Archives du mois de décembre 2019

Une interview de Bioy chez lui, dans sa bibliothèque, en 1998

06déc

Mon cousin toulousain

m’adresse une interview d’Adolfo Bioy Casares

_ cousin au second degré de son père Edouard Bioy et de ma mère Marie-France Bioy ;

dont les pères respectifs, les frères Antoine et Paul Bioy Daguzan, étaient cousins germains d’Adolfo Bioy Domecq ;

Antoine Bioy Daguzan est né le 9 juin 1872 à Oloron ; Paul Bioy Daguzan, le 25 avril 1878 à Oloron ; et Adolfo Bioy Domecq, le 27 juillet 1882 à Pardo, province de Buenos Aires ;

Antoine et Paul étaient fils de Marcelin Bioy Cazamayou, né à Oloron le 14 avril 1840 ; et Adolfo, fils de Jean-Baptiste Bioy Cazamayou, né à Oloron, le 6 août 1838 ;

le père des frères Jean-Baptiste et Marcelin Bioy Cazamayou, Antoine Bioy Croharé (l’ancêtre commun aux Bioy d’Argentine et de France !), était né, lui, à Oloron le 7 décembre 1809 _

que j’ignorais,

filmée en son domicile, Calle Posadas à Buenos Aires, en 1998

_ l’année qui précéda sa mort le 8 mars 1999 _,

dans sa _ fameuse _ bibliothèque.

La vidéo de l’interview _ on ne sait hélas pas qui est l’interviewer _ de Bazar TV

comporte trois volets,

respectivement de 6’28 _ « sobre la pasión, la muerte, sus novelas y el cine«  _,

7’49 _ « sobre Borges, Silvina Ocampo y sus amores de juventud«  _,

et 5’25 _ « sobre Jorge Luis Borges« 

Même affaibli par la maladie

qui n’allait pas tarder à l’abattre,

Bioy

est toujours élégant, humble, avec beaucoup d’humour,

et lucidissime.

Et avec le bleu transparent de son regard 

malicieux

et stoïque.

Ce vendredi 6 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Comment interpréter Gesualdo et son irradiante singularité ?..

05déc

Carlo Gesualdo da Venosa

(Venosa, 8 mars 1566 – Gesualdo, 8 septembre 1613)

est un de mes compositeurs préférés !


Mais combien sont rares les interprétations de ses œuvres

vraiment satisfaisantes

_ et réellement idiosyncrasiques ?..

Longtemps, de ses six livres de Madrigaux,

ne m’a exclusivement agréé

que l’interprétation du Quintetto Vocale italiano, d’Angelo Ephrikian

_ avec les chanteurs Karla Schlean (soprano), Clara Foti (mezzo-soprano), Elena Mazzoni (contralto), Rodolfo Farolfi (ténor), Gastone Sarti (baryton) et Dimitri Nabokov (basse).

Puis,

m’a beaucoup plu _ voire même comblé ! _,

livre à livre,

celle de La Compagnia del Madrigale,

pour les livres 6, 3 et 2

_ de même, d’ailleurs, que la totalité de leurs CDs : chaque fois, une extase…

Les chanteurs en sont Rossana Bertini, Francesca Cassinari (sopranos), Elena Carzaniga (alto), Giuseppe Maletto, Raffaele Giordani (ténors) et Daniele Carnovich (basse). 

Alors que m’horripilaient

toutes les autres interprétations,

tout particulièrement du fait de la non-italianité criante des chanteurs.

Alors quand est paru,

le 28 novembre dernier,

l’article de Jean-Charles Hoffelé sur son blog Discophilia

intitulé D’amour à mort,

ai-je été quasi blessé

de la chronique très négative _ et non argumentée ! _

portée par ce critique que j’apprécie beaucoup en général

à l’égard

et de La Compagnia del Madrigale,

et de leur CD du 2e livre de Madrigaux de Carlo Gesualdo ;

notamment par la comparaison faite par Hoffelé

avec le double album

que les Arts Florissants, dirigés par Paul Agnew

_ avec les chanteurs Miriam Allan et Hannah Morrison (sopranos), Lucile Richardot et Mélodie Rubio (contraltos), Sean Clayton (ténor), Edward Grint (basse) et Paul Agnew lui-même (ténor) _,

ont consacré aux Livres 1 et 2 des Madrigaux de Gesualdo !

D’AMOUR À MORT

La Compagnie del Madrigale s’est lancée voici quelques années dans une intégrale toujours en cours _ manquent encore les livres 1, 4 et 5 _ des Madrigaux de Gesualdo, je croyais l’entreprise salutaire _ certes ! _, après tout on n’avait pas vraiment d’alternative au geste expressionniste _ oui, éblouissant ! _ déployé par Angelo Ephrikian et ses chanteurs qui avaient enregistré dans des conditions difficiles la version princeps de l’ensemble des Livres.


Hélas, les nouveaux venus faisaient bien pâle figure _ ah ! non !!! _ et ce dès le premier disque, étrange que Glossa n’ait pas préféré confier une entreprise si périlleuse à La Venexiana _ tellement décevante, elle, depuis le départ de ses membres qui allaient fonder La Compagnia del Madrigale… Quel ensemble pourrait concilier le style musicologiquement juste avec l’expression si intense _ oui _ devinée _ oui _ par la petite troupe dépareillée d’Ephrikian ?

Une divine surprise m’attendait à la poste dans une enveloppe d’harmonia mundi, un joli double album qui semble le premier volume d’une intégrale des six Livres selon Les Arts florissants emmenés par Paul Agnew.


Leur parcours Monteverdi m’avait bluffé _ pas moi ! _ ; dès Baci, soavi, e cari qui ouvre le Libro primo, les mots éclatent, assaillant les notes _ c’est vrai _ ; les affects brillent ; tout le feu du baroque italien exalte _ oui _ les couleurs et les accents de ces six voix, faisant résonner cette alliance coupante comme une pointe de diamant entre le mot et la note qui donne à la musique de Gesualdo ses vertigineuses _ en effet ! _ propriétés expressives. Car ici les mots dansent, dans la clarté aveuglante qu’impose Paul Agnew conduisant de son ténor ces efflorescences de sons.

Admirable, jusque dans la sensualité trouble de bien des pages qui ne sont pas sollicitées _ artificiellement _ mais simplement exposées dans leurs singulières harmonies _ oui. Lorsque l’on sait qu’à mesure que les Livres s’accumulent, cette langue si libre se radicalise encore _ oui _, je peine à me dire qu’il faudra attendre les prochains volumes, je les voudrais tous pour m’immerger enfin dans ce corpus de chefs-d’œuvre _ assurément ; et sans postérité.


LE DISQUE DU JOUR

Carlo Gesualdo (1566-1613)
Madrigaux à 5 voix, extraits des “Libro primo” et “Libro secondo

Les Arts florissants
Paul Agnew, direction

Un album de 2 CD du label harmonia mundi/Les Arts florissants HAF8905307.08

Photo à la une : le ténor et directeur des Arts florissants – Photo : © DR

J’avais renâclé à me procurer ce double album des Arts Flo (et Paul Agnew), redoutant un certain défaut d’italianité de leur part…

J’ai bien voulu cependant tenter l’expérience…

Et n’ai pas été déçu, bien au contraire,

d’avoir écouté le conseil de Jean-Charles Hoffelé.

Même si je ne change _ pas du tout ! _ d’avis sur La Compagnia del Madrigale !

Je dirai simplement que

du Livre second des Madrigaux de Gesualdo,

nous disposons là

de deux interprétations qui diffèrent

quant à leur regard sur le parcours même de création du compositeur :

entre la tonalité des œuvres de la période de Ferrare (1594 – 1596),

pour les quatre premiers Livres,

et celle de la période de Gesualdo (1611 – 1613),

pour les deux derniers _ sublimissimes…

La Compagnia del Madrigale se refusant, elle, à interpréter les premiers Livres de Madrigaux de Gesualdo

de la manière qui conviendra aux deux derniers…

Quant à l’appréciation de Jean-Charles Hoffelé

sur la valeur des précédents CDs de La Compagnia del Madrigale

_ leurs merveilleux et magiques Monteverdi (les Vespro), Marenzio (les livres 1 et 5 de Madrigaux), De Rore (Vieni, dolce Imeneo)

et l’album Orlando furioso : madrigaux composés sur des poèmes de l’Arioste… _,

je ne la partage _ ni ne comprends _ pas du tout !!!

À quoi peut donc tenir cette exécration musicale ?

Je me le demande bien…

Ce jeudi 5 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un entretien de Silvia Baron Supervielle avec Adolfo Bioy Casares, à Paris, en 1991 ou 1992…

04déc

PROMENADE AVEC ADOLFO BIOY CASARES
 
L’auteur de L’Invention de Morel, l’arbitre du réel et de l’imaginaire, est de passage à Paris. Je vais le prendre à l’hôtel pour faire une promenade dans la ville qui lui est chère. Ses yeux transparents parcourent les façades, se fixent dans sa pensée à mesure que nos pas s’arrêtent, reprennent lentement au rythme du dialogue :
 
S.B.S. : _ Les deux derniers livres de vous qui ont été publiés en France, Une Poupée russe et Un Photographe à La Plata, bien qu’ils soient l’un un roman et l’autre un livre de nouvelles, ont l’air d’appartenir au même genre, n’est-ce pas ?
 
A.B. C. : _ C’est vrai. Mes romans sont plutôt de longues nouvelles. Pourtant, lorsque j’écris une nouvelle, mon texte se resserre au lieu de se ramifier. Le roman m’intimide, et parfois me décourage. Dans les nouvelles, je me sens chez moi. Le thème de Un Photographe à La Plata m’a suivi longtemps. Les lecteurs argentins ont été désarçonnés. Ils espéraient une fin heureuse. Par contre, en Espagne le livre a connu un grand succès. Des livres bien accueillis à Buenos Aires ne le sont pas en France ou en Allemagne. Il est curieux de constater qu’en franchissant la ligne imaginaire de la frontière, la langue et les esprits se transforment. Chaque peuple est différent.
 
S.B.S. : _ Chacune de vos nouvelles est différente aussi. A l’exception du protagoniste…
 
A.B.C. : _ Qui ne change pas, oui. Je me suis attaché à lui. C’est un esprit limité. Cela me plaît. J’aime ses manques, ses perplexités, ses craintes, ses indolences, ses échecs. Il s’accorde peut-être à mes histoires. Certains écrivains, comme Dickens, sont capables d’inventer des personnages à l’infini. Moi, j’invente les rôles secondaires, mais le héros reste toujours confortablement le même.
 
S.B.S. : _ Le héros reste toujours un homme.
 
A.B.C. : _ Je n’avais pas remarqué. Peut-être je ne suis pas digne d’écrire un livre où la femme est au centre. Il est plus aisé d’écrire péjorativement. De donner à l’histoire une fin triste et non heureuse. Mon héros se suicide souvent. Ma pensée est pessimiste et mon humeur optimiste. La vie est un passe-temps frivole avec une fin tragique. Dieu sait si j’aime les femmes. Ma vie n’aurait pas de sens sans les femmes. Ma littérature, il est vrai, ne leur rend pas justice.
 
S.B.S : _ Quelque chose les empêche d’avancer sur la scène…
 
A.B.C : _ Les situations sont provoquées par elles. Toujours l’amour pour une femme. L’intensité n’est pas facile. L’amour intense. Le personnage intense. En parlant des sœurs Brontë, de Charlotte je crois, George Moore disait qu’elles étaient intenses ; et il ajoute que l’intensité n’est pas une vertu importante dans la littérature, bien qu’elle soit rare. La littérature intense n’est pas prolixe.
 
S.B.S. : _ Par l’intrigue et par la construction, vos livres font penser à des romans policiers du cinéma en noir et blanc, où le banal est au service du fantastique.
 
A.B.C. : _ Je suis toujours un lecteur de romans policiers. Ils m’ont appris à construire mes livres. En plus, ils font partie de la poétique d’Horace. Le cinéma est une de mes passions. Stevenson disait que les récits doivent être doués d’images, de scènes vivantes, comme au théâtre. J’ai suivi son conseil. Si ce n’est que pour moi, les scènes se déroulent sur l’écran. Mes souvenirs ressemblent à des films. J’aimerais que la fin du monde me surprenne dans une salle de cinéma. Rien que d’y pénétrer, je ressens du bonheur. Mais je ne vais presque plus au cinéma. J’ai observé que mes contemporains ont pris l’habitude de mourir. Avant de les suivre, je voudrais écrire les trois romans et les quatorze nouvelles  que j’ai dans la tête.
 
S.B.S. : _ Avec des dialogues au premier plan ?
 
A.B.C. : _ Je ne sais pas, je ne sais pas… Avant, je n’écrivais pas avec autant de dialogues. Depuis, j’ai appris à m’en servir. Il me semble qu’ils relâchent la tension. La manière orale produit une détente qui, sans détourner l’attention du lecteur, rend la lecture plus agréable.
 
S.B.S. : _ Aimez-vous la littérature américaine autant que l’anglaise ?
 
A.B.C. : _ Non, je la connais mal. De Hemingway, Les Vertes collines d’Afrique. De Faulkner, les romans policiers. Des anglais, je relis Bothwell, Hume, George Moore, Conrad, et j’ai beaucoup lu Wells. Je me sens proche de la littérature italienne, mais les auteurs que je relis sont Stendhal, Voltaire, Benjamin Constant.
 
S.B.S. : _ Quels furent vos rapports avec Roger Caillois lorqu’il se trouvait en Argentine ?
 
A.B.C. : _ Je regrette : une antipathie partagée.
 
S.B.S. : _ Vous avez écrit des textes avec Borges, et vos œuvres ont des similitudes. Comment cet univers est-il né entre vous ? 
 
A.B.C. : _ Je suis un ami de Borges depuis 1932. Je n’exagère pas en disant qu’on se voyait quotidiennement. On ne se séparait de lui, Silvina et moi, que durant la période d’été. Parfois il venait aussi nous rejoindre à Mar del Plata. A Buenos Aires, il dînait à la maison pratiquement tous les soirs. Après le repas, on se racontait mutuellement des histoires. Sauf que je ne lui lisais pas ce que j’écrivais, et qu’il ne me lisait pas ses textes. Nous avions l’habitude de nous communiquer l’un à l’autre des anecdotes, des récits, les poèmes qui nous venaient à l’esprit, des sujets inventés par nous ou que nous avions lus, ainsi que les arguments des films qu’on voyait. Borges aimait aussi le cinéma. La vie et la conversation créèrent ce climat. La vie était trop courte pour parler de littérature comme nous le voulions, Silvina, Borges et moi. En plus, nous partagions des préférences. Dans ma jeunesse, j’étais partisan du tigre et ennemi du lion. J’étais pour la carré et contre le cercle. Nous avions toutes ces choses en commun avec Borges. C’était comme un jeu. Nous étions tous deux partisans des chiffres impairs et ennemis des chiffres pairs. On a partagé ces bêtises…
 
S.B.S. : _ Qui se sont échangées dans vos pages secrètes…
 
A.B.C. : _ A cause de cinquante ans d’amitié et de lectures ensemble.
 
S.B.S. : _ De lectures à haute voix ?
 
A.B.C. : _ On se lisait la première phrase, ou des chapitres, ou la première et la dernière page d’une suite de romans illustres. Nous lisions Voltaire à Borges. Nous commentions les lectures. La plupart du temps, nous écrivions en ajoutant de jour en jour des plaisanteries qui poussaient comme des plantes grimpantes.
 
S.B.S. : _ On dirait que vous avez fait, à l’écart de la vôtre, comme une œuvre conjointe.
 
A.B.C. : _ Peut-être. Les frères Goncourt aussi. Entre Borges et moi, il y eut une espèce de fraternité qui dura jusqu’à sa mort.
 
S.B.S. : _ Silvina Ocampo et Macedonio Fernández font égalementent partie de cette création collective ?
 
A.B.C. : _ Silvina est incorrigiblement originale, et son style est inimitable. Macedonio Fernández a été presque inventé par Borges… 
 
S.B.S. : _ Il se serait inspiré de son invention ?
 
A.B.C. : _ …comme un personnage de Buenos Aires. Mais son style est illisible. Je ne voudrais pas écrire comme lui.
 
S.B.S. : _ Etes-vous un écrivain argentin ? Vos personnages le sont à l’évidence, et quand vous les placez à Aix-les-Bains, comme dans Une Poupée russe, ils le sont étrangement davantage.
 
A.B.C. : _ Je suis un lecteur de toute la littérature, mais je crois que je suis un écrivain argentin. Ma prose est argentine. J’ai vécu à Buenos Aires toute ma vie ; et cette ville, ainsi que la province de Buenos Aires, m’a formé.
 
S.B.S. : _ Pourtant votre grand-père était né près de Pau…
 
A.B.C. : _ C’est pourquoi j’aime tant les villes, les villages de ce pays, la campagne, le pain français, l’eau minérale, la cuisine françaises ; et me promener, m’entretenir avec les gens, les commerçants du quartier. J’ai beaucoup d’amis en France, qui ne sont pas nécessairement des écrivains. Un de mes meilleurs amis fut Casau, le propriétaire du restaurant Chez Pierre, à Pau.
 
Silvia Baron Supervielle
Tel est le texte que Silvia avait promis de m’envoyer dès qu’elle le retrouverait dans ses archives
_ il n’avait pas été publié.
Cet entretien-promenade à Paris, entre Bioy _ alors de passage à Paris _ et Silvia Baron Supervielle _ qui réside à Paris _,
qui a possiblement eu lieu en 1991 ou 1992
_ voire 1993, 1994 ou 1995 ; Silvia n’a pas noté sa date en son texte ; et n’a pas non plus un souvenir immédiat de cette date.
Mais le texte mentionne un premier repère chronologique intéressant avec l’expression : « les deux derniers livres de vous qui ont été publiés en France, Une Poupée russe et Un Photographe à La Plata« … Or le livre suivant de Bioy à paraître en traduction française, après Une Poupée russe, paru le 1er janvier 1991, et Un Photographe à La Plata, paru le 1er juin 1991, est Un Champion fragile, paru en français le 24 août 1995. Nous disposons ainsi des deux bornes temporelles a quo et ad quem de cet entretien parisien entre Bioy et Silvia : il a eu lieu entre juin 1991 et août 1995…
Mais un second élément, et décisif, lui, pour mieux cerner (et réduire) le créneau de datation possible de cet entretien-promenade dans Paris entre Bioy et Silvia Baron Supervielle, est l’absence de la moindre référence aux deux terribles décès pour Bioy de son épouse et de sa fille : Silvina Ocampo est décédée le 14 décembre 1993, et Marta Bioy, le 4 janvier 1994 ; et il est humainement impossible que cette tristissime situation n’ait pas été si peu que ce soit mentionnée dans cet entretien entre les deux amis que sont Bioy et Silvia : c’est donc au plus tard dans le courant de l’année 1993 que cette rencontre parisienne ainsi narrée par Silvia, a pu avoir lieu ; et vraisemblablement en 1991 ou 1992… _,
doit faire partie de l’hommage à Bioy que Les Amis de Bioy Casares, dont je suis le président, comptent publier en hommage à cet immense écrivain argentin d’origine béarnaise _ d’Oloron-Sainte-Marie, où naquit son arrière grand-père Jean-Baptiste Bioy, le 6 août 1838 ; avant de gagner l’Argentine (Buenos Aires et Pardo) vers 1855…
Ce mercredi 4 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Réception d’un envoi de Silvia Baron Supervielle : « Promenade _ parisienne et littéraire _ avec Adolfo Bioy Casares »

03déc

Dans le cadre d’un projet de publication de contributions de témoignages sur _ mon cousin l’écrivain argentin (Buenos Aires, 15 septembre 1914 – Buenos Aires, 8 mars 1999) _ Adolfo Bioy Casares_ sa vie et son œuvre _,

Silvia Baron Supervielle vient de m’adresser par courrier papier

le récit d’un passionnant entretien qu’elle a eu, dans les années 90, à Paris, avec Adolfito Bioy,

dont elle fut toutes leurs vies, la sienne, celle de Bioy, celle de Silvina Ocampo, celle de Borges, celle de Victoria Ocampo,

une amie proche.

Le récit de cet entretien, Silvia me disait l’avoir égaré.

Et venant de le retrouver, elle a l’immense gentillesse de me l’adresser :

il pourra ainsi faire partie des contributions d’amis de Bioy,

l’ayant fréquenté lui, de son vivant,

ou de lecteurs passionnés de son œuvre,

que j’avais priés de bien vouloir nous faire connaître, chacun d’entre eux, leur Bioy.

Ce texte paraîtra donc dans le recueil de contributions à la connaissance de la vie et de l’œuvre de Bioy, auquel, nous Les Amis de Bioy Casares, travaillons.

Cet envoi de Silvia, une fois lu, a donné lieu à quelques recherches de chronologie de ma part sur les séjours de Bioy en France _ à Paris, à Cagnes-Sur-Mer, mais aussi à Biarritz, à Pau et à Oloron-Sainte-Marie, en Béarn : le berceau de notre famille Bioy (de même que celui de la famille Supervielle : nos tombeaux de famille, au cimetière haut de la rue d’Aspe, sont voisins ; et nous sommes lointainement apparentés !)…

En attendant de diffuser la Promenade avec Adolfo Casares que Silvia Baron Supervielle a rédigée dans le courant des années 90 du siècle dernier,

voici mon questionnement :

Je viens de recevoir ce matin et de lire les 7 pages _ sur papier _ de Promenade avec Adolfo Bioy Casares de Silvia Baron Supervielle.

Un texte passionnant !
 
 
Un petit manque cependant _ pour la chronologie (dont je suis un maniaque) _ : Silvia n’a pas noté alors la date de cet entretien (qui a eu lieu à Paris !),
et elle ne se souvient pas, non plus _ ajoute-t-elle _, de sa date :
… 
« Cher Francis,
voici mon interview d’Adolfito.
De quelle année ?
Bien amicalement
Silvia ».
Cet entretien-promenade a toutefois eu lieu
après la publication en France des « deux derniers livres de vous dit-elle à Adolfito _ qui ont été publiés en France, Une Poupée russe et Un Photographe à La Plata »
Une Poupée russe a été publié le 1er janvier 1991, chez Robert Laffont ; et Un Photographe à La Plata le 1er juin 1991, chez Bourgois _,
a indiqué Silvia en ce texte de leur entretien parisien ;
et elle y interroge, en effet, très précisément Bioy sur l’écriture de ces deux livres qu’elle a lus.
Mais peut-être Silvia les avait-elle déjà lus en leurs éditions en espagnol
(en 1991 pour Una muñeca rusa, chez Tusquets ; et en 1985 pour La Aventura de un fotografo en La Plata, chez Emecé) ;
et elle n’évoque _ sans en donner les dates _ leur parution en français qu’à destination de l’éventuel lectorat francophone à venir de cet entretien _ demeuré inédit…
Pensant tout d’abord _ à tort _ que la première publication de la traduction française de Un Photographe à La Plata avait eu lieu le 6 novembre 1998 _ et c’était une erreur ! _
j’avais échafaudé quelques hypothèses afin d’essayer de mieux cerner la date de cet entretien parisien :
peut-être cet entretien-promenade dans Paris avait-il eu lieu au moment de la présence parisienne de Bioy pour assister à la première de la pièce La Lluvia de fuego (de Silvina Ocampo) à Bobigny, le 16 septembre 1997, en une mise en scène d’Alfredo Arias, et avec l’actrice Marilu Marini dans le rôle principal.
C’est la première idée qui m’était venue à l’esprit…
Ce qui posait tout de même un problème de cohérence de la chronologie _ à tenter d’élucider _,
puisque la première de La Pluie de feu (de Silvina Ocampo, l’épouse de Bioy _ Silvina Ocampo : Buenos Aires, 28 juillet 1903 – Buenos Aires, 14 décembre 1993 _) à Bobigny (le 16 septembre 1997 ; et en une traduction de Silvia Baron Supervielle) _ René de Ceccatty en raconte des détails en son superbe Fiction Douce _
précèdait, d’après mes calculs _ erronnés _  de plus d’un an la parution (le 6 novembre 1998, croyais-je ; à tort !) de la traduction en français, par André Gabastou, d’Un Photographe à La Plata
Et Adolfo Bioy, très malade, décèdera à Buenos Aires le 8 mars 1999
Cf aussi le très significatif article de Guillermo Pirro La entrevista más corta del mundo à propos de Bioy recevant chez lui Calle Posadas à Buenos Aires, dans le quartier de La Recoleta, en août 1998, l’écrivain italien Nicola Orengo,
que vient de m’adresser l’ami Edgardo Scott.
Le lendemain de cette brévissime rencontre d’août 1998 à son domicile, Bioy s’envolait vers la France, et Cagnes-sur-Mer
il me semble que Silvina Ocampo n’est jamais venue en cette résidence de Cagnes ; et je me souviens plus de quand date l’acquisition de cette résidence de vacances de Bioy sur la Côte d’Azur… En 1998, Bioy était très fatigué et malade ; les décès successifs de son épouse Silvina Ocampo (Buenos Aires, 28 juillet 1903 – Buenos Aires, 14 décembre 1993) et de sa fille Marta Bioy (New-York (?), 8 août 1954 – Buenos Aires 4 janvier 1994), à à peine trois semaines d’intervalle, ont été deux coup terribles pour lui…
On connaît aussi des photos d’Adolfito à Paris avec son fils Fabian, qui résidait en permanence à Paris.
Voici un extrait d’un article 
publié le 16 février 2006 au moment du décès de Fabian Bioy, dans le journal La Nacion :
« La primera vez en que se los vio _ Adolfito, le père, et Fabian Bioy, son fils _ juntos en público fue en 1997 en París, en la presentación de la obra de teatro Lluvia de fuego, de Silvina Ocampo, cuando un fotógrafo se le acercó para tomarles una foto y Adolfo Bioy Casares presentó a Fabián como su hijo. Al año siguiente, lo reconoció legalmente, y Fabián Ayerza Demaria _adoptó el apellido Bioy Casares »…
Il faudrait pouvoir établir une chronologie précise des divers séjours en France (à Paris et à Cagnes-sur-Mer, tout particulièrement) d’Adolfito…
L’édition (dite abrégée _ celle que je possède ; André Gabastou en possède, lui, la version dite intégrale, qu’il m’a prêtée _) du Borges de Bioy s’interrompt, quant à elle, en 1989,
quand Bioy raconte quelques précieuses confidences que lui a faites Jean-Pierre Bernès (le traducteur de Borges) à propos des derniers jours de l’ami Borges à Genève,
peu avant le décès de celui-ci le 14 juin 1986, et dont Bernès avait été le témoin au jour le jour
ainsi qu’il l’a narré à ma cousine Françoise et moi-même quand il nous a reçus chez lui à Audenge ;
une autre fois, Bernès m’avait reçu à Audenge avec ma mère (née Marie-France Bioy en 1918 ; et cousine au second degré d’Adolfito Bioy, né, lui, en 1914) ;
sa vieille cuisinière argentine (qui avait été auparavant celle de Borges) nous avait préparé de délicieux gâteaux argentins) ;
et Bernès nous a joué des milongas sur un de ses très beaux pianos
En nous montrant de nombreuses photos d’Adolfito, Silvina et Borges…
On ne peut que rêver quand on mesure qu’il reste 18 300 pages (sur les 20 000 qu’il comprend au total) du Journal de Bioy à publier :
les pages du Borges de Bioy (en édition dite complète) ne comportant que 1700 des pages de ce Journal de Bioy… _ cf mon article du 30 novembre dernier : … 
Or voici que par retour de courriel l’ami René de Ceccatty corrige très justement mon erreur sur la date de parution de la traduction française de Un Photographe à La Plata :
non pas le 6 novembre 1998, mais le 1er juin 1991.
Et je rappelle que la parution de la première édition de la traduction française de Une Poupée Russe eut lieu le 1er janvier 1991.
Des dates rapprochées, pour ces parutions des deux traductions, au cours du premier semestre de 1991.
Il ne me restait plus qu’à rechercher la date de parution de la traduction française suivante d’une œuvre de Bioy ;
et je découvre qu’il s’agit de celle d’Un Champion fragile, qui paraît aux Éditions Robert Laffont le 24 août 1995.
Le créneau d’éventualités pour l’entretien-promenade dans Paris entre Bioy et Silvia Baron Supervielle se rétrécit donc :
celui-ci dut avoir lieu entre le mois de juin 1991 et le mois d’août 1995. Et peut-être en 1991 ou 1992, car la lecture de ces deux oeuvres récentes de Bioy par Silvia semble alors assez récente… À préciser…

Il me reste à réaliser _ à fin de large diffusion : en ce livre de contributions à un portrait divers de Bioy, l’homme et l’écrivain, que nous avons en chantier, nous Les Amis de Bioy Casares _ une transcription numérique de ce très riche texte de Silvia Baron Supervielle : Promenade avec Adolfo Bioy Casares

Ce mardi 3 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Redécouvrir Reynaldo Hahn : le coffret de l’intégrale des mélodies (pour voix seule) par Tassis Christoyannis _ et Jeff Cohen au piano

02déc

L’œuvre de Reynaldo Hahn

(Caracas, 9 août 1874 – Paris, 28 janvier 1947)

est encore étrangement méconnue

au sein de la musique française du XXe siècle.

Jusqu’ici,

d’un assez vaste choix de mélodies de Reynaldo Hahn

n’existait qu’un double album Hyperion _ CDA 77141/2 _

avec d’excellents chanteurs

_ Felicity Lott, Stephen Varcoe, Susan Bickley, Ian Bostridge, ainsi que le London Schubert Chorale  _,

accompagnés par le piano de Graham Johnson ;

et comprenant quelques mélodies avec chœur : par exemple le merveilleux Phydilé….

Et voici que le Palazzetto Bru-Zane nous offre un coffret de 4 CDs _ BZ 2002 _,

intitulé Reynaldo Hahn Complete Songs

par le baryton Tassis Christoyannis,

et le piano de Jeff Cohen _ ne comprenant pas de mélodies avec chœur : Phydilé ne s’y trouve donc pas.

Mon article du 4 novembre dernier

s’était contenté d’annoncer l’événement ;

en y ajoutant tout de même l’adjectif « délicieux« …

Un mois plus tard,

voici venir sur son site Discophilia

un article de Jean-Charles Hoffelé

intitulé Trésors cachés

TRÉSORS CACHÉS


Le monde de Proust ? Oui évidemment, mais ce que révèle aujourd’hui le Palazzetto Bru Zane en publiant la première intégrale des Mélodies  _ pour voix seule, avec piano _ de Reynaldo Hahn est encore plus important. Il y eut entre Fauré et Debussy, en même temps qu’eux et au-delà d’eux, un maître de la mélodie les égalant, annonçant le dépouillement sensuel de Ravel, et ce maître aura longtemps passé _ hélas _ pour un compositeur de petit rayon.

Depuis le début du XXIe siècle heureusement, le génie singulier de Reynaldo Hahn est enfin réévalué _ oui ; les intimidations bouléziennes ayant fait leur temps, probablement… _ et tout ce qui nous en est rendu stupéfie _ en effet ! _ par la qualité _ oui _ de la facture, l’intemporalité _ classique _ de l’inspiration. Les mélodies auront un temps survécu grâce à Andrèze, qui les a magnifiées dans sa langue parfaite, de sa longue voix si belle. Néère, A Chloris _ ces chefs d’œuvre ! _ seront restés au répertoire des mezzo-sopranos, bis favoris de certaines, mais prendre conscience de l’ensemble du corpus _ oui _ ouvre un vertigineux territoire inexploré _ en effet _ où le goût d’un antique stylisé voisine avec un symbolisme quintessencié, où ce chant ose la parole et le piano ose le minimum _ c’est fort bien vu !_, désarmant de nudité parfois dans sa simplicité _ oui ! _, splendide comme un petit orchestre parfois _ aussi…

Je n’entre pas ici dans un détail, chacun d’entre vous aura son propre itinéraire _ fort bien ! _ et pourra se laisser guider par les excellents textes _ mais oui _ d’Alexandre Dratwicki et de Sylvain P. Labartette, mais il faut simplement rendre hommage _ absolument ! _à Tassis Chistoyannis qui parachève dans cette admirable boîte sa grande anthologie _ absolument remarquable, en effet ! _ de la mélodie française, accompagné par l’impeccable _ ouiJeff Cohen.

Ils font ici un miracle _ oui _, le livret est une mine d’informations _ oui _ et comprend une remarquable iconographie, une vraie œuvre d’art.


LE DISQUE DU JOUR


Reynaldo Hahn (1874-1947)
Les Mélodies (Intégrale)

Études latines
Venezia
Chansons grises
Mélodies inédites
La dame aux camélias
Premier Recueil
Rondels
Les Feuilles blessées
Second Recueil
Troisième Volume
9 Mélodies retrouvées
5 Little Songs
Love without Wings

Tassis Christoyannis, baryton
Jeff Cohen, piano


Un coffret de 4 CD du label Bru Zane BZ 2002

Photo à la une : le compositeur Reynaldo Hahn au piano – Photo : © Palazzetto Bru Zane

 


Un régal de délices…

Ce lundi 2 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

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