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Un présent retour en grâce de la musique pour clavier de Muzio Clementi (1752-1832), au moins sur les platines…

11mar

En mes articles récents des 2, 3 et 6 mars derniers

_ « « ,

« « ,

et «  » _,

j’ai eu l’occasion, à propos de mon regard porté sur le passionnant CD de Jean Rondeau « Gradus ad Parnassum »  (Erato 5054197416170), de mentionner l’interprétation impressionnante sur clavecin _ voilà l’audace, et la merveille !!! _, notamment de deux morceaux de Muzio Clementi, le Studio n°14 et le Studio n°45 du « Gradus ad Parnassum » Op. 44, pour piano _ un recueil de 100 Études pour piano composées en 1817, 1819 et 1826 _, de celui-ci…

Or une récente actualité discographique nous a proposé et offert un bien intéressant CD « Clementi Piano Sonatas & Preludes« , par Ilia Kim, au piano _ le CD Piano Classics PCL 10254 _,

chroniqué notamment, sur son site Discophilia, par Jean-Charles Hoffelé, sous le titre « Secret bien gardé« , le 9 janvier dernier…

SECRET BIEN GARDÉ

Maria Tipo aura osé graver la première intégrale des Sonates _ au nombre de 54 pour piano seul, composées entre 1771 (Opus 1) et 1821 (Opus 50) _, de Muzio Clementi, révélant les splendeurs _ voilà _ d’un monument érigé comme en regard du massif des trente-deux Sonates de Beethoven. Las !, malgré tant de merveilles déjà auscultées par Horowitz et par une poignée d’autres pianistes, ce corpus passionnant sera retombé dans l’oubli.

Ilia Kim en ressaisit tout l’esprit si divers avec un talent pianistique éclairant. Dès le Piuttossto allegro de la sublime _ rien moins ! _  Sonate en fa dièse mineur, on balance de Scarlatti à Mendelssohn, l’œuvre souligne bien cet « entre-deux mondes » qui fait la singularité de la grammaire de ce génie méprisé _ oui… _ : même en composant pour demain, il ne peut s’empêcher de regarder _ aussi _ dans les siècles passés, voulant faire cohabiter dans un même geste des époques et des styles antithétiques, ne renonçant ni aux paysages romantiques, ni à la musique narrative des contemporains bohémiens, entendant les échos de Lieder de Schubert et le bel canto de Bellini, et se souvenant des fantaisies des clavecinistes italiens.

Mais tout cela ne serait rien si Ilia Kim ne saisissait pas la dimension expressive _ voilà ! _ qui fait tout le prix des trois sonates qu’elle a choisies d’un œil expert, les agrémentant des impertinents petits croquis stylistiques de l’Op. 19. Aurait-elle rouvert cette boîte de Pandore où sommeille un des trésors _ voilà ! _ du grand piano de l’orée du romantisme ?

LE DISQUE DU JOUR

Muzio Clementi
(1752-1832)


Sonate pour clavier en fa dièse mineur, Op. 25 No. 5
Sonate pour clavier en ré majeur, Op. 25 No. 6
Musical Characteristics,
Op. 19 (4 extraits : II. Preludio alla Haydn ; VI. Preludio II alla Mozart ; XI. Preludio I alla Clementi ; XII. Preludio II alla Clementi)

Sonate pour clavier en sol majeur, Op. 37 No. 2

Ilia Kim, piano

Un album du label Piano Classics PLCL10254

Photo à la une : la pianiste Ilia Kim – Photo : © DR

Une interprétation d’Ilia Kim qui sert excellemment l’élégance au moins de l’art de Muzio Clementi…

Ce samedi 11 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

De l’apport, pour l’interprète, jusqu’à l’incandescence, d’un instrument particulier, voire original et imprévu, pour incarner-servir au mieux la plus pure idiosyncrasie même de telle ou telle oeuvre, ainsi incarnée-sublimée…

06mar

La question de l’apport, pour l’interprète, d’un instrument particulier, voire original et même totalement imprévu, pour servir au mieux et incarner _ et même sublimer ! _ telle ou telle œuvre musicale :

ce questionnement me travaille l’esprit depuis l’écoute enthousiasmée du clavecin  qui sert si merveilleusement le jeu de Jean Rondeau, dans son éblouissante interprétation d’œuvres de Joseph Haydn, de Mozart, de Muzio Clementi, et même de Claude Debussy, comme il vient de si bien le réussir en son CD « Gradus ad Parnassum » _ cf mes articles des 2 mars  «  » et 3 mars derniers « « 

Ce qui m’amène à me ressouvenir de ce qu’a pu, par exemple, apporter le divin dulcimer-pantaléon de Margit Übellacker, découvert dans le splendide CD « Portus Felicitatis«  _ le CD Ramée RAM 1302 _, pour des œuvres de Johann-Georg Reutter (1708 – 1772) _ dont le plus que fascinant pizzicato qui illumine le générique du « Mademoiselle de Joncquières » d’Emmanuel Mouret ; cf la conclusion de mon article du 16 janvier dernier : « «  _à un merveilleux, lui aussi, CD « Hebenstreit’s Bach«  _ Ramée RAM 2101 _, par la même magicienne Margit Übellacker dans des œuvres de Johann-Sebastian Bach (1685 – 1750), cette fois…

Quand l’instrument illumine, par la splendeur que sait bien sûr en tirer son exceptionnel interprète, l’idiosyncrasie même des œuvres ainsi portées à une bouleversante et évidente toute pure incandescence…


Ce lundi 6 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Et écouter en boucle le délicieux CD « Gradus ad Parnassum » de Jean Rondeau, sur son magique clavecin…

03mar

Et,

en suivant mon article d’hier « « ,

j’écoute délicieusement en boucle _ de 82′ 23 _ ce merveilleux CD « Gradus ad Parnassum«  _ Erato 5054197416170, paru ce vendredi 3 mars _ de Jean Rondeau et son clavecin parfaitement idoine aux pièces si judicieusement choisies du programme qu’il s’est très intelligemment composé, de Palestrina à Debussy, via Fux,

en m’attardant tout particulièrement aux œuvres si heureuses et radieuses de Haydn, de Mozart, et aussi de Clementi en 2004, pour le très remarquable CD Pan Classics 10171 « Muzio Clementi Late Works for pianoforte« , par Edoardo Torbianelli sur un pianoforte Clementi & Co de 1812, voici ce que je disais sur un blog, « L’Agenda de Francis Lippa«, que Jean-Paul Combet m’avait spécialement ouvert alors pour son label Alpha Classics : « Un très intéressant, et plein de charme, « Late Works for Pianoforte » de Muzio Clementi (compositeur injustement décrié…) par Edoardo Torbianelli, très en verve : Vladimir Horowitz n’avait pas nécessairement mauvais goût ; en tout cas, un tel enregistrement nous oblige à mieux repenser l’histoire et l’esthétique du clavier, au tournant d’un certain classicisme : ce n’est déjà pas rien… » ; ainsi l’œuvre de Muzio Clementi (Rome, 24 janvier 1752 – Evesham, 10 mars 1832) est-elle à bien mieux explorer et redécouvrir, comme nous en donne subtilement ici le goût, Jean Rondeau, sur son merveilleux clavecin qui avcc tendresse vole _, auxquelles il sait si bien rendre lumineuse justice,

sur son magique si poétique clavecin…

Ce vendredi 3 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

La merveilleuse surprise d’un Jean Rondeau enfin justissime, et non hystérisé, en un magnifique programme « Gradus ad Parnassum », sur un superbe clavecin de Jonte Knif et Arno Pelto : de Palestrina à Debussy, en passant par Haydn, Mozart, Clementi et Beethoven, et bien sûr Fux, l’auteur du « Gradus ad Parnassum », en 1725 ; un miraculeux CD. Ou la révélation de ces oeuvres en leur absolu « naturel » par leur interprétation au clavecin…

02mar

C’est une magnifique _ divine… _ surprise que Jean Rondeau, enfin justissime et non hystérisé _ peut-être parce que le fond de l’affaire, cette fois-ci, est, au moins en son départ, et à sa base, l’assez exigeant contrepoint (de Fux : célèbre Kapellmeister de la cour de Vienne, organiste, compositeur, pédagogue estimé et auteur du Gradus ad Parnassum, en 1725, un traité de composition dont la force et le très durable succès résident dans sa consolidation des traditions contrapuntiques héritées des deux siècles précédents. Les interprétations qui s’ensuivent, en ce CD de Jean Rondeau, étant, elles, tout au contraire, et il faut bien le souligner, rayonnantes de « naturel« , d’élégance et même de tendresse ; sans la moindre once de rigide ni de forcé… _, vient nous offrir en un vraiment splendide, absolument maîtrisé, et d’une fluidité merveilleusement naturelle _ oui, oui, il me faut bien y insister _ et inventive, CD intitulé « Gradus ad Parnassum«  _ le CD Erato 5054197416170  _,

avec un merveilleux programme d’œuvres bâties autour et à partir de ce fameux Traité de contrepoint et composition musicale, de 1725, qu’est le « Gradus ad Parnassum« , du compositeur Johann-Joseph Fux (Hirtenfeld, 1660 – Vienne, 13 février 1741),

et cela sur un superbe clavecin de Jonte Knif & Arno Pelto (de 2006) _ et avec une superlative prise de son d’Aline Blondiau, en la fameuse salle de musique de La Chaux-de-Fonds, à l’acoustique parfaite ! où ce miraculeux enregistrement a eu lieu du 8 au 12 octobre 2021 _ :

un programme tout à la fois ingénieux, inventif _ et d’abord dans le choix, au départ audacieux, d’interpréter toutes ces œuvres, jusqu’à celle de Debussy, Doctor Gradus ad Parnassum, un pastiche de la série d’exercices pour le piano Gradus ad Parnassum, composée par Muzio Clementi, qui constitue la première pièce de « Children’s corner« , entre 1906 et 1908), sur clavecin ! Un choix qui n’a rien d’arbitraire et gratuit, et permet rien moins que leur lumineuse révélation !!!.. _ et absolument splendide,

qui va de Giovanni-Pierluigi da Palestrina (1525 – 1594) à Claude Debussy (1862 – 1918),

en passant par Joseph Haydn (1732 – 1809), Wolfgang-Amadeus Mozart (1756 – 1791), Muzio Clementi (1752 – 1832) et Ludwig van Beethoven (1770 – 1827),

et bien sûr Johann-Joseph Fux (1660 – 1741), l’auteur du célébrissime Traité de contrepoint intitulé « Gradus ad Parnassum« , en 1725…

Qu’on écoute, en particulier, les merveilles tout simplement admirables _ et quasi inouïes jusqu’ici à un tel degré de perfection en leur absolu « naturel«  ! _ qu’obtient ici, sur le clavecin, Jean Rondeau,

dans les 28′ de la Sonate Hob. XVI.46 de Joseph Haydn,

dans les 6′ 24 de la Fantaisie n°3 K. 397 et les 6’23 de l’Andante de la Sonate n°16 K. 545 de Mozart,

ou dans les 6’07 de l’Étude n°14 du Gradus ad Parnassum de Muzio Clementi…

C’est renversant de beauté de classicisme libre et lumineusement, tout en sourire, épanoui,

voilà ;

et qui, sans la moindre précipitation un peu trop virtuose, sait merveilleusement prendre tout le temps, serein, lumineux et joyeux, qu’il y faut, pour que ces pièces, en toute plénitude de leur « naturel« , viennent vraiment s’épanouir…

Ce à quoi il faut ajouter aussi que l’instrument qu’est ce clavecin magnifique _ de Jonte Knif et Arno Pelto (de 2006) _, et cette prise de son superlative _ d’Aline Blondiau _, aident aussi, afin de servir en toute perfection la gracilité toute simple splendidement épanouie, déjà, de ces pièces _ la majorité d’entre celles-ci (8/12) étant postérieures à l’invention (au mitan du XVIIIe siècle), et rapide triomphe, du piano-forte…

Ces Haydn et Mozart, servis donc ici au clavecin par Jean Rondeau, sont ainsi comme enfin révélés à eux-mêmes, voilà, mieux encore que par le pianoforte, ou le piano classique de concert :

j’en prendrai pour exemple une comparaison de cette si heureuse et radieuse interprétation-ci par Jean Rondeau (en 28′) de la Sonate Hob. XVI.46 de Joseph Haydn _ probablement l’acmé de ce si beau CD ! _avec l’interprétation _ qui m’avait pourtant bien plue : « épatamment jeune« , « pétulante« , disais-je…  _ du cher Christian Zacharias (en 17′ 39″ _ contre les 28′ de Jean Rondeau : une différence considérable… _) sur un Steinway Concert Grand Piano D. 1901, en son récent très réussi CD « Haydn Sonatas » MDG 940 2257-6cf mon article du 31 janvier dernier : « « 

Quelle interprétation de Jean Rondeau en tout ce CD « Gradus ad Parnassum » ! Quel jeu !!! quelles délices !

Un pur ravissement de musicalité… Et cela grâce au clavecin, mais oui !

Une fête qui nous comble !!!

Une absolue révélation musicale, donc, par ce très évident CD !

Ce jeudi 2 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

La délicatesse de l’interprétation du clavier de Girolamo Frescobaldi : quel interprète choisir ?..

14sept

Voici que je reçois ce jour une très courte vidéo _ de 2′ 15, adressée par Il Teatro de la Fenice, de Venise _

d’un extrait de la Toccata Settima de Girolamo Frescobaldi : très plaisante interprétation, en effet,

par un Jean Rondeau,

dont je n’apprécie pourtant pas toujours, les démonstrations un tantinet excessives, et à contresens, de virtuosité,

à mon goût du moins…

Or, il se trouve que j’ai personnellement toujours eu de la difficulté à bien recevoir ces musiques de Frescobaldi ;

du moins en leurs interprétations discographiques, pourtant nombreuses, auxquelles j’ai pu avoir accès ;

y compris par les doigts expertissimes du grand Gustav Leonhardt…

À preuve, ces deux articles miens :

surtout celui du 21 décembre 2019 :  ;

et, à un moindre degré _ et nonobstant l’enthousiasme un peu excessif de son titre… _, celui du 28 avril 2019 :

Au moins, ces deux articles-ci, détaillent-ils un peu les raisons de mes réticences… 

Frescobaldi : une magistrale interprétation, enfin !, de l’oeuvre de Girolamo Frescobaldi : par le très délié claviériste Francesco Cera

— Ecrit le samedi 21 décembre 2019 dans la rubriqueHistoire, Musiques”.

Longtemps, j’ai été désagréablement insatisfait

des interprétations, au disque, de l’œuvre de Girolamo Frescobaldi

(Ferrare, 15 septembre 1583 – Rome 1er mars 1643) ;

que les histoires de la musique présentent pourtant

comme un brillantissime maillon décisif

de la musique occidentale :

Frescobaldi ayant eu pour brillantissime élève le génialissime Johann Jakob Froberger

(Stuttgart, 18 mai 1616 – Héricourt, 16 mai 1667)

_ un de mes compositeurs préférés ! _ ;

mais aussi les excellents Johann Caspar Kerll (Adorf, 9 avril 1627 – Munich, 13 février 1693)

et Franz Tunder (Lübeck, 1614 – Lübeck, 16 novembre 1667).

À peine en avril dernier, enfin, un CD, par Christophe Rousset,

était parvenu à rompre le _ mon ? _ maléfice ;

cf mon article du 28 avril dernier :

Eh bien ! me voici aujourd’hui très largement comblé, enfin !,

par un merveilleux coffret de 7 CDs,

par la grâce du claviériste _ et aussi, à l’occasion, chef de l’Ensemble Arte Musica _ Francesco Cera :

le coffret Arcana A 463.

4 œuvres _ majeures : les principales ! _ nous y sont magistralement

et dans une merveilleuse évidence _ enfin ! _

données _ restituées, telles qu’elles auraient pu être jouées à la cour des Este, à Ferrare ;

mais les Este perdent Ferrare en 1697, à la mort du duc Alphonse II d’Este, décédé sans fils légitime ; Ferrare revenant alors aux États pontificaux sous le pontificat d’Innocent XII Pignatelli, qui refuse de laisser Ferrare à Cesar d’Este, cousin de feu le duc Alphonse II (et descendant d’un bâtard du duc Alphonse Ier et de sa maîtresse Laura Dianti) ; Cesar d’Este héritant seulement de Modène et Reggio… ; Frescobaldi, lui, avait 14 ans en 1597 ; et, à Ferrare, il fut élève, il faut le remarquer, de Luzzasco Luzzaschi… _du maître ferrarais :

_ les Toccate e Partite Libro Primo (publiées à Rome en 1615)

_ les Capricci (publiés à Rome en 1624)

_ le Secondo Libro di Toccate (publié à Rome en 1627)

_ et les Fiori Musicale (publiées à Venise en 1635).

Tout y est du plus merveilleux soin,

à commencer par la variété _ quelles splendides sonorités ! _ des instruments,

clavecins (au nombre de 5) comme orgues (au nombre de 4),

choisis,

pour tel ou tel morceau spécifique.

Et l’interprétation

est _ enfin ! et d’un bout à l’autre… _ renversante de beauté :

chapeau bien bas, maître !!!

En matière de préférences personnelles,

si je puis me permettre très immodestement de les donner ici,

je dois avouer une certaine prédilection pour la poésie absolument merveilleuse du Secondo Libro di Toccate… :

est-ce dû à la nature particulière de ces œuvres-ci du compositeur ?

ou bien au merveilleux délié de leur interprétation _ surtout aux deux clavecins (d’après des modèles napolitains) _ par Francesco Cera ?

Je ne sais…


Ce samedi 21 décembre 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

Sur ce coffret Frescobaldi/Cera d’Arcana, voici aussi, et d’abord, un très détaillé article _ de même date : le 21 décembre 2019 _ de Frédéric Muñoz sur le site de ResMusica :

« L’oeuvre pour clavier de Frescobaldi par Francesco Cera« …

L’œuvre pour clavier de Frescobaldi par Francesco Cera

La discographie frescobaldienne pour clavier est déjà riche de grandes interprétations depuis le début des années 70. Pour autant, Francesco Cera, grand spécialiste en la matière, propose une approche novatrice et captivante _ voilà ! _ reposant sur un choix d’instruments historiques ou copies d’anciens, au service d’un jeu basé sur ses propres inspirations et ses nombreuses recherches musicologiques.

Frescobaldi_Toccate, Capricci, Fiori Musicali_Ensemble Arte Musica_Francesco Cera

La première moitié du XVIIe siècle a vu en Europe l’éclosion d’un style nouveau pour le clavier _ voilà _ au travers de livres de génie : Correa de Arauxo, Jehan Titelouze, Samuel Scheidt, à la suite de l’initiateur flamand Sweelinck, le fameux Orphée d’Amsterdam. Girolamo Frescobaldi (1583 – 1643) fait partie de cette incroyable pléiade de musiciens qui ont édifié un monument unique dans l’histoire de la musique pour clavier. Venu de Ferrare _ sa ville natale, où il avait été l’élève du magnifique Luzzasco Luzzaschi (1545 _ 1607) ; qui fut aussi, à cette élégantissime  cour des flamboyants Este, à Ferrare, le maître du génialissime Carlo Gesualdo (1566 – 1613)… _, Frescobaldi développa son art à Rome et nous laisse une œuvre _ très importante _ importante. Outre le clavier, diverses œuvres vocales ou instrumentales constituent un ensemble impressionnant, présenté en totalité en 2011 dans un coffret de 15 CDs par Roberto Loreggian (Brilliant Classics). Le présent coffret se compose de 7 CDs, dont chacune des pochettes représente un tableau, témoin de l’art pictural romain à l’époque de Frescobaldi. C’est l’historien de l’art Denier Grenier qui a sélectionné ces chefs-d’œuvre, soit une invitation à la musique de l’organiste de Ferrare.

L’œuvre pour clavier de Frescobaldi de compose de quatre livres écrits sur une longue période, de 1608 à 1635, comprenant Caprices, Toccate, Partite, Courantes et Ballets, Canzone, Arias, hymnes ainsi que trois messes pour orgue. Cet important ensemble de pièces fut écrit pour diverses destinations, liturgiques ou profanes, et le choix des instruments qui en résulte afin de les interpréter est fondamental _ oui _, l’auteur ne l’indiquant pas toujours. C’est l’écriture même des pièces qui impose un choix logique tourné vers le clavecin ou l’orgue. Dans les livres de Toccate, celles qui sont écrites « pour l’élévation », par leur côté planant destiné à ce moment particulier de l’office, sont naturellement dévolues à l’orgue. D’autres, plus virtuoses et décoratives, s’imaginent volontiers au clavecin. Ce choix reste pour de nombreuses pièces celui de l’interprète, qui peut changer suivant les intégrales à disposition des mélomanes. L’ouvrage de Frescobaldi le plus célèbre de tous est sans doute celui des Fiori Musicali publié en 1635, renfermant trois messes courantes pour clavier : Apostoli, Domenica et Madonna. Ici, la présence de l’orgue est de fait permanente, alternant avec les versets grégoriens harmonieusement chantés par l’ensemble Arte musica et le ténor soliste Riccardo Pisani.

Grâce à ses recherches et études échelonnées sur de nombreuses années, Francesco Cera, élève de Gustav Leonardt _ tiens, tiens… _ et de Luigi Ferdinando Tagliavini, offre une vision musicologique et vivante _ oui _ de ces textes par un jeu savant et subtil, porté par des instruments minutieusement choisis, contemporains et en adéquation avec les divers styles de cette musique. Une particularité de cet enregistrement est que les clavecins ont été enregistrés dans une salle qui fut la résidence d’été des ducs d’Este _ voilà ! _ que fréquenta Frescobaldi : une manière de retrouver l’ambiance sonore existant lors de la création de ces œuvres et d’en retirer une inspiration toute particulière _ oui ! _, y compris visuelle par la beauté du lieu _ cf aussi le génialissime testament cinématographique de ce merveilleux ferrarais, lui aussi, qu’a été Michelangelo Antonioni (1912 – 2007) : Al di là delle nuvole (en 1995)… Les instruments sont accordés suivant le tempérament mésotonique couramment en usage à l’époque, ce qui permet un relief indispensable aux multiples couleurs du discours. Les clavecins sont des copies d’anciens, réalisés par de grand spécialistes d’aujourd’hui, de même pour les orgues, historiques qui offrent divers diapasons, du 392 Hz au 465 Hz.

Tous ces paramètres concourent à offrir à l’auditeur un produit de premier choix _ et c’est encore peu dire… _, depuis la beauté du coffret avec la reproduction de tableaux anciens, la présence d’un épais livret avec une étude musicologique de l’artiste et une description détaillée des instruments utilisés, jusqu’à l’interprétation humaine et émouvante _ enthousiasmante par là… _ de Francesco Cera, portée par les sonorités colorées et magnifiquement captées des différents claviers.

Girolamo Frescobaldi (1583-1643) :

Toccate (livres 1 et 2) ; Capricci ; Fiori Musicali.

Ensemble Arte Musica. Riccardo Pisani ténor, Francesco Cera sur cinq clavecins et quatre orgues historiques italiens.

7 CDs Arcana.

Enregistré de novembre 2015 à septembre 2018.

Livret bilingue français anglais.

Durée : 8h19

Voici ensuite mon précédent article, du 28 avril 2019, sur le CD Frescobaldi / Christophe Rousset (Aparté AP 202) de ces mêmes Toccatte

Enfin un CD Frescobaldi idéalement accompli ! par Christophe Rousset

— Ecrit le dimanche 28 avril 2019 dans la rubriqueHistoire, Musiques”.

Jusqu’ici, nul CD Frescobaldi

_ pas même par la grâce de l’immense Gustav Leonhardt ! _

ne m’avait véritablement satisfait !

de lui, Girolamo,

le maître (1583 – 1643) vénéré de tant de compositeurs merveilleux

_ à commencer par Johan Jakob Froberger (1616 – 1667)…

Eh bien ! le maléfice vient de se rompre,

au moins pour ma satisfaction personnelle ! _ je commençais à désespérer gravement… ;

ou bien était-ce moi-même qui me révélais incapable de pouvoir apprécier sa musique !!! _

avec le CD Aparté AP 202  de Christophe Rousset

interprétant les Toccate e partie d’intavolatura di Cimbalo, libro primo

(de 1615, mais données ici dans la version de 1637),

sur un clavecin original anonyme de la fin du XVIe siècle,

remanié par Rinaldo de Bertonis, en 1736…

Tout enfin, ici, coule et chante de source…

Ce dimanche 28 avril 2019, Titus Curiosus – Francis Lippa

J’ai donc recherché, puis retrouvé _ parmi les CDs de ma discothèque _, une interprétation _ complète, elle : de 3′ 46 _ de cette même Toccatta Settima de Girolami Frescobaldi,

par le cher Pierre Hantaï, en 1996, sur un CD Astrée Auvidis E 8585 :

tout à fait excellente, elle aussi…

Ce mardi 14 septembre 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

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