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Et toujours pour un peu mieux comprendre ce qui vient de se jouer aux Etats-Unis

20jan

Et toujours pour (un peu mieux) comprendre

ce qui vient de se jouer

aux États-Unis,

un excellent article _ de Romain Huret _ sur le passionnant _ chaque jour ! _ site

laviedesidees.fr :

« L’étrange défaite de John MacCain« …

Au-delà de la magistrale campagne de Barack Obama, comment comprendre la très lourde défaite du candidat républicain à la présidentielle américaine ? Pour l’historien Romain Huret, l’échec de John MacCain signe la faillite morale et politique de trente années de conservatisme.

« Ils invoquaient avant tout l’intérêt ; et c’est en se faisant de cet intérêt prétendu une image terriblement étrangère à toute vraie connaissance du monde qu’ils ont lourdement induit en erreur les disciples, un peu moutonniers, qui, en eux, mettaient leur foi. […] Comme la parole qu’ils prêchaient était un évangile d’apparente commodité, leurs sermons trouvaient un facile écho dans les instincts paresseusement égoïstes qui, à côté de virtualités plus nobles, dorment au fond de tout cœur humain. Ces enthousiastes, dont beaucoup n’étaient pas personnellement sans courage, travaillaient, inconsciemment, à faire des lâches. Tant il est véritable que la vertu, si elle ne s’accompagne pas d’une sévère critique de l’intelligence, risque toujours de se retourner contre ses buts les plus chers ».
Marc Bloch [1]

Employés en un autre temps, pour une autre défaite, ces propos _ d’une rare et magnifique lucidité ! _ de Marc Bloch _ dans le magistral (et toujours de la plus brûlante actualité ! « L’Etrange défaite«  ; qu’on peut lire aussi dans « L’Histoire, le guerre, la résistance »_ rendent également compte de l’étrange défaite de John McCain. Si nul ne peut contester le manque de dynamisme de sa campagne face à l’extraordinaire candidat que fut Barack Obama, si nul ne peut remettre en cause le ridicule du choix de Sarah Palin, chacun doit s’interroger sur cet étonnant constat : comment un politicien si ouvert dans le passé à des solutions de compromis avec les Démocrates, comment un homme longtemps favorable à une politique migratoire plus audacieuse, comment un individu si souvent iconoclaste a-t-il été condamné à n’apparaître que comme le candidat d’une Amérique blanche, très conservatrice, repliée sur ses prérogatives économiques ? La réponse est simple : s’il fut choisi précisément pour cela par des militants qui ne l’avaient guère ménagé jusqu’alors, John McCain n’a pas su faire oublier la trahison des élites conservatrices et leur échec de gouvernance depuis une vingtaine d’années aux États-Unis.

Le bilan politique du mouvement conservateur

Pour comprendre le caractère étonnant de cette défaite, il convient de revenir aux origines mêmes du mouvement conservateur [2]. Dans les années 1960, les conservateurs ont l’impression de vivre dans un monde foncièrement hostile, dangereux et inquiétant. Ce sentiment d’appartenir à une minorité, sociale, intellectuelle et politique, les conduit à entrer en politique. Cette politisation n’emprunte pas des trajectoires familières : elle se met en place dans les foyers ; le prosélytisme se développe dans le voisinage ; les réunions ont lieu dans de paisibles salons de la classe moyenne américaine. Pour un observateur avisé, la mobilisation relève de l’amateurisme et du bricolage si on la compare à la puissance des structures d’organisation mises en œuvre au même moment par les libéraux (liberals) [3]. Mais cette faiblesse devient rapidement un atout. Car la mobilisation tire sa force de cette accumulation de petites formes de militantisme locaux : ici une manifestation contre l’homosexualité dans l’Idaho, là une dénonciation des manuels scolaires dans le Texas ; bref des milliers d’actes individuels qui s’agrègent lentement dans le paysage politique américain. Dans les universités, les lycées, les usines, au cœur même de ces banlieues souvent présentées comme des lieux d’apathie politique, des formes inédites de contestation se mettent progressivement en place pour critiquer l’ordre établi par les libéraux (liberals). Si le conservatisme américain présente des visages multiples, des fondamentalistes religieux aux partisans du libre marché, en passant par les libertariens, qui souhaitent une rupture brutale avec l’État, l’investissement militant sur le terrain relie bien souvent les courants conservateurs entre eux [4]. D’abord invisible, cette contestation est omniprésente dans le pays au début des années 2000. La chaîne de télévision Fox News, principal médiateur aujourd’hui des idées conservatrices, en est la preuve la plus éclatante.

Depuis une trentaine d’années _ vers 1980 _, les conservateurs occupent les principaux postes de pouvoir et affichent avec fierté leur capacité à gouverner le pays et à garantir sa sécurité dans un monde dangereux. Dès les années 1960, les cadres de l’organisation étudiante Young Americans for Freedom annonçaient qu’ils allaient prendre le pouvoir très rapidement pour mettre un terme à la faiblesse de gouvernance des Démocrates [5]. À la fin des années 1990, Tony Blankley, un temps proche conseiller du leader du parti républicain, Newt Gingrich, compare la révolution conservatrice à un « trotskysme de droite », non pour son idéologie, mais pour son travail de sape de minorité très agissante [6]. Hostiles à l’État social, les conservateurs promettent un État fort, centré sur la sécurité nationale, utilisant des méthodes de gestion et d’évaluation qui ont parfaitement fonctionné dans le privé. Depuis l’arrivée de Ronald Reagan, la dérégulation du monde du travail, la disparition progressive des programmes sociaux et la création d’un État militarisé fort _ voilà qui devrait nous rappeler quelque chose… _ ont été mis en œuvre lentement, mais sans discontinuer, par les militants conservateurs.

L’administration de George W. Bush aura révélé avec cruauté l’échec de gouvernance de cette génération de conservateurs. Le décalage entre l’effondrement des cadres élémentaires de la société et un discours très convenu a frappé _ tout récemment _ tous les Américains. Les terribles conséquences de l’ouragan Katrina ont révélé l’ampleur des effets sociaux du désengagement de l’État et du rôle accordé à la famille comme seule structure de régulation sociale. Devant une commission de la Chambre des représentants, Mike Brown, le responsable, fort critiqué à l’époque, de l’agence en charge des catastrophes naturelles, répondit avec une franchise désarmante, lorsqu’on lui demandait pour quelle raison le gouvernement n’avait pas veillé à apporter de la glace pour conserver les aliments après le passage de l’ouragan, que ce n’était pas « le rôle du gouvernement fédéral de m’aider à conserver au frais ma viande de hamburger dans mon réfrigérateur » [7] ! En Irak, l’échec de gouvernance a paru identique. Dans la conduite de la guerre contre le terrorisme et la gestion des affaires de la planète, les conservateurs ont semblé obtus, incapables de comprendre le monde qui les entoure au-delà de leurs croyances personnelles et religieuses. La crise financière a encore plus contribué à démontrer leur incompétence en matière de gouvernance. C’est à un échec générationnel  _ oui _ auquel nous avons assisté au cours des huit années de mandat de George W. Bush.

La mobilité sociale américaine en crise

Alors que les conservateurs promettaient davantage de mobilité sociale, accusant l’État d’être un facteur de blocage et un outil utilisé par les élites libérales (liberal) pour garantir leur reproduction sociale, ils lèguent au pays une crise structurelle de la méritocratie à l’américaine [8]. À plus d’un titre, l’ouragan Katrina a révélé les conséquences du désinvestissement social de l’État _ qu’on le médite, et bien vite, partout ! _, qui a pourtant fait l’objet d’un consensus politique dans les années 1990 [9]. Il est frappant de constater la prégnance de la thématique du concept sociologique d’underclass dans les écrits des journalistes qui ont rendu compte du désastre. L’ouragan a permis une redécouverte médiatique des soubassements économiques mais également socio-culturels de la pauvreté : être pauvre, c’est certes manquer d’argent, d’une voiture, mais aussi de contacts à l’extérieur, de relais dans le reste du pays. Bref, ce n’est pas un hasard si les pauvres furent les principales victimes de la catastrophe [10]. De façon cruelle, Katrina a mis au jour les blocages structurels de la société américaine. Les difficultés des populations pauvres à sortir de la ville révèlent, plus largement, une mobilité sociale en panne dans l’ensemble du pays.

Incontestablement, l’éducation américaine _ à prendre très vite, aussi, et partout !!! il y a urgence grave !!! _ ne joue plus son rôle d’ascenseur social et renforce le capital culturel et social des élites. Longtemps justifiés par la logique du marché, ces chiffres inquiètent aujourd’hui : alors que les déclarations d’un Bill Gates sur la corrélation entre la détention d’un diplôme d’études supérieures (master’s degree) et le niveau de réussite sociale sont acceptées par tous, le nombre d’étudiants diplômés stagne. Seuls l’Allemagne et les États-Unis sont dans ce cas aujourd’hui, alors que l’ensemble des pays industrialisés connaît une croissance forte du nombre de diplômés du supérieur _ même si ce critère est loin de suffire… La diversité sociale du recrutement dans les universités s’étiole. La part des bourses dans le financement des études s’étant réduite de 55 à 41% depuis 1980, le recours à l’emprunt est de plus en plus souvent obligatoire pour les parents et/ou les enfants. Cette stratégie familiale n’est pas identique partout. Une étude sur les quartiers pauvres de Boston a montré que seulement un tiers des lycéens issus des quartiers pauvres avaient passé l’examen SAT, indispensable pour l’admission dans l’enseignement supérieur, au cours du mois d’octobre de leur dernière année de lycée, contre 97% des enfants issus des milieux favorisés [11]. À cela s’ajoute le manque d’informations des milieux défavorisés qui, peu au fait des systèmes de bourses, hésitent à envoyer leurs enfants dans des universités coûteuses [12].

Les universités sont en effet contraintes de répercuter sur les frais d’inscription le ralentissement de l’investissement public. Cette diminution des fonds publics s’est opérée à un moment où le coût moyen de formation par étudiant a considérablement augmenté. Dans l’enseignement supérieur, les frais d’inscription ne cessent de s’accroître : entre 1976 et 1995, ils ont été multipliés par quatre à l’université de Californie-Los Angeles (UCLA) [13]. L’écart se creuse inexorablement entre les universités publiques et privées, en raison de la croissance des frais d’équipement, notamment dans le domaine informatique [14]. Est-ce un hasard si les critiques virulentes se multiplient contre l’élitisme de l’université américaine depuis une dizaine d’années ? D’après les données contenues dans le Social Register, le « bottin mondain » contenant la liste des familles de l’élite américaine, 92% des familles présentes en 1940 y sont toujours en 1977 [15]. En dépit des velléités réformatrices de l’après-guerre, les écoles préparatoires (prep schools) demeurent élitistes : seulement 4% des étudiants y accédant sont issus de la communauté afro-américaine, alors qu’ils représentent 19% des lycéens [16].

Sans surprise donc, les enfants issus des milieux défavorisés réduisent souvent leur temps de scolarisation à deux années. Pour financer leurs études, ils doivent travailler dans la restauration rapide et la grande distribution : Wal-Mart en emploie plusieurs milliers. Faute de réussite suffisante aux tests de fin d’année, ce sont souvent des petites universités (community colleges) qui les acceptent. En leur sein, les étudiants s’inscrivent en grande majorité pour des cours de rattrapage en anglais et en mathématiques. On estime à 60% le nombre de Latinos scolarisés dans le supérieur qui intègrent ce type d’université. Toutefois, et c’est là que le bât blesse, seulement 30% des étudiants inscrits décident de prolonger leur cursus au-delà des deux années requises [17]. Ces universités ne jouent plus le rôle de sas qu’elles avaient longtemps joué dans le pays pour recruter les meilleurs éléments. En d’autres termes, la société américaine apparaît de moins en moins égalitaire _ cf Paul Krugman. Le contrat social conservateur ne facilite donc guère l’ascension sociale de l’homme de la rue (common man).

La défaite d’un franc-tireur et d’un système

Le choix de John McCain par les militants républicains a été une réponse à cette crise structurelle. Longtemps considéré comme inclassable (maverick) dans la vie politique, il a toujours combattu en faveur de mesures de compromis, d’une politique migratoire moins frileuse à l’égard des Hispaniques et d’une lutte contre la corruption du personnel politique. À plusieurs reprises, il a montré sa volonté de faire de la politique autrement. Est-ce un hasard si McCain a appelé son bus de campagne le « bus du franc-parler » (straight talk bus) ? Sa différence l’avait pourtant longtemps handicapé. En 2000, le candidat George W. Bush n’avait pas hésité à distiller des insinuations racistes contre l’un des enfants adoptés par la famille McCain. Ses rapports amicaux avec les Démocrates, en particulier John Kerry, avaient également joué en sa défaveur. En 2008, en raison de l’échec de l’administration Bush, le processus s’inverse : sa différence devient un atout électoral pour les militants républicains. Tout dans son parcours semble faire de lui l’homme capable d’éviter une cuisante défaite de la droite américaine. Son passé de militaire et ses allures de sémillant retraité plaident plus encore en sa faveur. Il joue à merveille de sa carte de « dur » (tough guy), distillant à dessein les anecdotes sur son passé de bagarreur et, bien évidemment, utilisant son statut d’ancien combattant du Vietnam et de victime de la torture. Que s’est-il donc passé pour expliquer la défaite de John McCain ?

McCain est demeuré prisonnier de l’échec de gouvernance de l’administration Bush pendant toute la campagne électorale. La crise économique a agi comme un révélateur pour nombre d’électeurs. Au lieu de dénoncer la gestion dérégulée en cours depuis de nombreuses années, il a repris un discours convenu sur la bonne santé du système et les inévitables « canards boiteux » tout au long du mois de septembre. Ensuite, il n’a jamais réussi à lutter contre l’influence croissante de la base conservatrice qui imposa le choix de Sarah Palin. Au-delà de son incompétence flagrante pour la fonction, le parcours politique de Palin est entaché par la corruption. Pour le grand malheur de John McCain, l’Alaska et ses petits arrangements avec la morale ressemblèrent tout à coup à la manière dont, à Washington D.C., les conservateurs ont envisagé le pouvoir politique comme un patrimoine appartenant à celui qui l’exerce.

Dans un ouvrage récent, le fils de l’écrivain Saul Bellow _ Adam Bellow _ a émis l’hypothèse que le népotisme serait un élément structurant de la nation américaine depuis l’époque coloniale [18]. Au sein de l’administration du président George W. Bush, on comptait les fils de Strom Thurmond, d’Antonin Scalia, de Michael Powell, de Dick Cheney et de William Rehnquist. In fine, la campagne de John McCain a donné de plus en plus l’impression de ne s’adresser qu’à cette caste conservatrice qui, après s’être approprié le pouvoir, ne semblait pas prête à le rendre _ à méditer, bien sûr, pour d’autres lieux... Bien évidemment, et chacun doit avoir en tête l’ampleur de la tâche, les raisons mêmes de l’étrange défaite de John McCain rappellent à quel point _ certes ! _ le mandat de Barack Obama sera décisif pour les États-Unis, tant l’héritage conservateur apparaît dramatique.

par Romain Huret [19-01-2009]

Notes

[1] Marc Bloch, « L’Etrange défaite« , Paris, Coll. Folio Histoire, Gallimard, 1990, p. 174-175.

[2] Je me permets de renvoyer à mon ouvrage, « Les Conservateurs américains se mobilisent. L’autre culture conservatrice« , Paris, Autrement, 2008.

[3] Aux États-Unis, le terme libéral (liberal) désigne les personnes de gauche favorables au Parti démocrate.

[4] Alan Brinkley, « The problem of American conservatism », American Historical Review, 99, 1994, p. 409-429.

[5] Gregory Schneider, Cadres for Conservatism : Young Americans for Freedom and the Rise of the Contemporary Right, New York, New York University Press, 1999.

[6] Tony Blankley, « Street-Fighting Days », George, July 1998, p. 53.

[7] Cité dans Éric Lipton, Shane Scott, « Leader of Federal Effort Feels the Heat », New York Times, 3 septembre 2005, p. 1 ; Romain Huret, « L’ouragan Katrina et l’État fédéral américain. Une hypothèse de recherche », Nouveau Monde. Mondes Nouveaux, revue électronique, 7, 2007.

[8] Romain Huret, « Le recrutement des élites aux États-Unis au XXe siècle », Revue internationale d’éducation de Sèvres, n° 39, septembre 2005, p. 25-36.

[9] Romain Huret, « Le trou du donut ou l’inachèvement de l’État-providence américain », in Denis Lacorne (dir.), « Les États-Unis 1880-2000« , Paris, Fayard, 2006, p. 281-294.

[10] Matthew Mulcahy, « Hurricanes, poverty, and vulnerability : an historical perspective ».

[11] Cité dans Robert Haveman, Timothy Smeeding, « The role of higher education in social mobility », The Future of Children, vol. 16, n° 2, 2006, p. 125-150.

[12] Dans les 146 meilleures universités du pays, qui représentent 10 % de l’ensemble des étudiants, 74% des étudiants viennent des fractions les plus riches de la société, alors que seulement 3% viennent de milieux défavorisés. Dans les 253 universités de rang inférieur, les pourcentages sont respectivement de 46 % et 7%. Seules les petites universités (community colleges) accueillent de façon significative les étudiants pauvres.

[13] R. Benjamin, S. Carroll, Breaking the Social Contract : The Fiscal Crisis in Higher Education, Santa Monica, Council for Aid to Education, RAND, p. 17.

[14] C. H. Persell, P.W. Cookson, Jr., « Microcomputers and elite boarding schools : educational innovation and social reproduction », Sociology of Education, vol. 60, avril 1987, p. 123-134.

[15] David Broad, « The Social Register : directory of America’s upper class », Sociological Spectrum, 16, p. 173-181.

[16] C. H. Persell, P.W. Cookson, Preparing for Power : America’s Elite Boarding Schools, New York, Basic Books, 1985, p. 67.

[17] Chiffres tirés de Robert Haveman, Timothy Smeeding, « The role of higher education in social mobility », The Future of Children, vol. 16, n° 2, 2006, p. 146.

[18] Adam Bellow, « In Praise of Nepotism« , New York, Doubleday, 2003.

De quoi (nous) donner bien à connaître ; et penser…


Titus Curiosus, le 20 janvier 2009

Président Obama : lecteur et écrivain _ la construction d’une identité et d’une politique dans les pas d’Abraham Lincoln…

19jan

En contrepoint aux magnifiques « Rêves de mon père _ l’histoire d’un héritage en noir et blanc« , parus aux Etats-Unis en 1995,

puis réédités _ au moins une première fois (avec l’adjonction d’une « Préface« , alors) _ en 2004, à l’occasion de l’élection « au Sénat des États-Unis en tant que sénateur de l’Illinois » (page 11) de Barack Obama,

et traduits en français par Danièle Darneau (aux Presses de la Cité ; et paraissant maintenant _ décembre 2008 _ en Points-Seuil) ;

voici un bel article _ en anglais _

paru dans l’édition de ce 19 janvier _ veille de l' »inauguration » à Washington _ du New-York Times,

sous la plume de Michiko Kakutani,

intitulé « From Books, New President Found Voice ».

WASHINGTON _

In college, as he was getting involved in protests against the apartheid government in South Africa, Barack Obama noticed, he has written, that people had begun to listen to my opinions. Words, the young Mr. Obama realized, had the power “to transform” : “with the right words everything could change _ South Africa, the lives of ghetto kids just a few miles away, my own tenuous place in the world.

Much has been made of Mr. Obama’s eloquence _ his ability to use words in his speeches to persuade and uplift and inspire. But his appreciation of the magic of language and his ardent love of reading have not only endowed him with a rare ability to communicate his ideas to millions of Americans while contextualizing complex ideas about race and religion, they have also shaped his sense of who he is and his apprehension of the world.

Mr. Obama’s first book, Dreams From My Father _ en traduction française : « Les rêves de mon père _ l’histoire d’un héritage en noir et blanc«  _ (which surely stands as the most evocative, lyrical and candid autobiography written by a future president), suggests that throughout his life he has turned to books as a way of acquiring insights and information from others _ as a means of breaking out of the bubble of self-hood and, more recently, the bubble of power and fame. He recalls that he read James Baldwin _ l’auteur de « La chambre de Giovanni«  et de « La prochaine fois, le feu« _, Ralph Ellison _ l’auteur de « Homme invisible, pour qui chantes-tu ? » _, Langston Hughes _ l’auteur des « Grandes profondeurs » _, Richard Wright _ l’auteur de « Black Boy«  et « Un enfant du pays«  _ and W. E. B. Du Bois _ l’auteur des « Âmes du peuple noir«  _ when he was an adolescent in an effort to come to terms with his racial identity ; and that later, during an ascetic phase in college, he immersed himself in the works of thinkers like Nietzsche and St. Augustine _ l’auteur des « Confessions«  _ in a spiritual-intellectual search to figure out what he truly believed.

As a boy growing up in Indonesia, Mr. Obama learned about the American civil rights movement through books his mother gave him. Later, as a fledgling community organizer in Chicago, he found inspiration in “Parting the Waters” _ non traduit en français _, the first installment of Taylor Branch’s multivolume biography of the Rev. Dr. Martin Luther King Jr.

More recently, books have supplied Mr. Obama with some concrete ideas about governance : it’s been widely reported that Team of Rivals,” Doris Kearns Goodwin’s book _ non encore traduit en français _ about Abraham Lincoln’s decision to include former opponents in his cabinet, informed Mr. Obama’s decision to name his chief Democratic rival, Hillary Rodham Clinton, as Secretary of State. In other cases, books about Franklin Delanoe Roosevelt’s first hundred days in office ; and Steve Coll’s “Ghost Wars_ non encore traduit en français _ about Afghanistan and the C.I.A., have provided useful background material on some of the myriad challenges Mr. Obama will face upon taking office.

Mr. Obama tends to take a magpie approach to reading _ ruminating upon writers’ ideas and picking and choosing those that flesh out his vision of the world or open promising new avenues of inquiry.

His predecessor, George W. Bush, in contrast, tended to race through books in competitions with Karl Rove (who recently boasted that he beat the president by reading 110 books to Mr. Bush’s 95 in 2006), or passionately embrace an author’s thesis as an idée fixe. Mr. Bush and many of his aides favored prescriptive books _ Natan Sharansky’s “Case for Democracy” which pressed the case for promoting democracy around the world, say, or Eliot A. Cohen’s “Supreme Command” which argued that political strategy should drive military strategy. Mr. Obama, on the other hand, has tended to look to non-ideological histories and philosophical works that address complex problems without any easy solutions, like Reinhold Niebuhr’s writings _ non traduits en français _, which emphasize the ambivalent nature of human beings and the dangers of willful innocence and infallibility.

What’s more, Mr. Obama’s love of fiction and poetry _ Shakespeare’s plays (par exemple, ses « tragédies« ) , Herman Melville’s “Moby-Dick and Marilynne Robinson‘s “Gilead are mentioned on his Facebook page, along with the Bible _ par exemple « la Bible« _, Lincoln’s collected writings and Emerson’s “Self Reliance(en français « La Confiance en soi« ) _ has not only given him a heightened awareness of language. It has also imbued him with a tragic sense of history and a sense of the ambiguities of the human condition quite unlike the Manichean view of the world so often invoked by Mr. Bush.

Mr. Obama has said that he wrote “very bad poetry in college ; and his biographer David Mendell suggests that he once harbored some thoughts of writing fiction as an avocation.For that matter, “Dreams From My Father” evinces an instinctive storytelling talent (which would later serve the author well on the campaign trail) and that odd combination of empathy and detachment gifted novelists possess. In that memoir, Mr. Obama seamlessly managed to convey points of view different from his own (a harbinger, perhaps, of his promises to bridge partisan divides and his ability to channel voters’ hopes and dreams) while conjuring the many places he lived during his peripatetic childhood. He is at once the solitary outsider who learns to stop pressing his nose to the glass and the coolly omniscient observer providing us with a choral view of his past.


As Baldwin once observed, language is both “a political instrument, means, and proof of power” and “the most vivid and crucial key to identity : it reveals the private identity, and connects one with, or divorces one from, the larger, public, or communal identity.

For Mr. Obama, whose improbable life story many voters regard as the embodiment of the American Dream, identity and the relationship between the personal and the public remain crucial issues. Indeed, Dreams From My Father” written before he entered politics, was both a searching bildungsroman and an autobiographical quest to understand his roots _ a quest in which he cast himself as both a Telemachus in search of his father and an Odysseus in search of a home.


Like “Dreams From My Father”, many of the novels Mr. Obama reportedly admires deal with the question of identity : Toni Morrison’s “Song of Solomon_ en français « Le chant de Salomon » _ concerns a man’s efforts to discover his origins and come to terms with his roots ; Doris Lessing’s “Golden Notebook _ en français « Le Carnet d’or » _ recounts a woman’s struggles to articulate her own sense of self ; and Ellison’s “Invisible Man_ en français « Homme invisible, pour qui chantes-tu ? » _ grapples with the difficulty of self-definition in a race-conscious America and the possibility of transcendence. The poems of Elizabeth Alexander, whom Mr. Obama chose as his inaugural poet, probe the intersection between the private and the political, time present and time past ; while the verse of Derek Walcott (a copy of whose collected poems was recently glimpsed in Mr. Obama’s hands _ en français, « Une autre vie » _) explores what it means to be a  divided child”, caught on the margins of different cultures, dislocated and rootless perhaps, but free to invent a new self.

This notion of self-creation is a deeply American one _ a founding principle of this country, and a trope addressed by such classic works as The Great Gatsby(« Gatsby le magnifique« , de Francis Scott Fitzgerald) _ and it seems to exert a strong hold on Mr. Obama’s imagination.


In a 2005 essay in Time magazine, he wrote of the humble beginnings that he and Lincoln shared, adding that the 16th president reminded him of a larger, fundamental element of American life _ the enduring belief that we can constantly remake ourselves to fit our larger dreams.

Though some critics have taken Mr. Obama to task for self-consciously italicizing parallels between himself and Lincoln, there are in fact a host of uncanny correspondences between these two former Illinois state legislators who had short stints in Congress under their belts before coming to national prominence with speeches showcasing their eloquence : two cool, self-contained men, who managed to stay calm and graceful under pressure ; two stoics embracing the virtues of moderation and balance ; two relatively new politicians who were initially criticized for their lack of experience and for questioning an invasion of a country that, in Lincoln’s words, was “in no way molesting, or menacing the U.S.

As Fred Kaplan’s illuminating new biography (“Lincoln : The Biography of a Writer” _ non encore traduite en français _) makes clear, Lincoln, like Mr. Obama, was a lifelong lover of books, indelibly shaped by his reading _ most notably, in his case, the Bible and Shakespeare _ which honed his poetic sense of language and his philosophical view of the world. Both men employ a densely allusive prose, richly embedded with the fruit of their reading, and both use language as a tool by which to explore and define themselves. Eventually in Lincoln’s case, Mr. Kaplan notes, the tool, the toolmaker, and the tool user became inseparably one. He became what his language made him.

The incandescent power of Lincoln’s language, its resonance and rhythmic cadences, as well as his ability to shift gears between the magisterial and the down-to-earth, has been a model for Mr. Obama _ who has said he frequently rereads Lincoln for inspiration _ and so, too, have been the uses to which Lincoln put his superior language skills : to goad Americans to complete the unfinished work of the founders, and to galvanize a nation reeling from hard times with a new vision of reconciliation and hope.

« Paix » et « espérance » : ce ne sont pas que d’actifs espoirs

_ personnellement je n’apprécie que modérément le vocable « rêves » ; et, de fait, « ceux » du père du 44ème président, n’ont pas pris corps… _

« américains », bien sûr…


La tâche est grande, certes ; mais une confiance lucide _ à bâtir, patiemment : « yes, we can » _

vaut mieux que le cynisme des divisions montant systématiquement _ pour « régner », croient-ils… _ les uns contre les autres…


Et il y faut, en effet, une grande « vision« 

Et le « réalisme » vient peut-être, en changeant de camp

_ on se souvient de celui des Açores… _

de changer de sens…


Demain, nous serons sans nul doute nombreux à tourner nos regards

_ et avec « réalisme », donc _

vers cette renaissance d’espérance

à Washington ;

comme à Nairobi et à Djakarta…

Et

Guantanamo,

Gaza,

etc...

Soit, au sein même des États-Unis,

comme dans le « reste » de ce qui est aussi « le » _ et notre ! _ « monde » (= de plus en plus uniformisé) ;

soit un « monde » commun ; et _ qu’on le veuille ou pas ! _ partagé !..

soit, donc,

diviser et régner versus unir et réunir ;

 = aimer ou haïr…

Toute paix est une construction, et de très longue haleine…

Là-dessus,

(re-) lire

_ lecteurs, nous aussi ! et pour avoir (un peu) « voix au chapitre » (démocratique) _ ;

(re-) lire les « fondamentaux », tels que, par exemple, les « Traités«  :

« théologico-politique »

et « politique »

de Spinoza…

Titus Curiosus, le 19 janvier 2009

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