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S’entretenir d’interprétations de chefs d’oeuvre de la musique : l’oreille quasi parfaite de Jean-Charles Hoffelé en son Discophilia, à propos, ce matin, du merveilleux « Ravel Piano Concertos » d’Alexandre Tharaud et Louis Langrée, avec l’Orchestre National de France _ ou la chance de pouvoir dialoguer un peu, à la lecture, à défaut de vive voix, avec une telle oreille musicale…

16oct

Une confirmation du coup d’éclat éblouissant d’Alexandre Tharaud _ et Louis Langrée dirigeant l’Orchestre National de France : magnifiques, eux aussi… _ dans les deux merveilleux et profonds, par delà leur virtuosité, concertos pour piano et orchestre de Maurice Ravel, en le CD Erato 5054197660719 « Ravel Piano Concertos«  qui vient de paraître vendredi 13 octobre dernier,

avec, au réveil ce lundi matin 16 octobre, le très bel article « Les deux visages » de Jean-Charles Hoffelé _ à la si juste et honnête oreille ! _ sur son si précieux site Discophilia…

Une oreille juste

comme est aussi, tellement de confiance, elle aussi, celle de Vincent Dourthe, mon disquaire préféré ;

et c’est assurément bigrement précieux que de pouvoir s’entretenir un peu précisément et vraiment _ de vive voix, ou à défaut, seulement par dialogue silencieux à la seule lecture… _ avec de tels interlocuteurs sur leur perception ultra-fine, au microscope _ ou stéthoscope musical… _, des interprétations au disque des œuvres de la musique…

Et tout spécialement, bien sûr, à propos de chefs d’œuvre d’interprétations de chefs d’œuvre _ pourtant passablement courus de bien des interprètes, qui s’y affrontent, se confrontent à de tels Everests pour eux, les interprètes… _ de la musique ; comme ici ces deux somptueuses merveilles du somptueux merveilleux _ et hyper-pointilleux et exigeant déjà envers lui-même, à l’écritoire, jusqu’au supplice ! _ Maurice Ravel…

Et je renvoie ici à mon article d’avant-hier samedi 14 octobre :

 

« « …

LES DEUX VISAGES

Cette douleur dans l’assombrissement de l’Adagio assai _ voilà _ qui ira jusqu’au quasi cri _ voilà : Ravel, éminemment pudique, demeure toujours dans de la retenue… _ invite _ voilà _ dans le Concerto en sol l’univers si _ plus évidemment _ noir _ lui _ du Concerto pour la main gauche, et rappelle que les deux œuvres furent écrites _ très étroitement _ en regard _ en 1930-1931 _, et de la même encre _ absolument ! Beaucoup _ d’interprètes _ n’auront pas même perçu cette _ infra-sismique _ tension, jouant tout _ de ce concerto en sol _ dans la même ligne solaire ; Alexandre Tharaud, qui connaît son Ravel par âme, s’y souvient probablement de la vision qu’y convoquait _ en 1959Samson François _ oui : c’est en effet à lui, et à Vlado Perlemuter aussi, que, sur les remarques si fines et compétentes de mon disquaire préféré Vincent Dourthe, je me référais hier dimanche matin, en mon post-scriptum à mon article de la veille, samedi, « «  : références d’interprétations marquantes, s’il en est !  _ et ose ce glas qu’on n’entend jamais _ chez les autres interprètes de ce Concerto en sol.

Mais le Concerto en sol majeur est aussi dans ses moments Allegro cette folie _ oui _ d’un jazz en arc-en-ciel _ débridé, voilà : Ravel avait été très vivement marqué par ce qu’il avait pu percevoir de ce jazz lors de sa grande tournée récente aux États-Unis, du 4 janvier au 21 avril 1928… _ dont le pianiste ne fait qu’une bouchée, swing et échappées belles, toute une enivrante suractivité rythmique _ à la Bartok aussi, autant qu’à la Gershwin ; Maurice Ravel avait fait la connaissance de George Gershwin le 7 mars 1928, lors d’un repas organisé pour son anniversaire chez Eva Gauthier à New-York, ainsi que Ravel en témoigne à Nadia Boulanger en une lettre du lendemain 8 janvier (citée aux pages 1162-1163 de sa « Correspondance » éditée par Manuel Cornejo en 2018 : « The Biltmore New-York 8/3/28 Chère amie, voici un musicien doué des qualités les plus brillantes, les plus séduisantes, les plus profondes peut-être : George Gershwin« , et il ajoutait : « Son succès universel ne lui suffit plus : il vise plus haut. Il sait que pour cela les moyens lui manquent. En les lui apprenant, on peut l’écraser. Aurez-vous le courage, que je n’ose pas avoir, de prendre cette terrible responsabilité ? Je dois rentrer aux premiers jours de mai et irai vous entretenir à ce sujet. En attendant, trouvez ici l’expression de ma plus cordiale amitié. Maurice Ravel« ) _ que pimentent les bois du National menés avec une intense fantaisie _ voilà ! l’orchestre lui aussi brûle… _ par Louis Langrée.

Cet accord magique _ oui, oui, oui _ se renouvelle dans le Concerto pour Wittgenstein, mais dans des nuances de cauchemar _ à la ravelienne Scarbo _, le prestidigitateur s’y fait diable, artificier tragique _ Ravel avait traversé et vécu, comme infirmier, les affres de la Guerre mondiale... _ dont le théâtre est un champ de mines _ oui, qui déchire et découpe les corps, comme ici le bras droit de son commanditaire Paul Wittgenstein…  La guerre de tranchées _ qui fut donc aussi celle de Maurice Ravel _ est partout sous les doigts d’Alexandre Tharaud _ oui ! _, qui convoque _ fort justement _ des visions de charnier, fait tonner son clavier en fureur, rage des traits de mitraillette _ oui, oui, oui _, proposition fascinante _ et tellement juste ! _, suivie au cordeau par un orchestre fantasque _ oui _ aux proclamations démesurées _ oui : quel chef aussi est le magnifique Louis Langrée !

Le jazz s’invite ici aussi _ en effet, en ce concerto pour la main gauche _, mais déformé, amer, acide, osant la charge, le grotesque _ oui ; mais qu’on se souvienne aussi de la formidable viennoise ravelienne Valse de 1919-1920 !.. : une course à l’abîme… _, une parodie de Laideronette, impératrice des pagodes faisant diversion. Quel kaléidoscope ! _ voilà un trait éminemment ravélien… _, qu’Alexandre Tharaud fait tourner à toute vitesse _ telle sa propre viennoise Valse, créée le 12 décembre 1920… _ pour saisir cette folle course à l’abîme _ nous y voilà donc ! cf aussi, en sa course, le plus contenu et retenu, mais tout de même.., Bolero de 1928 _ et mieux suspendre les cadences où seul il élève son chant vers une voie lactée inquiète _ une des boussoles nocturnes de Maurice Ravel, sur son balcon en surplomb de la forêt et face à la nuit de Montfort-l’Amaury…

J’attendais _ moi aussi _ un couplage jazz, le Concerto de Gershwin comme réponse au jazz de Ravel _ certes _, mais non, ce seront les Nuits andalouses de Falla, sauvées de tant de ces lectures affadies qui les inféodent à un pâle debussysme _ voilà qui est fort bien perçu…

Alexandre Tharaud hausse leurs paysages fantasques _ oui _ à l’étiage de ceux _ fantasques eux aussi _ de Ravel, ardant leur con fuoco, tout duende, cambrant la gitane de la Danza lejana, implosant le feu d’artifices d’En los jardines de la Sierra de Córdoba dans l’orchestre flamboyant _ oui _ de Louis Langrée, faisant jeu égal avec les ardeurs osées par Alicia de Larrocha et Eduardo del Pueyo _ oui. Et c’est bien sûr qu’est très profond aussi le tropisme espagnol de Maurice Ravel… Ne serait-ce pas dans les jardins d’Aranjuez que se seraient rencontrés et fait connaissance ses parents, lors de leurs séjours madrilènes ?..

Quel disque ! _ voilà ! voilà ! _, splendidement saisi par les micros de Pierre Monteil _ et il faut en effet saluer aussi la splendide prise de son de cet éblouissant raveliennissime CD…

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)


Concerto pour piano et orchestre en sol majeur, M. 83
Concerto pour piano et orchestre en ré majeur, M. 82 (Pour la main gauche)


Manuel de Falla (1876-1946)


Nuits dans les jardins d’Espagne

Alexandre Tharaud, piano
Orchestre National de France
Louis Langrée, direction

Un album du label Erato 5054197660719

Photo à la une : le pianiste Alexandre Tharaud –
Photo : © Jean-Baptiste Millotune _ _ 

Pouvoir dialoguer vraiment si peu que ce soit avec des mélomanes à l’oreille et au goût ultra-fins et ultra-exigeants, mais capables d’enthousiasmes vrais et sincères,

est plus que jamais indispensable,

eu égard à la solitude grandissante des individus que nous sommes devant la misère en expansion, le désert gagne _ cf mon « Oasis (versus désert) », in le « Dictionnaire amoureux de la librairie Mollat« , aux pages 173 à 177 (celui-ci est paru aux Éditions Plon en octobre 2016) ; une contribution redonnée en mon article du 17 juin 2022 : « « , accessible ici.. _, de la plupart des médias _ le plus souvent très pragmatiquement vendus aux plus offrants… _, pour ne rien dire de pas mal des publics...

Car c’est ainsi qu’il arrive parfois un peu heureusement, telle une étape enfin rafraîchissante (et bien évidemment vitale) en une oasis verdoyante en la traversée assoiffante du désert si aride et si morne, que des œuvres de la civilisation _ ici musicale _ rencontrent un infra-minimal plus juste écho qui, en son petit retentissement, les prolonge, et surtout et aussi réanime leur flamme, en un partage irradiant de vraie joie…

Et écouter de telles interprétations de tels chefs d’œuvre de musique fait un immense bien…

Et ces tous derniers temps,

les grandes interprétations, majeures et magistrales, véritablement marquantes, qui ont vu le jour, cette année 2023,

_ celles de « L’Heure espagnole » et du « Bolero » par François-Xavier Roth et ses Siècles _ Harmonia Mundi HMM 905361 _,

_ celle du « Trio pour piano et violoncelle » de 1914 par le Linos Piano Trio _ CAvi-Music 8553526 _,

_ celles de l’intégrale de « L’Œuvre pour piano » du double album par Philippe Bianconi _ La Dolce Volta LDV109.0 _,

_ et maintenant celles du « Concerto en sol » et du « Concerto pour la main gauche » par Alexandre Tharaud, Louis Langrée et l’Orchestre National de France _ Erato 5054197660719 _,

toutes,

savent faire enfin entendre en toute sa clarté et fluidité, allègre, intense, tonique, la puissance incisive et au final impérieuse en son irradiante tendresse, jubilatoire, de Maurice Ravel compositeur…

Une force de plénitude absolument accomplie…

Ce lundi 16 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Pour approcher d’encore plus près à la vérité de Ravel en son plus intime, le stupéfiant « Ravel – L’OEuvre pour le Piano » du magnifique Philippe Bianconi (suite)…

29sept

Plus j’écoute _ quasiment en continu, quand je suis à ma table de travail _ le double CD la dolce volta LDV 109.0 de Philippe Bianconi « Ravel – L’Œuvre pour le Piano« ,

et après le témoignage déjà émerveillé de mon article d’avant-hier 27 septembre « « ,

plus je pense

que la formidable maîtrise, si pleine _ avec une formidable prise de son, aussi, il faut le préciser, de François Eckert ! _ en son extrême délicatesse (et parfaite naturelle fluidité) de jeu des diverses micro-inflexions si expressives en leur finesse et ultra-délicatesse, dénuées de la moindre volonté _ à l’égard de quelque public que ce soit… _ d’exhibition de virtuosité, du piano de Ravel,

que parvient ici à nous donner avec tellement de toute simple naturelle évidence Philippe Bianconi,

nous offre là un inestimable cadeau _ de grâce ! _ qui approche au plus près la vérité même de Ravel en son plus intime, à son solitaire piano, pour lui seul…

Et c’est bien là aussi le sentiment qu’éprouve, et à son tour, en un justissime article intitulé « Nocturne« , sur son site Discophilia, le bon Jean-Charles Hoffelé, ce vendredi 29 septembre,

je le découvre en ce petit matin du vendredi 29 septembre :

NOCTURNE

Philippe Bianconi revient à son cher Ravel dont il avait déjà gravé l’intégrale de l’œuvre pour piano seul sous l’écoute bienveillante de Suzanne et René Gambini voici bien trente ans _ pour le label Lyrinx, en 1993. Un vaste soleil illuminait alors son jeu, Ravel en lumière, joué assez dandy _ et dandy, Ravel le fut aussi, en sa première jeunesse… _, alliant à une beauté toute classique quelques traits proustiens : on croyait voir le compositeur tiré à quatre épingles _ ainsi qu’en témoignent visuellement quelques photos du jeune Ravel… _ dans chaque note de sa musique.

Il ajoute aujourd’hui, en accord avec _ l’excellent ravélien qu’est lui aussiClément Lefebvre, la suite de Ma mère l’Oye qui manquait à son album Lyrinx. Le dialogue très sombre de La Belle et la Bête signale illico que les portes d’un autre univers se sont ouvertes : ce Ravel-là sera d’abord celui du Gibet, de Scarbo, d’Ondine _ de Gaspard de la nuit, en 1908 _, l’envers _ ou le revers, voilà… _ teinté d’un brin de fantasque du rayonnement solaire que le pianiste y avait jadis entendu.

Les Miroirs _ de 1904-1905 _ sont tendus, sombres, presqu’amers _ mais jamais tout à fait, surtout pas… _ (Une barque sur l’océan avec cette main gauche obstinée avant le retour du ressac), étranges d’atmosphères non seulement pour Oiseaux tristes, pour la fantasmagorie de Noctuelles, pour l’Alborada _ formidable de présence _ mêlant l’ironie à une certaine _ pointe très fine, un soupçon effleurée, de _ tristesse, pour La Vallée des cloches aussi, si nostalgique _ Ravel aimait les reflets des miroirs…

Et si le vrai visage _ voilà ! voilà ! _ de Ravel paraissait dans ce piano qui fut l’instrument _ oui, aux harmoniques orchestrales aussi… _ de son _ solitaire et méditatif _ quotidien ? Inquiet, intranquille _ oui _, splénétique _ oui _ tout au long d’un Gaspard de la nuit _ en 1908 _ où même Ondine a un côté Loreley. Jusqu’au Tombeau de Couperin _ de 1914-1917 _ qui ne renonce pas à l’espressivo, voyant derrière les danses, au travers de l’esseulement de la Fugue les visages des disparus, jusqu’aux Valses nobles et sentimentales _ de 1911 _,vénéneuses, emplies de parfums de tubéreuse : dans l’ultime page, un opium semble rendre immatériels et la musique de Ravel et le jeu du pianiste – onirisme trouble au possible.

Les petites pièces tardives ou pas, Menuets _ de 1895 et 1909 _, Pavane _ de 1899 _, et hommages « dans le style de », le bref Prélude  _ de 1913 _ troublant comme un regret, sont jouées avec un sens de la nuance, du phrasé juste _ oui, oui, oui _ qui les hissent au rang de chefs-d’œuvre. Sommet _ probable, oui… _ de l’ensemble _ ainsi sublimement interprété par un Philippe Bianconi en un (paradoxalement sérénissime de maîtrise !) état de grâce de gravité… _, si je ne devais en choisir qu’un : la _ confondante _  Sonatine _ de 1903-1905 : oui, ainsi insidieusement glaçante, mine de rien en sa terrifiante douceur, elle est proprement sidérante ! Écoutez comment Philippe Bianconi fait sourdre les ombres, ose le cri  _ munchien, en 1893 _ qui saisit soudain au centre du Modéré.

Et maintenant, il faut _ oui ! _ que La Dolce Volta lui offre l’occasion d’enregistrer les deux Concertos.

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)


L’Œuvre pour piano (Intégrale)

Philippe Bianconi, piano
Clément Lefebvre, piano
(Ma mère l’Oye, version à quatre mains)

Un album de 2 CD du label La Dolce Volta LDV 109.0

Photo à la une : le pianiste Philippe Bianconi –
Photo : © William Beaucardet

 

Ce merveilleux transcendant double CD Ravel de Philippe Bianconi

est tout simplement un tranquille _ mais tout sauf placide, cependant… _ sommet _ sans jamais, ni en rien, se pousser si peu que ce soit du col _ de la discographie du singulier _ oxymorique _ et si magnifique Maurice Ravel…

Ce vendredi 29 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Vu sur Arte « Secrets et mensonges » de Mike Leigh (1996) : un chef d’oeuvre d’humanité !

11juin

Il y a déjà quelques jours, mon épouse a regardé sur la chaîne Arte le film « Secrets et mensonges » de Mike Leigh (en 1996),

dont elle est sortie, le film terminé, venir me dire _ larmes aux yeux _ qu’elle n’avait jamais vu un si beau film de sa vie…

Ce lundi 12 juin,

alors que j’achevais à mon bureau ma toute première lecture de l’admirable « Les Airs de famille : une philosophie des affinités » (paru aux Éditions Gallimard au mois de janvier 2012) de François Noudelmann _ cf la vidéo (de 9′ 26) de la lumineuse présentation de ce livre par François Noudelmann pour la librairie Mollat, en date du 5 juin 2012 _,

mon épouse vient me prévenir que le film de Mike Leigh repasse cet après-midi même sur la chaîne Arte, à la télévision _ en voici la bande-annonce (de 1′ 48) ; une brève présentation de quelques séquences représentatives du film (en 3′)) ; ainsi que les multiples occurrences de « sweetheart » (en 2′ 44)…

Je viens donc le regarder à mon tour, toujours, donc, sur Arte ;

et à mon tour je ressors de sa vision en larmes _ de bonheur !!!

Quel admirable portrait d’humanité !

Ce lundi 12 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Une interprétation magistrale et bouleversante de tendresse de 4 chefs d’oeuvre de Schubert par l’immense Lars Vogt et Tanja et Christian Tetzlaff : un trésor pour l’île déserte…

29avr

C’est un double CD absolument exceptionnel _ Ondine ODE 1394 _ qu’Ondine aujourd’hui nous donne _ qu’on écoute pour commencer déjà rien que ces fabuleux courts extraits-ci Qui y résisterait ??? _

avec l’interprétation magistrale bouleversante de tendresse vraie, irremplaçable, et surtout qui nous donne, quasi miraculeusement, à recevoir, à l’écoute, comme absolue, enfin, les œuvres ainsi interprétées en leur essence schubertienne même,

que viennent ainsi nous offrir avec une intensité et une justesse de sens jamais atteinte jusqu’ici à un tel degré de vérité aussi pure _ écoutez jusqu’aux silences de leurs respirations musicales !.. _,

l’immense _ et infiniment regretté et pleuré de tous ; cf mon article du 6 septembre 2022 : « « , qui comporte aussi un commode récapitulatif des articles que je lui avais consacrés (depuis le 17 octobre 2009) à la date de son décès le 5 septembre 2022 _ Lars Vogt (Düren, 8 septembre 1970 – Erlangen, 5 septembre 2022), au piano,

et ses amis, si proches, les magnifiques, eux aussi, Tanja Tetzlaff (Hambourg, 1973), au violoncelle, et son frère Christian Tetzlaff (Hambourg, 29 avril 1966), au violon,

dans, surtout, quatre des chefs d’œuvre absolus, miraculeux, de Franz Schubert (Lichtental, 31 juillet 1797 – Vienne, 19 novembre 1828),

que sont les deux Trios avec piano,

le premier, en si bémol majeur, Op. 99 (D. 898) _ créé chez Joseph von Spaun le 28 janvier 1828 _

et le second, en mi bémol majeur, Op. 100 (D. 929) _ créé au Musikverein de Vienne le 28 décembre 1827 _,

le fragment de Trio dit Notturno, en mi bémol majeur, Op. 148 (D. 897) _ de 1827 : probablement un mouvement non retenu du Trio Op. 100, et sublime lui aussi… _,

et la Sonate Arpeggione (D. 821) _ composée à Vienne en novembre 1824 pour son ami Vincenz Schuster.

Et c’est absolument exceptionnel !!!

Nos larmes coulent en abondance et de peine et de joie…

Sur ce double CD miraculeux,

cf aussi le bien bel article de Patrice Imbaud intitulé « Lars Vogt, Tanja et Christian Tetzlaff, bouleversants dans le dernier Schubert« , paru le 25 avril dernier, sur le site de ResMusica :

Lars Vogt, Tanja et Christian Tetzlaff bouleversants dans le dernier Schubert

Véritable chant du cygne, ce dernier enregistrement de Lars Vogt accompagné de Tanja et Christian Tetzlaff, constitue une nouvelle poignante et douloureuse référence dans les Trios avec piano de Schubert. In memoriam.

Cet album prend bien évidemment une dimension particulière lorsque l’on sait que le pianiste , décédé le 5 septembre 2022, a débuté cet enregistrement des deux Trios avec piano op. 99 et op. 100, du Nocturne op. 148, du Rondo pour violon et piano et de la Sonate « Arpeggione », contre avis médical, alors qu’il était déjà sous traitement _ voilà _ et se savait probablement condamné… Il n’est pas hasardeux non plus de penser que c’est délibérément _ oui _ que le pianiste allemand a choisi ces dernières œuvres de Schubert où la mort rôde… Composés fin 1827-1828, juste avant la mort du compositeur _ le 19 novembre 1828 _ et probablement _ oui _ l’un à la suite de l’autre, les deux grands _ tout simplement merveilleux, l’un et l’autre _  Trios avec piano opus 99 et opus 100, sont tout à la fois le même, par ce mélange typiquement schubertien de joie et de tristesse, et l’autre, par leur climat dissemblable, plus lumineux et lyrique pour l’opus 99, plus sombre pour l’opus 100.

Lars Vogt et ses amis nous en livrent une interprétation mémorable _ et comment !!! _ comme suspendue _ écoutez la ferveur des respirations et silences musicaux… _ entre ciel et terre, faite d’équilibre _ oui, avec une parfaite et justissime humilité _ , de subtilité _ oui _, de couleurs et de superbes nuances, portée par une écoute complice _ de toujours _ et une expressivité dont l’éloquence donne forme à l’indicible _ voilà ! _ et force _ absolument ! _  l’admiration. On admire sans réserve l’allegro lyrique et contrasté du Trio n° 1, son andante mélancolique et rêveur, son scherzo malicieux et bondissant, autant que son rondo final jubilatoire et résolu. Et on souscrit aussi totalement à l’ambiguïté palpable du Trio n°2 hésitant entre révolte et plainte déchirante dans l’allegro, bientôt suivi de la mélodie hypnotique et élégiaque de l’andante, précédant elle-même un scherzo dansant d’où sourd une fragrance de résignation, avant un final aux parfums de fête forcée, hanté par la résurgence du lugubre thème de l’andante, chanté par le violoncelle, comme une menace _ de bien belles analyses…

Contemporain des deux trios, le Nocturne op. 148 (1827) conclut cette progression dramatique dans une interprétation à vous tirer les larmes _ oui ! _ où la désolation acceptée cède progressivement le pas, après quelques sursauts, à une apaisante quiétude.

Deux œuvres en duo complètent _ généreusement _ ce copieux double album : le Rondo D 895 (1826) pour violon et piano _ avec Christian Tetzlaff _ et la _ si belleSonate « Arpeggione » (1824) pour violoncelle et piano _ avec Tanya Tetzlaff : tous deux amis très proches, et vieux complices musicaux (cf les merveilleux concerts et CDs du Festival Spannungen de Heimach, qu’avait créé et dirigeait Lars Vogt) de Lars Vogt… De sublimes CDs à thésauriser !!! Le premier donne libre cours à la virtuosité et à la complicité de et de Lars Vogt. La seconde, plus consistante _ quel chef d’œuvre, elle aussi !.. _, permet de gouter l’impressionnante digitalité de et à la belle sonorité de son violoncelle Giovanni Baptista Guadagnini de 1776 dans une lecture à la fois lyrique et tendue d’un charme envoûtant _ oui, oui : absolument !

Rien d’hagiographique, ni de pathétique _ surtout pas, en effet… _ dans cette élogieuse chronique, mais simplement _ oui _  un _ tout simple _ constat _ de fait, oui ! _ fait par Lars Vogt lui-même à la fin de l’enregistrement : « J’ai un peu l’impression que tout dans ma vie s’est développé vers cet opus 100… s’il ne reste pas beaucoup de temps, alors c’est un adieu digne » et sans doute beaucoup plus que ça… un legs _ absolument _ magistral !

Franz Schubert (1797-1828) :

Trio pour piano et cordes n° 1 en si bémol majeur D 898 op. 99 ;

Trio pour piano et cordes n° 2 en mi bémol majeur D 929 op. 100 ;

Nocturne pour trio avec piano D 897 op. 148 ;

Rondo pour violon et piano D 895 op. 70 ;

Sonate « Arpeggione » en la mineur D 821.

Lars Vogt, piano ; Tanja Tetzlaff, violoncelle ; Christian Tetzlaff, violon.

2 CD Ondine.

Enregistrés du 21 au 25 février et du 10 au 11 juin 2021 _ pour le Trio Op. 99 _ à la Sendesaal de Brême.

Notice bilingue : anglais-allemand. Durée totale : 136:45

 

 

Un double CD pour l’île déserte.

Ce samedi 29 avril 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Une comparaison discographique de Concertos et double concertos pour clavecin de Bach : le Bach revigoré et proprement jubilatoire de Francesco Corti et il pomo d’oro…

17fév

À propos du tout à fait remarquable _ et déjà remarqué ici même au mois d’août dernier _ percutant CD « Bach Harpsichord Concertos III » par Francesco Corti, Andrea Buccarella et le décidément toujours magnifique il pomo d’oro,

voici que paraît cet intéressant article, en date d’hier 16 février 2023, sous la plume de Christophe Steyne sur le site de Crescendo : « Concertos et double concertos pour clavecin de Bach : trois nouvelles parutions« ,

qui me paraît à confronter à mon article du 20 août 2022 sur ce même CD : « « …

Concertos et double concertos pour clavecin de Bach : trois nouvelles parutions

LE 16 FÉVRIER 2023 par Christophe Steyne

Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Concertos pour clavecin no 3 en ré majeur BWV 1054, no 4 en la majeur BWV 1055, no 6 en fa majeur BWV 1057, no 7 en sol mineur BWV 1058.

Masato Suzuki, clavecin. Bach Collegium Japan.

Andreas Böhlen, Kenichi Mizuuchi, flûtes à bec. Natsumi Wakamatsu, Azumi Takada, violon. Yukie Yamaguchi, alto. Toru yamamoto, violoncelle. Seiji Nishizawa, violone.

Juillet 2019. Livret en anglais. TT 60’05.  BIS-2481

Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Concertos pour clavecin no 2 en mi majeur BWV 1053, no 4 en la majeur BWV 1055. Concertos pour violon en la mineur BWV 1041. Concerto pour deux clavecins en ut mineur BWV 1062.

Mario Sarrechia, Bart Naessens, clavecin.

Sara Kuijken, violon solo.

Sigiswald Kuijken, violon, violoncello da spalla, direction.

La Petite Bande. Yun Kim, violon. Marleen Thiers, alto. Edouard Catalàn, basse de violon.

Octobre 2021. Livret en anglais, français, allemand. TT 62’39. Accent ACC 24385

Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Concertos pour deux clavecins en ut mineur, ut majeur, ut mineur BWV 1060-1062. Concerto pour clavecin, hautbois et cordes en ré mineur BWV 1059 [reconstruction F. Corti].

Francesco Corti, Andrea Buccarella, clavecin. Emmanuel Laporte, hautbois.

Ensemble Il Pomo d’Oro.

Avril 2021. Livret en anglais. TT 55’48. Pentatone PTC 5186 966

Au sein d’une discographie déjà abondante, l’actualité s’enrichit de trois nouvelles parutions consacrées aux concertos pour un ou deux clavecins. Affichant chacune un accompagnement réduit à un pupitre par partie, pour des effets au demeurant très contrastés selon l’esthétique qui se dégage de chaque album. Après un album de concertos à deux clavecins par Suzuki père et fils admiré par Ayrton Desimpelaere voilà huit ans, après un premier volume de concertos pour un seul clavecin (dont une reconstruction du BWV 1059), Masato et le Collegium Japan reviennent boucler l’intégrale des BWV 1052-1058. Dont celui décalqué du quatrième Brandebourgeois, ici superbement servi par les flûtes d’Andreas Böhlen et Kenichi Mizuuchi. On retrouve le même instrument à deux claviers (Kroesbergen, 1987, d’après Couchet), on retrouve le même accompagnement aminci, que la captation reproduit avec un relief et une densité qui remplument un peu la lésine des effectifs, au prix d’une certaine dureté et d’une image frontale.

On retrouve aussi le même genre d’interprétation radiographique, qui comblera les amateurs de lisibilité, de recto tono. Les mouvements vifs brillent comme un cristal aux arêtes pures, mais dépourvu de la moindre chaleur, de la moindre souplesse d’influx. Un usinage sidérurgique. Alors que dire des mouvements lents ?, d’une glabre et réfrigérante géométrie, désertés de tout affect, raclés à l’os. Suspecterait-on jamais l’Adagio e piano sempre de pouvoir flotter aussi impassiblement, tel un bloc de banquise dans un océan glacé ? Les oreilles avides d’un littéralisme élagué se rappelleront la phrase de Saint-Exupéry (Terre des hommes) : « il semble que la perfection soit atteinte, non quand il n’y a plus rien à ajouter mais quand il n’y a plus rien à retrancher ». Du territoire expressif visité par ces opus, ne reste-t-il pourtant qu’un cadastre piqué à la machine à coudre ?, se demanderont en revanche les contempteurs de cette approche digne d’un scanner.

Les déterminants de l’empathie ne se réduisent pas à l’arithmétique. L’émotion ne s’indexe pas sur la taille. Chez le label Accent, le même effectif d’archets (au plus, un quintette) manifeste une entropie supérieure à l’interprétation nipponne, mais aussi un net surcroît de chaleur communiquée à l’auditeur. Application du principe thermodynamique de conservation d’énergie ? À comparer le BWV 1055, les allegros ne sont pas moins animés avec l’équipe de Kuijken, mais le larghetto respire bien plus aisément. La malléabilité des cordes exsude un coloris et une saveur que nous ne percevions guère autour de Masato Suzuki. Toujours est-il que le mélomane devra adhérer à ce giron plutôt qu’un véritable orchestre, et accepter de souscrire à l’avis de Sigiswald Kuijken (« tous ses concertos appartiennent au genre de la musique de chambre ») au sein d’une notice à l’argumentaire partial. Laquelle explique aussi (pas très clairement) le recours à un violoncello da spalla pour le BWV 1062 (erronément répertorié comme BWV 1061 dans le tracklisting).

Côté solistes, on apprécie le tempérament de Sara Kuijken, aux phrasés étudiés qui déjouent les évidences (remarquable élasticité dans l’allegro assai) quitte à paraître parfois mal assurée. On salue le jeu fin et sensible de Mario Sarrechia, son articulation lubrifiée, son propos juste et soupesé (comme le final du BWV 1053 pétille sainement !). Le brillant alumnus des Conservatoires d’Anvers et Amsterdam est rejoint par Bart Naessens dans un tandem là encore parfaitement ciselé. Ce CD s’annonce comme premier volume d’une trilogie qui, outre les six concertos pour clavecin soliste (sans le BWV 1058 ?), compte rassembler à terme les trois doubles concertos pour clavecins, le double concerto pour violons, et les deux concertos pour violon

On mesure toutefois ce que l’interprétation du BWV 1062 concluant le disque Accent avait de prudente quand on sursaute _ avec jubilation ! _ à l’écoute du même concerto, qui fait irruption au début de l’album Pentatone. Le premier volume de l’intégrale des concertos solistes par Francesco Corti avait enthousiasmé notre plume et notre magazine _ et moi aussi !!! cf mon article du 21 mai 2022 : « «  _, qui le récompensait d’un Joker Millésime distinguant les douze meilleurs enregistrements de l’année 2020 ! Le livret invoquait un continuo attesté pour le BWV 1055, plaidant pour plusieurs archets par partie (3/3/2/1/1), extrapolés aux trois autres concertos de ce tome I. Nous voici ici cependant revenus à un équipage congru, mais valeureux par ses individualités : Evgeny Sviridov et Anna Dimitrieva aux violons, Stefano Marcocchi, à l’alto, Catherine Jones au violoncelle, Paolo Zuccheri au violone.

Codicille à cette série BWV 1052-1058, on nous offre ici le BWV 1059, inachevé par Bach mais complété par Francesco Corti (en s’inspirant des airs de la cantate Geist und Seele wird verwirret), comme Gustav Leonhardt l’avait osé en son temps (et gravé en 1960 sous étiquette Das Alte Werk), ainsi que d’autres tel Suzuki que nous évoquions ci-dessus. Tous les détails de cette intéressante (et très conjecturale) reconstruction sont honnêtement présentés dans le livret qui renseignera dûment les anglophones.

L’interprétation des quatre concertos affiche une vigueur peu commune, presque militante _ oui, oui… _, aiguisant les rythmes et affutant les tempos, poussant les partitions dans leurs retranchements. Y compris dans les andante et adagios, concentrés comme des instants paraboliques, resserrés d’un geste unificateur qui révoque la nuance, certes. Que dira-t-on alors des mouvements vifs ?! C’est musclé, parfois chahutant, souvent étourdissant, toujours stimulant _ pour notre jubilation ! Même combat que dans le disque de Masato Suzuki ? Du moins, la physionomie diffère, voire les enjeux : là dominait une impression de sécheresse, ici triomphe la force, tout aussi brute peut-être mais mieux hydratée, et qui n’oblitère pas l’éloquence. La démonstration intimide toutefois. On souhaiterait que la motorisation poussée à fond les manettes réintroduise quelque subtilité _ quant à moi, je me régale et y trouve le portrait le plus idoine que je me fais du puissant père Bach…

On saluera la virile découpe que les deux violonistes russes inculquent au tracé, et le non moindre élan que les cordes graves impulsent à la motricité. Andrea Buccarella partage la même pugnacité que son compatriote. Deux clavecins faits par Andrea Restelli d’après le « Christian Vater 1738 » de Hanovre sont les complices de cette lecture aussi radicale qu’incendiaire _ voilà. On s’enflamme ! La conduite est magistralement, autoritairement, impeccablement gérée. Irrésistible, mais désarçonnant, verrouillez votre ceinture ! _ et décollez !

BIS = Son : 8,5 – Livret : 8 – Répertoire : 10 – Interprétation : 6

Accent = Son : 9 – Livret : 8 – Répertoire : 10 – Interprétation : 9

Pentatone = Son : 9 – Livret : 9 – Répertoire : 10 – Interprétation : 9,5

Christophe Steyne

C’est bien intéressant !

Ce vendredi 17 février 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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