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Un délicieux petit livre en hommage à un très grand photographe : Willy Ronis (1910-2009)

22sept

Pour saluer l’immense Willy Ronis qui vient de nous quitter (14 août 1910-12 septembre 2009),

ce tout simple mais magnifique volume « Willy Ronis« , par Paul Ryan, de la très soignée collection « 55«  (c’est-à-dire comportant 55 photos ; et paru en mai 2002) des très soignées Éditions Phaidon ; dont chacune des photos est accompagnée d’un très remarquable commentaire, précis et sobre (et juste !), indiquant les circonstances et la particularité de chacune de ces « saisies » _ « J’essayais juste de surprendre le temps« , disait très humblement Willy Ronis de son activité de photographie…

Je retiendrai tout particulièrement, parmi les 55 images de ce recueil, les photos de son épouse, Marie-Anne Lansiaux (1910-1991) : celle de 1949 _ Marie-Anne a trente-neuf ans _, en leur maison de Gordes, « Le Nu provençal« , page 51 et choisie, aussi, pour la couverture du volume, tel un Bonnard (avec Marthe) en noir et blanc : une splendeur de lumière

_ je m’avise en relisant le texte de présentation de Paul Ryan, pages 3 à 15, que la comparaison (avec Bonnard et avec Marthe) vient aussi à la plume de Paul Ryan :

« Sa photographie la plus célèbre, « Le Nu provençal«  (page 51), peut rappeler les portraits de Marthe par Bonnard, mais l’analogie va bien au-delà du sujet et du cadre. Par son caractère familier authentique et sa réelle intimité, l’image évoque ces moments à couper le souffle, nés d’un regard négligent posé sur un être aimé, qui soudain comble le cœur. Comme chez Bonnard, dont les peintures de Marthe, sa femme, la montrent toujours dans l’éclat de sa jeunesse, Ronis photographiant son épouse, Marie-Anne, la maintient dans le temps et la garde dans son éternelle jeunesse. Là se trouve _ en effet ! et je sais combien Bernard Plossu m’approuvera ! _ le vrai point commun avec Bonnard : l’acte de mémoire et d’amour«  _ ;

ainsi que celles de leur fils Vincent (1940-1988 : « Vincent se tue en 1988 dans un accident de deltaplane » ; « et Marie-Anne, dont Ronis a si lumineusement fixé le souvenir par un après-midi provençal, succombe en 1991, frappée par la maladie d’Alzheimer« , page 14) :

« Vincent endormi, Paris, 1946« , page 33 ;

« Vincent aéromodéliste, Gordes, 1952« , page 55 ;

« Montmartre, Paris, 1960« , page 77.

Tout un destin se lit dans cette séquence de trois photos ; et tout particulièrement dans celle, merveilleuse d’élan et de lumière, de 1952 (Vincent, lançant l’avion blanc, a douze ans) :

de même que la maquette d’avion lancée ici par l’enfant allait « s’abîmer » « sur les rochers _ juste en contrebas du jardin de la maison de vacances de Gordes _ lors de l’atterrissage« , en cet été 1952,

Vincent se tuerait en un accident de deltaplane en 1988 :

je lis le commentaire de Paul Ryan, page 54 :

« Voilà un exemple fort rare de photo mise en scène par Ronis. Pendant des vacances familiales, il espérait prendre son fils Vincent, alors âgé de douze ans, en train de lancer une maquette tout juste terminée. Mais Vincent, redoutant les rochers situés au-delà du jardin, refusait. Ronis dut lui promettre de lui faire un cadeau spécial s’il acceptait de lancer son modèle. Il ne prit que deux clichés. Le premier, en extérieur, n’était pas satisfaisant. Pour celui-ci _ de cette page 54 _, Ronis décida de prendre pour cadre la fenêtre de la cuisine de la maison de vacances. Les craintes de Vincent se révélèrent fondées, et l’avion s’abîma sur les rochers lors de l’atterrissage« …

Et le commentaire « Montmartre, Paris, 1960 » de la page 76 :

« Il s’agit là d’un autre exemple _ rare, il est vrai _ de mise en scène. Alors qu’il faisait des portraits de Vincent, qui en avait besoin pour son portfolio de jeune comédien, Ronis vit un jeune couple qui s’embrassait dans une rue de Montmartre. Il demanda à Vincent de s’asseoir sur un banc et de prendre l’air triste « comme s’il venait de constater l’infidélité de sa belle »… »

Qualifier de « photographie humaniste » l’œuvre de Willy Ronis

ne fait que témoigner de la non-humanité _ grossière, vulgaire _ de tant d’autres, seulement ; et hélas…

Titus Curiosus, ce 22 septembre 2009

Post-scriptum :

Je complète, ce 23 septembre, l’aperçu _ sur l’œuvre merveilleux  (des trois-quart du XXème siècle ! « 1925-2002« , dit-il lui-même) de Willy Ronis _ de cet article

par une brève évocation _ en quatre photos d’intimité familiale, encore _ de ce petit bijou que donna à Willy Ronis l’occasion de nous offrir Colette Fellous dans sa magnifique collection « Traits et portraits » du Mercure de France _ et ressorti en Folio en octobre 2008 _ :

« Ce Jour-là«  ;

dans lequel Willy Ronis commente lui-même sa sélection de (54) photos.

Je retiens
, encore, celles de Marie-Anne et de Vincent,

soient :


« Marie-Anne dans un village du Tessin, 1962« , pages 62-63 :

un chef d’œuvre de grâce !

en « un petit village du bout du monde, qui s’appelle Mergoscia« , page 64, Willy et Anne-Marie logeant en « une maison paysanne, où vivait un vieux couple« , page 65 ; « ce couple était tellement gentil qu’on a eu envie de rester encore un peu ici. C’est au moment où nous avons décidé de passer une nuit de plus dans cette maison que j’ai soudain voulu garder un souvenir et photographier Marie-Anne« , page 65 aussi : le portrait de Marie-Anne reposant sur l’escalier de pierre de la maison montagnarde « du bout du monde » est sublime !!!

« La Sieste, Gordes, 1949« , page 112 :

« j’ai soudain été saisi par le calme de ce moment, découpé dans l’après-midi. Sa beauté, presque sa majesté«  _ absolument ! la scène est irénique !!! _, pages 113-114…

« La corvée d’eau, Gordes, 1948« , page 118…

« La Vieille dame dans un parc, Nogent-sur-Marne, 1988 » _ il s’agit d’Anne-Marie, atteinte de la maladie d’Alzheimer… :

« Anne-Marie donnait des signes de fatigue« , page 159 ; « Marie-Anne _ presque indiscernable ici _ fait partie de la nature, du feuillage, comme un petit insecte dans l’herbe« , page 160… ; « ma photographie dirait le retour à la terre, imminent« , page 159 _, page 161…

« Marie-Anne et Vincent jouant aux boules de neige, 1954« , page 184 :

« le décor est un peu baroque et fait penser à certains dessins japonais ou chinois » _ vraiment ! _, page 185 : une danse entre des branches !.. « Ce jour-là _ celui-là même du titre retenu, « Ce Jour-là« , pour ce merveilleux immense petit livre de la collection « Traits et portraits » ! _ ;

ce jour-là, j’ai arrêté la voiture près d’une clairière et j’ai demandé à Marie-Anne et à Vincent d’aller jouer dans la neige. Il avait neigé tout le week-end _ ce fut la mémorable grande chute de neige de 1954 ! _ et nous étions allés nous promener à la campagne, dans les environs de Paris. C’était un jour heureux. (…) Une petite scène-surprise, comme ça, au cœur de l’après-midi« Tout est dit (et splendidement sobrement montré) !

La joie Bach : de sublimes sonates à l’orgue Aubertin de Saint-Louis en l’Île par un « solaire » Benjamin Alard

15sept

Des « Sonate a 2 Clav. & Pedal » (BWV 525-530) de Johann Sebastian Bach _ datées « des années 1723-1725« , à l’approche de la quarantaine du maître (1685-1750) _,

Gilles Cantagrel les présente, page 14 de ses « notes » du livret de ce CD Alpha 152 _ « Sonate a 2 Clav. & Pedal BWV 525-530 » de Johann Sebastian Bach par Benjamin Alard à l’orgue Pascal Aubertin de Saint-Louis en l’Île, Paris… _,

comme,

par « leur beauté intrinsèque comme leur puissance poétique« ,

« des chefs d’œuvre de la musique d’orgue« ,

tous auteurs confondus, si j’ose dire, et au-delà du seul génie de Bach lui-même ; et « devenues des pièces majeures des programmes de récitals » des plus grands organistes…

Gilles Cantagrel se ralliant par là même à l’avis du tout premier biographe de Bach, Johann-Nikolaus Forkel (1749 – 1818), en son décisif « Über Johann Sebastian Bachs Leben, Kunst und Kunstwerke« , publié par Hoffmeister & Kühnel, à Leipzig en 1802 (soit la « Vie de Jean-Sébastien Bach » dans l’édition Flammarion de novembre 2000) :

« La copie la plus ancienne de ces œuvres est due pour partie à Wilhelm Friedemann Bach _ Weimar, 1710 – Berlin, 1784 _, fils aîné du compositeur, et pour partie à sa belle-mère, Anna Magdalena Bach, seconde épouse de Jean-Sébastien. Cette copie demeura en la possession de Wilhelm Friedemann, ce qui accrédite le propos de Forkel _ indique Gilles Cantagrel, page 15 des « notes«  du livret du CD _, premier biographe de Bach _ en 1802, donc _, tenant de la bouche même de l’intéressé _ Wilhelm Friedemann _ que

« Bach écrivit ces sonates pour son fils aîné Wilhelm Friedemann. C’est en les étudiant que Wilhelm Friedemann se préparait à devenir le grand organiste _ lui-même, à son tour ! sur les leçons de son père… _ que je connus _ dit Forkel, donc, en 1802 _ dans la suite.

Il est impossible de vanter assez le mérite de ces sonates, composées alors que leur auteur, parvenu à l’âge mûr _ peu avant ses quarante ans, donc _, se trouvait en pleine possession de ses moyens : on peut les considérer comme étant son chef d’œuvre en ce genre (…). Il existe de Bach d’autres sonates pour l’orgue : elles sont dispersées dans diverses mains et doivent être comptées parmi ses meilleures œuvres, sans qu’elles puissent égaler celles que je viens de mentionner » _ fin de la citation de Forkel.

Et « c’est là le seul témoignage historique que nous possédions sur ces œuvres« , précise encore Gilles Cantagrel, page 15, qui ajoute cependant que « il est possible d’en reconstituer avec vraisemblance la genèse à partir de ce document » même :

« On sait que Bach veilla avec le plus grand soin, un soin que l’on peut même qualifier d’écrasant, à l’éducation musicale de son fils aîné qui manifesta très tôt des dons exceptionnels. A la fin du siècle _ le XVIIIème… _, Cramer rapporte que Bach « n’était satisfait que du seul Friedemann, le grand organiste ». Il lui enseigna le clavecin, l’orgue, le violon, et toutes les disciplines de l’écriture musicale. A son intention, il écrivit ses premiers ouvrages didactiques, « Inventions » à deux voix et « Sinfonie«  à trois voix, qui sont tout autant un traité de contrepoint que des exercices pour les doigts. Puis le premier livre du « Clavier bien tempéré« . Et il n’est pas douteux que c’est dans l’« Orgelbüchlein« , le « Petit Livre d’Orgue«  de son père, que le jeune garçon, déjà claveciniste aguerri, put faire son apprentissage d’organiste. Peu après, les six « Sonates en trio«  _ enregistrées ici, en ce CD Alpha 152 _ allaient le rompre à la haute école instrumentale, ce qui devait lui permettre de participer aux exécutions des cantates dominicales _ à Leipzig _ en tenant la partie d’orgue obligé des œuvres composées au cours de l’année 1726. Il avait quinze ans.

Mais on sait le labeur harassant qui, à la même époque, dans les premiers temps de son cantorat à Leipzig, attendait Bach. En composant, faisant copier et répéter, puis exécuter une nouvelle cantate chaque dimanche, durant ses quatre ou cinq premières années leipzicoises, il allait constituer un répertoire qu’il pourrait exploiter les années suivantes.


Mais il ne lui restait guère de temps pour songer à d’autres œuvres nouvelles.
Aussi n’est-il pas possible qu’à ce moment il ait pu composer les
« Sonates en trio » _ voilà la déduction importante de Gilles Cantagrel, page 16.


A l’examen, au contraire _ poursuit celui-ci sa « déduction«  _, il apparaît _ voici l’enseignement majeur pour nous ! _ que leurs dix-huit mouvements sont, au moins en grande partie _ et cela s’entend ! se savoure ! et avec quelle sublime délectation, même !.. _, sinon en totalité, des adaptations de pages antérieures, de musique de chambre essentiellement _ pour la cour du prince, si délicieusement mélomane, de Cöthen, Léopold d’Anhalt-Cöthen, à l’excellentissime service musical duquel Bach demeura de 1717 à 1723. Seule la sixième Sonate pourrait être une création entièrement neuve. Pour certaines d’entre elles, du reste, des états originaux sont connus ; de même qu’on en connaît des résurgences ultérieures« 


Autre précision intéressante de Gilles Cantagrel, en son si riche, comme chaque fois, livret, page 18 :

« Les « Sonates » occupent une place tout à fait particulière dans l’œuvre de Bach, à côté des « Concertos » transcrits d’après des originaux ultramontains _ c’est-à-dire italiens : notamment Antonio Vivaldi ! _, puisqu’il s’agit de pièces pour l’orgue qui ne sont pas destinées à l’église _ ni au culte _ ; et ne sauraient y être exécutées, en tout cas pas dans le cadre d’une cérémonie cultuelle _ voilà ! _, messe ou vêpres _ ou autres encore… On n’y relève d’ailleurs pas trace _ en effet ! _ de motif de choral » _ d’après le legs canonique de Luther..


Cependant Gilles Cantagrel précise, et sur un mode interrogatif fort intéressant :

« Mais tel ou tel mouvement ne pourrait-il cependant trouver place dans le déroulement de ces grandes liturgies de la musique et de la parole _ sur le modèle des « Abendmusiken«  de Franz Tunder et Dietrich Buxtehude à Sainte-Marie de Lübeck, par exemple… _ qu’affectionnaient alors les luthériens allemands ?

Et _ de plus, en effet ! _ existe-t-il une frontière bien nette entre le sacré et le profane _ baroques _, en ce temps où « tout citoyen est sociologiquement chrétien » ? Il suffit de voir comment ces œuvres sont constituées de pages ici assemblées, ayant connu d’autres parures sonores ou appelées à d’autres usages _ oui !


Il n’empêche que le tout
_ de ces six « Sonates« -ci _ forme un ensemble d’une remarquable cohérence dans sa diversité oui ! c’est même un caractère fondamental du « Baroque«  ; qui n’est ni le maniérisme ; ni le rococo…

Certes, les six « Sonates » respectent toutes la coupe en trois mouvements de la « sonata di camera » italienne _ oui ! (…) De l’économie du matériau , Bach tire toujours la plus grande substance sonore et le plus miraculeux équilibre entre la densité et la transparence _ formulation magnifique de pertinence. C’est l’ineffable poésie des mouvements lents, dans les amples festons de la mélodie rêveuse du « Largo » de la Sonate 2 ; le chant désolé du « Lento » de la Sonate 6 ; et plus encore, peut-être, la poignante méditation du « Largo » de la Sonate 5. Mais que d’énergie vitale dans les mouvements animés : le « Vivace » vertigineux qui conclut la Sonate 3 ; ou l' »Allegro » final en coupe de rondo de la Sonate 6 qui referme le recueil, en un jubilatoire tournoiement de motifs bondissants ! », pages 18-19…

De la remarque suivante, page 19 du livret du CD : « contrairement à l’habitude de l’époque pour la musique d’orgue, que l’on notait sur deux portées seulement« ,

Gilles Cantagrel déduit encore ceci :

« les sonates sont _ ici _ notées sur trois portées, correspondant à la main droite, à la main gauche et aux pieds intervenant sur le pédalier, parfait reflet de l’écriture en trio _ des sonates de musique de chambre. C’est là sans doute _ et c’est tout à fait éclairant _ un souvenir _ ou même davantage ! _ de l’instrumentation d’origine de la plupart de ces pages ;

mais il y a plus,

puisque cette disposition isolant chaque partie

équivaut à la notation « en partition », que l’on pratiquait encore à cette époque, celle de « L’Art de la fugue » ou du « Ricercar » de l’« Offrande musicale« .

Cette écriture d’une parfaite lisibilité _ que sert ici si splendidement l’intelligence musicale de Benjamin Alard à « son«  orgue Aubertin de Saint-Louis en l’Île _ est pour Bach une façon d’inciter à prendre la plus grande intelligence du texte, de son réseau contrapuntique si serré, si étroitement maillé, tout en invitant l’interprète à individualiser chacune des trois parties, quant à sa couleur, à son phrasé, à son articulation.

Et c’est bien là l’un des défis techniques _ lumineusement relevé : quelle splendeur musicale que celle de Benjamin Alard ! _ lancés par le compositeur à l’exécutant _ servant sa musique _, chargé de traduire la vivante autonomie de chacune des voix en dialogue _ oui ! et comment ! à l’instar du « dialogue des Muses«  _ avec les autres. Il lui faut posséder une indépendance parfaite des doigts et des pieds, dans leur non moins parfaite interdépendance. Faire entendre comment un personnage renchérit sur un autre ou s’y oppose. On comprend bien la fonction didactique _ quelle chance eut le jeune Wilhelm Friedmann d’apprendre à un tel « matériau didactique » à un tel degré : royal !!! _ qui est aussi celle de ces chefs d’œuvre« 

Quel interprète splendide est déjà, lui aussi, aujourd’hui, le jeune et si merveilleux Benjamin Alard !!!

Que son professeur Elisabeth Joyé,

visible, ainsi que Jean-Paul Combet (et Hugues Deschaux) sur la dernière des photos prises lors de l’enregistrement de ce CD par Robin Davis, donnée page 50,

ait apporté aussi ici

son « aide précieuse & amicale » (page 5),

illustre l’importance de ces miraculeuses filiations musicales…

Grand merci à eux tous

pour ce qu’ils nous donnent si splendidement

_ « jubilatoirement«  :

c’est le mot de mon titre,

comme celui qu’utilise, page 3, Jean-Paul Combet en sa courte présentation de ce CD :

« la difficulté _ d’exécuter une sonate à trois voix pour un musicien soliste, tel que, ici, l’organiste _ ne demande pas une technique ostensiblement et vainement virtuose, mais une capacité cérébrale de totale indépendance des trois voix (main droite, main gauche, pieds).

Pour les avoir pratiquées autrefois, je peux témoigner _ indique donc Jean-Paul Combet _ à la fois de cette difficulté

et du plaisir jubilatoire _ soit la « joie » de mon titre d’article ! _

que procure la conduite d’un tel « attelage »,

qui traite l’orgue comme un ensemble de musique de chambre«  _ rien moins ; et le principal est là !.. _

Grand merci à eux tous

pour ce qu’ils nous donnent si splendidement, donc,

d’une telle si belle musique !!! 


Titus Curiosus, ce 15 septembre 2009

Rue de Tournon et découvertes discographiques du dernier « Baroque »…

29août

 Sur « L’Heure de la fermeture dans les jardins d’Occident » de Bruno de Cessole (aux Éditions de la Différence)

ainsi que 3 nouveautés discographiques :

« Missæ breves«  BWV 234 & 235, de Johann Sebastian Bach, par l’Ensemble Pygmalion : CD Alpha 130 ;

« Missa votiva » ZWV 18, de Jan Dismas Zelenka, par les Collegium 1704 & Collegium Vocale 1704, sous la direction de Václav Luks : CD Zig-Zag Territoires ZZT 080801 ;

et « La Primavera _ Cantate per una prima donna« , de Joseph-Martin Kraus, par Simone Kermes, et L’Arte del Mondo, sous la direction de Werner Ehrhard : CD Phœnix Edition 101

T’ai-je dit que j’étais en train de lire « L’Heure de la fermeture dans les jardins d’Occident« 
de Bruno de Cessole (à la Différence) ?

dont l’action (des conversations-déambulations _ philosophiques sur ce qui « s’annonce » dans « l’air du temps » _, pour l’essentiel) se déroule
du côté de la rue de Tournon

_ lequel, « Tournon » _ Camille, comte de Tournon (1778-1833) _, fut préfet de Rome (= du « département du Tibre« ) de 1809 à 1814
_ une expo (« Camille de Tournon : le préfet de la Rome napoléonienne (1809-1814)« ) lui fut consacré à la Bibliothèque Marmottan de Boulogne-Billancourt en 2001-2002 : avec de notables transformations urbaines romaines
_ que constata Granet (en bons termes avec Tournon à Rome ;
cf mon article « François-Marius Granet, admirable tremblement du temps, Aix, Paris, Rome » _ ;

dont celle, « transformation », par l’architecte-urbaniste Valadier, de la Piazza del Popolo : l’entrée
_ et Porte (d’apparat ! depuis l’arrivée somptueuse de la reine Christine : le 20 septembre 1655 ! Alexandre VII Chigi ayant chargé le Bernin de nouvelles décorations en cet honneur-là : d’une reine s’établissant à Rome, convertie du luthérianisme au catholicisme…) _ ;
et Porte, donc, du « chemin de France »…) _ ;

puis préfet _ l’institution ayant demeuré sous la Restauration _ de la Gironde (du 25 juillet 1815 au 4 février 1822, très exactement…)

_ existe un « Cours Tournon » à Bordeaux (dans le prolongement vers la « Place des Quinconces » de la « Place Tourny ») _,

et enfin préfet du Rhône, à Lyon (jusqu’au 22 janvier 1823) ; puis « Pair de France« ) ;

fin, ici, de l’incise « Tournon » _ ;

du côté de la rue de Tournon, donc, et du côté du Jardin du Luxembourg ;
enfin dans ton quartier de la rue Crébillon

( le siège et la boutique d’Alpha sont 3 rue Crébillon, à proximité de l’Odéon) :
je peux « suivre » leurs déambulations sur un plan déplié de Paris…

Un livre assurément intéressant

_ et significatif de ce qui peut « se creuser », en ce moment, dans quelques « recoins » de consciences contemporaines : ce serait-là un « signe » éditorial, en quelque sorte… _

que cette « Heure de la fermeture dans les jardins d’Occident«  ;
même si je trouve le passage _ le chapitre XVI, de la page 235 à la page 256 _ sur Rome

(avec « passage obligé », dès l’arrivée du voyageur, au Caffe Greco, via Condotti)

_ il y en a donc un aussi, de « passage » (sur Rome)… _
un peu convenu :

un peu trop « à la touriste pressé »…

_ je pense ici à ce mot d’Yves Michaud : « on est toujours le « touriste » d’ « un autre »… ;

« un autre » qui se pense, lui, un peu moins empêtré

dans les « clichés » « courant les rues » ;

Gœthe, lui-même, n’a-t-il pas mis plus de six mois

_ arrivé le 1er novembre 1786 (et parti pour Naples le 21 février de l’année suivante),

c’est à partir de son second séjour romain (du 8 juin 1787 au 14 avril 1788) qu’il commence à vraiment « voir » et comprendre (au-delà des clichés « importés ») Rome ! _ ;

Gœthe n’a-t-il pas mis plus de six mois, donc,

à « découvrir vraiment » Rome ? on s’en rend assez bien compte quand on lit un peu « attentivement intensivement » son très, très riche (en détail passionnant, pour si peu qu’on s’y penche) Journal de « Voyage en Italie » ;

et c’est là une des grandes raisons du séjour prolongé

(trois ans ; puis deux ; combien de mois aujourd’hui ?)

des artistes « pensionnaires » de l’Académie de France à Rome ;

Granet, non « pensionnaire », a vécu vingt-sept ans à Rome ; Poussin, et Claude (le Lorrain) ont choisi, eux, de n’en plus partir… ;

à comparer à l’heure des week-ends (forfait « tout compris » !) par avion !!!

Fin de l’incise sur le « passage romain » de « L’Heure de la fermeture « …

Intéressant surtout pour l’excellent « portrait » du philosophe _ baptisé « Frédéric-Émile Stauff » ; et son angle de « vision » sur cette « heure de fermeture » des « jardins«  demeurant encore un peu,

tels des îlots que menace l’assez peu résistible « montée des eaux »

des océans du « réchauffement climatique »,

au cœur de nos cités d' »Occident« 

Ou ce qui change dans notre « air du temps« …

A part cela, j’ai écouté hier après-midi une première fois
3 disques :

missae-breves-big.JPG

_ les 2 messes brèves (« Missæ breves » BWV 234 & 235, par l’Ensemble Pygmalion : CD Alpha 130) de Johann Sebastian Bach ;

_ une messe votive (« Missa votiva » ZWV 18, par les Collegium 1704 & Collegium Vocale 1704, sous la direction de Václav Luks : CD Zig-Zag Territoires ZZT 080801) de Jan Dismas Zelenka ;

_ et un récital de cantates italiennes (de Métastase : « La Primavera _ Cantate per una prima donna« , par Simone Kermes, et L’Arte del Mondo, sous la direction de Werner Ehrhard : CD Phoenix Edition 101) de Joseph-Martin Kraus ;


ma curiosité s’étant d’abord portée sur le génie, trop chichement « servi » au disque, de Zelenka ;
dont tant d’œuvres (dont une collection de splendides messes, à Dresde) demeurent _ si étonnamment ! _ encore inédites discographiquement ! ;

si bien que je me suis dit (à part moi…), à propos du CD Alpha : « pourquoi encore Bach ?.. » ;
« et ne pas _ bien plutôt _ donner à découvrir les chefs d’œuvre de Zelenka ?!… »
_ ici, chez Zig-zag _ par d’excellents tchèques
enregistrés à l’église du Prytanée de La Flèche : telle était donc mon interrogation : je te la livre ici « telle quelle »…

Cela dit, si le CD Zelenka tient ses promesses (de splendeur) : quel immense musicien, catholique _ tchèque (= du royaume de Bohème) _ pour la cour du fastueux roi de Pologne

_ converti au catholicisme, lui, pour raison de condition sine qua non d’accession (par élection !) au trône polonais !… _,

à Dresde

_ capitale de l’électeur saxon (que le roi _ élu _ de Pologne demeurait aussi)… _

quel immense musicien que ce Zelenka ! Que de chefs d’œuvre (baroques) encore à « découvrir » de lui !.. ;


si le CD Zelenka tient ses promesses (de splendeur) _ je reprends l’élan de ma phrase _, le CD Bach ne lui cède rien en « beauté » :
lui aussi est « splendide » : en l’intimité même, toute de ferveur, de son interprétation _ intense _

par ces tout jeunes interprètes : on sent le souffle de leur passion…

Une très grande chose, à nouveau, cher maître d’œuvre !..

Et en plus, la notice, par le jeune chef (de Pygmalion), Raphaël Pichon, est passionnante,

à propos des pratiques de « parodies » de Bach…

Quelqu’un, ce jeune Raphaël Pichon, à suivre ; un nouveau, donc, de tes excellents « poulains », mon cher Jean-Paul… Bon boulot d’édition, donc ! aussi ; en plus du régal de cette interprétation-ci de pareille si belle musique !..

Et combien le jeune librettiste-et-surtout-chef (de son Ensemble : « Pygmalion ») est fondé à « reprendre », page 12 du livret, le mot malheureux du vieux « médecin, théologien, organiste et musicologue Albert Schweitzer » _ c’est à ce genre de « décalage » temporel « culturel » que nous mesurons mieux, cher Jean-Paul, combien le temps (de l’Histoire) passe (pour tous…) ; et combien nous avons besoin de voir nos propres sens _ notre æsthesis _ toujours « ra-fraîchis » par de nouveaux enthousiasmes autrement (et, si possible, mieux) lucides !!! _ ;

est fondé à « reprendre », donc,

le mot qui qualifiait ces messes-là de « superficielles et dénuées de tout sens« , parce que « parodiques », et constituées de pièces empruntées à droite et à gauche (ou « de bric et de broc » : à telle ou telle de ses cantates : BWV 72, 102, 179, 187…) : comme quoi même une oreille aussi avisée que celle du vénérable « sage » de Lambaréné _ et auteur de «  »Jean-Sébastien Bach, le musicien poète » (publié aux Éditions Fœtisch, en 1904) _ pouvait avoir ses propres « tâches aveugles » (en l’occurrence « sourdes« ) _ selon le cliché « romantique », lui (et impropre au « Baroque »), des « chefs d’œuvre » (au compte-gouttes)… : la ferveur connaissant alors, surtout avec un Bach (ou avec un Zelenka), d’autres rythmes qu’un peu plus tard ; quand il faut, bientôt, même l' »enseigner », aux « Nathanaël » (des « Nourritures terrestres » : en 1897, dans le cas d’André Gide, alors âgé de vingt-huit ans _ 1869 – 1951)…

Mais tu m’avais prévenu, que ces jeunes-là _ « Pygmalion » et Raphaël Pichon devraient très vite se faire un nom… _ avaient un talent fou !..
En effet !

Une excellente découverte
_ et pour Alpha !
et pour la joie des oreilles
(et un peu, voire beaucoup, plus que cela) des mélomanes !..

Enfin, le CD Joseph-Martin Kraus est lui aussi _ mais nous ne sommes plus « à l’église » _ très beau ;
mais là, nous sortons
_ en plus de l’église, au « profit » du « concert » _
qui se « développe » au XVIIIème siècle (depuis l’ouverture, à Paris, du « Concert spirituel« , dans les années 20 de ce siècle : le privilège royal est du 22 janvier 1725, très précisément…) ;

mais là, nous « sortons », donc, aussi, du « dernier baroque » du XVIIIème siècle ;
et entrons (et nous trouvons) dans quelque chose d’assez proche _ en beauté aussi !!!

(et virtuosité : pour le gosier d’une rare agilité et hauteur _ « de vue », aussi  : le livret, page 10, parle de « difficulté inouïe des parties de soprano«  _ d’une « prima donna » (à la brève existence, elle aussi : Louisa Sofia Augusti (1756-1790 !) _ ;

nous nous trouvons, donc, dans quelque chose d’assez proche _ et en beauté d’abord ! _ de Mozart
_ dont Joseph-Martin Kraus (de vie tout aussi « brève » : Miltenberg am Main, en Bavière, 1756 – Stockholm, 1792, pour celui-ci) est le quasi contemporain (Salzbourg, 1756 – Vienne, 1791, pour celui-là, Mozart…).
Pour comparer :
Johann Sebastian Bach : Eisenach, en Thuringe, 1685 – Leipzig, 1750 ;
et Jan Dismas Zelenka : Louňovice pod Blaníkem en Bohême, 1679 – Dresde, 1745 : quasi contemporains l’un de l’autre, eux aussi (et qui se sont connus _ et appréciés _ à Dresde)…

Le livret de ce CD de cantates (italiennes) de Kraus rapporte (page 11) ce mot du compositeur, dans une lettre du « 2 août 1790 au secrétaire royal et directeur de théâtre, Abraham-Niclas Clewberg-Edelcranz à Paris, s’exprimant ainsi sur la perte de ce talent exceptionnel : « Si seulement notre pauvre Augusti _ « morte le 25 juin 1790 à Stockholm » (nous informe le livret, page 10) _ avait voulu nous laisser là ses cordes vocales, je m’en lamenterais moins : mais _ Mon Dieu ! Mes pauvres arias et toutes les superbes colorations !!!« 

Bref de bien belles musiques, en cette fin de vacances d’été
et de « rentrée » pré-automnale : le temps est devenu splendide _ lui aussi… _ à Bordeaux et dans le Sud-Ouest…

Bien à toi,

Titus

Ps : la Belgique a-t-elle « précisé » la date de sortie du DVD de « Cadmus et Hermione » ?
L’extrait accessible sur Internet est superbe : Vincent Dumestre est, comme il nous y a habitués, en merveilleuse forme… Et cette « première » de la toute première « tragédie en musique » du « Surintendant » Lully (représentée sur scène, dans la salle du jeu de paume du Béquet, en mars ou avril 1673) suscite mon impatience…

Enfin une scandaleuse absence discographique (du fondateur de la tradition française de chant : pas moins ! dont les « rejetons » sont Rameau, Berlioz, Debussy, et bien d’autres…) « réparée » ! Et par un musicien, Vincent Dumestre (théorbiste merveilleusement fin et subtil : ce n’est pas pour rien qu’il a donné pour nom à son ensemble « Le Poème harmonique » !) particulièrement attentif à la finesse des sources _ idiomatiques _ de ce génie-ci, qui n’est ni italien, ni allemand ; et pas un « dix-huitiémiste », comme jusqu’ici ; et tant d’autres interprètes pas aussi « soigneux » _ ni aussi fins, ni aussi justes _, encore aujourd’hui…

La réponse, aux dernières nouvelles, à cette dernière question (sur la date de parution du DVD de « Cadmus« ) serait le 16 octobre prochain…

Titus Curiosus, ce 29 août 2008

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