A propos de 2 remarquables CDs de mélodies françaises
en provenance du Québec,
en l’occurrence le Studio 12 de Radio-Canada à Montréal,
pour la marque de CDs « XXI« :
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_ d’une part : « Gounod-Fauré Mélodies françaises«
par Benoît Leblanc, baryton & Pierre McLean, piano _ CD XXI-CD 2 1584 _ ;
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&
_ d’autre part : « Les Fleurs du mal // De Fauré à Ferré _ Charles Baudelaire (1812-1857)«
par Marc Boucher, baryton & Olivier Godin, piano _ CD XXI-CD 2 1590.
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Le goût de la mélodie française n’a pas tous les jours des concerts ou des disques propres à vraiment le « ravir« .
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Dernièrement, cependant, une excellente _ ou même une carrément « merveilleuse« , si j’osais m’exprimer si mal… _ surprise, mais oui !, nous vint du « contreténor« _ ainsi l’indique la quatrième de couverture du CD… _ Philippe Jaroussky, qui appropria à ce registre (anachronique, à la lettre, certes) de « voix » (de « contre-ténor » !), ce répertoire (pour baryton, surtout ; ou soprano ; ou ténor).
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Pour ma part,
à part le malencontreux _ sacro-saint marketing désormais oblige !.. _ titre de ce CD Virgin-Classics _ 50999 216621 2-6 _ de Philippe Jaroussky, « Opium« , bien peu représentatif, ce-dit « titre« , des esthétiques des (24) mélodies (alors) servies _ même si le titre de ce CD « peut » être, si l’on veut bien, « dérivé » d’une des mélodies de ce récital, « Tournoiement« , de Camille Saint-Saens (1835-1921) : mélodie dont le sous-titre était, en effet,
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du moins sous la plume du compositeur, sinon sous celle du poète (qui avait donné ce titre « Songe d’opium« à un autre (tout autre !) de ses poèmes, publié, lui, en 1866, parmi le vaste recueil « Le Parnasse contemporain » (ou « Recueil de vers nouveaux« ) ; recueil auquel avaient contribué 37 poètes (dont Charles Baudelaire, Théophile Gautier, Paul Verlaine, Stéphane Mallarmé ; ainsi que Leconte de Lisle, José-Maria de Hérédia, Charles Coppée, Sully Prudhomme ; etc…) ; deux autres volumes de ce « Parnasse contemporain« paraissant encore en 1869-71 , puis en 1876 ;
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mélodie dont le sous-titre était, en effet, « Songe d’opium« , extraite du recueil des « Mélodies persanes« , opus 26 (de Saint-Saens), en 1870, sur un poème d’Armand Renaud (1836-1895), extrait, lui, du recueil de poèmes des « Nuits persanes« , publié également cette même année 1870 _,
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pour ma part, donc,
j’ai trouvé ce récital donné par Philippe Jaroussky d’autant plus excellent _ voilà ! par l’intelligence superbe de l’articulation entre la diction de la poésie (à faire « entendre« ) et la subtilité juste de l’art du chant lui-même ! (à faire « ressentir« …) _ que j’avais assez peu « apprécié » jusqu’alors les prestations « baroqueuses » de ce chanteur, et, en particulier, l’usage plutôt ingrat, à mon goût du moins, de son timbre en ce répertoire baroque (notamment dans Haendel) ;
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le tout dernier CD « Johann-Christian Bach _ La Dolce Fiamma, Forgotten castrato arias » de Philippe Jaroussky , venant très heureusement corriger, d’ailleurs, si j’ose le dire ainsi, cette impression mienne, par un usage du registre (et du timbre) de voix bien mieux approprié, à mon jugement, à l’art bien plus tendre et _ quasi onctueusement… _ « galant » _ et jusqu’ici très méconnu, car trop mal servi au concert, à l’opéra, comme au disque ! _ du dernier (1735-1782) des fils de Bach (et maître, à Londres, du jeune Wolfgang Amadeus Mozart : lequel l’a adoré ; et tant appris de son art très « aimable » : le séjour _ de seize mois _ du jeune Mozart à Londres eut lieu d’avril 1764 à juillet 1765 … ; Jean-Chrétien et Wolfgang Amadeus se rencontrèrent à nouveau à Paris en 1778, à la fin août…).
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Sur tout cela,
cf mon article du 25 février 2009 « La grâce (et l’intelligence) “Jaroussky” en un merveilleux récital de “Mélodies françaises”, de Jules Massenet à Reynaldo Hahn _ un hymne à la civilisation de la civilité » ;
et sur ce, fin de l’incise « Jaroussky » ; retour à ma découverte des deux barytons montréalais… _
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En témoigne, en forme de « demande de précision » à bonne source (québécquoise !), cet envoi de mail (un peu elliptique…) à mon ami Denis Grenier à Québec, après une première écoute des 2 CDS « Gounod-Fauré Mélodies françaises » par Benoît Leblanc, baryton & Pierre McLean, piano _ CD XXI-CD 2 1584 _ & « Les Fleurs du mal // De Fauré à Ferré _ Charles Baudelaire (1812-1857) » par Marc Boucher, baryton & Olivier Godin, piano _ CD XXI-CD 2 1590 _ :
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De : Titus Curiosus
Objet : 2 barytons québecquois
Date : 20 novembre 2009 15:42:28 HNEC
À : Denis Grenier
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Cher Denis,
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des deux barytons (de Montréal ?) que je viens de découvrir au disque,
le chant de l’un m’agrée assez ;
alors que je trouve l’autre ridicule !
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Vous devez les avoir entendus « au vif » sur les planches…
L’un est Benoît Leblanc et l’autre Marc Boucher…
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Dans un répertoire qui m’intéresse tout particulièrement ;
et sur lequel je dois, et non sans plaisir, « réfléchir« …
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Titus
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Réponse express de Denis, de Québec _ il est professeur émérite de l’Université Laval ; et anime une émission hebdomadaire de musique, « Continuo« , sur la radio québecquoise CKRL :
“CONTINUO”
MOYEN-ÂGE, RENAISSANCE, BAROQUE, PRÉ-CLASSIQUE
avec
Denis Grenier
CKRL, 89,1 MF Québec
A retrouver tous les dimanches, de 8h à 11h.
Dans le monde entier, de 14h à 17h (heure de Paris)
Toute la musique ancienne au 89,1
La radio culturelle
_ ; et non sans ellipses, non plus, comme on va en juger :
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De : Denis Grenier
Objet : Rép : 2 barytons québecquois
Date : 21 novembre 2009 16:57:08 HNEC
À : Titus Curiosus
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Cher Titus,
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Non, je ne connais pas ces chanteurs _ de Montréal, pas de Québec, certes… Il est vrai qu’il y a plus fana que moi de l’art lyrique !
http://www.quartom.com/Aboutusfr.html
difficile de vous contredire, en tout cas le placage douteux du lyrique sur la musique ancienne _ par Quartom ! dont fait partie Benoît Leblanc… _ ne me ravit pas _ Denis a donc écouté ce qu’offrait à écouter ce lien… _, mais je sais bien que vous me parlez de la voix _ du baryton, seul et seulement ! _ en tant que telle… Ridicule certainement dans l’extrait de « Noëls anciens« , aucune notion de style ; ah le romantisme et ses effets pervers !
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http://www.marcboucher.com/enregistrements.html
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http://www.polymnie.qc.ca/sol-boucher.htm
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Je fais toujours confiance à votre réflexion, merci de nous en faire bénéficier continûment avec tant de générosité… et de grâce.
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Amitiés.
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Denis.
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Je suis dans la musique « hors système » !
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Maintenant, mes impressions…
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L’interprétation par Benoît Leblanc (et Pierre McLean : tout aussi excellent !) des mélodies de Gounod
_ « Déesse ou femme » (sur un poème de Jules Barbier & Michel Carré), « Viens, les gazons sont verts » (mêmes auteurs), « Ô ma belle rebelle » (la mélodie n°2 de « 6 Mélodies« : sur un poème d’Antoine de Baïf), « Le Temps des roses« (sur un poème de Camille Roy), « Prière » (sur un poème de Sully Prudhomme), « Ce que je suis sans toi » (sur un poème de Louis de Peyre) & « Venise » (la mélodie n°6 de « 6 Mélodies« : sur un poème d’Alfred de Musset) _
me ravit
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_ l’interprétation des mélodies de Gabriel Fauré (le premier Fauré, ici : celui-ci eut une longue carrière : 1845-1924 !) est elle aussi excellente ; mais ces mélodies-ci : « Lydia« , op. 4 (sur un poème de Leconte de Lisle) ; « Larmes« , op. 51 n°1 (sur un poème de Jean Richepin) ; « Prison« , op. 83 n°1 (sur un poème de Paul Verlaine) ; la « Sérénade du Bourgeois-Gentilhomme« (de Molière) ; « En prière« (sur un poème de Stéphan Bordèse) ; « Le Secret« , op. 23 n°3 (sur un poème d’Armand Silvestre) ainsi que les (trois) « Poèmes d’un jour« , op 21 (de Charles-Jean Grandmougin) et « Ici bas » (sur un poème de Sully Prudhomme) _, sont davantage « données« à écouter tant au concert qu’au disque… _,
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par son caractère direct, profond, tout en servant magnifiquement les nuances,
et cela de la part tant du chanteur, Benoît Leblanc, que du pianiste, Pierre McLean ;
et cinquante écoutes du CD ne m’en ont pas le moins du monde lassé !.. j’y reviens ! et en redemande ! Quel charme !!! profond sans la moindre pesanteur…
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Gounod (1818-1893) n’est pas du tout assez « servi » au disque, lui, le père magnifique de la mélodie française…
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Benoît Leblanc, avec un « présent » aussi réussi, me paraît promis à un magnifique « avenir » de mélodiste…
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Mon rapport au second CD _ « Les Fleurs du mal // De Fauré à Ferré _ Charles Baudelaire (18212-1857) » : pour l’occasion de la célébration, en 2007, du cent-cinquantième anniversaire de la parution du chef-d’œuvre baudelairien des « Fleurs du mal« , en 1857… _ et à l’interprétation du baryton Marc Boucher est plus complexe ; et m’a demandé un peu plus de temps pour enfin l’apprécier…
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D’abord, j’ai été agacé _ jusqu’à prononcer le mot « ridicule » ! _,
et surtout par contraste avec l’interprétation directe, profonde, ainsi que le timbre franc et tendre sans mièvrerie, de Benoît Leblanc,
par la première impression d’une interprétation jugée par trop chichiteuse _ un peu comme celle d’un Dieter Fischer-Diskau, face à la franchise « virile« et plus « directe« d’un Hermann Prey, toutes proportions gardées…
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Avant de mieux écouter, et à plusieurs reprises ;
et surtout de me procurer un CD antérieur de ces mêmes Marc Boucher et Olivier Godin, le CD « Théodore Dubois _ Musiques sur l’eau et autres mélodies« , le CD XXI-CD 2 1570, paru en 2007 et brillamment récompensé… _, qui m’a fait mieux percevoir (et admirer) le talent de Marc Boucher ; et d’Olivier Godin.
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C’est peut-être l’autorité _ poétique ! _ de Baudelaire qui vient un peu trop peser sur les épaules _ et le gosier _ de Marc Boucher, et lui faire craindre de « savonner » quelques unes des très riches, en effet, nuances de sa sublime _ oui _ poésie, en ce CD d’abord baudelairien _ cf le titre (on ne peut mieux choisi !) choisi de ce CD : « Les Fleurs du mal // De Fauré à Ferré _ Charles Baudelaire (1812-1857)« … _ qui vient de paraître cette fin d’automne 2009…
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Le programme est tout à fait magnifique ;
et le choix
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(un second CD « baudelairien » à partir de tout le matériel de mélodies découvert et rassemblé par Marc Boucher n’eut en rien déparé à la splendeur des pièces mélodiques du premier !)
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des pièces nous donne à découvrir des mélodies merveilleuses, d’esthétiques amplement diverses, et de compositeurs qui méritent pleinement d’être enfin interprétés, chantés ; et ainsi écoutés, appréciés, admirés !
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Citons-les : Pierre Onfroy de Bréville (1861-1979), Claude Duboscq (1897-1938), Alphons Diepenbrock (1862-1921), Jean Dora (1876-1941), René Lenormand (1846-1932), Pierre Capdeville (1906-1969)…
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Rien qu’à ce titre (de « découverte » d’œuvres qui le méritent !), ce CD _ et le travail de défricheur de Marc Boucher _ vaut _ et valent _ le détour !
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Marc Boucher s’étant révélé, somme toute, plus à l’aise en tant qu’interprète-chanteur avec les mélodies de Théodore Dubois (1837-1924 : un compositeur à découvrir pleinement !!) sur des poèmes d’auteurs un peu moins « impressionnants » que le Charles Baudelaire des « Fleurs du mal » : Albert Samain, Henri de Régnier, François Coppée, Sully Prudhomme, Armand Silvestre (1837-1900), mais aussi Joachim du Bellay, à côté d’un Maurice Bouchoir ; ou de complets inconnus jusqu’ici de moi _ qui ne suis pas un expert ! _ tels que Eugène Manuel (1823-1901), Charles Lomon, André Foulon de Vaulx (1873-1961), Jules Breton (1827-1906), Antonin Lugnier, Charles Dubois, Landely Hettich, ou Jules Barbey d’Aurevilly _ je veux dire ici en poète… _, et aussi Fernand Fouant de La Tombelle (1854-1928) et Louis de Courmont (1828-1900)…
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Les trois poèmes de Baudelaire mis en musique par Léo Ferré (1916-1993), « La Vie antérieure« ; « La Musique » & « La Mort des amants« , sont hélas loin d’avoir, dans l’interprétation ici de Marc Boucher (et dans un arrangement pour le piano seul d’Olivier Godin) le charme intense mêlé de gouaille de Léo Ferré interprète _ c’était en 1957, pour le centenaire des « Fleurs du mal« , un trente-trois tours « Odéon » _ :
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il y aurait fallu beaucoup plus d’audace et de familiarité (d’oreille d’abord) de Marc Boucher-interprète chanteur avec la tradition française de la chanson _ celle d’Yvette Guilbert, Damia, Fréhel, Berthe Sylva, Edith Piaf… _ :
que possédait ô combien ! l’immense Léo Ferré…
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C’est là, sans doute, le point faible de ce travail du chanteur Marc Boucher en ce CD « découvreur » pourtant…
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En tout cas,
avec ces CDs de mélodies françaises nous parvenant de Nouvelle-France et des rives du Saint-Laurent,
voilà un Marc Boucher bien intéressant ;
et un Benoît Leblanc plus que très talentueux _ très attentivement à suivre !
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Titus Curiosus, ce 6 décembre 2009
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