Pour prolonger la conférence d’hier soir de Fabienne Brugère : penser la « sollicitude » et l' »intime »
26nov
Pour prolonger la conférence d’hier soir de Fabienne Brugère, sur « Le Sexe de la sollicitude«
_ dans les salons Albert-Mollat,
et dans le cadre de la saison 2008-2009 des conférences de la Société de philosophie de Bordeaux _,
ce petit mot (à un ami) :
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Cher Rolandas,
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Après Fabienne,
c’est Guillaume
qui hier soir, en aparté à la conférence _ salle pleine (des salons Mollat illuminés) _ de Fabienne _ en forme olympique _
m’a « confié » qu’il s’était mis à « re-lire » « La Privation de l’intime«
(de Michaël Foessel)
que je t’ai chaleureusement recommandé (cf mon article du 11 novembre : « la pulvérisation maintenant de l’intime : une menace envers la démocratie« ;
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en convenant que le faisceau du projecteur en direction du phénomène de « pipolisation »
n’était, en effet que marginal dans l' »économie » du livre _ ainsi que je le lui avais bien soutenu en notre échange téléphonique de dimanche après-midi…
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Quant à Fabienne,
elle a, elle aussi, convenu _ au sortir de la conférence, et en nous dirigeant vers le restaurant du repas convivial qui allait suivre (au « Café Louis« , du Grand-Théâtre),
que la conception de « l’intime » de ce livre (de Michaël Foessel)
s’attachait bien à un rapport d’attention à (la personne de) l’autre (comme sujet ; et « aimé » vraiment…) ;
et pas à quelque repli sur quelque « intériorité » (d’un Moi séparé, en quelque « fort » _ sic _ intérieur ; vis-à-vis de quelque « objet » _ ou « moyen » _ que ce soit…) ;
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ainsi qu’au concept _ si crucial _ de « vulnérabilité » « humaine »…
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Et que la troisième partie de « La Privation de l’intime » était, en effet, très riche
de bien fécondes perspectives (quant au devenir démocratique)…
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Pour ce qui concerne le fond de la conférence de Fabienne hier soir,
je vais tâcher d’en rédiger un article (sur mon blog) ;
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et pour ce qui concerne « la forme »,
Fabienne l’avait hier soir :
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claire, précise sur les détails de ses analyses,
_ encore mieux que dans son livre, ai-je « trouvé »…
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Il n’empêche,
le fond
_ sinon une quasi « fusion », du moins de très fortes « passerelles » revendiquées,
du « descriptif » (disons, de nature sociologique) et du questionnement (proprement philosophique, lui) de ce qui peut venir « fonder » des normes (morales, sociales, politiques) _
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continue de, « quelque part », « me gêner » un peu (aux entournures)…
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Céline Spector, avec sa clarté synthétique coutumière _ bien précieuse ! _,
a tranquillement ouvert le débat avec cette question _ de fond, cruciale _
quant au statut de la « sollicitude » (et du « care« ) :
la visibilité _ « demandée » (par Fabienne, et à plusieurs reprises, je l’avais repéré, dans le livre) _ ne tombe-t-elle pas (un peu) sous les coups
des critiques du tout-Etat-Providence ?..
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même si Fabienne, en son exposé, avait solennellement « récusé » par avance les arguments _ type Michel Schneider _ anti « Big Mother » : in « La confusion des sexes » (paru aux Éditions Flammarion en février 2007)…
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Quelle est donc « l’authenticité » d’une « croisade » (en faveur de cette « sollicitude« -là) ?
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Que penser des arguments cherchant à bien dissocier la « sollicitude« ,
et de la « compassion« ;
et, plus encore, de la « charité »
_ présentée comme illégitime
parce que prétendant se fonder sur quelque transcendance (divine) ?..
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Je me le suis demandé à la lecture du « Sexe de la sollicitude« ,
et continue de m’y interroger après ce (très) clair exposé
de la conférence d’hier soir…
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Bref, cette « sollicitude« -là _ et à l’égard de quels « pauvres« , de quels « blessés » (de la vie) ? _
sur quoi donc vient-elle « se fonder » ?
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Parvient-elle à échapper, et comment, au statut (et fonctions) de l' »idéologique » ?
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Voilà qui continue pas mal de me « travailler » encore…
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Et sur quoi se détermine la différence entre « le proche«
_ ayant « droit » à de « pleins » rapports de réciprocité _
et « le lointain«
_ « réduit », lui
(sur « qui » on vient alors « se pencher » : le « surplombant« …),
à des rapports a-symétriques ?
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même si la « liberté » de chacun d’eux est très clairement revendiquée,
et notée « à respecter »…
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Par quel « sur-plomb »
qui soit « de droit » ?..
et pas rien que « de fait »…
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Bruce et Christophe
se le demandaient aussi…
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N’y a-t-il pas là quelque chose comme de l' »inauthentique »,
ainsi que quelque chose comme des « larmes de crocodile » _ « Où sont les caméras ?« ..
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Voire : n’y aurait-il pas, ici,
rien que cela ?..
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Le « second » dix-huitième siècle, enivré de « vertu »
_ et de « larmes » (je pense ici aux beaux livres de Chantal Thomas : « Les Adieux à la reine » ; « La reine scélérate. Marie-Antoinette dans les pamphlets » ; « Sade » ; « Sade, la dissertation et l’orgie » ; « Casanova. Un voyage libertin« ) _ sous le règne de ce brave bougre de Louis XVI _,
n’aboutit-il pas
aux paniers de sciure des têtes coupées (à la « réception » du couperet de la guillotine)
de la Terreur robespierrienne…
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Du Laclos des « Liaisons » _ dangereuses, en effet, certes ! _
au Beaumarchais de la « Mère coupable » ;
et, immédiatement après, au Sade des « Infortunes »
de cette « vertu« …
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De même,
l’expression de Fabienne
_et dans son livre,
et lors de sa conférence _,
d’un « usage de la politique«
me fait toujours assez (fortement) « question » ;
me « trouble »…
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Tout cela n’étant vraisemblablement pas sans nul rapport, non plus,
avec les querelles, pressions, cris d’orfraies
du congrès _ et suites _ du PS,
en train de s’achever pendant que nous dînions _ fort agréablement, et convivialement _ hier soir…
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Voilà de toutes premières réflexions sur cette conférence
très réussie
d’une Fabienne très en forme,
dans ce si beau lieu,
si bien éclairé,
des salons Albert-Mollat, hier soir…
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Bien à toi,
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Titus
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qui tâchera de rédiger quelque chose sur « Le Sexe de la sollicitude » aussi sur son blog…
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La question de l' »authenticité » n’en paraît que plus « forte » ;
ainsi que la question des « fondements » _ et de l' »autorité » _,
en régime
_ désormais : Fabienne citait très justement la position, notamment, de David Hume _ ;
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en régime d’immanence,
de la « sollicitude »…
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Sur le terrain de l’esthétique,
je n’ai pas encore lu « L’expérience de la beauté : essai sur la banalisation du beau au XVIIIe siècle » de Fabienne (Brugère),
mais _ j’avais écouté Fabienne en (bien) parler sur France-Culture ;
à l’émission de Raphaël Enthoven, il me semble me souvenir _ ;
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je ne me situe personnellement pas tout à fait
sur ce champ _ rien que « de fait » _ de la « banalisation » des valeurs (esthétiques ; et autres !)…
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Idem quant aux réflexions de l’ami Bruce (Bégout),
avec lequel j’ai échangé quelques mots hier soir, à la conférence (mais lui participait à un autre « banquet philosophique »),
sur le « quotidien » (in la « Découverte du quotidien » ; cf aussi « De la décence ordinaire« , qui est sur ma table de chevet)…
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« Banal » ; « quotidien«
versus _ peut-être ?… _ « intime« , en quelque sorte (pour se référer au livre si riche de Michaël Foessel
et versus, aussi, le « sublime« de l’amie Baldine Saint-Girons (« Le Sublime » ; cf aussi son très beau « L’Acte esthétique« )…
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ou l' »indécrottable » point de vue du « baroqueux »
que je demeure ad vitam æternam !..
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Dernière chose :
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j’ai très envie de « lire » Stanley Cavell,
notamment son « Déni de savoir » :
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au repas hier soir, Layla Raïd me l’a présenté très favorablement,
à partir des mots de « rencontre » et de « conversation«
_ qui sont, aussi, de « mon » vocabulaire, comme de celui de Layla :
le vocabulaire de l' »intime« , donc,
cher Rolandas…
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J’espère ne pas trop te faire perdre de ton temps en étant si prolixe…
à rebours du B-A BA de l' »art de la conversation », justement : sans pesanteur, lui…
Vive Marivaux !
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Titus Curiosus, ce 26 novembre 2008