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Le bouleversant « Je te laisse dormir » d’Edith Bruck, ou la somptueuse conversation poursuivie – continuée avec Nelo Risi (1920 – 2015), le compagnon de sa vie…

02oct

Ce lundi 2 octobre,

achèvement de ma deuxième lecture bien attentive du « Je te laisse dormir » (2017-2018) d’Édith Bruck, le troisième volet (aux pages 195 à 318) du volume intitulé « Je te laisse dormir » ;

en complément de son « L’Hirondelle sur le radiateur » (2014-2015 ; aux pages 9 à 184), premier volet de ce volume, et de « L’Homme Nelo Risi » (un discours prononcé par Edith le 13 octobre 2016 ; et retranscrit ici aux pages 187 à 191), deuxième volet : 

un volume de 320 pages qui paraît jeudi prochain 6 octobre, en une traduction de René de Ceccatty, aux Éditions du sous-sol…

J’ai accédé à quelques uns des divers récits de survie et vie d’Édith Bruck _ parmi ceux qui  ont été traduits en français _ par ma  lecture, en janvier 2022, tout d’abord, de son stupéfiant « Le Pain perdu«  _ paru, aux Éditions du sous-sol, en une traduction de René de Ceccaty, le 7 janvier 2022 _ (« Il Pane perduto » avait paru en 2021 aux Éditions La Nave di Teseo),

bientôt, très vite, suivie de ma lecture de son « Qui t’aime ainsi » _ paru le 21 janvier 2022, en Points-Seuil, en une traduction de Patricia Amardeil, datant d’avril 2017… :

cf la succession de cette sélection de 9 articles miens de janvier et février 2022 :

_ «  » (7 janvier 2022)

_ «  » (8 janvier)

_ «  » (10 janvier)

_ «  » (11 janvier)

_ «  » (12 janvier)

_ «  » (13 janvier)

_ «  » (22 janvier)

_ «  » (10 février)

_ «  » (11 février 2022)

puis ces 3 articles récents de septembre et octobre 2023 :

_ «  » (18 septembre 2023)

_ «  » (28 septembre)

_ «  » (1er octobre 2023)

Et maintenant,

le somptueux récit « Je te laisse dormir«  _ « Ti lascio dormire«  est paru en 2019 aux Éditions La Nave di Teseo _ est une longue bouleversante lettre de 122 pages qu’Édith Bruck adresse à son compagnon de 58 ans de vie (rencontré, à Rome, au Palazzo Marignoli, Via del Corso (in « Je te laisse dormir » page 187), ou bien/et au restaurant Otello, via della Croce (in « Le Pain perdu« , page 152) le 9 décembre 1957, puis épousé le 17 mars 1966 au Capitole de Rome _ cf la rapide mention de cet événement à la page 154 du « Pain perdu«  _, Nelo Risi (Milan, 21 avril 1920, Rome, 17 septembre 2015), décédé en leur domicile du 72 Via del Babuino, à Rome, ce 17 septembre 2015 :

Page 197 :

« Cette nuit _ la date précise n’est pas indiquée : au cours de l’été 2017… _, comme souvent dans le demi-sommeil, l’esprit occupé par toi _ voilà _,  j’ai pensé t’écrire _ un medium absolument capital pour Édith Bruck, si fondamentalement, consubstantiellement, écrivain, depuis ses premiers écrits, en 1945... J’ai carrément pris cette décision. Sans bien encore savoir quoi te dire, mais ça ne m’inquiète pas. Je sais, d’expérience _ de toute sa vie d’écriture, dès 1945, donc… _ que l’idée me suffit, que c’est une nécessité _ de révélation de et à soi-même, d’abord. Les mots se multiplieront tout seuls et d’un mot en naîtra un autre emportant avec lui _ en sa formidable dynamique révélatrice _ quelque chose de déjà mûr _ voilà… _, prêt à voir le jour sur la page _ voilà, voilà.

Tout doucement je me suis levée pour ne pas te réveiller _ « Ti lascio dormire«  ; l’expression apparaîtra un peu plus loin, à la page 204… _, comme si tu étais encore près de moi et comme si je n’avais pas compté, il y a près de deux ans _ c’était le 17 septembre 2015 ; nous sommes donc ici l’été 2017… _, l’effroi dans mon regard, tes quatre derniers souffles brefs. ensuite plus rien, rien que les cris d’Olga (notre aide à domicile dans la dernière période de ta longue maladie _ d’Alzheimer, apparue lors du premier malaise à Assise, l’été 2004 _), « C’est fini ! C’est fini ! » et mes cris inarticulés « Non non non ! », avant que je ne me jette sur le divan du salon où recroquevillée comme un fœtus je me suis détachée du réel« …


Et pages 203 – 204 :

« Je ne sais pas pourquoi, mais pour la première fois _ depuis presque deux ans _ je m’assois devant ma vieille Olivetti pour t’écrire. Que de choses il nous restait à nous dire et combien il en restera ! _ en cette conversation déjà perpétuelle et ainsi perpétuée. Une énormité, malgré les soixante années _ du 9 décembre 1957 de leur rencontre romaine, au 17 septembre 2015 des derniers souffles de Nelo, à leur domicile du 72 Via del Babuino… _ l’un près de l’autre, qui n’ont pas suffi, pas à moi en tout cas, pour avoir la liberté _ totale et absolue _ de nous parler. La liberté, avec toutes ses limites, tu l’as vécue, en bien ou en mal ; moi _ asymétriquement en leur couple _, je l’ai subie, du fait de « mon amour indulgent », comme une de mes amies l’a défini _ en une relation aimante réciproque et mutuelle, oui, mais pas tout à fait symétrique…

Tu étais et tu es _ toujours _ tout pour moi : langue, patrie, famille, père et mère. L’homme le meilleur que j’aie jamais rencontré, et pourtant j’en ai tellement rencontré, de passage dans ma vie errante, et même les meilleurs, les plus cultivés, valaient moins que toi. Personne ne t’est comparable, à toi qui te sous-estimais dans le souci obsessionnel de défendre ta dignité, ta liberté et ton honnêteté. Tu n’étais pas en mesure de faire quelque chose pour de simples raisons de survie. L’argent, pour toi, laïque, non baptisé, c’était vraiment les excréments du Diable. Tu ne savais même pas ce qu’était une facture ! Et je t’aimais pour cela aussi ; le pouvoir, l’argent sont la ruine du monde, répétais-tu« …

Et page 204, 12 lignes plus bas :

« Quand je me réveille, le matin, souvent, en me levant, je tourne la tête vers ta place et une phrase tant de fois répétée échappe toute seule à mes lèvres :

_ Je te laisse dormir.« 

Puis, page 205 – 206 :

« Depuis ce soir-là _ du jour de tes derniers souffles, le 17 septembre 2015 _, je n’ai plus touché mon stylo : tu te souviens que tu ne le supportais plus dans ma main, quand, dans les derniers temps _ en 2014-2015… _ de ta maladie _ d’Alzheimer _, je prenais ces rares notes qui sont par hasard devenues un livre _ le terrifiant et sublime « L’Hirondelle sur le radiateur«  _ ? Après ta disparition, je me suis dit que je n’écrirais plus jamais ; et puis, il y a quelques jours _ cet été 2017 _, en pleine nuit, j’ai décidé de le faire pour te raconter _ à toi, Nelo, sur le déroulé du papier… _ des choses sur moi, sur nous après toi _ « On se marie pour poursuivre la conversation » (Ford Maddox Ford) et « Pourquoi permettre à la mort de l’interrompre ? » (Julian Barnes) sont les deux parfaits exergues de cette formidable conversation reprise et poursuivie (dès lors aussi sur le papier…) de ce superbe « Je te laisse dormir«  _, parce que, dans la vie, il y a toujours un avant et un après, et quand le vide paraît me suffoquer et pèse trop, il est temps d’écrire, mon unique liberté _ voilà ! et revoici ce capital « Écrire pour respirer ! » si consubstantiel à l’écrivain qu’est fondamentalement Édith Bruck, au-delà de la personne d’Édith Steinschreiber (née à Tiszabercel le 3 mai 1931, et passée par Auschwitz en 1944 ; et bien d’autres épreuves ensuite…) : il faut y insister..; cf mon article du 11 février 2022 : « «  _ Quand, la nuit, mes bras s’allongent vers ta place déserte et que mon corps se retrouve dans l’espace qui t’était réservé au risque de tomber, il est temps d’écrire.

Mes jours ne sont plus inutiles, durant les nuits, je ne sens plus aussi souvent ta main, mais je sais que tu es là et que tu m’effleures le dos. (…)

L’écriture est oxygène _ voilà, voilà ! _, elle purifie _ en décantant vraiment et démêlant, pour commencer, les situations enchevêtrées et difficiles… En te parlant, en t’écrivant, j’ai l’impression d’émerger du puits obscur où je suis tombée _ à ton décès _ et de remonter vers la lumière, vers la blancheur _ lumineuse, éclairante et illuminatrice _ de la page que je remplis pour toi » _ pour reprendre et continuer – poursuivre l’indispensable aimante conversation (asymétrique, aussi ; mais c’était mutuellement accepté ainsi, en l’état de leurs tempéraments de fond si contrastés…) interrompue un moment de presque deux ans : entre nous deux.

Ce lundi 2 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Ce que j’apprends de plus du parcours de vie assez bousculé d’Edith Bruck (et de ses proches) à la lecture de « L’hirondelle dans le radiateur » (de 2014-2015) par rapport à mes lectures de « Qui t’aime ainsi » (de 1959) et « Le Pain perdu » (de 2021)…

01oct

En la synthèse _ riche et pointue ; et je n’ai rien lu jusqu’ici d’un peu équivalent… _ de mon article du 10  février 2022 « « , et en l’absence d’auto-biographie, ainsi que de biographie, jusqu’ici, d’Édith Bruck,

j’avais pas mal appris de ma comparaison minutieuse des récits de sa vie qu’avait réalisés Édith Bruck en 1959, avec « Qui t’aime ainsi« , et en 2021, avec « Le Pain perdu » _ avec beaucoup de noms cryptés, qu’il fallait retrouver : ceux des prénoms de ses frères et sœurs et des autres membres de sa famille, pour commencer (variant d’un récit à l’autre…), de ses maris successifs, et de pas mal de personnes rencontrées, ici où là, en ses pérégrinations compliquées de Tiszabercel jusqu’à Rome, etc. ; là-dessus, cf le décryptage de mon article du 10  février 2022 : « « …

Venant de relire ce dimanche 1er octobre son récit « L’Hirondelle sur le radiateur » de 2014-2015, publié, conjointement avec « Je te laisse dormir » de 2017, en traduction française par René de Ceccatty, aux Éditions du sous-sol _ le volume est à paraitre vendredi 6 octobre prochain aux Éditions du sous-sol _,

je ne peux manquer de m’interroger :

d’une part sur la différence des récits que la narratrice, Édith Bruck elle-même,  donne de sa première rencontre, le 9 décembre 1957, à Rome, avec celui qui devient très vite le compagnon de sa vie, et qu’elle épousera, au Capitole de Rome, le 17 mars 1966, Nelo Risi, et dont elle recueillera le dernier souffle, en leur domicile du 72 Via del Babuino, à Rome, le 17 septembre 2015 ;

et d’autre part de ce que, après quelques petites recherches à partir des apports de la lecture attentive de ce nouveau texte qu’est « L’Hirondelle sur le radiateur« , je découvre concernant quelques données nouvelles de certaines des personnes abordées dans « Le Pain perdu » :

par exemple,

_ la sœur bien-aimée Adel Steinschreiber Taub (nommée Judit dans « Le Pain perdu » et Eliz dans « Qui t’aime ainsi« ) : née à Tiszakarad, le 12 mars 1927, et décédée à Tel-Aviv le 23 juin 2010, la très attentive protectrice d’Édith en 1944-45, à Auschwitz, Bergen-Belsen, etc. (cf les terribles récits de « Qui t’aime ainsi » et « Le Pain perdu« ),

Adel avait eu deux maris, en 1946 et en 1982, tous les deux nommés Taub :

_ Karoly Taub (Tiszadob, 28 octobre 1922 – Merlo (Buenos-Aires), 9 mars 1974), épousé à Chypre, en 1946, et dont Adel a eu deux enfants, Haïm Taub, en 1947 _ lui-même, en 2014, père de 3 fils, et grand-père de 2 petits-enfants, et psychologue social en Israël _, et Deborah Taub Damascelli, née en 1956, la très proche nièce « romaine » d’Édith _ épouse du romain Lucio Damascelli, et mère de leurs 3 enfants : Ariel, Daniel et Lisa Damascelli… _ ;

_ puis Alex Taub (Szamossalyi, 19 février 1923 – ?), qu’Adel, devenue Zahava en Israël, a épousé le 22 août 1982, à New-York, quartier de Queens ;

ou bien

_ celle qui fut la première épouse (australienne) de Nelo Risi, jusqu’ici nommée seulement, et sans davantage de précision, « Mitty« , Mitty Risi :

Juanita Lee-Brown (San Francisco, 22 octobre 1922 – Trinco – Sri Lanka -, 3 juin 2012), célèbre peintre australienne, avec laquelle Nelo Risi a vécu plusieurs années à Paris ;

et dont Nelo Risi n’a pu divorcer _ à cause des lois italiennes d’alors _ que bien après sa rencontre à Rome, le 9 décembre 1957 avec Édith, que Nelo n’a pu épouser au Capitole de Rome que seulement huit années plus tard, en 1966, le 17 mars _ pour être un peu précis _, alors qu’ils vivaient ensemble _ Édith ayant enfin quitté la chambre très obscure et exigüe où elle vivait jusqu’alors, chez Madame Ida, dans le même quartier, non loin de la Piazza di Spagna _ depuis plusieurs années déjà, dans le petit studio de Nelo, Piazza Mignanelli, non loin des grands escaliers de la Piazza di Spagna…

Mais c’est surtout la comparaison des récits de sa première rencontre avec Nelo Risi, aux pages 150 à 152 du « Pain perdu » _ lu en janvier-février 2022 _,

et aux pages 187 à 188 du récit « L’Homme Nelo Risi »,

intercalé entre « L’Hirondelle sur le radiateur » et « Je te laisse dormir » _ lu depuis le 18 septembre dernier _, au milieu du volume « Je te laisse dormir » à paraître jeudi 6 octobre prochain aux Éditions du sous-sol,

qui m’a assez intrigué :

« Parfois j’allais manger chez Otello _ Via della Croce, 81, proche de la Via del Babuino (du futur domicile, au 72, de Nelo et Édith) et de la Via Condotti, où travaillait alors Édith, dans la boutique de luxe de Gian-Carla Mandelli (« Nadia« , ou encore « Madame G.« ), où officiait le fameux coiffeur des stars « aux mains d’or« , Filippo (cf les pages 148 à 154 du « Pain perdu« )… _ pour mille lires, comme en famille, car j’avais sympathisé avec la femme  _ Nora Geronzi _ et les filles _ Maria-Pia, Franca, Gabrielladu restaurateur _ Giuseppe Caporicci, dit Otello ; cf cet intéressant et significatif article en date du 15 mars 2023 : « A tavola… da Otello alla Concordia« … _ « ,

page 150 du « Pain perdu« .

(…)

« Chez Otello, j’avais rencontré, il y avait déjà longtemps, un émigré arménien _ qui ? _ qui était critique littéraire, et c’était la première fois que je le voyais _ ce très mémorable 9 décembre 1957 _ avec un homme qu’il me présenta comme poète et cinéaste _ sans que j’identifie alors son nom… Cet inconnu m’interrogea aussitôt sur le livre que j’étais en train d’écrire _ le crucial « Qui t’aime ainsi« , qui, une fois achevé, paraîtra un peu plus tard, en 1959, aux Éditions Lerici… Je me plongeai dans son visage, dans ses yeux érudits, je fixai sa bouche charnue, je bus ses paroles avec son « r » aristocratique que j’aurais toujours voulu toujours entendre, ses mains agitées à la paume tendre, délicate, que j’aurais voulu toujours sentir entre les miennes, son beau visage marqué et fragile, que je ne pourrais oublier, un homme qui est entré aussitôt dans mon âme, qui m’a vidée de toute mon énergie, en faisant trembler mes genoux. Une impression si immédiate, irrationnelle, totale me fit peur, surtout à l’égard d’un inconnu dont je ne connaissais _ à cet instant-ci même pas le nom, qui m’avait échappé, car son être m’avait comme étourdie, et je compris _ sur le champ _ que je m’enfonçais dans quelque chose d’inexplicable dont je ne remonterais plus.

Nelo, l’homme élu  parmi des millions d’hommes, se donnait à moi et disparaissait, Me cherchait et M’abandonnait. Me voilait et ne me voulait pas« ,

page 152 du « Pain perdu« .

Et :

« J’ai fait sa connaissance le 9 décembre 1957 à Rome, dans le Palazzo Marignoli _ sur le Corso, où se tenaient des réceptions et des conférences où cinq personnalités de retour de la Chine de Mao vont raconter leur expérience.

Ugo Casiraghi, critique de cinéma _ (Milan, 25 février 1921 – Gorizia, 7 janvier 2016) triestin, sans ascendance arménienne _, me demande lequel de ses compagnons de voyage me plaît le plus et je lui indique Risi.

_ Non, non, me dit-il, c’est le meilleur d’entre nous, mais c’est le plus compliqué _ voilà ! _, j’ai partagé sa chambre en Chine, choisis-en un autre.

_ Non, lui, ai-je insisté avant de savoir qui c’est, comment il s’appelle.
C’est l’élu de mon cœur, à en juger mes battements accélérés, rien qu’à le voir, dès lors pour le restant de mes jours.

Le soir même à dîner _ où ? chez Otello, via della Croce, 81 ? _ je suis assise face à lui, il me propose de goûter le jambon, que je n’ai jamais mangé, et je lui dis aussitôt que je suis juive, une survivante des camps de concentration nazis.

Le jambon au bout de la fourchette dans sa main reste suspendu en l’air, son regard clair s’assombrit et, presque rapetissé d’un coup, il me demande pardon comme s’il était coupable de la terrible épreuve que j’avais endurée _ en 1944- 1945.

À partir de ce 9 décembre, notre destin – moi, dernier enfant de l’obscurantisme, née dans une pauvre famille hongroise, lui descendant des Lumières, dans une famille bourgeoise de Milan – se tisse de manière indéfectible _ voilà.

Après une longue et pénible attente _ voilà _ d’un « oui » de sa part, je déménage de ma _ très sombre et très exigüe_ chambre meublée dans son studio solitaire _ de la Piazza Mignanelli, non loin des escaliers de la Piazza di Spagna.

pages 187-188 du volume « Je te laisse dormir » qui paraît vendredi prochain 6 octobre. 

(…)

Ainsi commence notre cohabitation dans la différence _ oui qui nous enrichit réciproquement et sans être conditionnée par l’amour pour lui, avec la lumière _ sereine et lucide, distanciée _ de la raison, je peux dire que vivre avec un homme rare, exceptionnel, est une grâce« ,

page 189 du « Je te laisse dormir » qui paraît vendredi.

À suivre…

Ce dimanche 1er octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Début de lecture du très attendu, de ma part, de « Je te laisse dormir » d’Edith Bruck, à paraître aux Editions du sous-sol le 6 octobre prochain, en une traduction de René de Ceccatty…

18sept

Ayant reçu au courrier ce jour le « Je te laisse dormir » d’Édith Bruck, traduit par René de Ceccatty, à paraître aux Éditions du sous-sol le 6 octobre prochain _ outre « Je te laisse dormi« , aux pages 193 à 418le volume comprend aussi « L’Hirondelle sur le radiateur« , aux pages 7 à 184 ; ainsi qu’un bref  « L’Homme Nelo Risi« , aux pages 185 à 191 :

« La rondine sul termosifone« , écrite en 2014-2015, est parue chez l’éditeur La Nave di Teseo le 19 janvier 2017 ;

« Te lascio dormire« , écrit postérieurement au décès de Nelo Risi le 17 septembre 2015, à Rome, est paru le 3 octobre 2019 chez le même éditeur, La Nave di Teseo ;

et « L’Uomo Nelo Risi« , « brève intervention d’Edith Bruck aux journées d’études Parole et immagini per Nelo Risi, Fondazione Carlo Palmisani«  qui se sont tenues à San Salvatore Monferrato les 13 et 14 octobre 2016, date, lui, du 13 octobre 2016… _,

j’en ai entrepris immédiatement la lecture…

Et en forme en quelque sorte d’introduction,

ou de seuil,

je me permets de renvoyer d’abord ici à une sélection de 7 articles _ écrits du 7 janvier au 11 février 2022 _ que j’ai consacrés à mes lectures _ proprement enchantées _ d’Édith Bruck, et plus spécialement de ses sublimes et décisifs récits autobiographiques « Qui t’aime ainsi » de 1959 et « Le Pain perdu » de 2021,

dont voici les 7 liens :

_ le 7 janvier 2022 : «  » ;

_ le 8 janvier 2022 : «  » ;

_ le 11 janvier 2022 : «  » ;

_ le 13 janvier 2022 : «  » ;

et surtout ces trois-ci,

d’ampleur davantage panoramique : 

_ le 21 janvier 2022 : «  » ;

_ le 10 fèvrier 2022 : «  » ;

_ et le 11 février 2022 : « « .

À suivre, avec passion…

Ce lundi 18 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Une présentation vidéo essentielle du « Pain perdu » d’Edith Bruck par son traducteur en français René de Ceccatty, sur le site d’Akadem

24fév

Voici le courriel que je viens d’adresser à René de Ceccatty,

en venant de découvrir, par hasard, la vidéo essentielle (de 18′) de sa présentation du « Pain perdu« , sur le site d’Akadem :

 

Cher René,

 
je viens de regarder-écouter ta présentation du « Pain perdu » d’Edith Bruck, pour Akadem,
dans laquelle, comme toujours, tu vas à l’essentiel !
 
Les comparaisons des œuvres d’Edith Bruck, dès « Qui t’aime ainsi »,
avec les témoignages majeurs d’Imre Kertész _ « Être sans destin » et « Le chercheur de traces » _ et Primo Levi _ « Si c’est un homme » et « Les Naufragés et les rescapés » _, mais aussi Aharon Appelfeld _ « Histoire d’une vie » _,
sont aussi très bienvenues pour bien situer la place, immense, d’Edith Bruck, parmi ces œuvres _ faut-il dire littéraires ? _ fondamentales témoignant de la Shoah
mais aussi de ses suites, toujours, toujours présentes.
Et tant qu’elle peut écrire, Edith Bruck continue, continue de porter témoignage.
 
Participer si peu que ce soit à la diffusion de l’œuvre d’Edith Bruck me paraît donc très important !
 
L’humanité fondamentale d’Edith Bruck est, bien sûr, excellemment soulignée dans ce que tu dis ici,
en particulier dans l’accueil que vient de lui réserver le pape François, allant personnellement lui rendre visite chez elle, en son domicile romain…
Comme en la déception d’Edith Bruck devant le geste de suicide de son ami Primo Levi, 
dont témoigne son poème aux pages 39-40 de « Pourquoi aurais-je survécu ? ».
 
Bravo et merci !
 
Francis
 
L’invasion de l’Ukraine est terrifiante !

Ce jeudi 24 février 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

Quelques éléments que j’ai appris de ma lecture comparée de « Qui t’aime ainsi » (de 1959) et « Le Pain perdu » (de 2021), en particulier sur la constellation familiale des Steinschreiber-Bieber-Deutsch, et le cousin Tibi…

10fév

La comparaison-confrontation des deux récits autobiographiques, « Qui t’aime ainsi » (en 1959) et « Le Pain perdu » en 2021), est riche de bien intéressantes données,

outre, bien sûr, le fait que ces deux actes d’écriture avaient deux fonctions bien différentes pour Edith Bruck, leur auteur, à deux époques cruciales de sa vie de personne, autant que d’écrivain-témoin :

en 1958-59, trouver à qui _ le papier ! avec le stylo… _ parler, se confier, afin d’essayer de se trouver enfin, et se comprendre mieux ;

en 2020-21, revenir, à 90 ans, et face aux résurgences nauséabondes de l’Europe d’aujourd’hui, en particulier en sa Hongrie natale, comme en son Italie d’accueil, du négationnisme de l’Histoire _ de la Shoah _ et de la barbarie annihilatrice de l’antisémitisme, ainsi que l’expriment plusieurs expressions on ne peut plus limpides et éclairantes au final de cet admirable « Pain perdu » :

_ à la page 156 :

« En fille adoptive de l’Italie, qui m’a donné beaucoup plus que le pain quotidien, et je ne peux que lui en être reconnaissante, je suis aujourd’hui profondément troublée pour mon pays et pour l’Europe, où souffle un vent pollué par de nouveaux fascismes, racismes, nationalismes, antisémitismes, que je ressens doublement : des plantes vénéneuses qui n’ont jamais été éradiquées et où poussent de nouvelles branches, des feuilles que le peuple dupé mange, en écoutant des voix qui hurlent en son nom, affamé qu’il est d’identité forte, revendiquée à cor et à cri, italianité pure, blanche… Quelle tristesse, quel danger !  » ;

_ et aussi, page 164, au final de la formidable adresse de sa « Lettre à Dieu » :

« Je Te prie, pour la première fois je Te demande quelque chose : la mémoire, qui est mon pain quotidien, pour moi, infidèle fidèle ; ne me laisse pas dans le noir, j’ai encore à éclairer quelques jeunes consciences dans les écoles et dans les amphis universitaires où, en qualité de témoin, je raconte mon expérience depuis une vie entière« …

Mais cette comparaison-confrontation mienne de ces deux récits autobiographiques d’Edith Bruck, m’a aussi fait m’interroger sur certains flous et certainss blancs _ volontaires _ qui constituent, à mes yeux du moins, autant de « tâches aveugles« , dont l’insatifaction de mon intarissable curiosité de lecteur soucieux de comprendre le mieux possible les tenants et aboutissants de ces récits, me priait de dépasser, vaincre, résoudre les questions qu’elles ne cessaient de me poser :

bien sûr, je comprends parfaitement que la révélation de certains graves faits advenus nécessite de protéger _ un peu _ l’identité véridique et réelle de ceux qui, ou bien y ont directement participé, ou bien en ont été des témoins plus ou moins impliqués :

ainsi, dans chacun de ses deux récits autobiographiques, Edith Bruck ne se résout-elle pas à donner les prénoms effectifs de ses trois sœurs, Lili, Magda et Adel, et de ses deux frères, Ôdön et Laszlo ;

dans « Qui t’aime ainsi« , en 1958-59,

Lili est Leila, Magda est Margo, Adel est Eliz, Ôdon est Peter, et Laszlo est Laci ;

alors que dans « Le Pain perdu« , en 2020-21,

Lili devient Sara, Magda devient Mirjam, Adel devient Judit, Ôdon devient David, et Laszlo devient Jonas _ des prénoms affichant (assumant et proclamant même) très clairement leur judéité.

Surtout ce qui me frappe, après plusieurs relectures patientes et attentives aux moindres détails donnés, c’est la disparition de certains personnages, ou parfois seulement le gommage de leur nom _ qu’il s’agisse du nom légal de l’acte d’état-civil de leur naissance, ou de celui que leur a donné, dans chacun de ces deux récits, l’autrice, Edith Bruck _ de certains des épisodes _ riches et dramatiquement agités _ de chacun de ces deux livres.

Ainsi, d’abord et surtout, le personnage du premier amant d’Edith, que celle-ci, en son récit de 1958-59, nomme « Tibi » _ cf ceci, page 83 de « Qui t’aime ainsi«  : « Cinq jours après mon arrivée dans le village slovaque _ en ayant quitté clandestinement la Hongrie, fin décembre 1945 _ le parent tant attendu _ pour l’aider en sa difficile fuite _ arriva. Il se présenta comme le beau-frère de ma sœur Margo (Magda) mais moi je reconnus mon cousin Tibi (Gershon Deutsch)«  _ ; un personnage qu’Edith Bruck situe doublement, au passage, au sein de sa constellation familiale _ de la famille Steinschreiber _ d’une part comme un de ses cousins _ côté Bieber, celui de sa mère, née Berta Bieber _, mais aussi, d’autre part, comme le beau-frère de sa sœur Magda _ alias Margo, ou Mirjam _, puisque ce Tibi est le frère du second mari de Magda _ Ernö Deutsch _ ; et que Magda Steinschreiber, déjà veuve de son premier mari, et mère d’un premier enfant, s’était remariée avec un de ses cousins _ côté maternel, Bieber _, comme l’indique sans s’y attarder ni insister un bref passage, page 92, du « Pain perdu » :

« Mirjam _ Magda Steinschreiber, alias « Margo«  dans « Qui t’aime ainsi«  _ était en train de se remarier avec un de nos cousins _ Ernö Deutsch avait en effet pour mère Helen Bieber (Tiszakarad, 27 juin 1892 – Auschwitz, mai 1944), épouse de David Desider Deutsch (Tolcsva, 17 septembre 1884 – Auschwitz, mai 1944), qui était une des sœurs de Berta Bieber (Tiszakarad, 1er février 1895 – Auschwitz, mai 1944), épouse, elle, de Sandor Sulem Steinschreiber (Tiszabercel, 1895 – Dachau, 6 mars 1945) ; laquelle Berta Bieber était la mère de Lili, Magda, Ôdon, Adel, Laszlo et Edith Steinschreiber : voilà donc la raison du double cousinage entre, d’une part, Magda Steinschreiber et son second mari Ernö Deutsch ; et, d’autre part, entre Edith Steinschreiber et son premier amant, Gershon Deutsch (Krumpachy, 16 février 1922 – Brooklyn, 20 septembre 2009), le trop beau « cousin Tibi » rencontré non loin de la frontière entre la Hongrie et la Slovaquie, comme on le lit à la page 83 de « Qui t’aime ainsi«  : « Mon cousin avait tout juste vingt-trois ans, il était très beau, grand et blond, pas très intelligent« …  _, qui _ lui, Ernö Deutsch (Moldava Nad Bodnou (près de Kosice), 26 janvier 1920 – New-York, 29 janvier 1991) _ avait perdu sa femme et ses deux enfants, et le couple s’était installé en Tchécoslovaquie« .

Et je remarque, aussi, qu’à nul moment, ni dans « Qui t’aime ainsi« , ni dans « Le Pain perdu« , Edith Bruck n’indique un prénom, ni a fortiori le nom de famille, pour ce qui concerne l’identité effective d’Ernö Ernest Deutsch, boulanger, de profession _ et il le sera à nouveau et encore aux États-Unis, à New-York…

Dans le récit de « Qui t’aime ainsi« , le personnage d’Ernö _ évoqué sans nom ni prénom, donc… _ apparaît simplement comme le mari de la sœur d’Edith, Magda alias ici Margo _ ; ainsi, aussi, mais en une occurrence unique _ à ne donc pas laisser passer en sa lecture, car tout cela demeure sans insistance aucune _, à la page 86 de « Qui t’aime ainsi« , comme le frère de Tibi : « Il travaillait dans une usine d’ampoules électriques, comme son frère Tibi. C’était la seule chose qu’ils avaient en commun« …

 Et je note encore au passage que dans « Le Pain perdu« , cette fois,

ni Magda _ alias ici Mirjam, et non plus Margo _ ni son mari, ni le premier enfant né du premier mariage de Magda, le petit « Tomika« , ni non plus, pas davantage, le fils du couple de Magda et Ernö, né, le bébé, aux alentours du mois de juin 1945, n’apparaissent _ afin de réduire le nombre des personnages présents dans ce récit de 2020 ?.. Ou pour gommer la présence alors en Israël de cette famille ?.. _ lors du récit de la complexe et agitée épopée israëlienne d’Edith, entre le 3 septembre 1948, son arrivée au port d’Haïfa, et 1952, son départ d’Israël :

de la famille d’Edith,

n’apparaissent en effet dans « Le Pain perdu« , que les familles de sa sœur Adel _ alias cette fois Judit _, épouse Taub _ Ámos Taub (mais Ámos est-il bien son prénom effectif ? C’est sous le prénom de Ze’ev qu’il apparaît ailleurs, et officiellement ; comme sous celui de Zahava, Adel, son épouse…) et Adel Steinschreiber (alias ici Judit ; Adel était Eliz dans le récit de 1959) se sont en effet mariés lors de la retenue de plusieurs mois à Chypre de leur bateau à destination de la Palestine, avant que ce bateau ait été enfin autorisé par les Anglais à accoster enfin en ce qui devient Israël.. : « Judit vivait dans un quartier de la banlieue de Haîfa, avec son mari, épousé à Chypre, et ils avaient un enfant prénommé Haïm« , lit-on, page 108 du « Pain perdu«  _, et de son frère Ôdön _ alias cette fois David : « mon frère, sa femme et leur bébé vivaient dans une coopérative agricole » (page 108) ; « près de Zikhron Yaakov » (page 114)… _ ;

mais pas la famille de Magda _ alias ici Mirjam (et Margo dans le récit de 1959) _ et Ernö _ pourtant très amplement évoquée, et à de nombreuses reprises, avec leur domicile à Haïfa, dans le récit de « Qui t’aime ainsi« , en 1959 : aux pages 111, 112, 113, 114, 115, puis 129 ; Edith logeant un moment chez sa sœur, à Haïfa … _ ;

ni, non plus, qu’une ultime apparition de Gershon Deutsch _ alias Tibi _, et précisément au domicile de Magda et Ernö Deutsch, à HaïfaGershon Deutsch venait ce jour-là rendre visite à sa belle-sœur Magda _ ; ainsi que le mentionnait, page 115, le récit de « Qui t’aime ainsi« , en 1959 :

« Un jour, je rencontrai le cousin Tibi _ Gershon Deutsch _, militaire lui aussi, qui venait saluer _ chez elle, à Haïfa _ ma sœur _ sa belle-sœur, l’épouse de son frère Ernö Deutsch. Il me fit à nouveau la cour, disant que désormais j’étais une femme divorcée _ de Milan Grün, le premier mari d’Edith _ et je n’avais rien à perdre. Je le méprisais plus qu’avant et il ne se passa rien entre nous. Pour l’éviter, je quittai la maison de Margo _ c’est-à-dire Magda, chez laquelle logeait alors sa sœur Edith. Je n’avais pas un sou et ce ne fut qu’une fois dans la rue que je commençai à penser à un endroit où aller. Pour mon travail, je n’étais payée qu’à la fin du mois et je n’avais pas d’argent pour aller à l’hôtel. À la fin, je trouvai un balcon dans un hôtel, couvert d’une bâche, avec un lit« …

De minimes points demeurent encore obscurs dans mon esprit, concernant l’identité précise des quelques personnes très rapidement citées _ plutôt qu’évoquées… _, dans « Le Pain perdu » :

_ à la page page 94 :

« Il y a l’oncle Moriz en Palestine ! Tu venais à peine de naître quand il est parti. (…) Il était boulanger  » ;

_ à la page page 103 :

En Israël, « je retrouverais peut-être le frère _ Steinschreiber _ de notre père » ;

_ à la page 108 :

« Mon oncle Joël se trouvait à Tel-Aviv, avec ses deux garçons : Avi et Itaï » ;

_ à la page page 110 :

« Oncle Joël, il ressemble à papa ?« .

Et aussi,

_ à la page 116 :

« Et le mari de notre cousine Adele, qui est boulanger ?« …

Reprenant à propos de ce même personnage d’Adele _ semblablement présent, en son prénom, comme en son lien de parenté (une « cousine« ) avec Edith et sa sœur, dans les deux récits de 2020 et 1959 _, ceci, à la page 76 de « Qui t’aime ainsi » :

de retour des camps d’Allemagne, « ma cousine Adele reconnaît Peter _ alias Ôdön : alors assez mal en point dans un fossé sur le bord de la route… _  et le traîna à l’hôpital le plus proche »…

Qui sont donc cette « cousine Adele« , cet « oncle Moriz » et cet « oncle Joël » (ainsi que les deux fils de ce dernier, les cousins Avi et Itaï), tous parvenus en Israël, et y résidant alors ?..

Je n’ai pas encore réussi à le découvrir…

Ce jeudi 10 février 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

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