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Honneur aux « Rendez-vous with Martha Argerich » (Suite), ou à nouveau l’immense joie de partager, aussi au disque, en toute simplicité et les plus hautes exigences de l’art, le plaisir de donner heureuse vie à la musique avec des amis : maintenant à Hambourg…

21oct

Comme en continuation magnifiquement bienvenue à mon article d’hier « « , qui se permettait de citer les excellentes remarques de Jean-Pierre Rousseau en son article « Ubu, Martha, Melle Liu etc. » à propos du Volume 2 des « Rendez-vous with Martha Argerich » de l’année 2019 à Hambourg, en juin,

voici que je découvre sur le site du magazine belge Crescendo l’article paru ce jour de Jean Lacroix intitulé lui « Hambourg, juin 2021 : Martha Argerich et ses amis en concerts publics« , consacré, cette fois, au Volume 3 de ces « Rendez-vous with Martha Argerich » de juin à Hambourg, l’année 2021, cette fois…

Le voici donc, lui aussi :

Hambourg, juin 2021 : Martha Argerich et ses amis en concerts publics

Le 21 octobre 2024 par Jean Lacroix

Rendez-vous avec Martha Argerich, volume 3 : Œuvres de Arno Babadjanian (1921-1983), Béla Bartók (1881-1945), Ludwig van Beethoven (1770-1827), Leonard Bernstein (1918-1990), Johannes Brahms (1833-1897), Pablo Casals (1876-1973), Dimitri Chostakovitch (1906-1975), Manuel de Falla (1876-1946), César Franck (1822-1890), Felix Mendelssohn (1809-1847), Modeste Moussorgsky (1839-1881), Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), Astor Piazzolla (1921-1992), Serge Prokofiev (1891-1953), Franz Schubert (1797-1828) et Mieczyslaw Weinberg (1919-1996).

Martha Argerich, Nicholas Angelich, Nelson Goerner, Alexander Gurning, Maria João Pires, Lilya Zilberstein, piano ; Renaud Capuçon, Gidon Kremer, Anne-Sophie Mutter, Tedi Papavrami, violon ; Gérard Caussé, alto ; Mischa Maisky, violoncelle ; Michael Volle, baryton, et une vingtaine d’autres solistes ; Symphoniker Hamburg, direction Sylvain Cambreling. 2021.

Notice (uniquement de courtes biographies) en anglais, en allemand et en français.

458’ 35’’.

Un coffret de sept CD Avanti 5014706 10702.

Après Lugano, où un Festival Martha Argerich, regroupant un grand nombre d’amis et d’interprètes proches de la virtuose, a été organisé chaque été entre 2002 et 2016 _ voilà ! _, c’est la cité hanséatique de Hambourg, en sa splendide Laeiszhalle, sur la Johannes-Brahms-Platz, qui a pris le relais à partir de 2018. Un premier volume de ce « Rendez-vous avec Martha Argerich » a été publié dès l’année suivante _ 2019, donc _ chez Avanti. Une nouvelle édition a eu lieu en 2019 et elle est également documentée par un coffret.Voici le troisième témoignage de ces jours de complicité et d’échanges musicaux : il s’agit de l’édition 2021, celle de l’année précédente ayant été perturbée par le Covid.

Martha Argerich a fêté ses 80 ans le 5 juin 2021, peu avant cette édition. Toujours motivée et dynamique, elle est la « vedette » de la moitié des œuvres ici incluses, dix-neuf au total. Un seul concerto pour piano au programme : le n° 2 de Beethoven, qu’elle a joué à maintes reprises, et dont elle connaît les moindres recoins de la partition. Elle en livre une lecture enthousiaste, pleine de vivacité dans l’Allegro con brio initial, de lyrisme intense dans l’Adagio, et de virtuosité maîtrisée dans le Rondo final. Une belle version, que le Symphonique de Hambourg, placé sous la direction de Sylvain Cambreling, déjà requis pour l’édition précédente, anime avec le même enjouement _ voilà. Sur le même disque, on s’attardera au Trio n° 1 op. 49 de Mendelssohn, qu’elle joue avec son complice de toujours Mischa Maisky, mais aussi avec Anne-Sophie Mutter, scellant ainsi, dans ce contexte, une première collaboration avec la soliste allemande. Cette partition, créée en 1840 et que Schumann appréciait tant, dévoile, grâce à ce dialogue de haut niveau, ses secrets lyriques, fantastiques (superbe Scherzo) et brillants.

Mutter n’est pas la seule à être invitée pour la première fois, c’est le cas aussi de Maria João Pires, qui est la partenaire d’Argerich dans une Sonate pour piano à quatre mains K 521 de Mozart, jouée avec retenue et verve à la fois _ absolument… Pires propose en solo les Impromptus2 et 3 D 935 de Schubert et sa Sonate D 664. Le toucher a quelque chose de magique, tout paraît d’une évidence esthétique _ comme il le faudrait toujours ; comme s’il s’agissait d’une improvisation naturelle _, en particulier la sonate de 1819, qui distille une poésie de tendresse cristalline. Martha Argerich est encore présente dans des pages variées : avec Mischa Maisky, bien sûr, dans de séduisantes Variations sur un air de La Flûte enchantée WoO46 de Beethoven, ou dans la Sonate op. 40 de Chostakovitch, méditative mais aussi sarcastique _ à la Chostakovitch ! Avec Renaud Capuçon, pour la Sonate op. 30 n° 3 du maître de Bonn, avec Lilya Zilberstein pour un autre Chostakovitch, le pétillant Concertino pour deux pianos op. 94 de 1953, ou encore avec la flûtiste solo du Symphonique de Hambourg, Susanne Barner, dans la Sonate op. 94 de Prokofiev, avec ses traits d’exubérance spirituelle. Mention spéciale pour une explosive _ comme il se doit ! _  Sonate pour deux pianos et percussion de Bartók, qui brille de mille feux, avec _ l’excellentissime et compatriote argentin _ Nelson Goerner et les percussionnistes Alexej Gerassimez et Lukas Böhm, bien en forme.

Pour le reste du programme, celui dans lequel Martha Argerich n’est pas impliquée, nous sortons du lot la Sonate pour alto et piano op. 120 n° 2 de Brahms. Il s’agit de la toute dernière apparition scénique de Nicholas Angelich, qui décédera _ moins d’une année plus tard _  à 51 ans, le 8 avril 2022, des suites d’une grave infection pulmonaire. Gérard Caussé est son partenaire dans l’adaptation de cette page d’abord destinée à la clarinette. Le caractère mélancolique et apaisant _ si poétique _ de l’Andante molto conclusif, avant sa fin lumineuse, prend, dans ces circonstances, une émouvante dimension. Le présent coffret a d’ailleurs été placé sous le signe d’un hommage à la mémoire de ce regretté virtuose.

Un disque plaira aux passionnés d’Astor Piazzolla, d’autant plus que _ le merveilleux complice _ Gidon Kremer officie pour le langoureux et jouissif Great Tango, dans l’arrangement qu’en a fait Sofia Gubaidulina pour violon et piano (Georgijs Osokins est au clavier). Pour Les quatre saisons de Buenos Aires, tranches de vie d’un habitant de la cité, partition prévue pour un quintette, dont un bandonéon, qui a connu plusieurs arrangements, Tedi Papavrami est au violon, Eugene Lischitz au violoncelle, et Alexander Gurning au piano, pour rivaliser d’une séduction que l’on qualifiera _ bien sûr _ d’« argentine ». En complément, on trouve les _ jubilatoiresDanses symphoniques de « West Side Story » de Bernstein, dans une version pour deux pianos, souple et rythmée, par le duo Gerzenberg, Anton et Daniel, les fils de Lilya Zilberstein.

Une voix est à mettre en évidence, celle du baryton allemand, Michael Volle qui propose de façon poignante les douloureux Chants et danses de la mort de Moussorgski, avec Daniel Gerzenberg pour partenaire. On saluera encore l’introduction dans ces soirées des brèves Douze miniatures pour flûte et piano op. 29 de Weinberg _ qui me touche personnellement tellement... Susanne Barner, qui avait Martha Argerich pour partenaire dans Prokofiev, est ici en duo avec la Japonaise Akane Sakai.

Les mélomanes qui ont acquis les deux premiers volumes da la série ne manqueront pas ce troisième « Rendez-vous avec Martha Argerich », non seulement pour ses prestations, mais aussi pour celles de tous ces artistes réunis pour célébrer la musique _ voilà, voilà ! Les prises de son en public sont de qualité et apportent un vrai confort d’écoute.

Note globale : 10

Jean Lacroix

Quel régal que cette musique si jubilatoiremet partagée !!!

 

Ce lundi 21 octobre 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Comment passer de l’écoute d’un CD enchanteur à un CD qui ne souffre pas trop de la comparaison ? D’interprétations de Domenico Scarlatti (1685 – 1757) à des interprétations d’Hélène de Montgeroult (1764 – 1836), compositrice toute de fraîcheur et vitalité, entre Mozart et Mendelssohn…

02oct

C’est toujours une difficulté pour le mélomane discophile de passer d’une écoute enthousiaste d’un CD _ tel le CD Arcana A 568 « Domenico Scarlatti – A Man of Genius – Sonatas 1752-1753 » du merveilleux claviériste qu’est Francesco Corti (cf mon article d’hier 1er octobre « « )…à l’écoute d’un CD suivant,

et consacré à l’œuvre d’un compositeur qui supportera de passer immédiatement, en l’occurrence, après un génie aussi exceptionnel que le merveilleux Domenico Scarlatti (Naples, 1685 – Madrid, 1757)…

Eh bien ! la surprise toute récente d’une écoute au vol, sur mon autoradio, en allant faire mes courses un matin de cette semaine, sur l’antenne de France-Musique, d’extraits d’un CD d’Elisabeth Pion _ j’ai retenu le nom de l’interprète _ interprétant sur un très beau piano-forte des œuvres de la compositrice Hélène de Montgeroult (Lyon, 2 mars 1764 – Florence, 20 mai 1836), m’a convaincu de me mettre à la recherche d’exemplaires de CDs de cette compositrice jusqu’ici inconnue de moi…

Ainsi,

si je n’ai pas encore réussi à dénicher ce CD Atma Classique ATM 2885 « Amadeus et l’Impératrice » d’Elisabeth Pion,

au moins, ai-je pu mettre la main, d’une part, sur le CD Seulétoile 09 « Hélène de Montgeroult – Portrait d’une compositrice visionnaire« , de Marcia Hadjimarkos, piano-forte, Beth Taylor, mezzo-soprano, et Nicolas Mazzoleni, violon _ enregistré à Pressy-sous-Dondin, en Bourgogne, du 12 au 16 septembre 2022 _,  et d’autre part, le triple album Brilliant Classics 96247 « Hélène de Montgeroult – Complete Piano Sonatas« , de Simone Pierini, sur un très beau piano-forte J. Haselmann (ca première décennie du 19e siècle) _ enregistré du 15 au 17 juin 2021, à Monte Compatri, en Italie.

Une musique séduisante et toute de fraîcheur, et les deux fois interprétée avec grâce et jubilation sur de superbes instruments tout à fait idiosyncrasiques pour servir cette musique peu courrue,

et dont l’écoute, via ces CDs, ne pâtit absolument pas, toutes proportions bien sûr gardées, de suivre l’écoute _ enchanteresse pour moi _ du CD de Domenico Scarlatti servi si merveilleusement par ce magicien qu’est Francesco Corti…

Et sur ces deux très réussies réalisations discographiques, 

j’ai pu trouver, en cherchant un peu sur le Net, ces deux articles suivants,

du 6 octobre 2023, sous la plume de Christophe Huss : « Hélène de Montgeroult. Sonates pour piano, Simone Pierini« , pour Le Devoir, de Montréal ;

et du 10 décembre 2023, sous la plume de Jean Lacroix : « Hélène de Montgeroult, sur un pianoforte carré d’Antoine Neuhaus« , pour le magazine belge Crescendo…

Hélène de Montgeroult. Sonates pour piano, Simone Pierini

Alors que cette fin de semaine Arion, Mathieu Lussier et la pianiste Élisabeth Pion présenteront _ en concert _ un Concerto pour piano d’Hélène de Montgeroult (1764-1836), les enregistrements de la musique pour piano de cette dernière se multiplient. Cette compositrice, assurément parmi les plus intéressantes _ voilà… _ révélées ces dernières années, nous avait été dévoilée par Edna Stern. La pianiste avait opéré des choix pour montrer comment Montgeroult, à partir du classicisme, pouvait évoquer parfois Scarlatti _ nous y voici !!! _ et annoncer Schubert. Une nouvelle façon d’explorer est de tout prendre et de faire son choix soi-même. La possibilité est offerte par deux intégrales des 9 Sonates pour piano de Montgeroult désormais disponibles : l’une de Nicolas Horvath parue en novembre 2021 chez Grand Piano ; et l’autre de Simone Pierini. Différence majeure et notable : l’instrument, un Steinway capté de manière assez dure pour Horvath, et un superbe pianoforte, conçu entre 1800 et 1810 par Haselmann, pour Pierini. Deux pianistes compétents, mais une bonne dose de charme _ oui, oui, oui ; et c’est incontestable ! _ supplémentaire ici _ écoutez ici les podcasts de ces 3 CDs.

Hélène de Montgeroult, sur un pianoforte carré d’Antoine Neuhaus

LE 10 DÉCEMBRE 2023 par Jean Lacroix

Hélène de Montgeroult (1764-1836) : Onze Études pour la main droite, pour la main gauche ou pour les deux mains, pour pianoforte ; Six Nocturnes à voix seule avec accompagnement de pianoforte ; Sonate en la mineur pour forte piano avec accompagnement de violon op. 2 n° 3.

Marcia Hadjimarkos, pianoforte ; Beth Taylor, mezzo-soprano ; Nicolas Mazzoleni, violon.

2022.

Notice en français.

61.50.

Seulétoile SE09.

L’intérêt pour Hélène de Montgeroult s’est développé depuis 2006, lorsque le musicologue français Jérôme Dorival a publié à Lyon, chez Symétrie, une biographie consacrée à cette compositrice d’origine aristocratique qui échappa à la guillotine lors de la Terreur, en improvisant sur La Marseillaise devant le tribunal révolutionnaire, avant d’être la première femme à devenir professeur de piano au Conservatoire de Paris. Ces deux dernières décennies, plusieurs pianistes se sont intéressés à ses nombreuses Études, écrites entre 1788 et 1812 et publiées en 1816 dans son Cours complet pour l’enseignement du fortepiano. Bruno Robillard (2006), Nicolas Stavy (2009), tous deux pour Hortus, Edna Stern (2017, Orchid Classics) ou Clare Hammond (2021, BIS) en ont proposé une sélection.

Le présent enregistrement, sous-titré « Portrait d’une compositrice visionnaire », consiste en une approche différente. Dans une esquisse biographique insérée, Jérôme Dorival précise : Aucun enregistrement de la musique de Montgeroult sur un piano de son temps n’ayant encore été réalisé, il était donc urgent de le faire, et le choix d’un pianoforte carré français du début du XIXe siècle se révèle très judicieux, parce qu’il est vraiment contemporain de sa musique _ voilà _ et parce que les destinataires de ses œuvres jouaient ce genre de pianos. C’est à cette tentative d’authenticité que s’est attelée la Française d’origine américaine Marcia Hadjimarkos, qui a été l’élève de Jos van Immerseel au milieu des années 1990, et s’est spécialisée dans les instruments anciens. Son programme d’Études de Montgeroult recoupe un peu celui de Clare Hammond (quatre morceaux), mais, parmi les onze pièces qu’elle propose, trois sont enregistrées pour la première fois.


C’est un pianoforte carré de 1817 d’Antoine Neuhaus, natif de Vienne, installé à Paris en 1809, où il exerça jusqu’en 1827, qui a été choisi. Comme l’explique Matthieu Vion, son restaurateur en 2021, il n’existe que deux instruments de la production de Neuhaus qui soient connus. On lira la description par Vion de celui qui a été retenu ici (photographie en couleurs), les détails concernant le meuble, la mécanique et les registres. On découvrira, grâce aux détails fournis dans une longue note par Marcia Hadjimarkos, qu’il dispose de quatre pédales activant quatre registres, à savoir la pédale forte, le jeu de luth, le jeu céleste et le jeu de basson, et les considérations que l’artiste en déduit quant à son propre choix, notamment pour l’utilisation de la pédale. La variété d’effets et de couleurs que l’on peut obtenir en associant un toucher sensible aux différents registres du piano carré permettent de produire une riche palette sonore et d’évoquer une multitude d’atmosphères et d’émotions _ voilà qui est intéressant.

Le mélomane est ainsi transporté _ oui _ dans un univers expressif, débordant de noble vitalité _ oui, oui _, que Marcia Hadjimarkos sert avec une souplesse de chaque instant _ absolument ; écoutez-ici les podcasts de ce CD. Les études choisies montrent l’éventail de ces « leçons », à destination des deux mains, de la main droite ou de la main gauche, Montgeroult, selon son habitude pédagogique, ajoutant une précision quant à chaque contenu : « pour bien accorder le chant avec l’accompagnement » ; « pour les notes pointées » ; « pour la difficulté du ton », etc. L’interprète signale encore que les études sont souvent écrites dans un style plus romantique que classique, préfigurant ainsi les pages de compositeurs comme Schubert, Mendelssohn, Schumann ou Chopin. Les propositions de Clare Hammond, pour BIS, sur un Steinway qui soulignait les audaces harmoniques, et celles de Marcia Hadjimarkos, dans sa recherche d’authenticité, feront bon ménage côte à côte dans une discothèque.

L’intérêt de cet album consiste aussi dans les compléments aux études. Montgeroult a souvent évoqué l’art du chant dans son Cours complet et était attirée par l’art vocal italien. Pourtant, sa production dans ce domaine est des plus minimes : les six Nocturnes à voix seule avec accompagnement de piano, la plupart sur des textes de Métastase autour de l’amour, sont gravés ici pour la première fois. Si l’on y ajoute la Sonate en fa mineur pour fortepiano avec accompagnement de violon qui figure en fin d’album, on aura fait le tour de sa musique de chambre, autre pan, limité mais non négligeable, qui rappelle notamment que cette aristocrate, qui tenait salon parisien, joua souvent avec des violonistes, comme Giovanni Battista Viotti. La mezzo-soprano Beth Taylor et le violoniste Nicolas Mazzoleni sont de dignes partenaires _ oui _ de Marcia Hadjimarkos.

Son : 9  Notice : 10  Répertoire : 9  Interprétation : 10

Jean Lacroix

De bien belles découvertes, tout à fait jouissives, et un peu hors des sentiers battus et rebattus :

entre Scarlatti (1685 – 1757) et Mozart (1756 – 1791), et Mendelssohn (1809 – 1847) et Chopin (1810 – 1849) _ je veux parler bien sûr de leurs styles… _, si l’on veut grosso modo situer Hélène de Montgeroult (1764 – 1836) et son œuvre singulière _ et son piano-forte… _ dans l’histoire de la musique.

Ce mercredi 2 octobre 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

La reconnaissance confirmée du talent singulier de Jonathan Fournel, brillant et affuté pianiste, ici dans Chopin et Szymanowski…

25sept

Le 3 septembre dernier, je consacrais un article de curiosité admirative «  » envers le talent brillant et affuté du pianiste Jonathan Fournel, à l’occasion de la parution de son superbe album Alpha 1064 « Chopin – Szymanowski« … 

Et voici que trois semaines plus tard cette admiration mienne évoquée en mon article se voit rejointe et développée plus amplement par deux articles bien détaillés consacrés à ce même CD Alpha 1064 « Chopin -Szymanowski » de Jonathan Fournel au piano :

le premier avant-hier 23 septembre, par Jean Lacroix sur le site du magazine Crescendo, sous le titre de « Après Brahms et Mozart, Jonathan Fournel se tourne vers la Pologne » ;

et le second hier 24 septembre, par Jean-Charles Hoffelé, sur son blog Discophilia, sous le titre de « Les deux Pologne« …

Les voici donc, l’un et l’autre :

Après Brahms et Mozart, Jonathan Fournel se tourne vers la Pologne

Le 23 septembre 2024 par Jean Lacroix

Frédéric Chopin (1810-1849) : Sonate pour piano n° 3 en si mineur op. 58. Karol Szymanowski (1882-1937) : Variations pour piano en si bémol mineur op. 3 ; Variations sur un thème folklorique polonais op. 10. Jonathan Fournel, piano. 2023. Notice en français, en anglais et en allemand. 60’ 51‘’. Alpha 1064.

Vainqueur du Concours Reine Elisabeth de 2021, placé sous le signe de la pandémie, le pianiste français Jonathan Fournel (°1993), originaire de Sarrebourg, dans l’est de la France, avait alors démontré ses affinités particulières avec Brahms en jouant en demi-finale les Variations et Fugue sur un thème de Haendel op. 24, avant un brillant Concerto n° 2 en finale. Entré dès 2009 au CNSM de Paris où il étudia avec Bruno Rigutto, Brigitte Engerer, Claire Désert et Michel Dalberto, Fournel a poursuivi sa formation, à partir de 2016, à la Chapelle musicale de Waterloo, avec Louis Lortie et Avo Kouyoumdjian. Dans la foulée de ce Premier Prix, il a gravé pour Alpha son premier disque _ Alpha 851 _, consacré lui aussi à Brahms _ « Brahms – Piano Sonata N°3 – Handel Variations«  On y retrouvait l’opus 24 _ « Variations and Fugue on a Thème by Handel«  _, couplé à la Sonate n° 3 _ Op. 5. Nous avions souligné, le 23 novembre 2021, l’excellence du style, riche en nuances, ainsi que la plénitude, la capacité expressive, l’énergie et l’intensité émotionnelle que ces pages dévoilaient chez ce jeune interprète. Nous appelions aussi de nos vœux des gravures de Fournel dans d’autres répertoires. Ce fut chose faite, début 2024, pour le même label, avec les Concertos n° 18 et 21 de Mozart _ le CD Alpha 1039 _, l’Orchestre du Mozarteum de Salzbourg étant placé sous la direction de Howard Griffiths ; Fournel en soulignait toute la vivifiante élégance.

Pour son troisième album chez Alpha _ le CD Alpha 1064 _, le pianiste propose un album où se côtoient Chopin et Szymanowski. Un judicieux programme polonais, qui rappelle que le second nommé, dans ses partitions _ Op. 3 et Op. 10 _ de Variations, composées en pleine jeunesse, au tout début du XXe siècle, s’inscrit dans la descendance de Chopin, mais aussi du premier Scriabine, et sous influence brahmsienne et schumanienne. Dans l’opus 3 _ « Variations in B Flat Minor«  _, dédié à Arthur Rubinstein lorsqu’il est publié en 1910 (sauf erreur, le virtuose n’en a pas laissé de témoignage sur disque) _ l’œuvre a été composée en 1903 _, douze variations s’enchaînent, en moins de douze minutes, Szymanowski manie l’art de la concision et de la liberté expressive, avec des suraigus et des graves, une certaine joie, et un rappel de la marche funèbre de Chopin. Le compositeur est en recherche d’un style propre, qu’il va développer au sein de l’opus 10 _ « Variations on a Polish Folk Theme«  _ de manière plus large (une vingtaine de minutes), dans une polyphonie plus travaillée, qui fait défiler les variations d’un thème emprunté à un recueil de chants de la région de Zakopane, située au pied de la chaîne montagneuse des Tatras. La musique traditionnelle fait ainsi son entrée dans le catalogue de Szymanowski. L’écriture pianistique, qui n’est pas sans évoquer des atmosphères lisztiennes, s’exprime encore de façon académique (la dédicace est pour son professeur Zygmunt Noskowski), mais avec des humeurs variées : sombre, rêveuse, rythmée, funèbre, ou triomphale dans une conclusion en apogée. Jonathan Fournel sert ces deux séries de variations avec un vrai sens de l’équilibre instrumental, leur accordant cette part de jeunesse qui les caractérise, sans effets ni contrastes malvenus. Il met en évidence les influences, tout en animant le tout avec finesse et sûreté.

Placée entre les deux opus szymanowskiens, la Sonate n° 3 _ Op. 58 _ de Chopin (1844) fait vibrer la lumière et la joie, tout à fait à l’opposé de la Sonate Funèbre _ N°2. De style large et jaillissant, cette composition de Nohant, à la virtuosité maîtrisée, déploie un superbe chant d’une esthétique entre Beethoven et Bellini dans le vaste l’Allegro maestoso initial, avant un bref Scherzo « plus léger que l’air », selon la jolie formule de maints commentateurs. Le Largo se mue en caresses élégiaques qui s’épanouissent de façon rêveuse, en plein émerveillement, presque irréel. Chopin laisse la puissance et les scintillements se propager dans un final en forme de rondo, aux effets flamboyants. Jonathan Fournel est ici aussi à l’aise que dans Brahms ; il traduit tous les paysages intérieurs de Chopin avec un enthousiasme communicatif, un sens du partage, une flamme ardente et un engagement qui séduisent tout au long du parcours. Il sait aussi ne pas se laisser emporter par une fougue trop débridée et ne pas être débordé par une émotion excessive (le Largo est superbement énoncé), dans le respect de ce moment de bonheur que reflète l’écriture du compositeur. On aurait aimé que _ dans le livret du CD _ Fournel fasse l’un ou l’autre commentaire sur la manière dont il conçoit son approche de Chopin. Mais la notice n’en dit rien.

Ce troisième album confirme la maturité pianistique d’un artiste qui aura sans doute bien des richesses musicales à proposer dans le futur.

Son : 9  Notice : 8  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

LES DEUX POLOGNE

Admirable la Sonate en si _ de Chopin _ selon Jonathan Fournel, l’élégance et le feu, la main gauche impérieuse, le chant dit haut, la lumière même du Steinway font son Chopin d’une intense autorité sans pourtant oublier la ligne classique qu’y entendait jadis Dinu Lipatti. Le modèle certes était posé, mais le jeune homme y ajoute son propre clavier, où les polyphonies dansent, s’exaltent, s’envolent.

Pourtant, aussi fabuleuse que soit sa Sonate de Chopin, ce sont d’abord les deux cahiers de Variations _ Op. 3 et Op. 10 _ de Szymanowski qui me feront ranger le disque à l’auteur du Roi Roger _ ce chef d’œuvre majeur…

D’un Polonais l’autre croirait-on, mais non, le jeune Szymanowski ne regarde guère vers Chopin, Fauré s’évoque quasi sous les doigts du Français dans le thème de l’Opus 3, les verreries colorées de Scriabine, si souvent jouées pour Szymanowski par Heinrich Neuhaus, sont reconnaissables dans maintes variations, tout cela divulgué avec des attentions de poète qui trouveront l’ampleur commandée, une année plus tard _ en 1904 _, par les Variations sur un thème polonais, son glas fulgurant, ses esquisses de danses des Tatras, ses spectaculaires oiseaux de la coda, tout cela si vif, si prégnant, preuves nouvelles d’un art inspiré qui s’amplifie à chaque nouvel album.

LE DISQUE DU JOUR

Karol Szymanowski
(1882-1937)


Variations en si bémol mineur, Op. 3
Variations sur thème populaire polonais, Op. 10


Frédéric Chopin (1810-1849)


Sonate pour piano No. 3
en si mineur, Op. 58

Jonathan Fournel, piano

Un album du label Alpha Classics 1064

Photo à la une : le pianiste Jonathan Fournel – Photo : © Marco Borggreve

Deux belles reconnaissances de la critique : un talent d’interprète assurément à suivre…

Ce mercredi 25 septembre 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Reconnaissance de l’enthousiasmant bouleversant CD « Vol. Four – Weinberg – String Quartets N° 6, 13 and 15 » par l’Arcadia Quartet : une merveille de réalisation au disque…

21août

Comme en confirmation de mon article de samedi 17 août dernier « « 

à propos de l’enthousiasmant et bouleversant CD Chandos CHAN 20281 « Vol. Four – Weinberg – String Quartets N° 6 13 and 15 » par l’Arcadia Quartet _ enregistré à Dunwich, Suffolk, du 7 au 9 juillet 2023, et paru le 18 juillet dernier… _, un Quatuor constitué d’Ana Török et Rasvan Dumitru, violons, Traian Boalaaito, et Zsolt Török, violoncelle,

l’excellent magazine belge Crescendo publie ce mercredi 21 août 2024, et sous la plume très avisée de Jean Lacroix, un justissime article intitulé « Quatrième volet de l’intégrale des Quatuors de Weinberg par les Arcadia« ,

qui vient idéalement abonder à mon sens,

et que voici : 

Quatrième volet de l’intégrale des Quatuors de Weinberg par les Arcadia

LE 21 AOÛT 2024 par Jean Lacroix

Mieczyslaw Weinberg (1919-1996) : Quatuors à cordes n° 6 en mi mineur op. 35, n° 13 op. 118 et n° 15, op. 124.

Quatuor Arcadia. 2023.

Notice en anglais, en allemand et en français.

75’ 43’’.

Chandos CHAN 20281.

Lorsqu’il aura mené à terme son projet d’une intégrale des quatuors de Weinberg, qui doit compter six albums _ voilà, pour l’ensemble des 17 Quatuors de Mieczyslaw Weinberg… _, le Quatuor Arcadia rejoindra dans la discographie ses prédécesseurs : le Quatuor Danel (CPO, 2014 _ 6 volumes _) et le Quatuor Silésien (Accord, 2022). Fondé en 2006 par des étudiants de l’Académie de Musique Gheorge-Dima, sise à Cluj-Napoca, dans le nord-ouest de la Roumanie _ voilà _, le Quatuor Arcadia (Ana Török et Rasvan Dumitru, violons ; Traian Boala, alto, et Zsolt Török, violoncelle) s’est distingué en 2008 avec une intégrale des quatuors de Bartók (Chandos). Celle qui est consacrée à Weinberg en est _ ce jour _ à son quatrième volume. Nous avons présenté le troisième le 26 septembre 2023 _ Troisième volet des Quatuors de Weinberg par les Arcadia. Onze numéros sont désormais disponibles : 1, 2, 4 à 8, 11, 13, 15 et 16.

Ce quatrième album propose des partitions d’époques différentes, un choix déjà opéré antérieurement _ pour les volumes précédents. On ne reviendra pas sur la biographie tourmentée _ ravagée même _ de Weinberg _ Mieczyslaw Weinberg : Varsovie, 8 décembre 1918 – Moscou, 2 février 1996 _, désormais bien documentée. Lorsqu’il compose son Quatuor n° 6, entre le 20 juillet et le 24 août 1946, il le dédie à son ami compositeur Georgui Sviridov (1915-1998) qu’il a connu dans l’entourage de son autre ami, Chostakovitch. Deux ans plus tard _ en 1948, donc _, l’œuvre, au langage radical, figure au nombre des compositions que le régime soviétique _ de Staline _ classe parmi les « non conformes » _ aïe, aÏe, aïe… La notice de David Fanning, auteur d’un ouvrage _ Mieczyslaw Weinberg: In search of freedom (Hofheim, 2010) _ sur Weinberg en 2010, rappelle que, malgré la levée assez rapide de l’interdiction, celle-ci marquera le compositeur, qui ne produira pas de quatuor au cours des onze années qui suivront _ de 1948 à 1959. Il _ ce Quatuor n° 6, donc _ n’a pas été non plus joué de son vivant, semble-t-il, et ne sera donné pour la première fois qu’en janvier 2007, à Manchester, par le Quatuor Danel.

De vastes dimensions, quasi symphoniques (trente-cinq minutes), ce n° 6 se révèle audacieux dans sa conception en six mouvements. Très virtuose, l’ensemble, inclassable, est d’une grande difficulté technique et nécessite une maîtrise rigoureuse des couleurs sonores. Entre fluidité et sauvagerie _ voilà ! _, présentes dans les parties extrêmes, avec des moments lugubres, on découvre aussi deux mouvements dramatiquement brefs, avant un Adagio travaillé et un Moderato comodo à la fois passionné puis apaisé, avec des arpèges bruissants. Une partition qui demande aux interprètes de grandes facultés de concentration et de discipline collective, des qualités que possèdent au plus haut point _ oui ! _ les Arcadia.

Les quatuors n° 13 (composé entre mai et mi-juillet 1977) et n° 15 (l’écriture occupera les deux premiers mois de 1979) sont postérieurs au décès de Chostakovitch _ survenu le 9 août 1975 _ ; on peut les considérer dans la lignée des partitions de ce dernier, avec aussi des liens bartokiens _ oui. Ils ont une caractéristique commune : ils ne comportent pas d’indications expressives, mais bien métronomiques. En un seul élan de moins de quinze minutes (le plus court de Weinberg), le treizième, dédié au Quatuor Borodine, se révèle d’une grande complexité émotionnelle, avec des phases atonales onduleuses, un discours tantôt angoissant dans un échange entre le violoncelle et le premier violon, tantôt fusionnel, tantôt fiévreux, mais toujours d’un lyrisme concentré _ oui. Une page difficile _ mais imposante, grandiose _, tout comme l’est le quinzième quatuor, riche de neuf mouvements brefs, pour une durée de vingt-six minutes, au cours desquelles les sourdines sont utilisées dans plusieurs mouvements, dont le caractère, rythmé et passionné _ voilà ! _, adopte à chaque fois une texture propre. Ce quatuor est dédié à quatre lauréates russes de concours qui formeront ensuite le Quatuor à cordes de Moscou.

Le Quatuor Arcadia interprète, dans un engagement incisif et âpre _ idoine et superbissime ! _, ces pages dans lesquelles, selon une déclaration commune, il voit une musique pareille à une chaude lumière cernée par l’obscurité de l’inconnu. Toute la complexité de la structure et tout le poids émotionnel qui y est attaché, est traduit, comme dans l’album précédent, par des accents énergiques et une tension ravageuse _ énergie et tension ravageuse, d’une profonde intimité aussi… Les Arcadia prennent ces partitions à bras-le-corps, dans un investissement souvent bouleversant _ parfaitement ; du niveau de l’œuvre sublime de Beethoven, ai-je dit pour ma part… On attend les deux derniers albums à venir avec un _ très, très _ vif intérêt _ impatient et passionné. Mais il est déjà certain que la lecture globale des Arcadia, au style rigoureux et intensément lyrique _ oui ! _, va devenir une _ très _ solide référence pour ce _ sublime _ corpus weinbergien.

Son : 9  Notice : 10  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

Des merveilles d’interprétation par les Arcadia

pour des chefs d’œuvre sublimissimes de musique de chambre de Mieczyslaw Weinberg. 

Ce mercredi 21 août 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Et à nouveau à propos de l’excellent et encore bien trop méconnu Alexandre Tansman (1897 – 1986) et l’emballant CD « Tansman cosmopolite » du Novi Piano Duo, pour le label Dux…

13août

Et à nouveau à propos de l’excellent et encore bien trop méconnu Aleksander Tansman (Lodz, 11 juin 1897 – Paris, 15 novembre 1986),

et comme en confirmation de mon article du 17 mai 2024 « « 

_ dans lequel je citais le parfait article très justement enthousiaste « L’enfant terrible » de Jean-Charles Hoffelé, en date du 13 mai précédent : c’est lui qui m’avait appris l’existence de cet emballant et épatantissime CD Dux 1969 « Tansman cosmopolite«  _,

voici ce mardi 13 août 2024, ce bon article-ci de Jean Lacroix « Deux pianos pour le cosmopolitisme d’Alexandtre Tansman » sur le site de Crescendo Magazine :

Deux pianos pour le cosmopolitisme d’Alexandre Tansman

LE 13 AOÛT 2024 par Jean Lacroix

Alexandre Tansman (1897-1986) :

Le Train de nuit ; La Grande Ville ; Fantaisie sur les valses de Johann Strauss ; Trois Fugues ; Introduction et Fugue. Duo Novi. 2023.

Notice en polonais et en anglais.

54.20.

Dux 1969.

Le label Dux avait déjà proposé un programme consacré à des pages pour deux pianos d’Alexandre Tansman en 2021. Centré sur de grandes cités pianistiques, témoignages de la carrière internationale de ce compositeur polonais qui a vécu en France où il est devenu, dans les années 1920, un ami du Groupe des Six, et s’est produit, en sa qualité d’excellent pianiste, en Europe, aux Etats-Unis, en Asie et au Moyen-Orient, Il était confié au Duo Baayon. Nous renvoyons le lecteur à notre article du 13 juillet 2022 pour de plus amples détails biographiques. Rappelons que né dans une famille juive à Łodz, où il a étudié ainsi qu’à Varsovie, Tansman a été un inlassable voyageur et a laissé un catalogue de plus de trois cents œuvres. Il s’exila à Hollywood pour échapper au régime nazi et revint en France en 1946 pour s’y fixer définitivement. C’est à l’intention de son épouse Colette, fille du compositeur et contre-amiral Jean Cras, trop tôt disparue (en 1953, âgée de 44 ans), qu’il a écrit la plupart de ses partitions pour duo de pianos.

Le présent programme débute par une page très imagée de 1951, intitulée Le Train de nuit, dont le contenu s’inspire sans doute de souvenirs ferroviaires que Tansman a engrangés au cours de ses nombreux déplacements _ de par le monde entier. Destiné à un ballet du danseur et chorégraphe allemand Kurt Jooss (1901-1979), ce parcours léger _ mais absolument emballant ! _, d’un peu moins de dix-huit minutes, se compose de plusieurs micro-sections diversifiées et animées, dont on apprécie l’originalité ; elles évoquent notamment les rythmes du voyage, modérés ou pleins de vitalité. Celle-ci se retrouve, agrémentée d’effets de jazz _ oui _, après la découverte de Gershwin _ oui, oui _, dans La Grande Ville, qui date de 1935, et est à l’origine un ballet en trois tableaux, destiné lui aussi à Kurt Jooss. Tansman en a transcrit trois courts moments pour deux pianos ; il y rappelle les dangers que représente pour la jeunesse une cité comme New York, dans une atmosphère emballante _ voilà le qualificatif décisif ! _, typique du jazz américain, charleston y compris.

Tansman était épris de Vienne et de son atmosphère particulière. En 1961, après le décès de son épouse, il écrit une Fantaisie sur les valses de Strauss, haute en couleurs et en sensations dansantes. On y reconnaît, entre autres thèmes, celui de la Valse de l’empereur, le tout dans une atmosphère narrative élégante et de bon goût, sans négliger _ en effet _ un humour simple et léger. Les Trois Fugues de 1942 sont de brefs morceaux où apparaissent quelques dissonances, entre expressivité, discours lyrique et virtuosité. L’Introduction et Fugue de 1938 complètent l’affiche, la première pièce, assez grandiose, s’inspire du monumentalisme de Busoni, la seconde se développe à partir d’un thème doux pour progresser jusqu’à l’apogée.

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Le Duo Novi, fondé en 2018, s’est formé à partir de l’Académie de musique de Cracovie, où Anna Wielgus-Nowak et Grzegorz Nowak ont tous deux étudié. Ces partenaires ont signé en 2022 un premier album consacré au compositeur polonais Roman Maciejewski (1910-1998), déjà pour le label Dux. Le présent album recoupe une partie du programme de 2021 du Duo Baayon : on y retrouve La Grande Ville et la Fantaisie sur des Valses de Strauss. Tout autant que ses compatriotes, le Duo Novi défend ces pages alertes et divertissantes avec entrain, les passages imprégnés de jazz étant particulièrement bienvenus _ oui ! Le choix de l’une ou l’autre version se fera, à qualité égale, en fonction du reste du programme.

Comme c’était déjà le cas pour le Duo Baayon, le label Dux ne propose ici qu’un minutage qui dépasse à peine les cinquante minutes. C’est vraiment peu. D’autres pages pour deux pianos de Tansman auraient été _ certes… _  les bienvenues.

Son : 8,5  Notice : 8  Répertoire : 9  Interprétation : 9

Jean Lacroix

Alexandre Tasman,

un compositeur qui assurément vaut le voyage de notre écoute !

Ce mardi 13 août 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

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