : Christof Loy. Décors : Johannes Leiacker. Costumes : Ursula Renzenbrink. Lumières : Bernd Purkrabek. Chorégraphie : Klevis Elmazaj.

Avec : Asmik Grigorian, soprano (Rusalka) ; Eric Cutler, ténor (le Prince) ; Maxim Kuzmin-Karavaev, basse (Vodník) ; Katarina Dalayman, mezzo-soprano (Ježibaba) ; Karita Mattila, soprano (la Princesse étrangère) ; Manuel Esteve, baryton (le Garde-forestier) ; Juliette Mars, mezzo-soprano (le Marmiton) ; Julietta Aleksanyan, soprano (le premier Esprit de la forêt) ; Rachel Kelly, mezzo-soprano (le deuxième Esprit de la forêt) ; Alyana Abramova, mezzo-soprano (le troisième Esprit de la forêt) ; Sebastià Peris, baryton (le Chasseur) ; Chœurs du Teatro Real (chef de chœur : Andrés Máspero) ; Orchestre du Teatro Real, direction : Ivor Bolton.

Réalisation : Xavi Bové. 1 Blu-Ray Unitel.

Enregistré sur le vif en novembre 2020 au Teatro Real de Madrid.

Sous-titres : anglais, allemand, français, espagnol italien, japonais, coréen et japonais.

Notice de présentation en anglais, allemand et français.

Durée : 180:00

Une œuvre qui m’avait donc jusqu’ici échappé, et qui, dans sa singularité (de Bohème) _ au moins pour moi _, m’a touché musicalement _ déjà j’apprécie beaucoup Dvorak (Nelahozeves, 28 septembre 1843 – Prague, 1er mai 1904) _,

et que j’ai reliée à l’œuvre si importante d’un autre natif majeur (!) de Bohème-Moravie, et, à une génération près, le contemporain de Dvorak : Sigmund Freud _ Freiberg, 6 mai 1856 – Londres, 23 septembre 1939…

Une musique très touchante, et excellemment interprétée et incarnée avec finesse ici…

Ce dimanche 16 juin 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Dans la filiation des Vents mozartiens, avec une pointe d’esprit plus acide : quelques oeuvres pour Vents de Bohème-Moravie de l’Entre-Deux-Guerres-Mondiales (1924 et 1929)…

10nov

C’est dans la filiation des Vents _ telle la merveilleuse « Gran Partita« , mais aussi des pièces beaucoup plus légères et très plaisantes… _ de ce Mozart qui s’est, d’ailleurs, tellement plu à Prague,

que l’Orsino Ensemble (avec l’apport de la clarinette de Peter Sparks, du basson de Llinos Owen, et du piano de James Baillieu _ tiens, tiens, le revoici, cet excellent pianiste... _) vient nous offrir un très plaisant « Echoes of Bohemia – Czech Music for Wind« , le CD Chandos CHSA 5348,

comportant,

outre le « Quintette » Op. 88 N°2 (de 1811-17) d’Antoine Reicha (Prague, 26 février 1770 – Paris, 28 mai 1836), trois œuvres de compositeurs tchèques composées en 1924 :

_ »Mladi« , de Leos Janacek (Hukvaldy, 3 juillet 1854 – Ostrava, 12 août 1928),

et 1929 :

_ le « Quintette«  Op. 10 de Pavel Haas (Brno, 21 juin 1899 – Auschwitz, 17 octobre 1944),

_ ainsi que le « Sextuor » H 174 de Bohuslav Martinu (Polička, 8 décembre 1890 – Liestal, 28 août 1959) ;

composées au mitan _ du moins pour nous… _ de l’entre-deux-guerres-mondiales…

Trois œuvres à la fois emplies d’un vent rapide et frais de joyeuse gaieté _ à la Mozart _, mais aussi mâtinées de pointes d’acidité et de quelques accents d’inquiétude morose ou narquoise _ un peu à la Gustav Mahler (Kaliště, 7 juillet 1860 – Vienne, 18 mai 1911), ce viennois qui a passé son enfance à Iglau (aujourd’hui Jihlava) en cette Moravie où paradaient festivement de martiales fanfares, aux échos si fréquents dans sa marquante musique…

Ces années 1924 et 1929, la patrie de ces musiciens se nommait « Tchécoslovaquie« .

Un CD original et bien intéressant,

qui nous touche par ces divers accents-là, entremêlés et fondus.

Ce vendredi 10 novembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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