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Enregistrer les opéras de Nicola Antonio Porpora (1686 – 1768) : Carlo il Calvo (Rome, 1738), Polifemo (Londres, 1735), Arianna in Nasso (Londres, 1733) : les réussites discographiques d’Armonia Atenea, George Petrou, et la belle troupe menée par Max Emanuel Cenčić…

22déc

Comme en très riche complément opportunément bienvenu à mon article du 18 décembre dernier « « ,

voici que ce vendredi 22 décembre Jean-Charles Hoffelé consacre, sous le titre de « Pyrotechnie« , son article du site Discophilia

à l’œuvre opératique enregistrée et à enregistrer _ de préférence par Armonia Atenea et George Petrou…  _ de Nicola-Antonio Porpora (Naples, 10 août 1686 – Naples, 3 mars 1768) :

PYROTECHNIE

Fatal !, Max Emanuel Cenčić et son entourage de falsettistes devaient bien faire des ouvrages lyriques de Porpora l’objet central _ voilà !!! _ de leur insatiable appétit de découverte.

Porpora est à lui seul un continent lyrique _ rien moins… _ que l’on commence seulement à explorer _ à la scène comme au disque _ : plus de cinquante opéras ! _ voilà ! _, qui tentèrent de disputer vainement _ en effet… _ la primauté du genre à Haendel. Vienne ne goutât guère ses ouvrages, mais il y fut le professeur de Haydn _ tiens, tiens… _ qui dans ses opéras se souviendra du charme mélodique et de l’écriture volatile des œuvres de son professeur. Londres lui fut plus favorable, un cercle de mécènes éclairés fondant pour la création de ses opéras la classieuse société Opera of the Nobility, Las !, Haendel l’éclipsa progressivement _ voilà ! _, le ramenant à cette Italie où du moins Venise, Rome et Naples, sa patrie, restèrent fidèles à son style sur-orné, à sa si séduisante facilité mélodique _ c’est cela.

Écrit pour Rome, qui le créa au Teatro delle Dame au printemps de 1738, Carlo il Calvo nous plonge dans les intrigues qui suivirent la mort de Louis le Pieux, prétexte à un livret habilement troussé, plus dramatique que bien des opéras du Napolitain, avec un projet de meurtre sur une mère et son fils, ce dernier nommant l’opéra : Carlo il Calvo, désigné pour succéder à Louis le Pieux, n’a que six ans et pour seul protection sa mère Giuditta. L’intensité de l’ouvrage ne prive pas Porpora de déployer toutes les merveilles de son chant orné, surclassant le Carlo, Re d’Allemagna d’Alessandro Scarlatti (voir l’enregistrement de Fabio Biondi chez Agogique), également pour le sens dramatique qu’arde la direction flamboyante _ voilà ! _ de George Petrou.

Rome oblige, ce Charles le Chauve sera créé par une troupe uniquement constituée de castrats. Max Emanuel Cenčić ne va pas jusque-là, il le pourrait ayant dans son cercle assez de falsettistes, mais comment se passer de Julia Lezhneva et de ses pyrotechnies stellaires pour Giuditta ?

Le maître d’œuvre _ Max Emanuel Cenčić _ revient au rôle de Lottario dont il avait déjà gravé quelques arias au long de ses récitals, quelle merveille que son grand air de l’Acte II (Quando s’oscura il ciel), Bruno de Sá est idéal pour le rôle en demi-teinte de Berardo, belles surprises l’Eduige de Nian Wang, mezzo ambré, et le parfait Asprando de Petr Nekoranec. La troisième étoile de cette gravure réalisée en studio à Athènes, après que l’œuvre fut montée au Festival de Bayreuth, c’est Adalgisio. Une fois encore, Franco Fagioli délivre de son mezzo somptueux une éblouissante leçon de virtuosité dont le belcanto n’est jamais absent.

Du temps de Londres – il fut créé au bord de la Tamise le 1er février 1735Polifemo montre des ambitions supplémentaires _ voilà ! _, autant par l’habile livret de Rolli qui rassemble le meurtre d’Aci par Polifemo et l’aveuglement du cyclope par Ulysse, que par l’invention musicale débridée qu’y développe Porpora.

Est-ce la nécessité de rivaliser avec Haendel, le sujet pris à l’antique, qui lui inspirent un orchestre autrement inventif _ voilà _ et un chant où l’espressivo l’emporte _ oui _ sur la pure virtuosité de parade, quoi qu’il en soit on tient certainement l’un des chefs-d’œuvre _ voilà _ de Porpora, il suffit d’écouter la prégnante nostalgie de l’air de remerciement à Jupiter d’Aci à l’Acte III après sa métamorphose en source divine pour s’en convaincre.

Aci c’est Yuri Mynenko, lignes pures, timbre opulent, voix longue et flexible si sensible aux mots, il est l’autre héros de cette fable mythologique avec l’Ulysse de Max Emanuel Cenčić, héroïque et futé à la fois face à l’incroyable cyclope tonitruant et pourtant touchant incarné par Pavel Kudinov.

Magnifique évidemment Julia Lezhneva, tout comme la Calypso envoûtante de Sonja Runje, mais écoutez aussi le mezzo leste de Narea Sun que n’effraye aucune vocalise : « Une belta che sa » au début de l’Acte II vous convaincra qu’elle pourrait être bientôt une rossinienne stylée.

Toute l’équipe de chant ressuscite le niveau de celle, si relevée, de la création _ londonienne, le 1er février 1735, au Théâtre de Haymarket. Conscient de la valeur de l’ouvrage, Senesino _ oui _ quitta la troupe de Haendel pour celle de l’Opera of the Nobility, entraîinant avec lui la Cuzzoni, Francesca Bertolli, Antonio Montagnana, Farinelli les rejoignant _ une subite énorme hémorragie... Cet âge d’or du bel canto chez Porpora rayonne enfin _ ici, grâce à George Petrou _ dans toute sa gloire, emporté par la battue spectaculaire de George Petrou.

Si, pour le prochain opéra, Max Emanuel Cenčić et sa vaillante troupe, pouvaient révéler Arianna in Nasso qui avait ouvert avec tant de brio la parenthèse londonienne _ au Lincoln’s Inn Fields Theatre, le 29 décembre 1733.

LE DISQUE DU JOUR

Nicola Antonio Porpora (1686-1768)


Carlo il Calvo

Franco Fagioli,
contre-ténor (Adalgiso)
Max Emanuel Cenčić, contre-ténor (Lottario)
Julia Lezhneva,
soprano (Gildippe)
Suzanne Jerosme,
soprano (Giuditta)
Petr Nekoranec, ténor (Asprando)
Bruno de Sá, sopraniste (Berardo)
Nian Wang, mezzo-soprano (Eduige)

Armonia Atenea
George Petrou


Un livre-disque du label Parnassus Arts Productions PARATS002

Nicola Antonio Porpora (1686-1768)


Polifemo

Yuriy Mynenko,
contre-ténor (Aci)
Max Emanuel Cenčić, contre-ténor (Ulisse)
Pavel Kudinov,
baryton-basse (Plifemo)
Julia Lezhneva, soprano
(Galatea)
Sonja Runje, contralto (Calipso)
Narea Son, soprano (Nerea)

Armonia Atenea
George Petrou

Un livre-disque du label Parnassus Arts Productions PARATS003

Photo à la une : les contre-ténors Max Emanuel Cenčić et Franco Fagioli dans les représentations de Carlo il Calvo de Porpora, à Bayreuth –
Photo : © Falk von Traubenberg

 



Ce vendredi 22 décembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Une bien intéressante sortie discographique : l’opéra « Polifemo » de Nicola Porpora (créé à Londres en 1735), par Armonia Atenea, sous la direction de George Petrou…

18déc

Le 1er février 1735, a été créé au King’s Theater de Haymarket, à Londres, l’opéra en 3 actes « Polifemo » de Nicola Porpora (Naples, 10 août 1686 – Naples, 3 mars 1768) sur un livret de Paolo Antonio Rolli.

Et voici que le label Parnassus Arts Productions nous en propose une passionnante interprétation discographique par Armonia Atenea, sous la direction de George Petrou, en 3 CDs Pararts003…

L’article bien détaillé de Guillaume Saintagne à la page 86 du numéro 728 de ce mois de décembre 2023 de Diapason _ qui a aussi décerné à ce triple CD un Diapason-Découverte _ donne de passionnantes précisions sur les circonstances de la création à Londres de ce fastueux « Polifemo » de Nicola Antonio Porpora _ avec « une distribution de stars en partie dérobée au Saxon : Senesino, Cuzzoni, Farinelli » ; excusez du peu de pareille entreprise !.. _ afin de faire pièces aux succès opératiques _ qui gênaient certains _ de Georg Friedrich Haendel (Halle, 23 février 1685 – Londres, 14 avril 1759) _ « un feu d’artifice finalement assez semblable à celui qu’allumait Haendel en arrivant dans cette même ville de Londres vingt-quatre ans plus tôt avec Rinaldo« …

À suivre…

Ce lundi 18 décembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Encore et toujours l’étendue et la portée du tropisme ferrarais : une nouvelle pépite discographique du magnifique Francesco Corti, sur un clavecin de Philippe Humeau, son CD « Frescobaldi and the South », le CD Arcana A 547…

17sept

Et toujours dans le rayonnement intense de l’insistant tropisme ferrarais,  voici une nouvelle pépite du prodige Francesco Corti au clavecin : le CD Arcana A 547 « Frescobaldi and the South« …

Alors que je possède depuis sa parution ce CD enchanteur (!),  j’ai pourtant attendu jusqu’ici de le chroniquer sur mon blog…

Mais voici que le toujours sagace Jean-Charles Hoffelé vient, lui, de le faire sur son très riche et très souvent pertinent site Discophilia, sous le tout simple intitulé « Méditerranée«  _ alors que la cité natale de Frescobaldi, la Ferrare des Este, sur un des bras secondaires du Pô, et dans la proximité brumeuse de son large delta, se trouve proche, elle, de l’Adriatique…

 

Voici donc ce très intéressant article « Méditerranée » :

MÉDITERRANÉE

La belle idée, faire pencher le romain Frescobaldi _ de naissance ferraraise, le 13 septembre 1583, et formé à Ferrare par le ferrarais Luzzasco Luzzaschi (Ferrare, ca. 1545 – Ferrare, 10 septembre 1607)… Et ce n’est qu’en sa 20e année, en 1603, que Girolamo Frescobaldi quitte Ferrare et vient s’installer à Rome… _ vers la pointe de la botte ! Evidemment Francesco Corti ne va pas prendre pour l’armature de son récital, dans le plus roide, le plus savant _ et austère _ des pages coulées de la plume de Frescobaldi. Capriccio, Gagliarda, Balletto _ imaginatifs… _ dament le pion aux quelques Toccatas choisies, brillantes, et enlevées comme tel par le geste leste du claveciniste aidé par les couleurs vermeilles d’un spectaculaire clavecin italien _ oui _ signé Philippe Humeau. _ bravissimo à lui aussi !

L’exubérance est bien le propos des auteurs napolitains _ dont le génialissime et éminemment singulier Carlo Gesualdo (Venosa, 8 mars 1566 – Gesualdo, 8 septembre 1513), qui a séjourné à Ferrare de 1594 à 1596 : en 1594, Gesualdo avait épousé en secondes noces Éléonore d’Este, sœur de Cesare d’Estel’héritier présomptif du duc Alphonse II d’Este (Ferrare, 22 novembre 1533 – Ferrare, 27 octobre 1597) ; et de Carlo Gesualdo Luzzasco Luzzaschi a assurément profité ces années-là de la proximité musicale… _ , écoutez seulement la Toccata prima de Bernardo Storace ou l’explicite Consonanze stravaganti de Giovanni de Macque : partout, la danse s’invite _ oui ! _, et le brio réhausse jusqu’à la nostalgie (la Toccata nona de Frescobaldi). L’instrument, lui aussi, commande ce flot de lumière _ oui _ qui rendra la Battaglia si réaliste jusque dans l’effondrement de l’armure.

Passionnant _ comme à chaque fois ! _, Francesco Corti a ouvert grand la porte d’un autre monde du clavecin ultramontain, ce voyage mériterait _ assurément _ d’autres étapes.

LE DISQUE DU JOUR

Frescobaldi and the South.
Intendomi chi può che m’intend’io

Girolamo Frescobaldi
(1583-1643)


Toccata prima, F 2.01
Toccata decima, F 2.10
Partite sopra Ruggiero, F 2.15
Capriccio sopra La Battaglia, F 2.31
Balletto e ciaccona, F 2.32
Gagliarda seconda, F 3.28
Toccata nona « Non senza fatiga si giunge al fine », F 3.09
Capriccio nono, di durezze, F 4.09
Toccata settima, F 3.07
Recercar con obligo di cantare la quinta parte senza tocarla, F 12.44*
Gagliarda quinta, F 3.31
Cento partite sopra passacagli, F 2.29


Giovanni de Macque (ca. 1550-1614)


Capriccio sopra re fa mi sol
Consonanze stravaganti
Prima Gagliarda (2 versions)


Rocco Rodio (ca. 1530-ca. 1620)


Terza ricercata


Scipione Stella (1558-1622)


Partita sopra la Romanesca


Francesco Lambardo (1587-1642)


Toccata
Gagliarda


Michelangelo Rossi (ca. 1601-1656)


Toccata prima
Corrente terza


Bernardo Storace (XVIIe siècle)


Ciaccona


Giovanni Salvatore (début XVIIe siècle-ca. 1688)


Canzon francese Seconda, del nono tuono naturale


Luigi Rossi (ca. 1597-1653)


Passacaille del seigr. Louigi

Francesco Corti, clavecin
Andrés Locatelli, flûte à bec


Un album du label Arcana A547

Photo à la une : le claveciniste Francesco Corti – Photo : © DR

Un CD essentiel

afin de continuer à pénétrer l’idiosyncrasie frescobaldienne en la richesse de ses contextes italiens…

Ce dimanche 17 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le charme vraiment prenant de la tendresse Porpora : le merveilleux CD « Salve Regina » des Muffatti, et le contreténor Clint van der Linde, chez Ramée

06juin

Dans la continuité _ et la frustation _ de mon article «  » du 3 juin dernier à propos de ce qui manque maintenant dans la discographie accessible de Nicola Porpora (1686 – 1768),

je suis tombé sur un admirable CD Ramée RAM 2102, paru le 24 mars 2022, par l’excellent contre-ténor sud-africain Clint van der Linde et l’Ensemble Les Muffati, intitulé « Salve Regina – Motets by Hasse and Porpora« ,

comportant, entre autres, un sublime « Salve Regina » de Nicola Porpora _ quelle merveilleuse tendresse ! _ composé en 1630, et dédié par Porpora à la cantatrice Zabetta, Elizabetta Mantovani, mezzo-soprano, pensionnaire à l’Ospedale degli Incurabili, à Venise :

un admirable motet au charme fou d’une tendresse, oui, sublime.

Lire aussi cette récente recensiondécouverte après l’audition du CD, et assez neutre poour une fois… _ de Christophe Steyne, sur le site de Crescendo, en date du 11 mars 2023, intitulée (sic) « Le Salve Regina et l’italianisme à l’heure baroque : deux nouvelles parutions » :

Le Salve Regina et l’italianisme à l’heure baroque, deux nouvelles parutions

LE 11 MARS 2023 par Christophe Steyne

Salve Regina, motets by Hasse & Porpora.

Johann Adolph Hasse (1699-1783) : Hostes Averni ; Alma redemptoris Mater.

Nicola Porpora(1686-1768) : Salve Regina ; Nisi Dominus.

Antonio Vivaldi (1678-1741) : Concertos pour cordes en sol mineur et en fa majeur RV 154 et 136.

Clint van der Linde, contreténor.

Les Muffatti.

Livret en anglais, allemand, français (paroles en latin et traduction en anglais).

Mars 2021.

TT 68’54.

Ramée RAM 2102

Salve Regina.

George Frideric Haendel (1685-1759) : Adagio-Allegro [The Lord is my Light HWV 255], Presto [Acis & Galatea HWV 49]. Salve Regina HWV 241. Praise the Lord with cheerful voice [Esther HWV 50]. Gloria HWV deest. Silete Venti HWV 242. Tu del Ciel ministro electo [Il Trionfo del tempo HWV 46a].

Julie Roset, soprano.

Leonardo García Alarcón,

Millenium Orchestra.

Livret en anglais, français, allemand (paroles en anglais, latin et italien, traduction en anglais et français).

Septembre 2021.

TT 73’49.

Ricercar RIC 442

Le Grand Tour du jeune Anversois Corneille-Jean-Marie van den Branden (1690-1761) stimule ce disque qui nous propose des inédits, dont un en lien avec les archives de l’archevêché de Malines, dépositaire de manuscrits légués par ce Seigneur de Reeth. Parmi ces découvertes, le Nisi Dominus écrit dans les années 1710 par Nicola Porpora, dont le CD invite aussi le Salve Regina en fa majeur dédié à Zabetta, célèbre contralto pensionnaire de l’Ospedale degli Incurabili à Venise. L’autre figure de ce récital est un élève et rival du compositeur napolitain, qui comme lui connut une carrière nomade, et qui lui succéda d’ailleurs comme maître de chapelle dans cet Ospedale : Johann Adolph Hasse, émané de la Cour de Brunswick-Lunebourg. Au sein de son important catalogue lyrique, voici Alma redemptoris Mater qui se rattache à la célébration mariale, et Hostes Averni dans sa version conservée au Conservatoire de Bruxelles, une des douze sources identifiées pour ce motet et qui reçoit ici son tout premier enregistrement.

Dans sa notice, Clint van der Linde nous explique avoir choisi de présenter ces quatre œuvres sacrées en commençant par les plus graves pour terminer avec les plus aiguës, les plus dramatiques. La voix mixte est garante de la variété des couleurs sur l’ambitus. La manière italianisante, aux portes du style galant, se voit traitée en respectant la veine tantôt opératique (le Hostes Averni ornementé dans le da capo), tantôt introvertie. En privilégiant « les grands arcs d’expression plutôt que se limiter au détail », le contreténor s’offre une vocalisation ample et un souffle contrôlé, que ce soit dans le trait ciselé ou les phrases étirées. Pour faire bonne mesure, le CD est complété par deux brefs concertos de Vivaldi, que Van den Branden rencontra en toute modestie dans les ruelles de la cité sérénissime : les archets de l’ensemble Muffatti abordent ces intermèdes avec une palette moelleuse, tout à l’image d’une prestation vocale très léchée.

Le Salve Regina, mais pas que. Cette anthologie toute vouée au Care Sassone s’entend comme un tribut à la période italienne de Haendel (1706-1710) mais aussi plus largement comme « une transposition musicale des mille et une facettes de la psychologie humaine » et une valorisation d’un art sans pareil « de la mélodie dédiée à la voix », nous dit la notice signée de Marc Maréchal. Introduite par un concert instrumental emprunté à la Bibliothèque d’Uppsala (un assemblage tiré d’un anthem et d’un Masque), et guidé par l’inspiration au long cours du Millenium Orchestra qui semblerait prêt à avaler un opéra, le récital aligne l’antienne mariale, un extrait de l’oratorio Il Trionfo del tempo, et ce Gloria de paternité douteuse avant son authentification par le professeur Joachim Marx. On y apprécie les vocalises agiles de Julie Roset (Quoniam tu solus sanctus, où Leonardo García Alarcón ronge le frein), tandis que le Salve Regina montre une voix studieuse, blême et sans couleur, au galbe tendu et pour tout dire peu flatteur, rétif à la tendresse du sujet.

Ce timbre monochrome s’assouplit et s’enrichit néanmoins dans le chant de louange Praise the Lord with cheerful voice agrémenté de l’éloquente harpe de Marie Bournisien. Quand Esther fut représenté au King’s Theatre en 1732, le compositeur était déjà retourné en Italie : c’est certainement là, parti recruter des solistes pour la scène londonienne, qu’il rédigea son Silete Venti, pièce principale de ce CD (une petite demi-heure). Après la Symphonia enfiévrée par l’orchestre, on peut apprécier la saine ventilation et le registre lumineux de la soprano, qui exploite sa voix comme un ductile instrument, presque indifférent au texte. Au-delà du brio, l’italianisme ne s’accommoderait-il d’une expression moins droite, qui ne semble là que pour poser des notes, si maitrisées soient-elles jusque dans les cimes (la conclusion du Dulcis amor Jesu) ? Dommage que l’ensemble de ce motet ne soit à l’image du « Surgent venti », où Julie Roset semble enfin prête à fendre l’armure pour ces vents qui se lèvent.

Ramée = Son : 8,5 – Livret : 8,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 9

Ricercar = Son : 8,5 – Livret : 8,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 7

Christophe Steyne

 

Une merveille de CD…

 Ce mardi 6 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Redécouvrir ou découvrir, et en toute saison, la délicieuse petite musique de Michele Mascitti (1664 – 1760)…

22jan

La période du Covid m’avait empêché de me procurer un 5ème CD _ après les 2 CDs de son « Opera prima« , par l’Ensemble Baroques-Graffiti (les CDs APO 156 et 157, de l’éditeur Acte Préalable, parus en 2008 ; le vraiment superbe CDs de son Op. 2, « 6 Sonate da camera« , pour le label espagnol Cantus, paru en 1997 ; et le CD de son « Opera ottava« , le CD Arcana A 111, paru en 2018 _ du compositeur italo-parisien Michele Mascitti, soit le CD Arcana A 473 de ses « Sonate a violino solo e basso Opera nona » de 1738,

dont j’avais cependant signalé l’insigne parution en mon article du 19 avril 2020 : «  » _ cf aussi mon précédent article du 28 septembre 2018 : « « …

Après l’avoir expressément commandé, voilà, j’ai reçu ce CD Arcana A 473, et ma curiosité est satisfaite.

Mais jusqu’ici, il me faut avouer que ma préférence va au CD Cantus C 9610 de l’Op. 2, par le violoniste Fabrizio Cipriani et le violoncelliste Antonio Fantinuoli, enregistré à Cravasco, en Ligurie, en novembre 1994, et paru en 1997 :

à écouter ici même ; c’est délicieux,

et en toute saison… 

Ce dimanche 22 janvier 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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