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Ce que le philosopher aujourd’hui peut apprendre du philosopher des Stoïciens tardifs : Thomas Bénatouïl mardi prochain à la Librairie Mollat pour la seconde conférence de la saison 2009-2010 de la Société de Philosophie de Bordeaux

07nov

Mardi prochain, 10 novembre, les Salons Albert-Mollat de la rue Vital-Carles recevront Thomas Bénatouïl sur le sujet, passionnant, de « Peut-on encore être stoïcien ? A propos de la philosophie comme pratique« …

« Pourquoi s’intéresser aujourd’hui à Épictète et Marc Aurèle ? Après avoir présenté la spécificité des deux représentants les plus connus du stoïcisme par rapport aux autres philosophes de l’Antiquité, la conférence examinera dans quelle mesure leur conception pratique de la philosophie est toujours pertinente. Le retour actuel de la « philosophie comme manière de vivre » est-il fidèle au stoïcisme impérial ? et philosophiquement intéressant ? Thomas Bénatouïl donnera plusieurs raisons d’en douter _ ah ! ah ! _ et suggèrera une autre manière _ voilà… _ de faire usage du stoïcisme » _ passionnant !..

Nul doute que les travaux récents de Thomas Bénatouïl, « Les Stoïciens III _ Musonius, Épictète, Marc-Aurèle« , comme « Faire usage : la pratique du stoïcisme« , vont nous permettre, en cette occurrence et opportunité _ à ne pas laisser passer… _ de mieux nous _ chacun… _ confronter, grâce aux interrogations que cette conférence ne va pas manquer de susciter et provoquer, même _ on ne peut plus directement ! malicieusement même, peut-être… _, à ce que peut être (ou ne peut pas être : nous l’apprendrons surtout alors !..) l’activité de « philosopher » aujourd’hui, en regard (ou pas) à l’activité de « philosopher » des Stoïciens tardifs, et les plus célèbres (dont soient les écrits même nous ont été conservés et transmis _ c’est le cas du « Journal » personnel : « pour lui-même » ! de l’empereur Marc-Aurèle _ ; soient les pratiques, les conversations _ ou « entretiens« , voire « dialogues« … ; ou discours, ou simples paroles, sinon « leçons« _ nous ont été d’une quelconque façon, parfois tant bien que mal, « rapportés » par d’autres : disciples, élèves, admirateurs ou fidèles _ dans le cas d’Epictète ou de Musonius… La tradition philosophique faisant, à côté (et en plus) des chaos et violences de l’Histoire (peu avare à ces égards), ses « tris« …

Probablement Thomas Bénatouïl évoquera-t-il, au moins, les pistes tracées ces derniers temps, quant au sens même du « philosopher » lui-même dans les diverses Antiquités (gréco-latines, pour commencer…), par Pierre Hadot : auteur des « Exercices spirituels et philosophie antique » et d' »Apprendre à philosopher dans l’Antiquité » et « Introduction aux Pensées de Marc-Aurèle : la Citadelle intérieure » ; cf aussi ses entretiens « La Philosophie comme manière de vivre« , avec Jeannie Carlier et Arnold Ira Davidson…

Voici une appétissante et fort judicieuse présentation des travaux de Thomas Bénatouïl accessible sur le site des Agendas de Mollat.com :

Mardi 10 Novembre 2009 à 18h00 : Thomas Bénatouïl

Les derniers stoïciens…


Image manquante

Épictète (50-130) et Marc Aurèle (121-180) sont les derniers, mais les mieux connus, des Stoïciens de l’Antiquité _ avec Sénèque (vers 4 av. J.-C. – 65 apr. J.-C.)… Né vers 300 avant Jésus-Christ, le stoïcisme, fondé par Zénon de Kition à Chypre, a dominé la scène intellectuelle grecque puis romaine, influencé les idées sociales et politiques durant cinq siècles _ donnée factuelle à apprécier… Son enseignement repose sur une tripartition de la philosophie en physique, éthique et logique. Mais les ouvrages de la grande majorité des auteurs stoïciens ont été _ hélas _ perdus : on ne les connaît que par ce que d’autres auteurs rapportent _ voilà _ d’eux. Pour Épictète et Marc Aurèle, qui ont vécu aux Ier et IIe siècles après Jésus-Christ, leur pensée a été préservée _ jusqu’à nous _ grâce à des disciples _ oui _ qui ont mis par écrit leur enseignement (pour Épictète et Musonius) ou conservé (pour Marc Aurèle) le « journal philosophique » qu’il tenait et qui constitue l’une des œuvres littéraires et intellectuelles les plus singulières _ oui ! _ de l’histoire, non seulement parce que son auteur était l’empereur de Rome, mais aussi par son style _ admirable ! _ et son approche _ bousculante _ de la philosophie.

Le stoïcisme impérial est souvent réduit _ par la « tradition«  ou l’enseignement le plus courant _ soit à un résumé des premiers stoïciens _ seulement... _ ; soit à une philosophie purement éthique, qui aurait délaissé toute spéculation logique et cosmologique. En réalité, ces stoïciens-là se concentrent _ c’est une « focalisation » ! _ sur la dimension pratique et pédagogique de la philosophie _ voilà ! un besoin s’en faisant alors urgemment « sentir« Ils se demandent ce que signifie concrètement « être stoïcien » : s’agit-il seulement d’adhérer à certaines thèses ? S’agit-il aussi de les appliquer ? Comment les mettre en œuvre dans notre vie quotidienne ? Rares sont les philosophes, même dans l’Antiquité _ qu’en pense un Pierre Hadot ?.. _, qui traitent sérieusement des questions d’intendance intellectuelles !

Si Épictète et Marc Aurèle ne négligent pas les démonstrations des principes, ils montrent qu’elles ne suffisent pas. Et cela ne concerne pas seulement l’éthique. Comprendre la physique suppose de voir le monde à travers _ aussi _ ses principes. Maîtriser la logique exige d’appliquer ses règles, quel que soit le sujet _ cela menant forcément très loin… Ce dernier stoïcisme a influencé discrètement, mais de manière décisive, des auteurs aussi divers que Montaigne, Spinoza, Shaftesbury, Kant, Nietzsche, Deleuze ou Foucault _ voici des ouvertures passionnantes !..

Thomas Bénatouïl est maître de conférences à l’université de Nancy, spécialiste de philosophie antique, en particulier du stoïcisme. Il a publié « Le Scepticisme » (G-F, collection « Corpus« , 1997), « Matrix, machine philosophique » (2003, avec Alain Badiou, Élie During, Patrick Maniglier, David Rabouin et Jean-Pierre Zarader), « Faire usage : la pratique du stoïcisme » (2006) et « Les Stoïciens III _ Musonius, Epictète, Marc-Aurèle » (paru le 15 septembre 2009).

A mardi !

Ne manquez pas une « rencontre » passionnante : quand un (jeune) philosophe au travail vient jusqu’à vous

vous présenter l’état présent de sa recherche _ probe, exigeante, et on ne peut plus concrète par ses nécessaires « applications » pratiques !!!

Au fait,

quelle saveur a donc le « vivre » sans le « philosopher » ?..

Titus Curiosus, ce 7 novembre 2009

Mario Vargas Llosa et la « cité perverse » selon Dany-Robert Dufour

18oct

Comme pour illustrer l’analyse que l’excellent Dany-Robert Dufour,

l’auteur de « L’Art de réduire les têtes _ sur la nouvelle servitude de l’homme libéré, à l’ère du capitalisme total« , en 2003, « On achève bien les hommes _ de quelques considérations actuelles et futures de la mort de Dieu« , en 2005 et « Le Divin marché _ la révolution culturelle libérale« , en 2007 _ tous d’excellente lucidité _,

propose ce mois d’octobre-ci, 2009, avec « La Cité perverse _ libéralisme et pornographie«  (chez son éditeur Denoël) _ dont s’impose l’urgence, et pas rien que médiatico-circonstancielle (sur ce terrain, un clou chassant très vite l’autre : « tournez-manèges !« …), de la lecture !

voici, ce dimanche 18 octobre 2009, un article fort intéressant _ sur un regard autre que franco-français, en quelque sorte ; même s’il n’est pas non plus du point de vue « de Sirius« _ de Mario Vargas Llosa _ l’auteur de « La Ville et les chiens« , en 1963, et de « La Maison verte« , en 1966 ; ainsi que de « Conversation dans la cathédrale« , en 1969… _, en « tribune libre » de El Pais :

« Desafueros de la libido« ,

avec pour sous titre »Los casos del cineasta Roman Polanski, el ministro de Cultura francés, Frédéric Mitterrand, y el primer ministro italiano, Silvio Berlusconi, nos muestran el eclipse de toda moral« …

Le voici en espagnol :

« El cineasta Roman Polanski fue detenido en Zúrich, durante un Festival de Cine que le rendía un homenaje, por la policía suiza, a pedido de la justicia de Estados Unidos, debido a una violación cometida en 1977 (hace 32 años) en Hollywood, delito que el propio Polanski reconoció, antes de fugarse de California en pleno proceso cuando el tribunal que lo juzgaba aún no había pronunciado sentencia. Ahora, mientras espera que Suiza decida si acepta el pedido de extradición, se multiplican las protestas de cineastas, actores, actrices, intelectuales y escritores de Europa y América por el « atropello« , exigiendo su liberación. La moral de la historia es clara : emboscar, emborrachar, drogar y violar a una niña de 13 años, que es lo que hizo Polanski con su víctima, Samantha Geimer, a la que atrajo a la casa deshabitada de Jack Nicholson con el pretexto de fotografiarla, es tolerable si quien comete el desafuero no es un hombrecillo del montón sino un creador de probado talento (Polanski lo es, sin la menor duda).

Uno de los defensores más ruidosos del cineasta polaco-francés (tiene ambas nacionalidades _ Roman Polanski est né Raymond Roman Liebling le 18 août 1933 à Paris, de parents polonais immigrés) ha sido el ministro de Cultura de Francia, señor Frédéric Mitterrand, sobrino del presidente François Mitterrand y ex socialista _ appréciation qui est à nuancer : seulement « radical de gauche« , il y a un certain temps ; pour ne pas dire un temps certain _ que abandonó las filas de este partido _ non ! lui-même semble nier avoir été jamais encarté au parti socialiste…  _ cuando el presidente Nicolas Sarkozy lo llamó a formar parte de su Gobierno _ Frédéric Mitterrand avait déjà accepté sa nomination par le Président Sarkozy à la tête de la prestigieuse Villa Médicis, à Rome… De même, il avait fait savoir son vote en faveur de Jacques Chirac aux élections présidentielles de 1995 ; son oncle François Mitterrand étant encore de ce monde… No sospechaba el ministro que poco después de formular aquella enérgica protesta se vería en el corazón de una tormenta mediática parecida a la del realizador de « El cuchillo en el agua » _ « Le Couteau dans l’eau« , co-écrit avec Jerzy Skolimowski, et son premier long métrage, en 1962 _ y  » El pianista » _ « Le Pianiste« , « Palme d’or«  au festival de Cannes, en 2002.

En efecto, hace pocos días, la hija del líder del Front Nacional, Jean Marie Le Pen, Marine Le Pen, inició una ofensiva política contra el ministro Mitterrand, recordando que en 2005 éste publicó un libro autobiográfico, « La Mauvaise vie«  (« La mala vida« ), en el que confesaba haber viajado a Tailandia en pos de los chicos jóvenes de los prostíbulos de Patpong, en Bangkok. La confesión, muy explícita, venía adornada de consideraciones inquietantes, por decir lo menos, sobre los efectos turbadores que la industria sexual de adolescentes en el país asiático provocaba en el autor: « Todo ese ritual de feria de efebos, de mercado de esclavos, me excita enormemente« . La hija del líder ultra francés, y algunos diputados socialistas _ Benoît Hamon, Manuel Valls, Arnaud Montebourg, etc... _, unidos por una vez con este motivo, se preguntaban si era adecuado que fuera « ministro de Cultura » de Francia alguien que, con su conducta, desmentía de manera categórica los declarados empeños del Gobierno francés por erradicar de Europa el « turismo sexual » hacia los países del Tercer Mundo como Tailandia donde la prostitución infantil, una verdadera plaga, golpea de manera inmisericorde sobre todo a los pobres.

El ministro Mitterrand, sin dejarse arredrar por lo que él y sus defensores consideran una conjura de la extrema derecha fascista y un puñado de resentidos del Partido Socialista, compareció en la hora punta de la Televisión Francesa. Explicó que « había cometido un error, no un delito » y que, naturalmente, no pensaba renunciar porque « recibir barro de la ultraderecha es un honor« . Aseguró que no practica la pedofilia y que los chicos tailandeses de cuyos servicios sexuales disfrutó ya no eran niños. « ¿Y cómo sabía usted, señor ministro, que no eran menores de edad?« , le preguntó la entrevistadora. Desconcertado, el señor Frédéric Mitterrand optó por explicar a los televidentes la diferencia semántica entre »homosexualidad » y « pedofilia« .

La defensa que han hecho políticos e intelectuales franceses del ministro de Cultura se parece mucho a la que ha cerrado filas detrás de Polanski, y hermana también, cosa significativa, como a los críticos, a gente de la derecha y la izquierda. Se recuerda que, cuando el libro salió, el propio presidente Sarkozy alabó la franqueza con que el señor Mitterrand exponía a la luz pública los caprichos de su libido, y afirmó: « Es un libro valiente y escrito con talento« . Con todo este chisporroteo periodístico en torno a él, es seguro que « La Mauvaise vie » (« La mala vida« ) se convertirá pronto en un best-seller _ certes… Tal vez no obtenga el « Prix Goncourt« , pero quién puede poner en duda que lo leerán hasta las piedras _ bel hispanisme ! Nadie parece haberse preguntado, en todo este trajín dialéctico, qué pensarían en Francia de un ministro tailandés que confesara su predilección por los adolescentes franceses a los que vendría a sodomizar (o a ser sodomizado por ellos) de vez en cuando en las calles y antros pecaminosos de la Ciudad Luz _ Paris. Moral de la historia : está bien practicar la pedofilia y fantasías equivalentes _ à mieux élucider, tout de même ! _ siempre que se trate de un escritor franco y talentoso y los chicos en cuestión sean exóticos y subdesarrollados _ soient à peu près les arguments (mais tus, non signifiés à lui noir sur blanc) qui ont probablement valu son exclusion d’antenne (de « collaborateur régulier« , tout du moins) de France-Culture (de l’émission de Philippe Meyer « L’Esprit public« ) à Yves Michaud, il y a dix jours : le lendemain, ce dernier réitéra son « appréciation«  des faits de l’affaire de droit « Polanski«  au micro de Nicolas Demorand, face à Alain Finkielkraut, lors du 7-10 de France-Inter, le vendredi 9 octobre : chacun peut en juger sur pièces…

Comparado con el cineasta Polanski y el ministro Mitterrand, el primer ministro de Italia, Silvio Berlusconi, es, en materia sexual, un ortodoxo y un patriota. A él lo que le gusta, tratándose de la cama, son las mujeres hechas y derechas y sus compatriotas, es decir, que sean italianas. Él ha hecho algo que de alguna manera lo emparienta con los 12 Césares de la decadencia y sus extravagancias descritas por Suetonio _ en sa « Vies des douze Césars«  _ : llenar de profesionales del sexo no sólo su suntuosa residencia de Cerdeña llamada « Villa Certosa » sino, también, el Palacio que es la residencia oficial de la jefatura de Gobierno, en Roma _ le Palazzo Chigi, piazza Colonna ; à moins que ce ne soit sa résidence privée à Rome, le Palazzo Grazioli, via del Plebiscito… Los entreveros sexuales colectivos y seudo paganos que propicia han dado la vuelta al mundo gracias al fotógrafo Antonello Zappadu _ en janvier 2009 _, que los documentó y vendió por doquier. Al estadista le gustaba disfrutar en compañía y en una de esas extraordinarias fotografías de « Villa Certosa » ha quedado inmortalizado el ex primer ministro checo, Mirek Topolanek _ du parti ODS, le principal parti de la droite tchèque ; le 24 mars 2009, son gouvernement est renversé par une motion de censure ; et cède la place le 8 mai à un gouvernement intérimaire dirigé par le social-démocrate Jan Fischer, du principal parti de centre-gauche… _, quien, de visita en Italia, fue invitado por su anfitrión a una de aquellas bacanales, donde aparece dando un salto simiesco, desnudo como un pez y con sus atributos viriles en furibundo estado de erección (¿lanzaba al mismo tiempo el alarido de Tarzán?), entre dos ninfas, también en cueros. ¿La moraleja en este caso? Que si usted es uno de los hombres más ricos de Italia, dueño de un imperio mediático, y un político que ha ganado tres elecciones con mayorías inequívocas, puede darse el lujo de hacer lo que a sus gónadas les dé la reverendísima gana

_ à confronter aux expressions de la « quatrième de couverture » de « La Cité perverse _ libéralisme et pornographie » de Dany-Robert Dufour : « Pornographie, égotisme, contestation de toute loi, acceptation du darwinisme social, instrumentalisation de l’autre : notre monde est devenu sadien. Il célèbre désormais l’alliance d’Adam Smith et du marquis de Sade. A l’ancien ordre moral qui commandait à chacun de commander ses pulsions, s’est substitué un nouvel ordre incitant à les exhiber, quelles qu’en soient les conséquences« , annonce ainsi Dany-Robert Dufour

Hablar de escándalo en estos tres casos sería impropio. Sólo hay escándalo cuando existe un sistema moral vulnerado por el hecho _ le concept crucial ! en ces diverses polémiques _ escandaloso. Eso es lo que subleva a toda o parte de la sociedad. Lo que vemos, en estos episodios, es más bien el eclipse de toda moral _ voilà ! _, simples espectáculos _ eh oui ! devant les caméras… _, utilizados, por quienes los defienden o los condenan, no en nombre de principios y valores sobre los que existiría alguna forma de consenso social _ qui « s’effrite«  _, sino de intereses políticos _ brutement pragmatiques _, reflejos condicionados ideológicos _ avec de moins en moins le temps de réfléchir, questionner _, frivolidad _ dangereuse en proportion de ses effets séducteurs _ y una chismografía mediática que los redime de toda connotación ética _ voilà le tour de passe-passe _ y los convierte en diversión _ doublement gagnante par ce qu’elle montre autant que par ce qu’elle cache _ para el gran público _ c’est moi, bien sûr, qui souligne… Para la cultura imperante, sólo es lícito condenarlos desde un punto de vista estético y sostener, sin caer en el ridículo, que es una vulgaridad violar niñas, ir a Tailandia como hace la plebe a alquilar muchachos y contratar hetairas para las fiestas palaciegas ¡y luego hacerlas candidatas al Parlamento Europeo! Todo eso revela _ seulement _ mal gusto _ mais tous les goûts ne sont-ils pas, n’est-ce pas, dans la nature ?.. _, una imaginación sexual burda y cochambrosa _ et pas davantage…

La generación a la que pertenezco _ Mario Vargas Llosa est né le 28 mars 1936 à Arequipa, au Pérou : il a donc soixante-treize ans _ dio varias batallas : por la revolución, el comunismo, la emancipación de la mujer, la libertad religiosa y la libertad sexual. Parecía que, habiendo perdido todas las otras, por lo menos en Occidente habíamos ganado esta última. Episodios como los que resumo en esta nota muestran que creer semejante cosa es una ilusión. ¿Qué clase de libertad sexual hay detrás de las villanías de este trío? Abusar de una niña de 13 años, gozar con adolescentes que son esclavos sexuales por culpa del hambre y la violencia y convertir en un burdel el poder al que se ha llegado mediante el voto de millones de ingenuos, son acciones que hacen escarnio de la libertad que precisamente clama porque en la vida sexual desaparezca esa relación de amo y esclavo que, en estos tres casos, se manifiesta de manera flagrante. La libertad sexual es en ellos una patente de corso que permite a quienes tienen fama, dinero o poder, materializar de manera impune sus deseos _ tout simplement « pervers« , les qualifie, après Freud et la psychiatrie classique, Dany-Robert Dufour _ degradando _ sadiquement (ou masochistement : relire Freud ; ou le « Vocabulaire de la psychanalyse«  de Laplanche et Pontalis… _ a los más débiles. Apuesto mi cabeza que los tres héroes de estas historias reprobaron escandalizados las violaciones y abusos sexuales de niños en los colegios religiosos que han llevado al borde de la ruina a la Iglesia Católica en países como Estados Unidos e Irlanda, por las sumas enormes con que han debido compensar a las víctimas. Ni ellos ni sus defensores parecen conscientes de que sus proezas son todavía menos excusables que las de los curas pedófilos por la posición de privilegio que tienen y de la que abusaron, envileciendo _ en effet : car la liberté n’est certes pas la licence ; relire dans « Gorgias » de Platon les raisons de Socrate face à Calliclès !.. _ con sus actos la noción misma de libertad. Cuánta razón tenía Georges Bataille cuando _ cf « L’Érotisme«  _ pronosticaba que la supuesta sociedad « permisiva » serviría para acabar con el erotismo pero no con la brutalidad sexual. »


A méditer par tout un chacun !


Titus Curiosus, ce 18 octobre 2009

Post-scriptum :

sur l’exhibitionnisme (et ses actuelles instrumentalisations !),

lire l’excellent « La Privation de l’intime » de Michaël Foessel ; 

cf mon article du 11 novembre 2008 sur cette « pulvérisation maintenant de l’intime _ une menace envers la démocratie« …

Sur le désir de « France » _ de Cioran

19juil

Un passionnant « essai« , inédit jusqu’ici, et magnifiquement traduit

_ en une « traduction du roumain revue et corrigée par Alain Paruit » (sic, page 5) _

par Alain Paruit :

« De la France« ,

« Manuscrit déposé à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet, Fonds Cioran« ),

de Cioran, en « 1941« 

_ la date, au bas de la dernière page du manuscrit, est ajoutée « au crayon« , indique l’éditeur (L’Herne) ;

et de la main de Cioran lui-même,

indique immédiatement (page 7) Alain Paruit en sa lumineuse préface de deux pages, intitulée « La Métamorphose » :

« C’est la guerre. Cioran est à Paris

_ depuis 1937 : « alors titulaire d’une bourse (maintenue jusqu’en 1944) de l’Institut culturel français de Bucarest, il s’était inscrit pour terminer sa thèse de licence sur Bergson à la Sorbonne« , précise encore, page 10, et sous la plume de L. T., cette fois, une très courte « Note biographique«  de deux pages).

Il écrit au crayon, à gros traits appuyés, « 1941″, comme il aurait écrit le mot « FIN » sur son manuscrit, ce texte qu’il a intitulé « De la France« , en pensant aux moralistes du XVIIIème

_ ou/et du XVIIème ?.. :

ce sont La Rochefoucauld et Pascal, qui sont cités (une et sept fois : c’est lui le plus, et de loin !, régulièrement évoqué de tous les auteurs !), bien plus que Mme du Deffand ou Voltaire (les seuls mentionnés, d’ailleurs, de tout le XVIIIème siècle ; et à la seule page 12 :

« Comme je me serais rafraîchi à l’ombre de la sagesse ironique de Madame du Deffand, peut-être la personne la plus clairvoyante de ce siècle ! « Je ne trouve en moi que le néant ; et il est aussi mauvais de trouver le néant en soi qu’il serait heureux d’être resté dans le néant. » Et Cioran _ l’auteur du « Précis de décomposition«  et de « De l »inconvénient d’être né » _ d’ajouter : « En comparaison, Voltaire, son ami, qui disait « je suis né tué », est un bouffon savant et laborieux. Le néant dans un salon, quelle définition du prestige !«  (page 12, donc) ;

alors que le nom de « Pascal » revient, lui, le plus et presque continument : aux pages 17, 18, 25, 29, 31, 77 et 85… :

au hit-parade des noms cités en ce « De la France« ,

outre celui de « Napoléon«  (cinq fois),

je relève ceux de « Paul Valéry » _ pour lequel « l’homme est un animal né pour la conversation«  _ et « Baudelaire«  (quatre fois) ,

de « Racine » (trois fois)

et de « Madame du Deffand« , « Bergson« , « Rameau » et « Debussy » (deux fois chacun)… ;

et si je poursuis mon listing (un palmarès éminemment significatif !), pour une occurrence unique,

voici les noms assurément représentatifs de l’« esprit français«  de « Voltaire« , « Chateaubriand« , « Claude Lorrain » _ « honteux de rêver »… _, « La Rochefoucauld« , « Joachim du Bellay« , « Descartes« , « Rameau« , « Couperin«  _ avec « leur délicatesse et leur refus du tumulte » si rares, page 30 _, « Berlioz« , « César Franck« , « Rousseau« , « Montaigne » _ ou « la douceur«  qui « veille« .., page 70 _ , « Monet » _ dont « un paysage épuise la poésie du visible«  _, « Mallarmé« , « Van Gogh« , et, pour finir en beauté, « François de Sales » :

les « français d’adoption » (ou de récente date : Napoléon…) n’étant pas les moins « importants » :  Henri Bergson, Claude Lorrain, César Franck, Jean-Jacques Rousseau, Vincent Van Gogh et François de Sales… ;

fin de l’incise ! _,

en pensant aux moralistes du XVIIIème _ je reprends l’élan de la phrase d’Alain Paruit _,

en pressentant peut-être déjà qu’il les rejoindra un jour,

ne serait-ce que par le style qui en l’occurrence est « contenu ».

Ne crayonne-t-il pas son portrait prémonitoire _ oui ! _ lorsqu’il les compare aux grands créateurs étrangers ?« 

_ que sont, dans l’ordre d’apparition des noms dans l’essai : Ruysdael, Dante, Eschyle, Shakespeare, Maître Eckart, Ruysbroeck, Bach, Michel-Ange, Beethoven, Dostoïevski, Novalis et Cervantès…

On mesure l’importance de cet éloge, par Cioran,

pour la civilisation d’un « pays » _ celui-là même « du dialogue« , la formule se trouve à la page 34 _ à l’heure même _ depuis juin 40 _ de sa « chute« ,

à l’occasion d’une méditation détaillée sur 84 pages (de la page 11 à la page 94) sur une « décadence« .

D’autres, aimant un peu moins, semble-t-il, la « spécificité française« , en la sapant de leur politique prétendument « moderne » _ = d’aggiornamento « mondialiste« _,

pourraient en prendre acte,

dont les parents et grands-parents _ qui de Budapest, qui de Salonique… _ ont pourtant choisi aux heures les plus difficiles pour leur « survie » même, la France _ et sa « civilisation » !!!

Cioran, page 45 :

« La France « éternelle », avant de se perdre, deviendra un pays comme les autres«  :

qu’on le médite un peu davantage, donc, en notre actualité de 2009 !…


Et page 50, toujours à propos de « la France » et des « Français« , à l’heure sonnant, paraît-il, de l' »individualisme » mondialisé (des marchés !) :

« Un pays d’« êtres humains » et non d’individus« …

Ici,

je voudrais citer et commenter une interview assez perspicace d’Alain Finkielkraut s’exprimant précisément sur ce « De la France«  de Cioran,

en un article du 2 avril 2009 du Figaro : « Finkielkraut : « Pour Cioran, ce livre était une honte« , principalement à propos d’un autre livre (antérieur : un « livre sulfureux publié à Bucarest en 1936« ) de Cioran : « Transfiguration de la Roumanie » ;

voici le passage particulièrement judicieux à mon goût sur ce « De la France« , en cet entretien d’Alain Finkielkraut avec Sébastien Lapaque :

« Cioran s’est arraché de la tentation totalitaire _ présente dans ce livre ensuite « regretté » et même « vilipendé«  par son auteur, Cioran, qu’est « Transfiguration de la Roumanie« , de 1936 : né le 8 avril 1911, Cioran avait alors vingt-cinq ans… _ en devenant un écrivain de langue française _ oui ! _ et en s’inscrivant en plein XXe siècle dans la lignée des moralistes classiques _ français. Les moralistes ne sont pas des gens qui font la morale, ce sont des gens qui divulguent une vérité douloureuse _ la formule d’Alain Finkielkraut est magnifique de justesse. Il rejoint leur camp dès 1941, à travers le texte charnière intitulé « Sur la France » _ « De la France« , plutôt ! _, qu’on découvre également. C’est un livre écrit en roumain, mais le style est déjà français _ absolument ! _, on le voit merveilleusement dans la traduction d’Alain Paruit _ en effet ! j’y applaudis des deux mains !.. Voir mes remarques plus haut ! Au fond, la réponse des moralistes, c’est la réponse de ceux qui ne sont pas dupes de Rousseau _ ni du « rousseauisme » qui va suivre… Formule magnifique encore (hélas ! ô combien juste !) à propos de ce fossoyeur, aussi, de la musique française, par sa si niaise (= caractérielle !) « résistance«  au génie de Rameau !.. Qu’on jette une oreille à l’accablant « Devin du village » dudit Rousseau pour s’en convaincre, face aux génialissimes « Boréades«  du merveilleux Rameau !!! D’un côté, il y a l’idée d’établir un régime sans mal _ d’où le chemin, méticuleusement pavé, de l’Enfer… _ en trouvant une solution politique _ dissolvante ! _ au problème _ d’existence et coexistence ! _ humain. Et de l’autre, une lucidité inquiète _ à l’infini de son (propre) souci critique et plein d’humour : mon modèle (personnel) étant ici un Montaigne et sa pratique, modeste, d’« essayeur«  ! _ qui nous vaccine _ oui ! la métaphore est excellente _ contre cette tentation. Le désespoir de Cioran ne le conduit d’ailleurs pas nécessairement à une vision noire de la nature humaine. J’ai relevé un passage extraordinaire dans ses « Cahiers«  :

« Haine et événement sont synonymes. Là où il y a haine, quelque chose se passe. La bonté, au contraire, est statique. Elle conserve, elle arrête, elle manque de vertu historique, elle freine tout dynamisme _ en étant « égard » et « scrupule«  La bonté n’est pas complice du temps ; alors que la haine en est l’essence. »

On n’imagine pas Cioran faire cet éloge de la bonté. Et pourtant. Lorsque s’évanouit l’idée d’établir un régime sans mal, reste ce que Vassili Grossman _ l’auteur (capital !) de l’immense « Vie et destin«  ; ainsi que de, avec Ilya Ehrenbourg, l’indisponible actuellement : on se demande bien pourquoi, « Le Livre noir«   _ appelle la petite bonté, la bonté sans régime«  _ une expression encore d’une justesse formidable !

Bref, voilà un livre passionnant que ce « De la France«  :


par exemple, ceci, pages 13-14 :

« Qu’a-t-elle aimé, la France ? Les styles _ au pluriel ! _, les plaisirs de l’intelligence, les salons, la raison, les petites perfections _ discrètes. L’expression précède la Nature. Il s’agit d’une culture de la forme _ oui ! _ qui recouvre les forces élémentaires et, sur tout jaillissement passionnel, étale le vernis bien pensé du raffinement.
La vie _ quand elle n’est pas souffrance _ est jeu.

Nous devons être reconnaissants à la France de l’avoir cultivé avec maestria et inspiration
_ quelles brillantes expressions ! C’est d’elle que j’ai appris à ne me prendre au sérieux que dans l’obscurité et, en public, à me moquer de tout. Son école _ car c’en est une, sans didactisme pesant ! par le jeu : grave et léger à la fois… _ est celle d’une insouciance sautillante et parfumée. La bêtise voit partout des objectifs _ utilitaires : voilà le langage des « communiquants » !.. _ ; l’intelligence _ seulement _ des prétextes. Son grand art _ oui ! _ est dans la distinction _ n’est-ce pas, pauvre Pierre Bourdieu ?.. _ et la grâce de la superficialité _ celle-là même que le Nietzsche de « Humain trop humain » et du « Gai savoir«  enviait aussi, en plus des moralistes français, aux Grecs de l’Antiquité… Mettre du talent dans les choses de rien _ c’est-à-dire dans l’existence et dans les enseignements du monde _ est une initiation aux _ salubres _ doutes français.« 


Et ceci, sur le goût, pages 15-16 :

« Un peuple de bon goût ne peut pas aimer le sublime, qui n’est _ alors… _ que la préférence du mauvais goût porté au monumental. La France considère tout ce qui dépasse la « forme » comme une pathologie du goût.« 

« Le goût se place aux antipodes du sens métaphysique, il est la catégorie du visible _ à portée même de perception : un peu fine… Incapable de s’orienter _ c’est crucial _ dans l’embrouillement des essences, entretenues par la barbarie de la profondeur _ à plaisir embrumée _, il cajole _ avec douceur et non sans infiniment de délicatesse _ l’ondulation immédiate _ à portée de sens, d’aisthesis… _ des apparences _ cultivées… Ce qui n’enchante pas l’œil est une non-valeur : voici quelle semble être sa loi. Et qu’est-ce que l’œil ? L’organe de la superficialité éternelle _ la recherche de la proportion, la « peur » du manque de proportion définit son avidité pour les contours observés. L’architecture ornée selon l’immanence ; la peinture d’intérieur et le paysage, sans la suggestion des lointains intacts (Claude Lorrain _ un Ruysdael salonnard, honteux de rêver) ; la musique de la grâce accessible et du rythme mesuré, autant d’expressions de la proportion, de la négation de l’infini _ conjuré, davantage que nié… Le goût est beauté soupesée _ avec légèreté, délicatesse : sans la lourdeur d’une précision trop mécanique _ élevée au raffinement catégoriel. Les dangers et les fulminances du beau lui semblent des monstres _ qu’il éloigne _ ; l’infini, une chute«  _ dont il importe en permanence de se prémunir… :

cette magnifique analyse dit tout de l’« acuité de perception«  du penser si remarquablement affiné de Cioran…

Et encore ceci, pages 86-87, à l’heure de la « mondialisation » :

« Le risque auquel peut se confronter l’individu flottant au dessus des cultures

est le « faux moi »,

la perte de la mesure et du goût,

le passage à des dimensions fallacieuses,

à force de frayer avec des valeurs trop diverses.

Les limitations de la France sont un antidote contre le faux moi _ oui ! _,

elles sont un barrage du classicisme érigé contre les tendances à la disponibilité et au flou«  _ enivrés (à se perdre…) : ces formules sont magnifiques de lucidité !..

« La France est une école de l’embrassement limité, une leçon contre le moi illimité«  _ cette formule encore, et le mot de « leçon », est superbe !

Avec cet avertissement : « Qui n’est pas passé par là

risque de vieillir en apprenti _ sorcier !.. _ des virtualités _ et des gouffres…

Une âme vaste enclose dans les formes françaises,

quel type d’humanité féconde !« , page 87.

Cioran s’inscrivant lui-même, en conclusion de son essai, page 93 (et en 1941 !), parmi ceux qui, « nés sous d’autres cieux«  et « issus d’un autre sang et d’autres coutumes«  sont devenus les « patriotes«  de la France !

« N’avons-nous pas tous été, dans les crises, dans les accès ou dans les respirations durables, des patriotes français ?

N’avons-nous pas aimé la France avec plus d’ardeur que ses fils ?

N’avons-nous pas été nombreux, en provenance d’autres espaces, à l’embrasser comme le seul rêve terrestre _ en un lieu circonscrit et bien réel _ de notre désir ?« 

Et en une heure particulièrement menaçante pour la survie de la France, en 1941, donc,

Cioran conclut ainsi son essai, page 94 :

« Dans quelque direction, sur quelque plateau ou sentier que nous orientions nos pas,

la France ne mourra pas seule,

nous expierons ensemble le goût _ sien et chevillé à son corps _ de la fugacité« … 

Un très bel essai, et on ne peut plus « actuel« -« inactuel » _ à la Nietzsche _, que ce « De la France » de Cioran…

Titus Curiosus, ce 19 juillet 2009

De la « non-inhumanité » d’un cinéaste d’exception : James Gray (dans « The Yards »)

06juin

A la double occasion d’un (nouveau : le troisième, en l’occurrence : le premier, ce fut « en salle », à la sortie en France du film ; et le second, lors de sa parution en DVD) visionnage de « The Yards » (le film est sorti en 1999), lors d’un passage mercredi soir) à la télévision,

et de la sortie, cette fin mai, du DVD de « Two Lovers« , le dernier film de James Gray _ cf mon article (admiratif !) du 21 novembre 2008 : « “Two Lovers” _ ou de l’”humanité” vraie du “care” dans le regard cinématographique de James Gray » _,

je suis demeuré, cette fois encore, béat d’admiration face à la très profonde « non-inhumanité« 

_ selon l’indispensable concept stieglérien (passim ; dont, par exemple, le très important « Prendre soin _ 1 de la jeunesse et des génération« ) _

de cet auteur cinéaste, James Gray ;

face à la beauté (et vérité) de cet immense film, « The Yards« , donc ;

ainsi qu’à ce que James Gray obtient de ses acteurs-interprètes :

en commençant par le visage de Mark Wahlberg, par les yeux (et le regard : les deux !) ultra-sensibles duquel, via le personnage (de Leo Handler) qu’il incarne, se déroule, pour les spectateurs fascinés du film que nous sommes, à en suivre, scène après scène, le défilement sur l’écran, l’intrigue de ce polar new-yorkais (dans le quartier de Queens, cette fois (pour « Little Odessa« , c’était dans le quartier juif russe du Bronx) ;

et en continuant par les yeux (et le regard : désolé) chargés de noir de Charlize Theron (transformée pour l’occasion en la brune Érica Stoltz) ;

mais encore à travers l’incarnation « habitée » de tous les autres acteurs :

d’abord, pivot (pour beaucoup, mais quasi à son corps défendant…) du Fatum, l’ange sombre (Willie Guttierez) que figure le d’autant plus dangereusement lisse Joaquin Phoenix (qui revient, avec Marc Wahlberg, dans « La Nuit nous appartient » ; puis sans lui, dans « Two Lovers » : en DVD cette semaine) ;

relayés du côté de ceux qui ont « sombré » par les impeccables figures que donnent à leurs personnages (de « parrain« , Frank Olchin, et de son épouse, Kitty Olchin : soient la mère d’Érica ; et son beau-père) les (toujours !) impeccables James Caan et Faye Dunaway (le premier, fragile dans les incertitudes de ses plus noires décisions; la seconde, le regard protégé par d’immensément larges verres de lunettes translucides ou teintées) ;

et du côté de ceux qui ont tant bien que mal « tenu« , mais terriblement « amochés« ,

la bouleversante, dans sa sobriété, Ellen Burnstyn, dans le personnage de Val Handler, la mère veuve et en bien mauvaise santé (au cœur près de céder…) de Léo…

C’est à un film de « regards » immergés en pleine action (violente), que nous sommes invités à assister,

en ce « réel » de concurrence exacerbée des compagnies d’entretien du métro new-yorkais,

du fait surtout de la place qu’y prennent des plans relativement rapprochés…

A part ces moments de « regards » éperdus, « pris«  (au plus près de leurs silences par la caméra formidablement attentive de James Gray, dans sa sobriété), à la toile dans laquelle se « prennent« , sans pouvoir s’en « dépêtrer« , les mouvements inchoatifs et malheureux de ses trop malhabiles protagonistes),

je noterai deux remarquables scènes-« ballet«  (si j’ose les qualifier ainsi) de « bagarres«  (mais sans le moindre formalisme, ni maniérisme de la part de la caméra ; ni a fortiori hyper-baroquisme…), mettant « aux prises« , en deux extraordinaires et imprévues accélérations des gestes, les personnages qu’incarnent,

d’une part (les deux fois) Joaquin Phoenix,

et d’autre part, dans la plus longue et en extérieur _ dans la rue _, Mark Wahlberg ;

et, dans la plus brève et en intérieur (avec escalier et étages), Charlize Theron :

le corps de cette dernière (Érica) en restera définitivement « figé« 

en une improbable figure de « poupée » désarticulée et arrêtée en une posture anguleuse, immobilisée et cassée (mi à la Hans Bellmer, mi à la Egon Schiele, peut-être…) ;

tandis que les deux autres, félins (Willie et Leo), continueront, dans la rue, à courir _ même si moins vite..

On pourra lire ici un très beau commentaire de ce film, par Alexandre Tylski

(ainsi qu’un autre, « à contresens« , lui, de ma perception : pour mieux se rendre compte de la pertinence… ; par Serge Kagansky) :

Mais d’abord, cette remarquable interview-ci de James Gray, par Olivier Nicklaus,

sur lesinrocks.com le 9 mai 2000 :

« The Yards de James Gray » :

On attendait avec impatience le deuxième film de James Gray, qui avait fait forte impression il y a cinq ans avec « Little Odessa« . « The Yards« , avec toujours New York en arrière-plan, revisite le « thème » de l’individu face à l’injustice et à la perversité.

Pourquoi une aussi longue absence ?

James Gray : ­ C’est très simple. J’ai du mal à monter les films auxquels je tiens, qui représentent un risque pour les producteurs. L’industrie du cinéma est très dure. En outre, je ne suis pas le genre de personne à avoir des tas d’idées et qui, si un projet patine, peut s’atteler à un autre. Depuis « Little Odessa« , je n’avais que « The Yards » en tête. Ce film me tenait trop à cœur pour que je l’abandonne comme ça. Je suis un réel obsédé ; et je ne suis pas prêt à faire de compromis ! Du coup _ cette « vertu » se paie ; et à un prix fort ! _, j’ai mis trois ans à le monter.

Trois ans pour convaincre les studios ?

C’est plus compliqué que ça. « Little Odessa » a obtenu un succès critique suffisant pour que les studios s’intéressent à moi. Le problème, c’est qu’ils vous veulent pour réaliser un scénario à eux. J’en ai lu quelques-uns : ils me tombaient des mains ! C’est absurde quand on y pense. Ils vous remarquent pour votre singularité _ voilà ! _, mais si vous leur proposez un projet personnel, ils _ les « instrumentaliseurs » du marketing… _ n’en veulent pas ! Là est la vraie explication des cinq ans entre « Little Odessa » et « The Yards« . Je trouvais qu’il y avait suffisamment de réalisateurs remarqués pour leur premier film, mais dont le deuxième était une merde estampillée « studio« . Alors même si j’en ai bavé pendant toutes ces années laborieuses, aujourd’hui, je ne le regrette pas. Au final, j’ai tourné le film que j’avais écrit.

« The Yards » est un projet cher ?

Mes difficultés n’ont jamais été tellement liées à l’argent, mais plutôt au casting. Les acteurs, surtout les stars, viennent vous voir en vous disant « J’ai adoré « Little Odessa« , je veux absolument être dans votre prochain film. » Et quand vous parlez réellement d’un projet avec eux, vous vous rendez compte qu’ils ne cherchent qu’une vitrine _ toujours l‘ »instrumentalisation«  et le marketing ; au rebours de la singularité de l’œuvrer « vrai«  (= authentique) !.. Moi, j’essaie de faire des films, pas des vitrines pour Untel ou Unetelle. Sur mes films, j’ai même l’ambition de réunir une équipe et que chacun ait le sentiment d’apporter sa pierre à un projet commun _ ce qu’est l’œuvrer de cinéma…

A l’arrivée, vous avez pourtant une distribution particulièrement excitante _ et encore mieux que ça ! _ : Marc Wahlberg, Joaquin Phoenix, Charlize Theron, James Caan, Ellen Burstyn, Faye Dunaway…

C’est vrai, ce sont des acteurs merveilleux _ oui !!! _, et contrairement à l’image que l’on pourrait avoir d’eux, aucun de ces six-là n’a justement _ ouf ! _ ce complexe de la vitrine. Wahlberg et Theron _ les deux regards-pivots du film… _ ont fait eux-mêmes la démarche de m’appeler pour participer au projet. Et Caan ou Dunaway savaient qu’ils n’auraient que des rôles secondaires, mais ils se sont mis d’emblée au service du film _ voilà la démarche d’un « véritable » artiste !

Quel est le point de départ du projet ?

C’est très autobiographique _ ce point est, lui aussi, important. J’ai voulu faire un film sur un groupe de personnes qui essaient _ dans la difficulté du « réel«  _ de se construire en tant que famille _ voilà… Mon père a travaillé dans le business du métro à New-York. J’ai donc beaucoup observé _ oui : avec attention et curiosité authentique… _ ce monde quand j’étais jeune, en particulier la corruption _ oui ! _ qui y règne. C’est ma version de « Sur les quais » de Kazan, en remplaçant les quais par les rames de métro. D’ailleurs, le titre du film, « The Yards« , évoque les voies de garage du métro new-yorkais.

Il y a déjà un cliché au sujet de votre cinéma : cette fameuse « noirceur« .

(Rires)… Oui, c’est vrai. Mais le monde est comme ça, je n’invente rien. « The Yards » est un drame social _ réaliste et tragique, tout à la fois _ inspiré de ma propre expérience, des gens que j’ai croisés, avec une pincée de Visconti en plus.

Visconti ou Kazan ? Ils n’ont pas vraiment le même regard sur le monde.

Oui, c’est vrai. Alors je choisis Visconti. Le Visconti de « Rocco et ses frères« . Au fond, la morale de Kazan est trop binaire, ne rend pas assez compte _ un verbe important _ des complexités du monde. Visconti n’est d’ailleurs pas ma seule influence européenne. Il faudrait aussi citer les autres Italiens : Rossellini, De Sica ; et puis les Français de la « Nouvelle Vague« .

Et les Américains ? Vous avez tourné à New York, une ville qu’ont déjà quadrillée des grands metteurs en scène comme Martin Scorsese ou Woody Allen. Comment avoir _ mais Gray ne le recherche pas : il l’a… _ un regard singulier sur cette ville ?

J’ai un ego monumental sur bien des sujets, mais, bizarrement, pas sur celui-là.

Je ne filme pas le Queens, je ne filme pas du tout à la même échelle que Scorsese. Lui, ce serait le grand angle, et moi, le plan rapproché _ voilà ! Si vous tenez à faire un film sur un sujet qui vous tient à cœur, votre singularité suivra _ tout simplement ; quand d’autres ne l’« empêchent«  pas : c’est aussi le « sujet«  même du film…

Voici, ensuite, la critique « The Yards de James Gray » avec laquelle je me sens en désaccord, par Serge Kagansky, le 30 novembre 1999, dans le numéro 253 des Inrockuptibles :

« The Yards » de James Gray séduit par sa tonalité crépusculaire et ses dialogues chuchotés.

Si « The Yards » déçoit un tantinet _ voilà… _, c’est surtout relativement à l’attente _ toujours relative, en fonction de notre « perspective » et de nos références particulières, forcément : après, il s’agit de « se hisser«  à la hauteur de l’œuvre ; si œuvre il y a (bien…) ; et pas seulement « produit« … : c’est cela que doit être l’objectif du « spectateur«  lambda, comme celui du « critique«  ayant pignon sur rue, lui… _ placée sur le nom _ devenant « marque« , « logo«  _ de James Gray, attente à la fois temporelle (cinq ans qu’on attendait ce deuxième film) et qualitative (« Little Odessa » avait laissé une empreinte durable). « The Yards » est d’ailleurs une sorte de remake de « Little Odessa« , et en même temps son contraire. Il en reprend les thèmes et les motifs : le retour du fils prodigue, le quartier et la famille, l’importance des mères vertueuses _ pas toutes _ et les figures de pères _ surtout ceux de « substitution«  (Frank Olchin), par rapport à ceux qui ont disparu (Stoltz, le père d’Érica; Handler, le père de Leo)… _ corrupteurs, la proximité de la tragédie antique et la construction sobrement opératique. Mais là où « Little Odessa » était diurne, blanc et neigeux, « The Yards » sera nocturne, noir et ocre.

Au passif du film, on notera qu’il ne renouvelle _ ah ! voilà donc le péché originel, pour la clique des « hyper-modernistes«  _ absolument pas le « genre » du film noir, que ce soit sur le plan thématique, narratif ou formel. Plastiquement, « The Yards » peut être identifié comme néoclassique _ autre pseudo tare… _, avec sa facture propre et lisse _ c’est donc un défaut : et les regards, sont-ils lisses ?.. _, et la présence trop forte du « production designer« , la plaie récurrente de la NQA (nouvelle qualité américaine). Malgré tout, « The Yards » est loin d’être un objet insignifiant _ ouf ! pas tout à fait rien qu’un « produit« _ à balayer d’un revers de regard.

A la colonne crédit _ c’est une comptabilité que cet article… _, on mettra d’abord le casting _ éblouissant, en effet ! En sus d’un Wahlberg idoine _ oui ! _ et d’un Joaquin Phoenix très Elvis 1956, on remarque la présence de chères vieilles branches (James Caan, Faye Dunaway, Ellen Burstyn) qui habitent puissamment _ en effet ! _ le film et indiquent d’où vient le désir de cinéma _ oui… _ de Gray : du cinéma américain des seventies : ­ il y a pire comme référent. Mais c’est dans les détails que le film creuse sa différence _ ou sa singularité ? non recherchée, elle… _, par exemple le son : bruits étouffés de la ville, dialogues le plus souvent murmurés, plages de silence _ c’est parfaitement ressenti et observé… « The Yards » est un film en sourdine _ oui ! _ que l’on écoute au moins autant qu’on le regarde _ en effet ! Et quand on le regarde, on garde en tête la dominante crépusculaire, mordorée de la photo, ou encore la progression déflationniste de l’histoire sur un tempo de marche funèbre. Le film échappe ainsi à l’académisme qui le menace constamment _ menace en consonance avec toutes celles de ce « réel«  dont il traite ; et auquel il ose se confronter, non sans blessures…


« The Yards » n’est certes pas terrassant d’originalité _ il le faudrait ? éperdument ??? « inrockuptiblement«  ?.. _ et si James Gray n’est pas Scorsese ou Ferrara _ ah ! bon ! serait-ce un « défaut » ? _, il rejoue certaines gammes connues _ quel dommage, entend-on penser tout fort l’auteur _ du cinéma américain avec suffisamment d’élégance _ certes : admirable ! _ et de doigté _ artisanale, technicienne ? _ pour qu’on tende _ tout de même un peu… _ l’oreille.

Serge Kagansky

Et voici, maintenant, l’analyse (non chichiteuse) que je préfère :

celle d’Alexandre Tylski dans le magazine « Cadrages » :

« L’Entrepot du mouvement« …

L’entrepôt du mouvement

Le film s’amorce dans une obscurité toute tombale. La toile est noire. Puis, par petites touches, quelques points blancs de lumière traversent fugitivement l’écran de part en part, comme le passage dans l’espace à la vitesse de la lumière dans un film de « science-fiction« . Mais rapidement, nous voilà bien ancrés sur terre _ certes ; et aussi dessous ! _, dans la vie concrète contemporaine, au sortir d’un tunnel de métro, dont les rails, et les murs peints de vieux graffitis, suintent d’une détresse gelée, inerte, sans âme _ oui ! Pourtant la force du mouvement est bien présente, le travelling arrière, décidé, semble vouloir s’arracher avec vigueur de l’emprise des ténèbres _ tout à fait ! Le regard du spectateur est mis en situation de devoir affronter, découverte après découverte, et de pleine « face« , sans se dérober, ce que l’écran va lui proposer-imposer (du « réel« ). « THE YARDS » est un film pictural très sombre parcouru de contre-jours, de visages _ avec leurs gestes de regards jetés _ coupés en deux par l’ombre, de pannes de lumière, de bougies, de lampes de chevet. Inspiré par _ Georges _ De La Tour, Hopper, Caravage, James Gray, comme pour son premier film « LITTLE ODESSA » [1994], a d’ailleurs peint des dizaines d’aquarelles à l’attention de son chef opérateur Harris Savides. «C’est le moyen le plus simple d’exprimer mes souhaits. Concernant les couleurs notamment. Pas de bleu, pas de noir profond, mais des ocres, des bruns Terre de Sienne…», avoue le jeune cinéaste.

D’un point de vue scripturaire, « THE YARDS » bénéficie comme « LITTLE ODESSA« , d’un générique sans majuscules. Référence directe au poète américain e. e. cummings qui revendiquait par là un refus de l’héritage et de la bureaucratie. Rébellion contre une certaine forme de traditionalisme social. Le titrage du film est laissé de plus volontairement en marge de l’image ; les personnages, eux aussi, marginaux _ oui _, toujours échoués au bord du précipice _ certains vont y chuter, lourdement _, sur une autre planète, esseulés et minuscules  _ c’est cela _ par rapport au reste du monde _ d’où l’inquiétude infiniment éperdue de leurs regards mouvants. Magnifique humilité _ oui _ de l’acteur Mark Wahlberg ; et magnifiques hésitations _ oui _ de l’actrice Charlize Theron. Deux visages _ oui  : d’abord eux _ effrayés, perdus et bouleversants _ absolument ! Film de recherche autour de la solitude _ oui _ sociale et familiale avec un style toujours aussi subtil et affirmé _ exactement ! Gray l’a répété dans maints entretiens : «Il n’était pas question pour moi de tourner autre chose qu’un drame social. Mes parents ont toujours pensé en terme de classe. J’ai toujours senti chez mon père une profonde déception de ne pas avoir su s’élever par la richesse. Dans le contexte social de l’Amérique, on peut toujours avoir le sentiment  _ frustant et liquéfiant _ d’être passé à deux doigts de la vie dont on rêvait.»

Au niveau musical, on retrouve par ailleurs subtilement tous ces sentiments-là présents dans « THE YARDS ». Ainsi, la partition originale de Howard Shore (décidément grand compositeur du cinéma indépendant) imprègne au film,  par de longues notes sobres et sombres, un rythme _ très important _ souvent en décalage tragique avec la violence des mots et des regards. De même, les voix des acteurs souvent à mi-voix, à peine articulées et audibles creusent la fosse entre les évènements tragiques et leurs faibles voix de vieillards _ oui, oui, oui… L’utilisation musicale à la fin du film d’un bout de «Saturne» tiré des « Planètes » de Holst referme en cela le tombeau _ oui. Morceau préféré de Holst lui-même, il a pour particularité de présenter la vieillesse sous différents aspects : le froid, la solitude, la terreur et enfin la paix (les thèmes mêmes du film) _ comme c’est parfaitement jugé ! La fin calme de ce morceau est utilisé d’ailleurs à la fin de « THE YARDS  » lorsque trois générations se serrent dans les bras. Le film de Gray, 31 ans, peut dès lors se voir comme un film sur la maturité, la mue, la vieillesse, la responsabilité _ de l’honnête face à l’utile, quand ils se contredisent tragiquement ! Cf l’essai d’ouverture du Livre III des « Essais«  de Montaigne… Les jeunes veulent devenir grands et devenir responsables.. Mais peut-on être responsable dans cette société carcérale et réductrice ? _ telle est en effet ici la question de fond…

Dans un entretien donné à « Libération« , Gray explique: « Ce qui m’intéresse, c’est de travailler et d’interroger le système de l’intérieur en essayant d’être un agitateur. La beauté plastique et musicale du film est en soi un moyen de commenter _ et contester, par là _ le système. On passe de la séduction à la subversion. C’était la théorie de Visconti ; et je n’ai pas hésité à la lui voler ! Et puis j’ai toujours aimé les opéras véristes, ce mouvement esthétique très localisé au XIXe, avec des œuvres de Puccini ou Mascagni, qui a consisté à élever d’un point de vue stylistique les couches les plus basses de la société, à les traiter avec le respect et l’émotion dus aux rois ou aux reines. » « THE YARDS » raconte les déraillements successifs du jeune Léo (Mark Whalberg) qui sort de prison pour tenter de rester dans le droit chemin. Ce film est l’histoire de rails, de voies. Leo demande du travail au beau-père de sa cousine, Frank (James Caan) patron de l’Electric Rail Corporation ; et c’est avec Willie, homme de main du patron que Leo va travailler. Ils s’acharnent dans la nuit à détériorer les machines des concurrents _ voilà le départ du « déraillement » de Leo… _, mais, coup dur, Leo est accusé à tort du meurtre d’un gardien. Les choses dérapent et lui échappent, tout devient alors confusion et fantomatique. L’argent, monstre concret, a réduit à l’état de cendres les esprits et les cœurs _ jusqu’à l’ordre (et la complicité active) de meurtre : ainsi en va-t-il de Kitty Olchin, aussi ; pas seulement de Frank Olchin ; ou de Willie Gutierrez.

Le scénario du film qui entremêle famille et mafia, fait irrémédiablement penser à du Francis Coppola. James Caan qui jouait le fils du « parrain » dans « THE GODFATHER » [1971] tient ici, cette fois, le rôle du « parrain« , avec les mêmes mimiques de visage, les mêmes gestes et les mêmes façons de mouvoir son corps que Marlon Brando. Gênant a priori, mais Caan reste un acteur touchant par sa _ fondamentale _ vulnérabilité. Or, c’est une des différences avec les « films de gangsters » passés et actuels. On voit dans « THE YARDS » un souper donné par le parrain, mais Gray nous peint un patriarche ni écouté ni même respecté. Même la nourriture n’a plus rien de traditionnel dans cette famille (vulgaire « repas asiatique » acheté à la sauvette). Contrairement à un Coppola, Gray ne fait pas l’éloge du père, ni de la famille, ni de la tradition. Nulle admiration, nul modèle social. Tout reste stocké dans une immobilité retenue et stérile _ morbidement. Dans « THE YARDS » (en français : « les entrepôts »), la liberté et le mouvement sont entreposés _ en puissance _, jamais exercés _ en acte. James Gray conclut: « A mes yeux, il est impossible de voir comme positive cette fin où un type n’a pas seulement trahi les siens, mais tout ce en quoi il croyait jusqu’à alors ; avec cette musique très sombre en bande-son, et ce dernier plan où il est assis, au bord des larmes, dans la rame du métro, exactement à la même place que celle qu’il occupait au début. L’idée, c’est qu’il n’est allé nulle part» _ il a fait seulement un mortel sur-place ; ou un mortel tourné-en-rond (et a perdu sa cousine Érica)…

Alexandre Tylski

Tâchez de regarder « The Yards« , au moins en DVD ;

et « La Nuit nous appartient » ainsi que « Two Lovers » (désormais disponibles tous deux, aussi, en DVD),

à défaut de « Little Odessa«  : plus difficilement trouvable en DVD en ce moment…

Titus Curiosus, ce 6 juin 2009

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