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Prendre plaisir à la découverte d’oeuvres d’un compositeur trop oublié jusqu’ici : Pierre-Montan Berton (1727-1780), à l’Opéra de Paris, et dans le beau sillage de Rameau (1683-1764)…

03oct

Ce sont les très brillantes réussites des CDs d’Alexis Kossenko (le double CD Château de Versaille Spectacles CVS101 « Simphonie du Festin royal de Monseigneur le Comte d’Artois – Versailles 1773« ), d’une part,

et Cyrille Dubois (le CD Aparté AP319 « Jouissons de nos beaux jours !« ), d’autre part,

qui comportent, le premier, des airs (l’un, un « air vif » ajouté en 1760 à une reprise de « Camille reine des Volsques » d’André Campra _ à la plage 3 du premier des deux CDs ; à regarder ici (2′ 13) _, et  l’autre, une « chaconne » ajoutée en 1761 à une reprise d' »Iphigénie en Tauride » de Desmarets et Campra _ à la plage 9 du second des deux CDs _),

et le second, l’air « Dans ce fatal instant, quels vœux puis-je former ? » du ballet en un acte « Deucalion & Pyrrha« , de 1755 _ à la plage 18 du CD _,

qui m’ont vivement incité à me renseigner bien davantage sur ce compositeur, Pierre-Montan Berton (Maubert-Fontaine, 7 janvier 1727 – Paris, 14 mai 1780),

sur son parcours de musicien et compositeur ; ainsi que sur son œuvre, et les interprétations de celle-ci au disque jusqu’ici _ soient seulement des extraits d’oeuvres, passés relativement inaperçus, de ma modeste part de mélomane au moins…

Ainsi ai-je pu découvrir _ et prendre vraiment conscience _ qu’au moins deux autres airs chantés extraits d’œuvres de Pierre-Montan Berton avaient aussi connus de belles réalisations discographiques, et de la part de Reinoud van Mechelen et son ensemble A nocte temporis,

en ses très remarqués CDs Alpha 753 « Jeliote, haute-contre de Rameau« , pour l’air « Ce n’est pas un crime en aimant« , extrait de la pastorale en un acte « Érosine« , de 1765 _ à la plage 19 de ce CD ; à écouter ici (2′ 24) _ ;

et Alpha 992 « Legros, haute-contre de Gluck« , pour l’air d’Amintas « Conduisez ces captifs » _ à écouter ici (2′ 54) _ ; ce CD « Legros » comportant aussi deux autres airs de Pierre-Montan Berton, instrumentaux seulement, eux : un « air pour les cyclopes » _ à écouter ici (1′ 46) _ et un « air gracieux » _ à écouter ici (1′ 59) _, tous les trois extraits de la pastorale héroïque en trois actes « Sylvie« , de 1749 _ ces trois airs de la « Sylvie » de Pierre-Montan Berton se trouvant aux plages 4, 5 et 6 de ce CD…

Et au passage, il me faut souligner la part prise pour ces quatre très belles réalisations discographiques par Benoît Dratwicki, le directeur du Centre de Musique Baroque de Versailles, qui signe les quatre remarquables présentations des livrets de ces CDs...

On peut aussi trouver des interprétations de la célébre « Nouvelle Chaconne« , en mi mineur, de Berton, en 1762, par exemple par la Bayerische Kammerphilharmonie sous la direction de Reinhard Goebel, en un CD OEhms OC705 « Mozart in Paris« , en 2007 _ en voici une vidéo de 8′ 45…

Bref, nous aimerions découvrir _ son talent le mérite ! _ bien davantage que ces brefs _ très beaux _ extraits d’œuvres, issus du génie musical bien trop méconnu jusqu’ici de Pierre-Montan Berton, qui fut très actif à l’Opéra, à Paris, de 1749 à son décès, le 14 mai 1780, date à laquelle celui-ci était rien moins que directeur-général de l’Opéra…

Et c’est ainsi qu’il a pu composer beaucoup de très réussis nouveaux airs _ tels que ceux, donnés ici, pour la « Camille reine des Volsques«  de Campra, créée à l’Académie Royale de Musique le 9 novembre 1717 ; ou l’« Iphigénie en Tauride » de Desmarets et Campra, créée à l’Académie Royale de Musique le 6 mai 1704… _ pour des reprises « actualisées » de très nombreux opéras _ tragédies en musique, ballets, etc. _ du répertoire de l’Opéra à Paris, depuis ceux de Lully, Desmarets, Campra, etc., jusqu’à ceux de Rameau et consorts, comme cela se pratiquait beaucoup alors… 


Ce mardi 3 octobre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Toujours à propos du si beau « Jouissons de nos beaux ans ! » de Cyrille Dubois et Györgyi Vashegyi (suite 2)…

25sept

Toujours à propos du si beau « Jouissons de nos beaux ans ! » de Cyrille Dubois et Györgyi Vashegyi,

qui fait briller de superbes feux l’opéra français entre 1728 et 1771 _ cf mes articles «  » du 20 septembre et « «  22 septembre derniers… _,

voici un bel article « Que tout s’enflamme et se réveille ! » de Laurent Bury sur le site Wanderer, en date d’hier 24 septembre,

qui rend justice, à son tour, au beau travail des interprètes de ce CD Aparté AP319 qui nous fait accéder à tout un pan jusqu’ici méconnu du répertoire lyrique français du siècle de Louis XV, contemporain des chefs d’œuvre magnifiques de Jean-Philippe Rameau…

Jouissons de nos beaux ans !
Airs et danses de Rameau, Dauvergne, Mondonville, Royer, Rebel & Francœur, Grenet, Berton, de Bury, Cardonne et Iso.

Cyrille Dubois, haute-contre
Orfeo Orchestra, Purcell Choir
Direction musicale : György Vashegyi.

CD Aparté, AP319, TT 77′

Enregistré du 15 au 17 novembre 2021 au Kodály Centre, Pécs, Hongrie.

On trouvera peut-être trop sobre, trop « classique » la manière dont Gyorgy Vashegyi aborde dans son nouveau disque les contemporains de Rameau ; c’est pourtant avec une véritable éloquence, sans effets superficiels, qu’il a su depuis longtemps s’approprier ce répertoire, ici avec la complicité de Cyrille Dubois, toujours à son affaire dans la musique destinée aux hautes-contre de l’opéra français.

Que de chemin parcouru depuis 1908, lorsque l’Opéra de Paris remontait en grande pompe Hippolyte et Aricie ! Ou même depuis 1952, quand la résurrection des Indes galantes était prétexte à un déploiement de faste grâce auquel la musique « ne gênait pas » les spectateurs ! Et même dans les années 1970–80, alors que la renaissance baroqueuse s’affirmait, qui aurait pu imaginer que l’on jouerait un jour les opéras de Lully et de Rameau, non seulement en France, mais même à l’étranger ? En Europe, du moins, car l’Amérique reste un territoire à conquérir sur ce plan. Alors qu’un certain nombre d’opéras de Rameau comptent désormais plusieurs enregistrements, alors que tous ceux de Lully ont eu droit à leur intégrale, l’heure est venue de s’aventurer _ un peu plus _ loin de ces sentiers aujourd’hui _ mieux _ battus pour donner à entendre des compositeurs nettement plus confidentiels. C’est là que le Centre de musique baroque de Versailles a un rôle à jouer _ oui ! _, à travers des disques comme ce « Jouissons de nos beaux ans », qui vient de paraître.

Puisque Rameau paraît mainstream, l’interprétation historiquement informée peut se tourner vers ceux qui, sans pouvoir prétendre au titre de génie de la musique, ont vu leur talent couronné en leur temps par l’approbation du public. On sait par exemple que Mondonville, violoniste virtuose, a composé pour la scène une poignée d’œuvres intéressantes, et l’Opéra-Comique a récemment présenté son Titon et l’Aurore _ de 1753 _ ; Antoine Dauvergne, dont la connaissance s’est longtemps bornée à son opéra-comique Les Troqueurs, sous prétexte que le livret pouvait sembler préfigurer celui de Così fan tutte, a été révélé comme compositeur de tragédies lyriques grâce à la résurrection de son Hercule mourant par Christophe Rousset en 2011. Mais par-delà ces deux noms, dont on peut soupçonner qu’ils ne sont vraiment familiers que des amateurs de ce répertoire, il existe encore une masse considérable de partitions qui dorment dans les bibliothèques, produites par des auteurs aujourd’hui bien oubliés.

On sait que Pancrace Royer était claveciniste, et c’est sa musique pour le clavier qui a jusqu’ici surtout été enregistrée, à l’exception de son opéra Pyrrhus _ de 1730 _, remonté à Versailles en 2012 et enregistré dans la foulée. Pour autant, était-il l’homme d’une seule tragédie lyrique ? Pas du tout, on l’apprend en écoutant le disque, où figure des extraits de Zaïde, reine de Grenade _ de 1739 _ ou du Pouvoir de l’amour _ de 1743 . Du tandem formé par François Rebel et François Francœur, quelques chanteuses ont eu à cœur d’interpréter certain air magnifique tiré de leur Scanderberg _ de 1735 _ et on dispose d’une intégrale de leur Pyrame et Thisbé _ de 1726 _ : mais qui avait entendu parler de Tarsis et Zélie _ de 1728. Sans parler d’autres compositeurs parfaitement inconnus au bataillon, comme François-Lupien Grenet (une assez large place est accordée à des fragments de son Triomphe de l’Harmonie _ de 1737 _), Pierre Montan Berton _  auteur de Deucalion et Pyrrha, en 1755 _ ou Pierre Iso _ auteur de Phaétuse, en 1759.

Le programme de ce disque couvre une période allant de 1728, soit quelques années avant la création _ en 1733 _ d’Hippolyte et Aricie, jusqu’à 1771, quelques années avant l’arrivée de Gluck à Paris. Autrement dit, une sélection avant tout consacrée aux contemporains de Rameau _ voilà… _, même si la musique n’est évidemment pas restée immobile pendant ces quatre décennies. D’ailleurs, l’air de 1771, extrait d’Ovide et Julie de Jean-Baptiste Philibert Cardonne, semble déjà appartenir à une autre esthétique _ en effet…

C’est donc ici tout un répertoire qui s’éveille _ reprend vie _, toute une théorie de belles endormies qui défilent ici, tirées de leur sommeil. Au terme d’un partenariat de plusieurs années avec le CMBV, György Vashegyi a dirigé et enregistré _ avec un grand succès _ de nombreux ouvrages lyriques du XVIIIe siècle français. Son orchestre Orfeo maîtrise ce répertoire, et l’on a déjà eu l’occasion d’admirer l’adéquation stylistique et linguistique _ mais oui ! _ de son chœur Purcell dans la tragédie lyrique. D’où vient alors cette première impression qu’il manque un petit quelque chose pour satisfaire pleinement l’auditeur ? _ mais pas moi…

Évidemment, il est impossible de créer, pour un disque d’extraits _ voilà _, la même tension dramatique qu’appelle un opéra donné dans son intégralité, mais ce récital semble au premier abord un peu dépourvu de fougue _ pas vraiment : tout dépend bien sûr des styles abordés… Le titre « Jouissons de nos beaux ans », emprunté à un passage des _ merveilleuses _  Boréades, dont l’esprit est aussi celui du chœur de nymphes « Nous jouissons dans nos asiles », tiré du Triomphe de l’Harmonie de Grenet, mais on est ici bien loin du slogan soixante-huitard « Jouissons sans entraves »… Rien de révolutionnaire dans cette interprétation qui paraît trop sage, et l’on se dit d’abord que les feux de l’amour, très présents dans le texte de ces opéras, ne semblent pas avoir vraiment embrasé les artistes _ mais l’amour peut aussi être tendresse…

A moins que notre oreille n’ait en réalité été influencée par d’autres chefs qui n’ont pas hésité, dans leur recherche d’efficacité théâtrale avant tout, à trop accentuer _ possiblement… _ le rythme de certains morceaux. On se pose la question en écoutant le fameux chœur de Platée qui conclut le disque, « Chantons Bacchus, chantons Momus », qu’on a sans doute trop pris l’habitude d’entendre marteler, voire piétiner. Rien de tel ici, car György Vashegyi reste avant tout soucieux d’équilibre et d’élégance _ des traits éminemment français, voilà ! _  : dans ces livrets, « jeunesse » rime avec « tendresse » _ oui ! _, et c’est ce souci de grâce _ oui ! _ que reflète sa direction aux tempos toujours mesurés, qui se refuse à toute frénésie hors de propos _ voilà. Nous ne sommes pas ici à Naples…

Le chef hongrois est parfaitement secondé dans sa démarche par Cyrille Dubois _ parfaitement ! _ qui, sans rien sacrifier de l’ardeur habituelle de son _ parfait ! _ investissement dramatique, déploie tout son art _ magnifique _ de la déclamation dans les passages tourmentés _ écoutez ici le « Impétueux torrents«  (4′ 00) qui ouvre le CD… Le ténor sait se transformer _ mais oui : il a oublié d’être niais… _ pour respecter les exigences de chaque morceau, délicat pour vanter le charme des plaisirs, plus exalté – mais dans les limites du bon goût – pour chanter la victoire de l’amour _ tout cela est très  juste… Le Bacchus qu’il incarne dans deux extraits des Amours de Tempé _ de 1752 _ de Dauvergne n’a rien d’un ivrogne en proie au délire. L’expressionnisme débridé n’aurait pas ici sa place, surtout si l’on songe à la virtuosité _ oui ! _ fréquemment exigée du soliste (ainsi que du chœur), avec les figuralismes qu’inspirent des mots comme « s’envole » ou « s’enflamme ».

Bien sûr _ bien sûr… _, le génie de Rameau reste éclatant, rapproché de ses contemporains moins illustres : il suffit d’écouter pour s’en convaincre l’ouverture de Zaïs, l’admirable « Descente de Polymnie » des Boréades ou même un air comme « Peuples heureux », des Fêtes de Polymnie. La muse de rhétorique est décidément très présente dans ce répertoire, et c’est son éloquence sans emphase _ oui, à la française… _ qui est de mise pour ce disque.

Voilà donc cet article de Laurent Bury…

En mon premier article sur ce CD,

j’avais émis l’hypothèse que le choix des pièces de ce CD de Cyrille Dubois et György Vashegyi devait peut-être un petit quelque chose au riche programme un peu commémoratif si plaisamment composé pour le Festin Royal du Mariage du Comte d’Artois, à Versailles, le 16 novembre 1773, qui, après le CD pionnier en 1993 d’Hugo Reyne et la Suomphonie du Marais qui m’a fait découvrir l’oeuvre musical de François Francoeur, vient d’être idéalement servi par les 80 instrumentistes réunis par Alexis Kossenko pour son très brillant double CD « Simphonie du Festin Royal de Monseigneur le Comte d’Artois – Année 1773 » ; mais à part le nom de François Francoeur dont deux extraits du « Tarsis et Zélis« , de 1728, composé avec son compère de toute leur vie Fançois Rebel, ouvre le programme du CD « Jouissons de nos beaux ans !« ,chant français, 

je me suis rendu compte que ces CDs n’ont en commun que l’Ouverture _ ce chef d’œuvre transcendant ! Écoutez la ici (4′ 43)  _ de « Zaïs » de Rameau,

et des emprunts d’ailleurs différents, d’une part à la « Zaïde, reine de Grenade » de Royer _ un rondeau et une chasse en rondeau, pour le CD d’Alexis Kossenko ; et un air pour les Turcs en rondeau, pour le CD de Cyrille Dubois et György Vashegyi  _, et d’autre part au « Titon et l’Aurore » de Mondonville _ une musette, pour l’un ; et un air de Titon, pour l’autre…

Mais le CD Dubois-Vashegyi nous fait accéder à des extraits d’œuvres de compositeurs français jusqu’ici oubliés tels que François-Lupien Grenet (Paris, 1700 – Lyon, 25 février 1753), Louis-Joseph Francœur (Paris, 8 octobre 1738 – Paris 10 mars 1804), Pierre Iso (ca. 1715 – ca. 1794) et Jean-Baptiste-Philibert Cardonne (26 juin 1730 – après le mois d’août 1792) ;

tandis que le double CD Kossenko, lui, sort des ténèbres de l’oubli, des extraits d’œuvres de René de Galard de Brassac, marquis de Brassac (La Roque, 1698 – Paris, 1771), Joseph-Hyacinthe Ferrand (1709 – 1791), Jean-Claude Trial (Avignon, 13 décembre 1732 – Paris, 3 juin 1771) et Louis Granier (Toulouse, 1725 – Toulouse, 1800)…

Leurs musiques méritent notre écoute…

Ce lundi 25 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

François Francoeur (1698 – 1787), Surintendant de la Musique du Roy, maître d’oeuvre des « Simphonies pour le Festin royal du Mariage de Monseigneur le Comte d’Artois », à Versailles, le 16 novembre 1773 ; ou l’été indien de la musique baroque française : comparer les orchestres de La Simphonie du Marais (et Hugo Reyne) en 1993, et des Ambassadeurs et La Grande Ecurie (et Alexis Kossenko) en 2023…

24sept

Dans le sillage du passionnant et superbe CD « Jouissons de nos beaux ans !«  _ le CD Aparté AP 319 _ de Cyrille Dubois, l’Orfeo Orchestra et le Purcell Choir sous la direction de György Vashegyi _ cf mon article un peu détaillé du 20 septembre dernier : «  «  _,

voici que je m’intéresse ce jour aux CDs qui ont été consacrés, en 1993 et en 2023, aux musiques _ instrumentales _ qui ont accompagné, à Versailles, le 16 novembre 1773, le Festin Royal donné pour les célébrations du mariage de Monseigneur le Comte d’Artois _ le futur Charles X _ et la princesse Marie-Thérèse de Savoie,

soient

_ le CD « François Francœur – Symphonies pour le Festin royal du Comte d’Artois » de Hugo Reyne et La Simphonie du Marais _ le CD Fnac-Music 592287 _, qui donne les 16 pièces musicales de la main de François Francœur (Paris, 21 septembre 1698 – Paris, 5 août 1787) données pour ces festivités royales _ ainsi que 3 autres, toujours de la main de ce compositeur : c’était l’œuvre de celui-ci qu’il s’agissait en effet de donner à entendre… _ ;

_ et le double CD « Simphonie du Festin Royal de Monseigneur le Comte d’Artois – Versailles 1773 » d’Alexis Kossenko dirigeant Les Ambassadeurs et La Grande Écurie _ le double CD Château de Versailles Spectacles CVS101 _, qui, lui, donne l’intégralité des 43 pièces musicales de ces festivités, soient ces 16 pièces de François Francœur même, mais aussi 27 autres de 10 autres compositeurs : Jean-Philippe Rameau (9 pièces) ; Antoine Dauvergne (3 pièces) ; Pancrace Royer (3 pièces) ; Bernard de Bury (3 pièces) ; Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (3 pièces) ; Pierre-Montan Berton (2 pièces) ; et le marquis de Brassac, Jacques-Hyacinthe Ferrand, Jean-Claude Trial et Louis Grenier (1 pièce chacun) choisies _ et parfois modifiées, adaptées par Francœur _ pour l’espèce par celui qui était alors _ de 1744 à 1776… _ Surintendant de la Musique du Roy, en un notable brillant panorama de l’art du Grand siècle musical qui s’achevait, au moment où triomphait à Paris un tout autre style, avec Gluck, Grétry, Gossec ou Piccinni…

Bien sûr, l’orchestre des 20 instrumentistes réunis par Hugo Reyne en 1993, paraît un peu léger par rapport à celui des 70 instrumentistes d’Alexis Kossenko en ce double CD de 2023…

Mais l’esprit vif et follement heureux de cette musique était déjà bien là !!!

Avec aussi cette révélation de Benoît Dratwicki, aux pages 12-13 du livret (consultable ici) de ce CD CVS101 :

« On pensait ne rien savoir des conditions d’exécution de ces musiques, sinon ce que nous en disait la presse de l’époque : « on exécuta, pendant le Festin royal, différents morceaux de symphonie, sous la conduite du sieur Rebel, Chevalier de l’Ordre du roi, et Surintendant de sa Musique ». Aussi avait-on imaginé de rassembler l’effectif orchestral mentionné dans un document réalisé, la même année 1773, par Jean-Baptiste Métoyen, bassoniste de la Musique du roi, indiquant précisément le nombre de musiciens réunis dans la fosse de l’Opéra royal pour les spectacles donnés à l’occasion du mariage du comte d’Artois : 70 musiciens, dont pas moins de 26 violons, 6 altos, 14 violoncelles, 4 contrebasses, 2 flûtes, 4 hautbois, 2 clarinettes, 6 bassons, 4 cors, 1 trompette et 1 timbale. Un autre plan de la fosse de l’Opéra royal, daté de 1770, confirme à peu de choses près le même effectif et la disposition des musiciens.

Quelle surprise toutefois lorsqu’au premier jour de répétition du projet, Michael Greenberg, contrebassiste et musicologue, nous révèle avoir retrouvé dans les archives de la Musique du roi l’effectif précis de l’orchestre pour cet événement : il s’agissait de 78 musiciens, répartis en 34 violons et altos (sans détail), 15 violoncelles, 3 contrebasses, 10 flûtes et hautbois (sans détail), 2 clarinettes, 6 bassons, 3 cors, 1 trompette, 1 timbale et 3 tambourins. Il était trop tard pour changer l’effectif, mais, de fait, celui choisi était quasiment le même que celui retrouvé.

Au passage, dans le même article, Michael Greenberg donnait l’effectif de l’orchestre réuni pour le Festin royal du mariage du Dauphin _ le futur Louis XVI _, en 1770 : 79 musiciens (25 violons, 8 altos, 17 violoncelles, 4 contrebasses, 9 flûtes et hautbois, 2 clarinettes, 8 bassons, 3 cors, 2 trompettes, 1 timbale), confirmant l’usage – à la Cour – d’orchestres aux vastes dimensions dans le cadre d’événements extraordinaires« …

Il n’empêche qu’il, importe de rendre pleine justice au travail pionnier de recherche ainsi que d’interprétation, pleine de verve _ avec les moyens dont il pouvait disposer alors… _, de Hugo Reyne, dès 1993 ;

ce que ne font ni Alexis Kossenko, ni Benoît Dratwicki, ni pas vraiment non plus, le critique Loïc Chahine dans le bel article louangeur « Folle ivresse » qu’il donne aux pages 70-71 du magazine Diapason de ce mois de septembre 2023, de ce double CD d’Alexis Kossenko :

« Hugo Reyne n’avait gravé qu’une sélection (Fnac, 1993)« ,

en ne mentionnant pas que le choix d’Hugo Reyne s’était délibérément porté alors sur les seules pièces de François Francœur…

Oui, François Francœur en novembre 1773, ou le splendide été indien de l’âge baroque de la musique française

en quelque sorte récapitulée par François Francœur en cette sélection de morceaux de choix d’une durée d’un peu plus de 2 heures… _

du temps de Rameau et du règne de Louis XV…

Ce dimanche 24 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Découvrir aussi le CD « Legros Haute-Contre de Gluck », de Reinoud Van Mechelen et son Ensemble A Nocte Temporis, qui vient de paraître aujourd’hui…

24sept

Tout à fait bienvenu

après le CD « Jouissons de nos beaux ans ! » de Cyrille Dubois et György Vashegyi _ le CD Aparté AP 319 ; cf mes articles « «  et «  » des mercredi 20 et vendredi 21 septembre derniers _

et le double CD « Simphonie du Festin Royal de Monseigneur le Comte d’Artois – Année 1773 » d’Alexis Kossenko et ses ensembles Les Ambassadeurs et La Grande Écurie _ le double CD Château de Versailles Spectacles CVS101 _,

tombe vraiment à pic le CD « Legros Haute-Contre de Gluck » _ le CD Alpha 992 _ de Reinoud Van Mechelen, troisièmee volet de sa passionnante trilogie consacrée à la tradition française du haute-contre, en complément de ses deux premiers volets : « Dumesny Haute-Contre de Lully » _ le CD Alpha 554 _ et « Jeliote Haute-Contre de Rameau«  _ le CD Alpha 753.

Ma toute première impression à la découverte première de ce CD,

est celle d’un énorme changement de monde _ culturel, musical… _, d’un terrible hiatus entre l’univers dont témoignent les deux passionnants et irremplaçables CDs « Jouissons de nos beaux ans ! » de Cyrille Dubois et György Vashegyi _ le CD Aparté AP319 _, d’une part, et le double CD « Simphonie du Festin Royal de Monseigneur le Comte d’Artois« d’Alexis Kossenko et ses ensembles Les Ambassadeurs et la Grande Écurie _ le double CD Château de Versailles Spectacles CVS101 _, d’autre part, qui nous font accéder tous deux au splendides derniers feux de la merveilleuse musique du Grand Siècle qui s’achevait là,

avec l’univers qui s’ouvre après les disparitions de Jean-Philippe Rameau, le 12 septembre 1764, et du roi Louis XV, le 10 mai 1774, dont vient témoigner un peu cruellement, à son désavantage _ et Reinoud Van Mechelen n’y est pour rien... _, ce bien intéressant, en cela, CD « Legros Haute-Contre de Gluck« …  

« Vive Rameau ! À bas Gluck ! » se serait écrié Claude Debussy en assistant à la recréation de « La Guirlande« , de Rameau sur un livret de Marmontel (créé en 1751), à la Schola Cantorum, en 1903…

En effet !!!

Mais avant de chroniquer ce CD « Legros Haute-Contre de Gluck » _ Alpha 992 _, qui vient de paraître ce samedi 23 septembre,

il me faut d’abord me pencher sur le très riche et passionnant double CD _ instrumental seulement _ « Simphonie du Festin Royal de Monseigneur le Comte d’Artois » d’Alexis Kossenko et ses Ensembles Les Ambassadeurs et la Grande Écurie _ le double CD Château de Versailles Spectacles CVS101 _ dont je n’ai jusqu’ici encore rien dit…

Ce samedi 23 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Après Rameau, ou le regret anticipé d’un glorieux été et automne qui vont finir : à propos du si beau « Jouissons de nos beaux ans ! » de Cyrille Dubois et György Vashegyi (suite)…

22sept

En forme de suite et confirmation de mon article d’avant-hier 20 septembre «  « ,

voici, ce vendredi 22 septembre, sur son site Discophilia, un article de Jean-Charles Hoffelé intitulé « Après Rameau« , consacré lui aussi au passionnant CD « Jouissons de nos beaux ans ! » tout récemment paru :

APRÈS RAMEAU

La tragédie lyrique tardive naissait, avec ses fastes et ses fantaisies, survivance que Gluck allait roidir, dépouillant le merveilleux au profit du tragique. Ce Jouissons de nos beaux ans !, qui pioche dans le connu et plus encore _ en effet _ dans l’inconnu, n’est pas seulement un carpe diem souvent démenti par le ton sombre de bien des pages (et jusqu’au trouble sommeil sous pavot de l’émouvante « cantate » de François Lupien Genet intitulée Le Triomphe de l’Harmonie), il est aussi une forme de regret anticipé _ voilà… _ illustré par l’automne d’un art glorieux dont les derniers feux brillent ici _ oui… Hélas !

J’attendais fatalement le haute-contre vertigineux _ oui _ de Cyrille Dubois dans les débauches du Bacchus de Dauvergne (Les Amours de Tempé), dans les adresses enivrées de Momus (Platée) ou dans les pyrotechnies de l’Antiochus ramiste (Les Fêtes de Polymnie), mais c’est dans la douloureuse colère d’Agénor, si noblement déclamée où semble s’annoncer Gluck (Bury, Les Caractères de la Folie), l’espressivo entre rage et résignation de Deucalion (admirable Deucalion et Pyrrha de Berton), l’élégance avec vocalise du sensuel Daphnis (Dauvergne à nouveau) que le chant solaire _ oui ! _ du haute-contre fait merveille _ et c’est même trop peu dire…

Le programme, si prodigue en raretés, doit autant à Cyrille Dubois qu’à l’insatiable curiosité de Gÿorgy Vashegyi qui ponctue la fête avec une spectaculaire ouverture de Zaïs. _ mais aussi à Benoît Dratwicki. On annonce la conclusion  _ vraiment ?!? _de la si productive collaboration de la belle bande hongroise avec le Centre de Musique baroque de Versailles. Refermant l’album je me demande bien quel arrêt _ funeste et imbécile… _ a pu défaire des liens que j’espérais insolubles !

LE DISQUE DU JOUR

Jouissons de nos beaux ans

François Rebel (1701-1775) / François Francœur (1698-1787)


Air, puis Prélude pour Arthémis,
extrait de « Tarsis et Zélie »


Antoine Dauvergne (1713-1797))


2 Airs de Bacchus, puis 1 Air de Daphnis, extraits des « Amours de Tempé »


Jean-Philippe Rameau (1683-1764)


Sarabande pour Hébé, extrait de « Castor et Pollux »
Air de Calisis, puis Descente de Polymnie, extraits des « Boréades »
Premier et second Tambourins, extrait de « Daphnis et Églé »
Ouverture, extrait de « Zaïs »
Air d’Antiochus, extrait des « Fêtes de Polymnie »
Air de Myrtil, extrait de « La Guirlande »
Air pantomime, puis Air de Thespis avec Chœur, extraits de « Platée »


Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711-1772)


Chœur de nymphes, extrait des « Fêtes de Paphos »
Air de Titon, extrait de « Titon et l’Aurore »


François Lupien Grenet (1700?-1753)


Air de Hylas avec Chœur, extrait du « Triomphe de l’Harmonie »


Pancrace Royer (1703-1755)


Air pour les Turcs en rondeau, extrait de « Zaïde »
Air pour les Jeux et les Plaisirs, extrait du « Pouvoir de l’Amour »


Louis-Joseph Francœur (1738-1804)


Air de Céphale, extrait de « L’Aurore et Céphale »


Pierre-Montan Berton (1727-1780)


Air de Deucalion, extrait de « Deucalion et Pyrrha »


Bernard de Bury (1720-1785)


Air d’Agénor, extrait des « Caractères de la Folie »


Jean-Baptiste Philibert Cardonne (1730-1792)


Air d’Ovide, extrait de « Ovide et Julie »


Pierre Iso (1715-1794)


Chœur, extrait de « Phaétuse »

Cyrille Dubois, ténor
Purcell Choir
Orfeo Orchestra
György Vashegyi, direction

Un album du label Aparté AP319

Photo à la une : le ténor Cyrille Dubois –
Photo : © Olivier Lalane/lephiltre

Un survol un peu rapide pour une si belle et brillante réalisation…

Ce vendredi 22 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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