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Un décevant double CD Mendelssohn « Complete Works for violin and piano », par Denitsa Kazakova et Sylviane Deferne, et l’Orchestre des Jeunes de la Suisse romande, pour le label Aparté…

24oct

C’est un bien décevant double CD Aparté AP 348 « Mendelssohn – Complete Works for violin and piano« , par Denitsa Kazakova, violon, et Sylviane Deferne, piano et direction de l’orchestre, et l’Orchestre des Jeunes de la Suisse romande,

que vient de publier le label Aparté :

tourné vers un romantisme larmoyant et excessif, au lieu d’être dans le droit fil, fluide et droit, classique, de Jean-Sébastien Bach et Mozart _ voire, mieux encore, de Carl-Philipp-Emanuel Bach, qui fur l’inspirateur des professeurs de Felix Mendelssohn (Hambourg, 3 février 1809 – Leipzig, 4 novembre 1847)…

 

Ce jeudi 24 octobre 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Un passionnant et intense « Labo du chanteur » (= travail de mise en place d’une interprétation musicale) de Thomas Dolié, baryton, avec Stéphane Trébuchet au piano, autour des deux premières « Chansons madécasses » (1925) de Maurice Ravel : une assez singulière beauté à attraper…

12mai

Assister, voire participer si peu que ce soit

_ pour ma part je me souviens tout spécialement des séances d’enregistrement à l’abbatiale de Saint-Michel-en-Thiérache, l’été 1995, pour le CD EMI-Virgin « Un Portrait musical de Jean-de-La-Fontaine« , sous la direction formidablement compétente (et magnifiquement exigeante !) de Nicolas Bartholomée à la table numérique, dans la sacristie ; un CD dont, « conseiller artistique » d’Hugo Reyne et La Simphonie du Marais, j’étais le co-auteur du programme (ainsi que de 90% du texte de présentation du livret), à partir d’un an de passionnantes recherches sur l’œuvre intégral (en deux volumes de La Pléiade) de Jean de La Fontaine, eainsi que sur l’œuvre musical de Marc-Antoine Charpentier ; cf mon article du 3 jullet 2020 : « «  _

au travail de mise en place, en vue d’un concert et plus encore d’un enregistrement discographique,

est absolument passionnant :

nous pénétrons alors au plus vif et sensible, frémissant (et fragile) de la chair la plus intime des œuvres qu’il s’agit d’interpréter, porter, et servir au mieux…

Or c’est exactement à cela que hier à 17 heures, à la Machine à Musique – Lignerolles, Thomas Dolié _ cf ici la merveilleuse vidéo (de 3′ 21) du final délicieusement somptueux autant que malicieux de « L’Heure espagnole«  sous la direction de François-Xavier Roth, dans lequel (« Un financier et un poète« …) est ô combien manifeste le génie éclaboussant de Ravel ! : Thomas Dolié y est Ramiro, le brave muletier qui « dans les déduits d’amour a (lui aussi, mais oui) son tour«  _ a généreusement et très simplement, et même très humblement, convié à assister le public pour son « Atelier du chanteur » _ cf cette vidéo de présentation (de 1′ 58), enregistrée le 24 février 2020 _, avec le pianiste Stéphane Trébuchet, en son exigeante  préparation, en cours, d’un enregistrement des 3 « Chansons madécasses » (avril 1925 – avril 1926) de Maurice Ravel, dans le cadre d’une très prochaine Intégrale discographique de la musique avec piano de Ravel par François-Xavier Poizat (Grenoble, 18 août 1989), à paraître cette année-ci, 2024, pour l’excellent label Aparté, que dirige l’excellent Nicolas Bartholomée…

« Les Chansons madécasses » ne sont certes ni le plus couru, ni le plus aisé non plus, des recueils de mélodies de Maurice Ravel :

commandé par l’américaine Elisabeth Sprague Coolidge (Chicago, 30 octobre 1864 – Cambridge, 4 novembre 1953), cette œuvre singulière et audacieuse de Maurice Ravel _ réalisée d’avril 1925 à avril 1926 : la troisième pièce a même dû être rajoutée afin d’adoucir l’effroi de l’impression produite par les deux premières ; et selon les termes de la commande passée, pour Elisabeth Sprague Coolidge par le violoncelliste Hans Kindler, l’effectif assez singulier de la pièce (d’une durée d’environ 10′), devait comporter, en plus de la voix, un violoncelle, une flûte et un piano : ce fut donc là la base même de ce travail très original de composition de Ravel qui a aboutira aux 3 « Chansons madécasses« , ce chef d’œuvre tout à fait singulier, j’y insiste, de Maurice Ravel, selon ses propres dires… _, a été composée sur un choix bien précis par Ravel lui-même de 3 poèmes en prose _ mais oui ! parmi les tous premiers… _ d’Évariste de Parny (Saint-Paul, La Réunion, 6 février 1753 – Paris, 5 décembre 1814), de 1787 : pour répondre à l’effectif même, très original donc, de la commande …

Cf déjà, ici, la très précieuse note, à la page 1009 de l’indispensable « Intégrale de la Correspondance de Maurice Ravel » publiée par Manuel Cornejo, se référant ici au très précieux « Maurice Ravel » de Roland Manuel _ à la page 118 de l’édition de 1948 dont je dispose ; dans l’édition originale de 1938, c’était à la page 166.

Et c’est Roland-Manuel lui-même que je lis donc ici, en son récit de 1938 :

« Amateur décidé des bibelots façonnés sous la Révolution, le Directoire, l’Empire et la Restauration, Ravel avait acquis, lors de son installation à Montfort, entre une pendule gothique de 1820 et une théière étrusque, les œuvres complètes d’Évariste Parny en édition princeps. Comme il feuilletait le poème des Fleurs :

L’Ognon préfère un sol épais et gras,

Un sol léger suffit à la semence.

Confiez-lui votre douce espérance

Et de vos fleurs les germes délicats…

il reçut d’Amérique un câblogramme du violoncelliste Kindler qui lui demandait de composer, à l’intention de Mme Elisabeth S. Coolidge, un cycle de mélodies avec accompagnement, « si possible » de flûte, de violoncelle et de piano« .

Et Roland-Manuel alors de poursuivre :

« Toujours heureux, en bon mozartien, de se plier à un jeu dont une volonté étrangère avait fixé les règles, le musicien poursuivit bravement sa lecture de Parny, bien décidé à imposer aux chants du « Tibulle français » la compagnie d’un piano, d’une flûte et d’un violoncelle. Séduit par un exotisme très particulier et de tout point conforme à ses goûts, puisque la couleur locale en est quasiment absente, son choix s’arrêta sur les cinquième, huitième et douzième chansons madécasses.

De cette gageure est née la meilleure musique de chambre qui soit sortie de ses mains depuis la guerre : « Les trois Chansons madécasses me semblent apporter un élément nouveau, dramatique _ voire érotique _, qu’y a introduit le sujet même des chansons de Parny. C’est une sorte de quatuor où la voix joue le rôle d’instrument principal. La simplicité y domine. L’indépendance des parties [s’y affirme] que l’on trouvera plus marquée dans la sonate [pour violon et piano] » _ très précieux extrait de l’Esquisse biographique dictée par Ravel à ce même Roland-Manuel, à Monfort-l’Amaury, le 10 octobre 1928 (note de Manuel Cornejo à la page 1437 de son indispensable édition de l’Intégrale de la Correspondance de Maurice Ravel).

 Réduite ici à ses éléments essentiels, primitifs, mélodie, rythme et timbre, la musique échappe complètement à la tyrannie des accords. Et pendant que Ravel s’amuse à faire à rebours le chemin parcouru par les compositeurs de jazz ; pendant qu’il y découvre la musique nègre en partant du rythme syncopé et de la juxtaposition des médiantes majeure et mineure ; pendant que son violoncelle se divertit à contrefaire la calebasse en sons harmoniques pizzicato, son lyrisme, amoureux de la belle Nahandove, quitte un instant pour cette Vénus exotique les enchantements de la féérie, les tréteaux de la comédie et chante pour une fois l’ardeur des voluptés terrestres« …

Cf aussi le très détaillé chapitre intitulé « Désaveux » que, aux pages 576 à 590, en son admirable et inégalé « Maurice Ravel » _ paru aux Éditions Fayard en octobre 1986 _ consacre à ces « Chansons madécasses » Marcel Marnat (Lyon, 6 juillet 1933 _ Marcel Marnat a maintenant 90 ans)…

Sur les péripéties à rebondissements de la composition et création de ces 3 « Chansons madécasses » de Maurice Ravel, on peut aussi s’attacher au très intéressant détail résumé en cette notice :


Maurice Ravel 1925

Les Chansons madécasses sont un cycle de trois mélodies (NahandoveAouaIl est doux) composées par Maurice Ravel entre 1925 et 1926 pour voix moyenne (mezzo ou baryton), flûte, violoncelle et piano, sur des poèmes en prose éponymes, les Chansons madécasses d’Évariste de Parny.

Elles sont dédiées à Elizabeth Sprague Coolidge, mécène américaine du musicien. Le compositeur, à la fin de sa vie créatrice, répéta à plusieurs reprises que de toutes les œuvres qu’il avait composées, c’est de ces Chansons qu’il était le plus fier. L’œuvre porte la référence M.78, dans le catalogue des œuvres du compositeur établi par le musicologue Marcel Marnat. La durée d’exécution de l’œuvre oscille entre treize et quatorze minutes.

Histoire de l’œuvre

La création s’est faite en plusieurs étapes : tout d’abord, la seule seconde des Chansons madécasses, Aoua, a été donnée lors de deux auditions privées organisées par la commanditaire et dédicataire Elisabeth Sprague Coolidge, le 24 mai 1925 à l’Hôtel Majestic de Paris, puis le 28 mai 1925 à Londres, les deux fois avec pour interprètes Jane Bathori au chant, Maurice Ravel en personne au piano, Louis Fleury à la flûte et Hans Kindler au violoncelle _ Hans Kindler, l’intermédiaire d’Elisabeth Sprague Coolidge pour cette commande à Maurice Ravel. Lors de l’audition parisienne, le compositeur Léon Moreau a protesté à haute voix contre les paroles _ violemment anticolonialistes (nous ne sommes pourtant qu’en 1787 !) du poème en prose du réunionnais Parny : celui-ci donnant ici la parole à des indigènes vivant « libres« , mais prévenant leurs frères « habitants du rivage«  de la menace d’« esclavage«  que feront peser sur eux de prochains colonisateurs blancs : « Méfiez-vous des blancs, habitants du rivage«  _ de la mélodie, pourtant bissée par les interprètes.

L’année suivante, une fois achevées les 1ère et 3ème Chansons madécasses _ « Nahandove«  et « Il est doux« ...  _, le cycle entier a été donné lors d’auditions privées pour les invités de la mécène Elizabeth Sprague Coolidge, le 8 mai 1926 à l’Académie américaine de Rome, puis le 21 mai 1926 au Palais d’Egmont de Bruxelles, les deux fois avec pour interprètes Jane Bathori au chant, Alfredo Casella au piano, Louis Fleury à la flûte et Hans Kindler au violoncelle ; et aussi le 13 juin 1926 à la Salle Érard de Paris, avec les mêmes interprètes à une exception près, le flûtiste, Urbain Baudouin qui remplaça Louis Fleury, initialement prévu mais décédé entre-temps prématurément _ le 10 juin 1926.

La première audition publique des trois Chansons madécasses date du 15 octobre 1926 à la Salle Érard à Paris, lors d’un « Festival Maurice Ravel » organisé par la Société musicale indépendante (SMI), avec pour interprètes Joy Mac Arden au chant, Vlado Perlemuter au piano, Gaston Blanquart à la flûte et Tony Close au violoncelle.

La première édition chez Durand est accompagnée de gravures de Luc-Albert Moreau.

Le premier enregistrement connu est celui _ pour le label Polydor _ de Madeleine Grey, cantatrice très estimée du compositeur, en 1932 :

« Depuis la création parfaite de Jane Bathori, il y a déjà bien des années _ 1925 et 1926 _, cette œuvre fort difficile _ sic _ a été reprise par beaucoup d’artistes, et non des moindres : aucune, sinon M. G. [Madeleine Grey], n’en a rendu aussi fidèlement le caractère _ voilà ! C’est elle que j’ai choisie récemment lorsque la Société Polydor m’a demandé d’enregistrer ces 3 pièces en me laissant le choix des interprètes« , a écrit Ravel le 5 janvier 1933 (in l' »Intégrale de la Correspondance de Maurice Ravel » publiée par Manuel Cornejo, page 1301.

Musique

 

Ravel _ bibliophile éminent et passionné ! _ s’enthousiasma pour les poèmes _ publiés d’abord en 1787 _ de Parny dont le contenu était conforme à ses propres convictions _ anticolonialistes, sinon érotiques… Le style extrêmement dépouillé _ oui _ qu’il adopta pour cette musique s’inscrit dans la suite de sa Sonate pour violon et violoncelle _ créée le 6 avril 1922. Dans cet esprit, cette œuvre n’est pas sans rappeler la Sonate pour flûte, alto et harpe de Claude Debussy, composée quelque dix ans plus tôt.

« Les Chansons madécasses me semblent apporter un élément nouveau – dramatique voire érotique – qu’y a introduit le sujet même de Parny. C’est une sorte de quatuor _ voilà ! _ où la voix joue le rôle d’instrument principal _ c’est très clairement affirmé là. La simplicité y domine. L’indépendance des parties _ et c’est bien là un point en effet capital ! Et qu’ont fort bien souligné Thomas Dolié et Stéphane Trébuchet dans leur travail de mise en place des deux premières mélodies… _ s’y affirme. » (Maurice Ravel, Esquisse biographique, 1928 _ disponible en entier aux pages 1437 à 1441 de l’indispensable « Intégrale de la Correspondance de Maurice Ravel » publiée par Manuel Cornejo _)

La chaleur et l’érotisme _ insidieusement torride _ de Nahandove et de Il est doux et la virulente dénonciation _ on ne peut plus claire et directe _ du colonialisme de Aoua font des Chansons madécasses une œuvre engagée _ assurément ! _ de Maurice Ravel, en même temps que sa meilleure réussite dans le genre.

Fin de citation de cette commode notice de Wikipédia.

À mes modestes oreilles et goût personnel,

l’interprétation la plus juste et séduisante _ jusqu’ici du moins ; et j’ai ré-écouté pas mal d’interprétations présentes en ma discothèque personnelle : de Gérard Souzay à Jessye Norman et Christa Ludwig ; et je mets à part ici la vraiment excellente, d’intelligence de ces mélodies, Janet Baker, avec le Melos Ensemble conduit par Bernard Keeffe, en 1966 : écoutez ce podcast _ de cet assez malaisant, intriguant et déroutant recueil de 3 mélodies (« Nahandove« , « Aoua« , de 1925, et « Il est doux« , de 1926) des « Chansons madécasses« , est celle, superbe de netteté et expression directe _ très justement dénuée d’affèteries : ouf ! _, du baryton Stéphane Degout _ une fois encore parfait d’intelligence et de la musique et des paroles du texte qu’il chante ! Quel mélodiste ! _, dans le très beau CD « Histoires naturelles » B-Records LBM 009, avec le piano de Cédric Tiberghien, le violoncelle d’Alexis Descharmes et la flûte de Matteo Cesari _ enregistré live à Paris, au Théâtre de l’Athénée, le 23 janvier 2017.

On trouve aussi et surtout sur le Net une magnifique vidéo (de 15′ 23) de ces interprètes dans ces, toujours très surprenantes, « Chansons madécasses«  _ sauf que, lors de ce concert, superbe lui aussi !, donné au Théâtre de la Bastille, à Paris, le 27 mai 2015, le piano était cette fois tenu, non par Cédric Tiberghien, mais par Michaël Guido.  Qu’on en juge ici même

Au terme du travail de cette soirée, hier, de mise en place de « Nahandove » et « Aoua« ,

la performance de Thomas Dolié (et Stéphane Trébuchet assumant au piano les trois parties de flûte, violoncelle et piano) était impressionnante de finesse-subtilité, fluidité dans la tenue de souffle de la courbe mélodique, puissance de projection, parfaite intelligibilité, bien sûr, et, au final, majestueuse et intense intime expressivité et beauté : assez singulière en sa redoutable exigence pour parvenir à vraiment bien l’attraper et porter…

En somme,

un très fructueux travail dont nous avons été les très humbles spectateurs-témoins admiratifs…

Ce dimanche 12 mai 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le formidable CD « Louis Beydts – Mélodies & Songs » de Cyrille Dubois et Tristan Raës : la découverte d’un compositeur (1895 – 1953) inconnu de nous jusqu’ici, bien que bordelais, la confirmation superbement réjouissante du merveilleux talent du ténor Cyrille Dubois (et de son pianiste-complice Tristan Raës) ; et un très précieux coup de projecteur sur le poète magnifique et très singulier qu’a été Paul-Jean Toulet (1867 – 1920)…

21mar

Oui,

c’est bien un formidable CD que ce « Louis Beydts – Mélodies & Songs« , le CD Aparté AP 345, de Cyrille Dubois et Tristan Raës qui nous fait gré à la fois

de la découverte d’un compositeur (notre compatriote bordelais Louis Beydts : Bordeaux, 29 juin 1895 – Caudéran, 15 août 1953), complètement inconnu de nous jusqu’ici ;

de la confirmation, une nouvelle fois, de l’exceptionnel talent du ténor Cyrille Dubois (et de son idéal complice pianiste Tristan Raës) ;

ainsi que d’un très précieux coup de projecteur, fort bienvenu, surtout sur le poète magnifique et très singulier qu’a été Paul-Jean Toulet (Pau, 5 juin 1867 – Guéthary, 6 septembre 1920), dont les parfaites sensualissimes  « Contrerimes » _ publiées post-portem en 1921 _ ont permis le cycle encore plus sensuel de 8 mélodies de Louis Beydts « D’Ombre et de soleil » (de 1946), le sublime sommet de la révélation éblouie que constitue ce CD de si belles mélodies françaises…



En effet,

c’est tout particulièrement ce recueil de mélodies sensualissimes que Louis Beydts, en 1946, et sous le titre de « D’Ombre et de soleil« , a choisi de consacrer à un choix de 8 « Contrerimes » de Paul-Jean Toulet qui, à mon goût, vient toucher au sublime,

tant l’art du compositeur sait si bien servir, par sa musique subtile et merveilleusement juste, le sublime, déjà, de l’art si singulier et merveilleusement touchant, en ses « Contrerimes« , du poète Paul-Jean Toulet _ ce qui m’a ainsi amené à me procurer illico presto le recueil « Paul-Jean Toulet – Œuvres complètes » réunies par les soins de Bernard Delvaille, en 1986, dans la très commode collection Bouquins des Éditions Robert-Laffont…

Et, en cliquant sur les titres de chacun des poèmes de Paul-Jean Toulet, ravissez-vous à chacun des podcasts de ces merveilleuses 8 mélodies du recueil « D’Ombre et de soleil » de Louis Beydts, en lisant aussi les 8 poèmes de Paul-Jean Toulet, d’une sensualité folle, déjà, qu’a choisis de mettre en encore plus sensuelle musique, en son recueil, ce très étonnant compositeur qu’est Louis Beydts :

_ « Dans la saison qu’Adonis fut blessé« , Chansons I d, 

« Dans la saison qu’Adonis fut blessé,

Mon cœur aussi de l’atteinte soudaine

          D’un regard lancé.

 

Hors de l’abîme où le temps nous entraîne,

T’évoquerai-je, ô belle, en vain – ô vaines

          Ombres, souvenirs.

 

Ah ! dans mes bras qui pleurais demi-nue,

Certes serais encore, à revenir,

          La bienvenue. »

 


_ « Toi qu’empourprait l’âtre d’hiver« , Contrerimes II,

« Toi qu’empourprait l’âtre d’hiver

          Comme une rouge nue,

Où déjà te dessinait nue

          L’arôme de ta chair ;

 

Ni vous, dont l’image ancienne

          Captive encore mon cœur,

Ile voilée, ombres en fleurs,

          Nuit océanienne ;

 

Non plus ton parfum, violier,

          Sous la main qui t’arrose,

Ne valent la brûlante rose

          Que midi fait plier.« 

 


_ « Dormez, ami… », Contrerimes LXVIII,

« Dormez, ami ; demain votre âme

          Prendra son vol plus haut.

Dormez, mais comme le gerfaut

          Ou la couverte flamme.

 

Tandis que dans le couchant roux

          Passent les éphémères,

Dormez sous les feuilles amères,

          Ma jeunesse avec vous.« 

 


_ « Douce plage où naquit mon âme… », Contrerimes XLVI,

« Douce plage où naquit mon âme ;

          Et toi, savane en fleurs,

Que l’océan trempe de pleurs

          Et le soleil de flammes ;

 

Douce aus ramiers, douce aux amants,

          Toi de qui la ramure

Nous charmait d’ombre et de murmure

          Et de roucoulements ;

 

Où j’écoute frémir encore

          Un aveu tendre et fier –

Tandis qu’au loin riait la mer

          Sous le corail sonore. « 

 


_ « L’hiver bat la vitre et le toit… », Contrerimes XII,

« L’hiver bat la vitre et le toit.

          Il fait bon dans la chambre

À part cette sale odeur d’ambre

          Et de plaisir. Mais toi,

 

Les roses naissent sur ta face

          Quand tu ris près du feu.

Ce soir, tu me diras adieu,

          Ombre, que l’ombre efface.« 

 


_ « Iris, à son brillant mouchoir… », Contrerimes III,

« Iris, à son brillant mouchoir, 

          De sept feux illumine

La molle averse qui chemine,

          Harmonieuse à choir.

 

Ah! sur les roses de l’été,

          Sois la mouvante robe,

Molle averse, qui me dérobe

          Leur aride beauté.

 

Et vous, dont le rire joyeux

          M’a caché tant d’alarmes,

Puissé-je voir enfin des larmes

          Monter jusqu’à vos yeux.« 

 


_ « Le temps irrévocable a fui… » Chansons II,

« Le temps irrévocable a fui. L’heure s’achève.

Mais toi, quand tu reviens et traverses mon rêve,

Tes bras sont plus frais que le jour qui se lève,

          Tes yeux plus clairs.

 

À travers le passé ma mémoire t’embrasse.

Te voici. Tu descends en courant la terrasse

Odorante, et tes faibles pas s’embarrassent

          Parmi les fleurs.

 

Par un après-midi de l’automne, au mirage

De ce tremble inconstant que varient les nuages,

Ah ! verrai-je encore se farder ton visage

          D’ombre et de soleil ?« 

 


_ « Puisque tes jours ne t’ont  laissé… », Dixains XII,

« Puisque tes jours ne t’ont laissé

Qu’un peu de cendre dans la bouche,

Avant qu’on ne tende la couche

Où ton cœur dorme, enfin glacé,

Retourne, comme au temps passé,

Cueillir, près de la dune instable,

Le lys qu’y courbe un souffle amer.

– Et grave ces mots sur le sable :

Le rêve de l’homme est semblable

Aux illusions de la mer.« 

 

Et tâchez d’écouter au plus vite

l’intégralité de ce que Louis Beydts, en ses subtilissimes mélodies, réussit à obtenir des poèmes (de Paul Fort, Robert Honnert, Henri de Régnier, Guillaume Apollinaire et Henry Bataille, aussi) qu’il met en musique, tels que nous les offre ici aussi subtilement Cyrille Dubois et Tristan Raës en ce si beau CD…

Et il me faut aussitôt signaler au passage ici la très grande qualité du livret de ce CD Aparté AP 345, avec tout spécialement, aux pages 21 à 24, un très éclairant « Louis Beydts mélodiste » sous la plume de la musicologue Justine Harrisoncitant, par exemple, à la page 24, ces très justes mots du crtique musical Paul Landormy pour caractériser l’idiosyncrasie de l’art de Louis Beydts :

la musique de Beydts « est une musique de gourmet. Vous y admirez des courbes mélodiques remarquables par leur naturel et leur grâce, une harmonie extrêmement coulante et des modulation d’un imprévu _ après celui, si merveilleux et surprenant, mais si juste, extraordinaire art de l’imprévu, déjà, des « Contrerimes » de Paul-Jean Toulet : « Les contrerimes sont construites autour d’un quatrain à rimes embrassées, alternant octo- et hexasyllabes (8+ 6 +8 + 6), les vers courts rimant avec les vers longs« , précise en son article Justine Harrison, page 21… _ qui enchante, marque d’une sensibilité des plus affirmées. Et c’est un plaisir de choix que nous offre toujours cet exquis compositeur« .
…;

Bien sûr,

nous connaissons et apprécions à un très haut degré l’art superbe de la prononciation, au service des plus fines inflexions du texte, de Cyrille Dubois, inflexions mêlées le plus finement aux subtiles inflexions tant mélodiques qu’harmoniques de la musique, idéalement serties par le piano idoine du toujours parfait Tristan Raës :

pour un parfait service de l’art si délicat _ et sublime _ de la mélodie française tout spécialement…

Lire aussi, à propos de ce rare CD, ces deux récents articles :

_ de Charles Sigel, sur le site de forumopera.com,

« Louis Beydts, Mélodies, par Cyrille Dubois et Tristan Raës« , en date du 9 mars dernier ;

_ et de Nicolas Mesnier-Nature, sur le site de ResMusica,

« Mélodies et chansons de Louis Beydts, magnifiées par Cyrille Dubois et Tristan Raës« , en date de ce jour même, 21 mars 2024…

Et quant à l’art si remarquable du chant, et tout particulièrement dans la mélodie _ et même la mélodie française… _, du cher Cyrille Dubois,

je renvoie ici à 8 de ses précédents CDs _ classés ici dans l’ordre chronologique de leur enregistrement _ainsi qu’aux articles que je leur ai consacrés :

1°) le CD Aparté AP 224 « Lili & Nadia Boulanger – Mélodies« , enregistré à Venise les 8 et 9 mars 2018

_ cf mes articles «  » et « « , en date des 26 février et 2 mars 2020 _ ;

2°) le CD Aparté AP 200 « Liszt – O lieb !« , enregistré à  Paris les 15, 17 et 18 octobre 2018

_ cf mes articles « « , «  » et «  » en date des 5 novembre, 25 novembre et 17 décembre 2019 _  ;

3°) le triple CD  Aparté AP 284 « Fauré- Complete Songs« , enregistré à Paris du 1 au 3 juillet, les 10 et 17 août 2020 et du 14 au 17 juin 2021

_ cf mes articles «  » et «  » en date des 3 juin et 6 août 2022 _ ;

4°) le CD NoMadMusic NMM 117 « Cyrille Dubois & Anne Le Bozec – Schubert Winterreise« , enregistré à La Grange de Mels au mois de janvier 2021 ;

5°) le CD Aparté AP 281 « Christophe Rousset – Cyrille Dubois – François Couperin – The Sphere of intimacy« , enregistré à Paris les 16 et 17 avril 2021

_ cf mes articles «  » et «  » en date des 14 janvier et 25 avril 2023 _ ;

6°) le CD Alpha 924 « So romantique !« , enregistré à Lille au mois de juillet 2021

_ cf mes articles «  » et « «  en date des 19 mars et 17 mai 2023  _ ;

7°) le CD Aparté AP 319 « Jouissons de nos beaux airs !« , enregistré à Pécs, en Hongrie, du 15 au 17 novembre 2021

_ cf mes articles « « , « « , «  » et «  » en date des 20, 22 et 25 septembre et 7 octobre 2023 _ ;

et 8°) le triple CD Harmonia Mundi HMM 902356.358 « Les Heures claires – The Complete Songs – Nadia & Lili Boulanger« , enregistré à Boulogne-Billancourt en février et juin 2022

_ cf mon article «  » en date du 14 mars 2023 _,

8 très remarquables réalisations discographiques, donc, auxquels ce stupéfiant CD « Louis Beydts – Melodies & Songs » vient ajouter un merveilleux complément de service, et à ce degré de si haute qualité, de, tout particulièrement _ à coté, je veux dire, des CDs que Cyrille Dubois a consacrés aussi aux Lieder de Schubert et de Liszt, ainsi que des CDs d’Airs d’opéras, eux, bien sûr, avec orchestre… _, la mélodie française avec piano… 

Bref,

une très marquante découverte, à ces divers et riches égards, que ce singulier et si idéalement réussi CD « Louis Beydts – Melodies & Songs » de Cyrille Dubois et Tristan Raës, pour le label Aparté…

Mais de l’art si fin de Louis Beydts,

écoutez d’abord et surtout les 8 merveilleuses mélodies du recueil « D’Ombre et de soleil » (en 1946), sur les décidément génialissimes « Contrerimes » de Paul-Jean Toulet, parues posthumes en 2021.

C’est le sommet sensualissime de ce sublimissible CD qui vient de paraître pour Aparté.

Ce jeudi 21 mars 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Suite du brillantissime parcours Mozart de Maxim Emelyanychev avec l’excellentissime il pomo d’oro : un merveilleux CD jaune après le splendide CD rouge…

28déc

Après le splendide CD rouge Aparté AP 307 _ cf mes 2 articles « «  et «  » des 3 et 4 février derniers _,

voici aujourd’hui un merveilleux CD jaune Aparté AP 328, comportant les symphonies n° 29 en la majeur K. 201 et n° 40 en sol mineur K. 550, entrecoupées par le concerto pour hautbois et orchestre en ut majeur K. 314, avec le hautboïste Ivan Podyamos, par le formidable Maxim Emelyanychev dirigeant le décidément excellentissime il pomo d’oro…

Avec le commentaire toujours bien affuté qu’en donne sur son site Discophilia l’excellent Jean-Charles Hoffelé, sous le titre « Mozart II » :

MOZART II

La retenue pourra surprendre. Guido Cantelli commençait la 29e Symphonie dans un grand soleil, Maxim Emelyanychev qui l’a choisie pour ouvrir le second volume de son intégrale _ voilà ! _ la débute dans un clair-obscur qui donne le ton : l’Allegro moderato gardera, dans son tempo savamment soupesé, cette ombre _ voilà… _ que personne à vrai dire, de Böhm à Harnoncourt, n’y a osée. L’Andante plussoiera, dix minutes !, chantant comme un nocturne, archets légers, mais phrasés un peu nostalgiques, une petite sérénade sous une lune voilée.

Volonté trop nette de se singulariser ? En rien. Le jeune chef russe opte pour le demi-caractère, exactement l’esthétique de la 40e Symphonie qui referme l’album dans un geste plus conquérant certes, mais pas moins lyrique _ en effet. La cohérence du programme, qui mène de Salzbourg à Vienne, est évidente. La qualité de l’interprétation, et simplement du jeu des musiciens italiens, parle d’elle-même _ oui ; et c’est là tout à fait là le juste accent qu’il faut !

Ce Mozart-là, qui ne prend en compte que de manière indicative les principes de l’interprétation historiquement informée, est aussi surprenant dans le paysage d’aujourd’hui que divinement musical _ oui !!! _, ce qu’illustre un agreste Concerto pour hautbois, lyrique lui aussi, sur les pointes, avec un merveilleux soliste qui fait de sa cadence une aria que _ la délicieusement taquineDespina aurait pu chanter.

LE DISQUE DU JOUR

Wolfgang Amadeus Mozart(1756-1791)


Symphonie No. 29 en la majeur, K. 201
Concerto pour hautbois et orchestre en ut majeur, K. 314
Symphonie No. 40 en sol mineur, K. 550

Ivan Podyomov, hautbois
il pomo d’oro
Maxim Emelyanychev, direction

Un album du label Aparté 328

Photo à la une : le claviériste et chef d’orchestre Maxim Emelyanychev – Photo : © Tessa Posthuma de Boer

Ce jeudi 28 décembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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