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Le cas Giuseppe Tartini (1692 – 1770) : un compositeur (et violoniste) plutôt déconcertant, du moins au disque et à mes oreilles : faute probablement, de ma part, d’atomes crochus avec le style galant et l’attraction envers la mélancolie, de Tartini…

01juin

La très grande réussite, absolument enthousiasmante _ c’est en en écoutant, à ma demande expresse, des extraits, en découvrant ce tout nouveau CD en évidence sur la table des nouveautés de mon disquaire préféré ; et son écoute m’ayant immédiatement enthousiasmé, j’ai acheté le CD ! _, du CD Alpha 935 « Duello d’Archi a Venezia« , par la formidable violoniste Chouchane Siranossian, le Venice Baroque Orchestra sous la direction de son chef l’excellent Andrea Marcon, et comportant quatre superbes Concerti per violino, de Francesco-Maria Veracini (1690 – 1768), Pietro Locatelli (1695 – 1764), Antonio Vivaldi (1678 – 1741) et Giuseppe Tartini (1692 – 1770) _ avec un absolument irrésistible Concerto pour violon à cinq en Fa majeur  D. 61 de Tartini… _,

m’a vivement incité à venir me pencher d’un peu plus près sur l’œuvre _ et la discographie présente en ma discothèque… _ de ce compositeur vénitien, natif de Pirano, en Istrie vénitienne, le 8 avril 1692, et qui décèdera à Padoue le 26 février 1770,

qui jusque là ne m’avait jamais vraiment enthousiasmé _ et il m’était difficile de dire pourquoi ; mais le fait était là, et bien là… 

Je voulais donc en avoir le cœur net !

En faisant aussi le constat que Chouchane Siranossian, toujours avec ce même Venice Baroque Orchestra et Andrea Marcon, avait consacré un précédent CD « Tartini Violin Concertos« , le CD Alpha 596,

je me le suis donc aussitôt procuré…

Et là, à nouveau, une endémique déception de ma part,

mais qui ne tient en rien à la qualité des interprètes _ et leur interprétation de cette musique _, Chouchane Siranossian, le Venice Baroque Orchestra, Andrea Marcon, toujours parfaits en leur incarnation au plus près des œuvres jouées,

mais bien à la musique même de Giuseppe Tartini, qui ne me touche décidément pas ! ;

 

probablement une affaire d’époque _ tardive : post-baroque… _, ainsi que de style _ galant…

L’ère de Vivaldi (1678 – 1741) venait donc irrémédiablement de passer !

Et nous quittions la vie virevoltante et admirablement contrastée _ les adagios de Vivaldi sont, eux aussi, à fondre et pleurer de larmes de plaisir !.. _, et nous abordions les prémisses d’un certain classicisme, plus gourmé et plus froid ;

et d’un certain romantisme, pleurnichard…

Sur ce CD « Tartini Violin Concertos » Alpha 596, paru en 2020, et enregistré à Trévise en septembre 2019,

lire les deux intéressants articles suivants,

le premier en date du 5 avril 2020, sous la plume de Jean Lacroix, sur le site de Crescendo, et intitulé « Chouchane Siranossian et Andrea Marcon dans Tartini : l’éblouissement » ;

et le second en date du 7 janvier 2021, sous la plume de Jean-Charles Hoffelé, sur le site de Discophilia, et intitulé « Apogée du violon » ;

même si, pour ma part, je suis loin de partager hélas leurs enthousiasmes respectifs ! pour ce CD-là :

Chouchane Siranossian et Andrea Marcon dans Tartini : l’éblouissement

LE 5 AVRIL 2020 par Jean Lacroix

Giuseppe TARTINI (1692-1770) : Concertos pour violon et orchestre D. 44, 45, 56, 96 et Concerto en sol majeur.

Chouchane Siranossian, violon ;

Orchestre baroque de Venise, direction : Andrea Marcon. 2020.

Livret en français, en anglais et en allemand.

79.22.

Alpha 596.

Il y a des disques dont l’audition vous donne la sensation de l’éblouissement _ certes, et très heureusement, bien sûr… La gravure de ces cinq concertos pour violon de Tartini est de ceux-là ! _ mais ce n’est pas mon cas, je dois en convenir. Ce CD exemplaire nous fait entrer dans un univers où tout semble à ce point couler de source _ oui, mais d’une source bien trop uniment mélancolique et auto-complaisante envers la tristesse, à mon goût : celle de la Venise (en décadence endémique…) de la seconde moitié du XVIIIe siècle... _ que cela relève du miracle musical. Les œuvres pour commencer, avec une première mondiale discographique à la clef, celle de ce Concerto en sol majeur non publié, découvert par la musicologue Margherita Canale, qui signe la très intéressante notice du livret. Cette dernière explique qu’il existe une copie manuscrite du XVIIIe siècle, conservée aux archives de la Cappella Antoniana de Padoue, et que l’analyse a permis de dater des années de maturité _ deTartini. Mais elle précise aussi que les _ quatre _ autres concertos _ de ce CD Alpha 596 _ « n’ont pas été _ eux non plus _ publiés du vivant du compositeur : ils appartiennent à différentes périodes de son évolution créatrice, et nous sont tous _ voilà _ parvenus sous forme de partitions autographes. » On lira avant audition les divers détails de la recherche et les considérations sur le matériau musical de ces différentes pages.

Giuseppe Tartini, né à Pirano en Istrie _ actuellement et désormais en république de Slovénie _, étudie le violon en milieu ecclésiastique, puis le droit à l’Université de Padoue et se trouve mêlé à l’âge de 19 ans à des problèmes judiciaires après un mariage secret avec la protégée d’un Cardinal. Il doit fuir dans un monastère d’Assise, où il participe à l’orchestre de l’opéra. Blanchi, il va se retrouver à Venise, revenir à Padoue avant de voyager à Prague et de s’établir à nouveau sur la rivière Bacchiglione _ à Padoue. Violoniste d’exception, il se produit partout dans la Péninsule avant de devoir arrêter ses concerts pour des raisons de santé. Compositeur prolifique (plus de cent concertos pour le violon), mais aussi théoricien à la base de découvertes sur le son et ses interférences, il est connu avant tout _ en effet _ par une sonate _ virtuosissime _  qui porte le nom de « Trille du diable ». Le résumer à cela serait injurieux, car sa réputation était bien établie de son vivant pour la qualité de sa musique et pour son apport technique, notamment dans la tenue de l’archet. Comme le souligne la notice, « il fut aussi une référence culturelle du monde musical européen de l’époque ». On le comprend aisément en écoutant ce programme à la fois virtuose, brillant, riche au niveau de l’ornementation et de l’harmonie, avec en plus une intelligence confondante de l’accompagnement orchestral.

La Franco-arménienne Chouchane Siranossian est née à Lyon en 1984. Elle s’est formée en Suisse, d’abord à Lyon avec Tibor Varga, puis à Zurich avec Zakhar Bron ; elle devient premier violon de l’Orchestre Symphonique de Saint-Gall. En 2009, elle se perfectionne au Mozarteum de Salzbourg avec Reinhard Goebel qui l’oriente vers la musique baroque, sans qu’elle néglige pour autant les créateurs de notre temps, comme en témoigne son premier CD pour le label Ohms où se côtoient des œuvres d’El Khoury, Tanguy, Rust, Stamitz et Leclair. Chez Alpha, on la retrouve en 2016 _ avec le CD Alpha 255 _ dans un programme intitulé « L’Ange et le Diable » où apparaît déjà Tartini, aux côtés de Locatelli, Leclair et Forqueray. Plus récemment, elle a interprété la première version du Concerto pour violon de Mendelssohn avec Anima Eterna Brugge. On a pu l’écouter l’an dernier au Festival de Wallonie dans plusieurs prestations, dont l’une avec Kristian Bezuidenhout. Le livret montre quelques jolies photographies de cette artiste rayonnante ; auprès d’Andrea Marcon, elle semble respirer la joie de vivre _ en effet, elle est rayonnante ! Ecoutez et regardez lee 2′ 39 de cette excellente vidéo…  _ et de transmettre le message musical. C’est avec le fondateur de l’Orchestre Baroque de Venise, qui existe depuis 1997 et dont la réputation n’est plus à faire _ l’excellent, lui aussi, Andrea Marcon _, que l’idée est venue d’enregistrer, en septembre 2019, au Teatro Eden de Trévise, des concertos de Tartini. Une note, signée conjointement par la soliste et le chef d’orchestre, précise : « Nous avons la chance d’avoir une copie manuscrite des ornements originaux des deuxièmes mouvements des concertos D 44 et D 45. Les autres mouvements lents ainsi que les cadences ont été agrémentés en tâchant de rester fidèle au style _ propre _ de Tartini et s’inspirant de sa palette infinie de trilles, fioritures, rubatos, gammes, appoggiatures, messa di voce… ».

Les partitions choisies sont un bel éventail de la créativité de Tartini à plusieurs moments de son évolution. Ce qui frappe tout au long du parcours, c’est la fraîche élégance des détails, la qualité des contrastes, mais surtout le déploiement du chant violonistique qui entraîne une atmosphère tour à tour intimiste _ surtout, en effet ; en rien extravertie : mélancolique même… _, émotionnelle et finement esquissée. A cet égard, les concertos D 44 et 45, cités plus avant, sont révélateurs de l’attention avec laquelle les protagonistes soignent l’architecture mélodique comme la ligne, que suggèrent les inscriptions autographes de la main du compositeur retrouvées sur les partitions et qui évoquent notamment le poète et librettiste Métastase (1698-1782) : la parole n’est pas loin, et elle se traduit aussi bien dans les murmures de l’archet que dans les accents sonores. On admirera les concertos D 56, aux allures ludiques, et D 96, traversé de courants bondissants ou langoureux _ surtout… Quant à l’inédit, comme l’explique Margherita Canale, la musicologue qui l’a découvert, il reflète la dernière phase compositionnelle de Tartini par « des accompagnements des passages solistes par les seuls violons I et II (sans basse) ».

Qu’ajouter de plus ? On sort de cette expérience musicale comblé, ravi, enchanté _ pas moi, et je le regrette… _, avec, répétons-le, la sensation d’avoir vécu un miracle sonore servi par des partenaires exemplaires, dans une prise de son claire et précise. Un moment de grâce, tout simplement…

Son : 10  Livret : 10  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

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APOGÉE DU VIOLON

L’admirable _ en sa réputation dans l’histoire de la musique, et parmi les musicologues, du moins _ corpus de concertos qu’a laissé Tartini effraye _ par ses réputés difficultés techniques, principalement… _ les violonistes depuis toujours, hélas, car dans son art à la fois évocateur et brillant, il aura porté à son apogée ce violon orphique qu’il aura ravi à Vivaldi _ hum, hum… _ et offert à Mozart par le truchement de son père _ et via le Padre Martini (Bologne, 24 avril 1706 – Bologne 3 août 1784) : Mozart et lui se sont rencontrés par deux fois chez lui à Bologne, lors du premier voyage de Mozart en Italie, de décembre 1769 à mars 1771…

Dans le grand concert du XVIIIe siècle, aucun ensemble écrit pour le violon ne peut l’égaler _ mais selon quels critères, au juste ? de pure technique violonistique ? ou bien de musicalité ?.. _, si ce n’est ceux bien plus concis de Leclair et Mozart. Leclair _ Lyon, 10 mai 1797 – Paris, 22 octobre 1764 _, lui-même violoniste virtuose _ voilà donc ce qui a marqué les musicologues… ; mais pour ma part j’aime beaucoup tout l’œuvre de Leclair ! _, admira sans frein les opus de Tartini, et s’efforça comme lui d’effectuer cette transition du baroque vers le classicisme _ nous y voilà… Cela débuta donc assez tôt dans le siècle… ; après Vivaldi (décédé à Vienne en 1741), toutefois… _, que soulignent avec infiniment de subtilités Choucanne Siranossian et Andrea Marcon, ressuscitant le discours tissé de trilles, de gammes, d’appoggiatures qui font tout le sel de l’art _ mais quid de sa musicalité ? _, de Tartini.

Les concertos sélectionnés ne sont pas parmi les plus courus, et s’y ajoute même un inédit enregistré en première mondiale, un Concerto en sol majeur retrouvé tout récemment _ par Margherita Canale _ à Padoue. Les teintes vénitiennes de ces interprétations élégantes _ certes, presque trop… _ mettent l’accent sur l’héritage vivaldien _ hum, hum… _, alors qu’au long du disque _ Ricercar RIC 414 _ d’Evgeny Sviridov _ mais qui ne m’a pas touché davantage, hélas ! _, ce sont des concertos de plus grand apparat qui sont choisis, majestueusement phrasés par l’archet généreux qui caresse un sublime violon signé par Januarius Gagliano : la profondeur de son médium, son aigu de voix humaine, donnent un relief saisissant _ j’y suis resté insensible ! _ au Concerto en ré majeur, le D. 24, où l’on croit la cadence du Finale de la main de Pisendel) : un grand concerto aux envolés magnifiques. Tout le disque est éblouissant _ pas à mes oreilles, ni à mon goût, hélas… _, autant par la virtuosité que par la poésie : écoutez seulement l’Allegro du Concerto en sol mineurEvgueny Sviridov intègre un Capriccio de Nardini. Merveille de style galant _ voilà, nous y sommes : et c’est bien ce style galant qui m’agace et me déplaît souverainement… _, le Concerto en mi majeur inspire aussi au violoniste toute une poésie de babillages, trilles, gammes, appogiatures, qu’il lie d’un seul trait _ toujours le critère de la pure virtuosité technique du violon….

Mais il faut aussi entendre Evgeny Sviridov délesté des décors de l’orchestre, découvrir _ en son CD « Giuseppe Tartini Sonatas Op. 1 » Ricercar RIC 391 _ l’autre face du génie de Tartini, qui donna naissance à d’étonnantes sonates narratives. Le jeune violoniste laisse de côté la plus célèbre (Le Trille du Diable), lui préférant la Didone abbandonata et sa poésie mélancolique _ voilà le trait hélas dominant (à la Dowland : « Semper Dowland, semper dolens« …) selon moi, de la musique de Tartini ; et qui m’y rend allergique… _, œuvre qui touche au sublime et qu’il joue avec une élégance folle. Le disque s’ouvre par une vocalise de violon inspiré par un poème du Tasse, et donne le ton d’un album fascinant où les trois musiciens ouvrent les portes de cet univers secret avec art. Un aussi beau doublé ne doit pas rester sans suite.

Les ultimes Sonates que Tartini coucha dans la solitude de sa vieillesse sont des merveilles de nostalgie _ encore, et décidément : soit une anticipation de ce que sera même le romantisme pleurnichard…  _ et d’invention, elles figurent au nombre de ses œuvres les moins courues. Pour en faire mieux sentir la singularité, David Plantier et Annabelle Luis _ en leur CD« Vertigo _ the last Sonatas« , le CD Muso MU040 ; dont l’écoute d’extraits ne m’a pas davantage séduit… _ contrastent les quatre ultimes opus avec une Sonate antérieure de trente année, et lui font succéder la Sonate en imitation de la guitare portugaise qui est l’un des ouvrages les plus étonnants jamais coulés de la plume du compositeur et dont les effets sont autrement poétiques que ceux du Trille du Diable. La singularité du génie de Tartini, parvenu à une liberté souveraine, et tirant des sonorités inouïes des deux instruments de la même famille, éclate tout au long de cet album précieux qui laisse espérer que le temps d’une juste réévaluation de son œuvre soit enfin venu.

LE DISQUE DU JOUR

Giuseppe Tartini(1692-1770)


Concerto pour violon, cordes et basse continue en mi mineur, D. 56
Concerto pour violon en la majeur, D. 96
Concerto pour violon en ré mineur, D. 45
Concerto pour violon en sol majeur
Concerto pour violon en ré mineur, D. 44

Chouchane Siranossian, violon
Venice Baroque Orchestra
Andrea Marcon, direction


Un album du label Alpha 596

Giuseppe Tartini


Concerto pour violon en ré majeur, D. 24
Concerto pour violon en sol mineur, D. 85 (Op. 1 No. 1)
Concerto pour violon en la majeur, D. 89 (Op. 1 No. 6)
Concerto pour violon en mi mineur, D. 55
Concerto pour violon en mi majeur, D. 48

Evgeny Sviridov, violon
Millenium Orchestra
Un album du label Ricercar RIC414

Giuseppe Tartini


Sonate XV en sol majeur, B. G3 « del Tasso »
Sonate X en sol mineur, B. g10 detta « Didona abandonata »
Sonate XII en fa majeur, B. F4
Sonate V en mi mineur, B. e6
Sonate XVII en ré majeur, B. D2 « del Tasso »
Pastorale en la majeur, B. A16

Evgeny Sviridov, violon
Davit Melkonyan, violoncelle
Stanislav Gres, clavecin


Un album du label Ricercar RIC391

Giuseppe Tartini


Vertigo – The Last Violin Sonatas

Sonate pour violon et violoncelle en la mineur, Brainard a8
Sonate pour violon et violoncelle en la majeur, Brainard A4
Sonate pour violon et violoncelle en ré mineur, Brainard D19
Sonate pour violon et violoncelle en ré mineur, Brainard d5
Sonate pour violon et violoncelle en ré majeur, Brainard D9

David Plantier, violon
Annabelle Luis, violoncelle


Un album du label Muso MU040

Photo à la une : le violoniste Evgeny Sviridov – Photo : © DR

 

Trop peu d’affinités, donc, pour ce qui me concerne, avec l’idiosyncrasie musicale de Giuseppe Tartini ;

à la glorieuse exception, toutefois, de ma part, de son enthousiasmant Concerto à 5, en Fa majeur, D.61, du CD « Duello d’Archi a Venezia« , Alpha 935 :

une fabuleuse réussite d’interprétation comme de musique, qui met, elle, parfaitement en joie…

Ce jeudi 1er juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Pour en apprendre un peu plus sur Johannes Pramsohler, violoniste et créateur des disques Audax

13mai

Voici déjà quelques temps que j’apprécie les CDs Audax

que publie _ et interprète parfois _ le violoniste italien (du Sud-Tyrol) Johannes Pramsohler :

ainsi les excellents CDs

Bach & Weiss, par Johannes Pramsohler, baroque violin, et Jadran Duncum, baroque lute (Audax ADX 13706),

Handel Works for keyboards, par Philippe Grisvard (ADX 13709),

French Sonatas for Harpsichord and Violin, par Philippe Grisvard et Johannes Pramsohler, violin (ADX 13710)

et German Cantatas with Solo Violin, par Nahuel Di Pierro, basse, Johannes Pramsohler, violon, Andrea Hill, soprano, Jorge Navarro Colorado, tenor, Christopher Purves, basse, et l’Ensemble Diderot (ADX 13715) _ sur ce dernier CD cf mon article du 28 avril dernier : _

Or voici que le site Res Musica vient de publier hier un excellent article sur le double CD Audax 13710 des Sonates françaises pour clavecin et violon, par Philippe Grisvard et Johannes Pramsohler.

Le voici donc _ avec l’ajout de menues farcissures miennes, en vert _ :

 

SONATES FRANÇAISES POUR CLAVECIN AVEC ACCOMPAGNEMENT DE VIOLON

CD, Musique de chambre et récital

Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711-1772) : Sonata I en sol mineur ; Sonata VI en la majeur.

Louis-Gabriel Guillemain (1705-1770) : Sonata V en ré majeur ; Sonata VI en sol mineur ; Sonata IV en do mineur.

Jacques Duphly (1715-1789) : « La de Casaubon », « La du Tailly », « La de Valmallette » ; « Ouverture », « La de May », « La Madin ».

Michel Corrette (1707-1795) : Sonata IV en mi mineur.

Claude Balbastre (1724-1799) : Sonata I en sol majeur.

Luc Marchand (1709-1799) : Première suite avec accompagnement de violon en la mineur.

Charles-François Clément (c. 1720-1782) : Sonata I en do mineur.

Philippe Grisvard, clavecin ; Johannes Pramsohler, violon.

2 CD Audax Records.

Enregistré en avril 2016 au SWR Studio Kaiserslautern.

Textes de présentation en français, anglais, allemand et japonais.

Durée : 1:50:23

Le claveciniste Philippe Grisvard et le violoniste Johannes Pramsohler nous présentent, pour leur troisième album enregistré en duo, une dizaine de sonates pour clavecin avec accompagnement de violon, genre en vogue sous le règne de Louis XV, dans les années 1740-1760. En offrant un beau bouquet de compositions méconnues, parmi lesquelles cinq sont des premiers enregistrements mondiaux, cette production est une aubaine _ mais oui ! _ pour tous les admirateurs de la musique d’alors.

L’âge du baroque tardif a vu naître en France un nouveau genre de musique instrumentale _ voilà ! _ : la sonate pour clavecin avec accompagnement de violon. Une telle combinaison d’instruments, sous forme de sonates en trio, avait déjà été proposée par Jean-Sébastien Bach pour son cycle BWV 1014-1019, composé aux alentours des années 1720-1723, pour lequel, cependant, la voix supérieure du clavecin et celle du violon étaient mises sur un pied d’égalité, tandis que pour les sonates françaises, la partie de violon était estimée de moindre importance par rapport au rôle tenu par l’instrument à clavier _ telle est donc la différence…

En parlant de cette innovation, nous pouvons résolument utiliser le terme _ expression plutôt _  de « révolution esthétique » car, jusqu’alors, dans la musique pour plus d’un instrument, que ce soient des sonates ou des suites, l’accompagnement était destiné à être réalisé par le continuo _ voilà. Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville décide – en vue d’explorer de nouvelles manières de s’exprimer – de confier au clavecin aussi bien la basse qu’une voix de dessus, et de les enrichir de « commentaires » donnés par une seconde voix de dessus exprimée par le violon. C’est ainsi qu’il fait publier, en 1740, ses Pièces de clavecin en sonates avec accompagnement de violon. Dans l’avant-propos de ce recueil, il note : « Il y a peut-être plus que de la témérité à donner aujourd’hui de la musique instrumentale au public. On a mis au jour depuis quelques années un nombre si prodigieux de sonates de toute espèce qu’il n’est personne qui ne croie que ce genre est épuisé. Cependant […] je me suis appliqué à chercher du nouveau » _ oui.

D’une part, les sonates de Mondonville présentent une division en trois mouvements empruntée à la sonate italienne ; d’autre part, on y perçoit un certain raffinement des lignes et le culte du détail caractéristiques de la musique française de l’époque _ bien sûr !

Le paysage de la musique de chambre en France fut dès lors changée de manière considérable. D’autres recueils, publiés par les contemporains de Mondonville, lui ont succédé : les Sonates pour le clavecin avec un accompagnement de violon que Michel Corrette fait éditer en 1742, pour lesquelles il affirme qu’elles peuvent être exécutées « sur le Clavecin seul », et celles de Charles-François Clément (1743), pour lesquelles la position du violon est affermie (du moins d’après leur titre : Sonates en trios pour un clavecin et un violon) par rapport à celle du clavecin. En 1745 voient le jour les sonates de Louis-Gabriel Guillemain, pour lesquelles la partie de clavecin, très athlétique, surpasse, du point de vue des difficultés techniques, celle laissée par Mondonville ; puis en 1747 sont publiées les suites de Luc Marchand, dans lesquelles le clavecin se voit rejoint non seulement par le violon, mais également par d’autres instruments ; en 1748 paraissent trois Pièces de Clavecin en Sonates avec accompagnement de violon de Claude Balbastre ; finalement, Jacques Duphly fait sortir, en 1756, son Troisième Livre de Pièces de Clavecin, renfermant six courtes pièces écrites selon le modèle laissé par Mondonville _ cet éclairage historico-musicologique est très intéressant.

Prestations puissantes, élégantes et ciselées

Pour ce qui est des exécutions, Philippe Grisvard et Johannes Pramsohler mènent une conversation galante _ voilà _ qui, malgré un léger manque de théâtralité rhétorique, convient étonnamment au goût français, en s’inscrivant dans la tradition qui consiste à mettre en lumière aussi bien la beauté même de la musique que la richesse des nuances _ oui : un goût français _ dont celle-ci s’accompagne. C’est ainsi qu’on admire la netteté du contour et la maîtrise des ornements (dont la majorité ont été annotés de la main des compositeurs _ c’est à souligner : marquant un tournant d’époque _), de même que l’importance de la mise en valeur de la pulsation _ oui _ et, pour la plupart des mouvements extrêmes, d’une certaine vivacité des tempi. Celle-ci accuse le côté expressif, voire émotif _ oui : anticipant en quelque sorte le moment de l’empfindsamkeit _ de ces partitions, et pourtant, n’affecte pas leur charme ni leur grâce, en y apportant au contraire de la fraîcheur _ très bien.

Pour la plupart des compositions présentées dans cet album, le violon s’implante _ voilà _ au sein du tissu acoustique du clavecin afin de perfectionner la partie de ce dernier, conçue comme un centre de gravité _ voilà _ autour duquel tourne son satellite. Si dans cet enregistrement l’instrument à clavier se caractérise par un geste simple et introverti (ce qui ne veut pas dire qu’il a tendance à se retirer du dialogue), à savoir étudié plutôt que spontané, et équilibré plutôt qu’impératif – en quelque sorte, le contraire de ce que nous propose Christophe Rousset dans sa récente interprétation de la Sonate en sol majeur de Balbastre –, le violon se montre un meneur de jeu éblouissant _ voilà _ de virtuosité (sonates de Mondonville et Guillemain), de poésie (celle de Corrette), de tendresse (celle de Clément) et de douceur (la suite de Marchand et la sonate de Balbastre) _ c’est remarquablement dégagé.

Accordés à une fréquence de 415 Hz, les deux musiciens déploient une belle sonorité baroque, se distinguant par un large éventail de teintes et, surtout pour le violoniste – jouant d’un instrument construit en 1713 par Pietro Giacomo Rogeri, ayant appartenu à Reinhard Goebel à l’époque des plus grands succès de Musica Antiqua Köln – par une articulation agile, précise et, à la fois, élégante _ à la française. Les phrasés « chantants » de Johannes Pramsohler impressionnent autant par la délicatesse et la densité que par la clarté, voire la luminosité du timbre _ mais oui. On doit admettre que cet instrument a trouvé un digne successeur ! _ à Reinhard Goebel…

Voici une belle proposition discographique _ oui _ dont ne peuvent se passer les amoureux de la musique instrumentale baroque _ en un des pans méconnus. En trouvant le plaisir d’écouter les enregistrements offerts par le tandem de luxe Philippe Grisvard-Johannes Pramsohler, il faut espérer que ce répertoire continuera à être exploré.


Merci à Maciej Chiżyński de cette qualité d’écoute,

au service de l’intelligence de sa propre curiosité musicale.

..

Et la passion de la curiosité est immensément féconde.

Et merci à Res Musica.

Ce dimanche 13 mai 2018, Titus Curiosus – Francis Lippa

Douceur (de la musique) française _ ou pas

30jan

En partie, on va le découvrir, « à contrechamp » de ma série d’articles sur la musique française _ ou de goût (ou style) français _,

voici deux passionnantes et magnifiques productions (de CDs) :

un double CD Sanctus (marque américaine) : « Six Sonatas for violoncello and continuo, opus 3 » de Carlo Graziani _ né (à une date inconnue) à Asti, et mort en 1787 à Postdam _, interprétées par l’excellentissime violoncelliste Antonio Meneses _ cello _& les continuistes Rosana Lanzelote _ harpsichord _ et Gustavo Tavares _ cello, too, but at continuo _ ;

en un (double, pour 91 minutes) CD Sanctus SCS 002/003, enregistré au « Studio 3 of the Swedish Broadcastin Corporation« , à Stockholm du 26 au 29 octobre 1994 : un bijou…


Et un CD Oehms Classics (de marque allemande) : « The ENIGMATIC ART of Antonio and Francesco Maria Veracini« , une série de « Sonatas« , des « plus importants représentants de l’Ecole florentine de violon » _ tant au niveau du jeu interprétatif, que de la composition _, l’oncle, Antonio, et le neveu, Francesco Maria : Veracini, tous deux (1659-1733, pour l’oncle ; 1690-1768, pour le neveu) ; interprétées par, au tout premier chef, en violon _ Barockvioline _ soliste, Rüdiger Lotter ; et l’ensemble Lyriarte, constitué ici de Dorothée Oberlinger, à la flûte à bec _ Blockflöte _ ; Axel Wolf, au luth _ Laute _ ; Kristin von der Goltz, au violoncelle _ Barockcello _ ; et Olga Watts, au clavecin _ cembalo _ : un non moins très remarquable CD Oehms Classics OC 720 , enregistré les 14, 17, 18 & 19 décembre 2007 à la Himmelfahrtkirche de München-Sendling : une petite merveille de finesse…

Les données biographiques sur Carlo Graziani demeurent à ce jour très lacunaires : sa naissance à Asti, nous l’induisons de sa signature « Astignano » : « d’Asti  » ;

et « on ignore« , donc, « toujours où il demeura jusqu’au moment où _ comme bien d’autres musiciens de la péninsule italienne franchissant les Alpes pour faire carrière ailleurs que chez eux, alors _ on le retrouve à Paris, où en 1747 il joua au « Concert Spirituel«  _ fondé en 1725 : sur cette institution cruciale pour l’Histoire même de la musique (en Europe), cf le riche et passionnant travail de Constant Pierre : « Histoire du Concert Spirituel (1725-1790)« , aux Éditions Heugel en 1975, réédité en 2000.

Lequel « Concert Spirituel », « en instaurant le concerto solo« , « contribua beaucoup à attirer des musiciens étrangers en France, où ni l’église ni l’opéra ne donnaient une chance au virtuose _ instrumentiste _, comme c’était le cas _ aussi ! _ en Italie » : « l’artiste soliste _ de talent _ n’avait _ guère _ d’autre choix _ tant économique qu’artistique : de « carrière » _ que celui de s’adresser à la salle de concerts publique.« 

De plus :

« en outre, comme le concerto solo avait aussi peu de possibilités d’évoluer en dehors du cadre _ et des genres : principalement les « suites » (genre français par excellence) _ ;


en dehors du cadre français d’origine, il fallait _ à l’interprète _ se tourner vers l’étranger _ surtout l’Italie _ pour des modèles _ de composition… De cette façon, la nouvelle organisation attirait des virtuose de toute l’Europe, (…) encourageant ainsi l’essor du concerto solo en France.« 


C’est ainsi que Graziani, après son succès au « Concert spirituel » en 1747, « fut engagé pour jouer dans l’orchestre du marquis de la Pouplinière, où il était premier violoncelliste avec un cachet annuel de 1 200 livres« .

Et « le 14 décembre 1758, Graziani obtint une bourse de dix ans pour « la musique instrumentale. Cette année coïncid(ant) avec la composition de son premier recueil de « Sonates pour violoncelle avec contrebasse » (opus 1).«  Ainsi « Graziani contribua (-t-il) à développer le style français de musique « galante ». Il introduisit _ aussi _ en France les rythmes iambiques, les motifs de « chasse » et les trilles que l’on retrouve dans les « Sonates » parisiennes opus 1 et opus 2 pour violoncelle et basso continuo (1758), dix ans avant que les compositeurs français ne commencent à les utiliser _ à leur tour (et à sa suite) _ dans leurs œuvres. A cette époque, un style musical européen plus vif et plus varié _ « galant » _ apparut qui reflétait le goût du jour pour le plaisir et les festivités.

Ce nouveau style remplaça lentement mais surement la pompe et la solennité des années précédentes par une musique pleine de gaîté et de frivolité. De courtes compositions basées _ encore _ sur des pas de danse _ mais nouvelles : la France est aussi le pays par excellence de la danse ! _ ne cesssaient de gagner en popularité ; et les « allemandes » et « sarabandes » _ des « suites » du passé (depuis plus d’un siècle : vers 1640… ; à peu près vers l’arrivée de Froberger à Paris…) _ se libéraient de la gravité intellectuelle qui les avaient caractérisé lors du siècle précédent. » Ainsi « un style plus « galant » limita (-t-il) la basse à un rôle plus modeste _ au sein, ou en dehors, du continuo. C’était l’âge d’or du menuet qui, par sa grâce délicate, résume ce style nouveau _ présent aussi, alors, chez Jean-Chrétien Bach et Wolfgang Amadeus Mozart…


Mais en décembre 1762, suite à la mort de soin mécène _ La Pouplinière _, l’orchestre fut dissous ; et Graziani, sans travail, dut quitter Paris

_ non sans avoir été marqué par ces influences françaises : en profondeur, et durablement ; ainsi que cela s’entend si bien en l’opus berlinois…


Graziani commence alors une nouvelle vie, comme violoncelliste virtuose itinérant, jouant dans de nombreuses capitales européennes. Le 17 mai 1764, il se trouve à Londres (…) il rencontra le jeune Wolfgang Amadeus Mozart. (…) En 1770, on le retrouve à Francfort.


A la mort _ le 15 septembre 1772 _ du gambiste Ludwig Christian Hesse, Graziani déménagea à Berlin _ pour servir « le prince héritier de Prusse (le futur Frédéric-Guillaume II)« .

Et c’est ainsi que,

« bien que non datées,

les partitions existantes de l’opus 3 portent l’en-tête suivant » :

« SIX SONATES / A / VIOLONCELLE & BASSO /Dediés / A SON ALTESSE ROYAL / Monseigneur Le / PRINCE de PRUSSE, / Par / CHARLES GRAZIANI, / d’ASTI / Musicien de la Chambre de S.A.R. / Monseigneur le Prince de Prusse / Œuvre Troisième. / Chés JEAN JULIEN HUMMEL, à Berlin avec Privilège du Roi, à Amsterdam au Grand / Magazin de Musique / et / aux Adresses ordinaires ».

Quant aux œuvres des deux florentins Antonio & Francesco Maria Veracini,

il s’agit _ purement ! _ de (spendide) musique italienne ;

et tout aussi splendidement interprétées : avec feu et très grande délicatesse… :

le (grand) mérite de ce CD Oehms Classics : « The ENIGMATIC ART of Antonio and Francesco Maria Veracini« , à l’initiative de Rüdiger Lotter,

étant de nous faire approcher au plus près de l' »énigme » des sources idiosyncrasiques du génie _ poïétique… _ qui présida,

sur un espace de temps tout à fait intéressant et significatif,

à leur création (et filiation « florentine »)  :

1691, pour l’opus 1 ;

1694, pour l’opus 2,

d’Antonio Veracini ;

1716, pour la « Sonata Nona a violino o flauto solo e basso«  (in « 12 Sonates a Flauto solo, e Basso », dédiées au prince Frédéric-Auguste, à Venise, le 26 juillet 1716 ; et présentes à la Stadtbibliothek de Dresde) ;

1721, pour l’opus 1 des « Sonates pour violon avec basse continue », publiées à Dresde en 1721, et dédiées au roi de Pologne et Saxe Auguste le Fort [réédité à Amsterdam, chez Jeanne Roger, et Roger et Le Cène en 1730 ; et à Paris, chez Leclerc le cadet ; ainsi qu’à Londres, chez I. Walsh, en 1733] ;

1744, pour l’opus 2 des « Sonate accademiche a violino solo e basso« , dédiées au roi Frédéric-Auguste III (devenu à son tour, après son père, par élection, roi de Pologne en 1733) ; et publiées aussi à Londres,

de Francesco Maria Veracini

Bref : ces deux productions discographiques (Sanctus & Oehms Classics)

sont toutes les deux

magnifiques !

Et permettent de clairement distinguer, au passage,

ce qui caractérise un style italien (florentin !) assez préservé

_ en Angleterre (Londres, à plusieurs reprises, à partir de 1714 : c’est une des capitales européennes de la musique : Francesco Maria Veracini y réside de 1733 à 1738 ; il y est encore en 1744) ;

en Allemagne (Francfort _ en 1711, pour les fêtes du couronnement de l’empereur Charles VI _, Düsseldorf, en 1715, Dresde, surtout : de 1717 à 1722, dans l’orchestre _ brillantissime ! _ d’Auguste II le Fort, avec Johann Georg Pisendel

_ avec cette nuance (intéressante) que

l’orchestre de la cour royale de Dresde est alors _ depuis 1709 _ dirigé par la kappelmeister, violoniste, maître de ballet et compositeur Jean-Baptiste Volumier (1670-1728), de naissance flamande, mais formé à la cour de Versailles, qui sert, et avec enthousiasme, le « goût français » d’Auguste le Fort ; la nuance est à remarquer _ ;

fin, ici, des références allemandes)

et Autriche (plus spécifiquement Bohème : Chlumec, en 1722, Prague : pour le couronnement _ fastueux ! _ de l’empereur Charles VI comme roi de Bohème, cette fois, en 1723) ;

en Italie aussi (Rome _ où il rencontre Arcangelo Corelli, en 1699 _, Venise _ en 1717, il fréquente Giuseppe Tartini (qui avait été très impressionné par lui lors d’un concert dès 1712) et où il rencontre le prince héritier Frédéric-Auguste, qui va le faire venir pour l’orchestre royal à Dresde) _, Pise, de 1745 à 1750, Turin, en 1750, en plus de sa ville de Florence, qui demeure sa cité ; où il revient régulièrement ; réside à partir de 1750 ; est maître de chapelle de plusieurs églises à partir de 1755 ; et finira par se retirer, après 1760) ;

et jamais _ de fait ! _ en France ;

dans le cas de Francesco Maria Veracini (Florence, 1er février 1690 – Florence, 31 octobre 1768) ;

et exclusivement à Florence,

où il se consacre beaucoup à son importante école de violon, Via di Palazzuolo,

dans le cas d’Antonio Veracini (Florence, 17 janvier 1659 – Florence, 24 octobre 1745),

oncle et professeur de son brillant neveu _ ;

Bref

_ je reprends l’élan de ma phrase _,

ces deux productions discographiques permettent de clairement distinguer

ce qui caractérise un style italien (et florentin !) assez préservé, donc, du goût français ;

et le raffinement des « Goûts réunis« ,

sous (délicieuse !) influence française, lui...


Même si le plaisir (des sens, à l’audition de ces musiques) déborde _ et très largement _ la pure satisfaction de la seule curiosité historienne…

Le jeune _ il est né en 1969 _ Rüdiger Lotter, violoniste,

comme le chevronné _ et grand ! , né en 1957 à Recife, au Brésil _ Antonio Meneses, violoncelliste,

sont, tous deux, d’assez extraordinaires interprètes

de ces répertoires :

le plaisir que nous en éprouvons

est intense :

vivement recommandé !..


Titus Curiosus, ce 30 janvier 2009


Post-scriptum
(le 31) :

à propos du CD « Veracini« , ceci, tout frais,

dans les magazines musicaux de ce mois de février-ci :

d’abord, sous la plume de Frank Langlois, dans « Le Monde de la Musique« , page 84 :

« Au sein de la production violonistique italienne au XVIIIème siècle, ce disque nous incite à réévaluer _ sans doute _ l’art de Veracini l’oncle (florentin) et surtout de Veracini le neveu, véritable européen _ oui ! _, de Florence à Londres, Dresde ou Prague. Ce dernier compte au nombre de ces inlassables voyageurs dont les itinérances, loin de les éparpiller, ont concentré la sève créatrice«  _ oui ! l’expression, pour désigner le génie (« poïétique« ), est on ne peut mieux parlante !

A propos des deux « Sonate accademiche » que Frank Langlois apprécie tout particulièrement  en ce disque, cette précision-ci : « Sans doute par « académique » faut-il entendre la familiarité avec une conception platonicienne du Beau _ empruntée peut-être (en 1699) au modèle corellien ; et si marquante à Florence, la ville de Marcile Ficin, l’importateur, via la réception de ceux qui fuirent la Constantinople (prise en 1453) des traditions « académiques » platoniciennes… Le Beau est en effet le premier sentiment qui s’impose ici à l’auditeur _ nous l’avons constaté ; et célébré ! On dirait du Corelli moins abstrait, mais d’une aussi haute tenue, et nourri d’une impérieuse vie sensible et mentale.« 

Veracini avait déjà été servi, avec excellence _ oui ! _ par Enrico Gatti (CD Arcana A 27, en 1996). Rüdiger Lotter est de la même trempe. Certes moins olympien, mais doté d’une identique maîtrise technique, il offre une sonorité charnue, une intuition plus présente et une égale tenue d’archet. Offrant un continuo vif-argent _ oui ! _ (Kristin von der Golz y tient un rôle moteur), « Lyriarte » contribue heureusement à de disque essentiel _ je bats des mains pour applaudir à cette « écoute » du beau travail réalisé en ce disque !


Et Roger-Claude Travers dans « Diapason« , page 98 :

« Si l’on en croit Charles Burney _ en son « Voyage musical dans l’Europe des Lumières«  : à consulter toujours, quand on le peut, sur l’époque (paru aux Éditions Flammarion en avril 2003) _ qui entendit jouer Francesco Maria Veracini, sa sonorité était puissante et claire, la tenue de l’archet ferme, au service d’une ornementation riche et expressive.

Parmi les interprètes d’aujourd’hui, Enrico Gatti (CD Arcana) s’en approcherait peut-être un peu, s’il savait ajouter ce soupçon _ mais pas plus ! _ qui offre son parfum subtil à cette musique magnifique. Sa diction épurée oublie le grain de folie, qui fait aussi défaut à un Holloway (CD ECM). (…) C’est dire combien Rüdiger Lotter était attendu. » Mais, tempère son enthousiasme Claude-Roger Travers, « l’imagination ornementale est _ certes _ un peu fantasque _ ce qu’il faut ! _, mais pas assez aboutie ; le coup d’archet lisse, agréable, mais sans _ assez de _ mordant ; le vibrato, un peu tendre. Un anti-Gatti _ en quelque sorte _, dont la réflexion manque _ à son goût, un peu trop _ d’ancrage...


En revanche, « le travail d’équipe de « Lyriarte » est _ lui, proprement _ enthousiasmant : cohésion, mise en place, saveur des conceptions du continuo, avec de délectables tenues d’orgue. La flûte à bec de Dorothée Oberlingen, très juste d’intonation, est particulièrement ravissante.

Bienvenue au catalogue, enfin, à Antonio, vieux sage florentin, oncle de Francesco Maria, pas si éloigné par la langue d’un Corelli, oncontournable référence… _ en effet !

Voilà qui conflue assez bien avec mon enthousiasme…

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