Un ravissant programme d' »Enfantines » (Bizet – Debussy – Fauré – Ravel – Aubert) par les délicieux Ludmila Berlinskaya et Arthur Ancelle, en un très réussi CD « Passage secret » musical vers nos jeux de l’enfance…
21juin
Un ravissement programme d' »Enfantines » (Bizet – Debussy – Fauré – Ravel – Aubert), par Ludmila Berlinskaya et Arthur Ancelle, en leur très réussi CD Alpha 1024 « Passage secret« _ enregistré Salle Colonne à Paris au mois d’avril 2022… _,
ainsi que le remarque très justementnt aussi, sur le site de ResMusica, en un article intitulé « « Passage secret » hédoniste à quatre mains du duo Ancelle – Berlinskaïa« , Bénédict Hévry…
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Le duo Ludmila Berlinskaïa – Arthur Ancelle publie chez Alpha ce réjouissant et solaire récital de piano français à quatre mains « Passage secret » entre grands classiques et la découverte de la ravissante Feuilles d’images de Louis Aubert.
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Le duo de piano Berlinskaya-Ancelle a déjà un long parcours artistique à son actif. Fusionnel à la ville comme à la scène il nous a déjà gratifié de huit superbes récitals discographiques, publiés jusqu’ici pour l’essentiel sur le label russe Melodyia. Le présent enregistrement, le premier réalisé pour la maison Alpha, explore cette fois le répertoire français à quatre mains écrit sous la Troisième République. Il est l’exact complément de leur disque Belle époque publié chez leur ancien éditeur. Cette fois, moins d’œuvres ou de noms plus rares (telles jadis celles signées Chaminade, Koechlin ou Hahn). Seul le méconnu Louis Aubert et l’incontournable Debussy sont communs aux deux récitals… pour des œuvres fatalement différentes !
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Ce nouvel enregistrement est un pur et gourmand _ voilà _ régal, tout d’abord par le réglage minutieux de l’instrument splendidement harmonisé, et par la prise de son d’Hughes Deschaux _ oui, oui ! _ à la fois capiteuse par sa légère réverbération et précise en sa définition spatiale comme en sa restitution des moindres nuances dynamiques.
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Il y a ensuite cette habile sélection – explicitée dans le magnifique texte de présentation signé par Arthur Ancelle – de pages assez célèbres tantôt axées sur le descriptif de l’enfance, mais destinées à des pianistes aguerris (tels les Jeux d’enfants de Bizet ou la Suite Dolly de Fauré) tantôt délibérément écrites pour de jeunes pousses pianistiques encadrées (la Feuille d’images en cinq donnes de Louis Aubert) ou non (Ma Mère l’Oye) par leur mentor. Seule la petite suite de Debussy échappe un peu à ce champ sémantique. L’enchaînement des partitions est subtilement tracé que ce soit par le truchement d’Emma Bardac, mère de Dolly, probable maîtresse de Gabriel Fauré avant de devenir Madame Debussy dix ans plus tard, ou par la solide amitié et l’estime réciproque qui liaient Maurice Ravel et Louis Aubert, créateur et dédicataire des Valses nobles et sentimentales.
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Mais ce disque vaut avant tout pour ces interprétations capiteuses et enchanteresses _ voilà ! _, nimbées d’une impalpable poésie de l’instant, d’un réel et gouleyant plaisir ludique, manière tendre et originale de respirer en musique _ oui _, dans l’intimité complice des quatre mains croisées au gré du clavier. Les Jeux d’enfants de Georges Bizet sont ici un vrai régal _ oui, oui : écoutez-ici leur délicieux « Le Bal« (1′ 41) _ par leur poésie de la précision quasi horlogère, depuis les balancements de l’Escarpolette au galop final du Bal, en passant par l’évocation ici quasi-schumanienne du Petit mari petite femme, l’humour assez irrésistible du Volant, les hésitations aveugles du Colin maillard, ou les croquignolesques triolets du Saute-mouton. La Petite suite de Debussy est égrenée avec un hédonisme suave (En bateau) une poésie presque verlainienne (Menuet) ou une bonhomie savoureuse (Ballet final), là où la Dolly de Fauré, par son expression directe et généreuse, retrouve une spontanéité bienvenue qui faisait peut-être un rien défaut à la récente version plus gourmée de Marc-André Hamelin accompagné de Cathy Fuller (Hyperion). L’interprétation par le duo des cinq pièces enfantines de Ma Mère l’Oye de Maurice Ravel nous a paru un rien en retrait : on pourrait peut-être souhaiter un peu plus d’atermoiements aux errances de Petit Poucet ou plus de langueur négligée pour la valse lente si délicate des Entretiens de la Belle et la Bête, même si l’apothéose du Jardin féérique, avec ses crescendi ruisselants est splendidement menée. Enfin, il y a cette tendre découverte de la beaucoup plus tardive (1930) Feuille d’images de Louis Aubert, nostalgique regard dans le miroir vers cette époque faste et révolue de l’avant-guerre, une petite suite en cinq donnes détaillée avec un à-propos et une minutie sans faille et culminant en sa truculente et conclusive Danse de l’ours en peluche, donnée avec toute la goguenardise souhaitée.
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Voici une anthologie de qualité superlative à la fois par la justesse du choix des œuvres, par la finition détaillée des interprétations, poétiques et minutieuses, et par l’adéquation stylistique à peu près parfaite de nos duettistes à chacune des différentes œuvres. Une réussite qui rappelle la compilation plus vaste encore du légendaire duo Noël Lee–Christian Ivaldi parue voici presque un demi-siècle et qu’Arion Music serait bien inspiré de rééditer !
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Passage secret.
Georges Bizet (1838-1875) : Jeux d’enfants, opus 22. Claude Debussy (1862-1918) : Petite suite, L. 65. Gabriel Fauré (1845-1924) : Dolly, opus 56. Maurice Ravel (1875-1937) : Ma mère l’Oye, M.60. Louis Aubert (1877-1968) : Feuille d’images.
Ludmila Berlinskaïa et Arthur Ancelle, piano à quatre mains.
1 CD Alpha Classics.
Enregistré à la Salle Colonne de Paris, en avril 2022.
Notice de présentation en français, anglais et allemand.
Durée : 73:39
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Un CD proprement délicieux de passage musical (secret, intime) vers notre propre enfance…
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Ce vendredi 21 juin 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa