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Francesco Piemontesi une fois encore au sommet : en un magistral double album Pentatone « Liszt Transcendantal Etudes & Piano Sonata » _ ou la perfection de l’interprétation la plus subtilement incarnée d’un immense compositeur…

19sept

Le merveilleux pianiste Francesco Piemontesi _ né à Locarno le 7 juillet 1983  _ nous conduit à nouveau au sommet en un magique magistral double album Pentatone PTC 5187 052 « Liszt Transcendantal Etudes & Piano Sonata« , enregistré à Lugano en avril-mai 2021,

et tout juste paru le 1er septembre dernier…

Les titres de mes 6 précédents articles sur le génie _ mais oui ! _ d’interprétation de Francesco Piemontesi témoignent de ma constante superlative admiration pour son piano, dans Mozart, Schubert, comme Liszt _ et aussi Debussy _ :

_ le 26 décembre 2018 : «  » ;

_ Le 6 juin 2019 : «  » ;

_ le 27 juin 2019 : «  » ;

_ le 25 septembre 2019 : «  » ;

_ le 29 octobre 2019 : «  » ;

_ et le 24 octobre 2020 : «  » ;

C’est l’article de Jean Lacroix, très justement intitulé « Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source« , paru avant-hier 17 septembre, sur le site de Crescendo, qui m’a appris l’existence _ ignorée jusqu’alors ! _ de ce double CD publié par l’excellent label Pentatone ; et m’a fait me précipiter chez mon disquaire préféré  pour me le procurer _ ce double CD « Liszt – Transcendantal Etudes & Piano Sonata – Francesco Piemontesi«  du label Pentatone, d’ailleurs, ne se trouvait pas sur la table des nouveautés, mais était tout simplement rangé, et en tête, sur une étagère au rayon « Liszt«  ; je n’ai donc pas eu de peine à le dénicher…

Voici donc cet article efficace et très juste, « Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source« , de Jean Lacroix :

Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source

LE 17 SEPTEMBRE 2023 par Jean Lacroix

Franz Liszt (1811-1886) :

Études d’exécution transcendante S. 139 ; Sonate pour piano en si mineur S. 178.

Francesco Piemontesi, piano. 2021.

Notice en anglais et en allemand.

96.00.

Un album de deux CD Pentatone PTC 5187 052.

Depuis sa troisième place au Concours Reine Elisabeth 2007, remporté cette année-là par Anna Vinnitskaya, le pianiste suisse Francesco Piemontesi (°1983) a fait son chemin, ô combien ! Né à Locarno, il a étudié à Hanovre avec Arie Vardi, mais a aussi pu travailler avec Alfred Brendel, Murray Perahia ou Alexis Weissenberg. Crescendo a suivi son parcours de façon régulière (lire l’entretien avec Pierre-Jean Tribot du 21 octobre 2020 _ publié sous le titre « Francesco Piemontesi, pianiste réflexif et discophile« … _). Piemontesi a enregistré pour plusieurs labels (Avanti, Naïve, Claves), notamment des pages de Mozart, Debussy, Dvořak ou Schumann. Pour Pentatone, il a gravé des œuvres de Schubert, un « Bach Nostalghia », ou un programme qui regroupait Schoenberg, Messiaen et Ravel. Avec ce dernier label, il prolonge son exploration du répertoire de Liszt, entamée avec brio pour Orfeo en 2017 _ cf mes propres articles des 26 décembre 2018 et 6 et 27 juin 2019 auxquels je viens de donner ci-dessus les liens… _ par les deux premières Années de pèlerinage et Deux Légendes, deux albums élégants agrémentés par des DVD, dont un documentaire aux superbes images, signé par Bruno Monsaingeon. Le nouveau programme Pentatone est non seulement alléchant, il est aussi audacieux.

La genèse des Études d’exécution transcendante s’étend sur près de vingt-cinq ans, cinq lustres au cours desquels, au fil du temps, Liszt a creusé la technique, fait des choix et insisté sur le développement. La vision aboutit en 1851 à un résultat fascinant : ces douze pages sont devenues un redoutable exercice de virtuosité, nourri du bagage littéraire et poétique que le génie hongrois du piano a accumulé. Tout ici est de haut vol _ et pas seulementent l’exécution qu’a en donner l’interprète… _, des frénétiques et mystérieux Feux follets (n° 5), à une valeureuse Chasse sauvage (n° 8) aux rythmes syncopés, ou encore, aux Harmonies du soir (n° 11). C’est l’étude la plus célèbre du recueil, une véritable incarnation poétique remplie de paix, de bonheur spirituel, de cohérence contemplative qui fait penser à la plénitude lamartinienne ; une musique d’une grande pureté _ voilà. On n’oubliera pas non plus la quatrième étude, Mazeppa, dédicacée à Victor Hugo, magistrale _ oui _ évocation d’un poème des Orientales ; très dramatique, c’est la substance du futur poème symphonique du même titre, et d’une version pour deux pianos et à quatre mains. Avant la découverte de l’ensemble sous les doigts de Piemontesi, il faut aller en plage 11 du premier disque et s’enivrer de ces Harmonies du soir pour se persuader que le pianiste suisse, technicien impeccable, possède le sens de la couleur, la fluidité des accents habités, l’élégance généreuse et la capacité expressive, le tout mêlé à une concentration de jeu phénoménale _ tout cela est de la plus haute justesse.

En 1964, lorsqu’il écrivait sa biographie sur Liszt pour les éditions Seghers (n° 5 de la collection « Musiciens de tous les temps »), Alfred Leroy avait souligné à quel point les Études d’exécution transcendante sont redoutables pour ceux qui s’affrontent à ce monument d’une durée dépassant l’heure : Elles doivent être exécutées avec un art fait de sensibilité, de nuances, de demi-teintes habilement ménagées, de grandioses orchestrations et de colorations délicates. Point d’acrobaties spectaculaires et vaines, point d’inutiles et fausses apparences, mais une pénétration de tout ce que ces Études enclosent de raffinement et de subtilité _ oui. À cette ligne directrice, qui convient tout à fait _ parfaitement _ à la vision de Piemontesi, le musicologue aurait pu ajouter, s’il avait connu le Suisse, des qualités qui sont les siennes : l’art des contrastes qui apparaît dès le Prélude et le Molto vivace qui suit, le dépouillement tendre ou rêveur _ c’est là un trait de jeu très présent chez ce subtil et magistral interprète _ qui parcourt le Paysage (n° 3) ou la Vision (n° 6), l’atmosphère entre ombre et lumières, proche de l’improvisation _ oui _, qui saupoudre la Ricordanza (n° 9). Piemontesi invite l’auditeur à un parcours exaltant, avec un piano très présent, capté à Lugano au printemps 2021 dans l’Auditorium Stelio Molo de la Radio Suisse Italienne (RSI). Lorsque le voyage s’achève sur le Chasse-neige, ce tableau d’un lyrisme si parfait qui marque la fin d’une aventure vécue intensément avec un artiste à la sensibilité épanouie _ oui ! _, on éprouve une vraie tristesse à le quitter… On n’oublie pas les versions déjà historiques de Claudio Arrau, Lazar Berman, Alfred Brendel ou György Cziffra, pour ne citer qu’elles, ni des signatures plus récentes, celles de Bertrand Chamayou, Marie-Claire Le Guay, Vesselin Stanev ou Gabriel Stern. Mais la vision de Francesco Piemontesi ne peut que susciter d’absolus éloges _ parfaitement ! Notre plaisir d’écoute est de cette hauteur d’intimité et grandeur à la fois…

Autre monument, autre réussite, la Sonate en si mineur, achevée à Weimar le 2 février 1853, qui occupe seule le deuxième disque _ écouter et regarder aussi cette superbe prise vidéo (d’une durée de 29′ 35) de Francesco Piemontesi interprétant cette célèbre Sonate en si mineur en concert à Prague le 1er novembre 2020, au magnifique Rudolfinum ; le double CD Pentatone, lui, a été enregistré, 6 mois plus tard, à l’Auditorio Stelio Molo de la Radiotelevisione Svizzera (RSI) à Lugano en avril et mai 2021… La dimension introvertie _ assez stupéfiante ! _ avec laquelle Piemontesi entame _ et l’oreille et le goût doivent aussitôt s’y adapter !.. _ ce long propos met en place une architecture qui va peu à peu _ oui _ installer un climat où la virtuosité, la véhémence, la dynamique et la netteté _ elle est très importante, et m’enchante dans le jeu d’interprète ultra-exigeant envers le respect le plus grand de la partition qui est celui de Francesco Piemontesi… _ vont s’imposer. Cette musique à couper le souffle _ en effet _ prend sous les doigts du pianiste suisse un caractère qui allie la sidérante beauté plastique _ voilà _ imaginée par le génie lisztien à une tension qui ne se relâche pas _ voilà. Ce piano peut se nimber d’une grande pudeur _ oui, et tendresse _, comme se réclamer d’un appel à une dimension grandiose _ vers le sublime _ au sein de laquelle la démesure _ aussi _ se laisse libre cours. Mais Piemontesi n’oublie jamais, et c’est en cela qu’il nous séduit, de veiller à conserver une sonorité qui sait combiner le murmure (Andante sostenuto) à une intense réflexion _ oui. Il manie les plans sonores avec une habile science des contrastes _ jamais artificielle ni poussée _ et une noble sensibilité _ c’est essentiel ! _, qui va conclure la sonate comme si elle s’effaçait, à la manière d’un baisser de rideau.

Ici aussi, la discographie est riche. On chérit les grandes réussites d’Argerich, Arrau, Brendel, Cziffra, Horowitz et ses sorcelleries, Pogorelich, Pollini, Richter, Rubinstein trop oublié, Zimerman… Mais on s’attarde aussi à de plus proches de nous : Colom _ cet immense pianiste catalan que j’apprécie énormément (c’est lui qui, en 1995, m’a fait découvrir et adorer la merveilleuse musique à nulle autre pareille de Manuel Blasco de Nebra ; et écouter un Mompou aussi beau qu’interprété par Federico Mompou lui-même : cf notamment mon article « «  du 23 avril 2022…) _, Dalberto, Grosvenor, Hamelin, Hough ou Yundi Li. Francesco Piemontesi rejoint cette pléiade qualitative en servant _ voilà ! _ Liszt avec toute la passion et la grandeur qu’il mérite. Pour la petite histoire, on signalera que la notice de ce superbe _ oui, oui, oui _ double album est signée par Nike Wagner, arrière-arrière-petite-fille de Liszt et fille de Wieland Wagner _ en effet.

Son : 9  Notice : 7  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

À nouveau,

une merveilleuse et indispensable réalisation discographique du décidément parfait, chaque fois, Francesco Piemontesi.

Ce mardi 19 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Le trésor singulier de la brillante réussite de Stephen Hough dans l’intimissime sublimissime « Musica callada », un des chefs d’oeuvre les plus marquants du XXème siècle musical, de Federico Mompou…

04juil

Ce jeudi 4 juillet 2023,

l’article « Chants magnétiques » de Jean-Charles Hoffelé _ qui a étrangement un peu tardé à se pencher sur ce nouveau CD Mompou de Stephen Hough… _ vient remettre le focus sur une des plus épatantissimes réussites d’interprétation discographique de ces derniers mois :

le CD « Musica callada » de Stephen Hough, soit le CD Hyperion CDA 68362,

sur lequel je me suis penché au moins à deux reprises, le 11 février et le 21 mars derniers,

en mes articles « « 

et « « …

Cette « Musica callada » de Federico Mompou,

un sublimissime chef d’œuvre d’intimité musicale époustouflant, une des plus extraordinaires musiques du XXième siècle, en sa stupéfiante éblouissante singularité…

Avec la qualité d’écoute, puis de riche dialogue, qu’elle réclame aussi de l’auditeur…

Voici donc cet article _ un peu tardif tout de même… _ de Jean-Charles Hoffelé, à l’oreille pourtant assez bien affutée :


CHANTS MAGNÉTIQUES

Musique du silence, plutôt que musique silencieuse _ bien sûr : minimale en ses moyens, maximale en ses effets poétiques sublimes… Dès le bruissement d’ailes dorées de l’Angelico qui ouvre le Livre de 1959 (et donc tout le cycle écrit sur presque dix ans _ en effet _), Stephen Hough ouvre la porte mystique que désignent les fragments de chansons catalanes, les esquisses brisées de rythmes de sardanes : música callada, música catalana, le pianiste anglais sait, depuis sa prodigieuse relecture des Canciónes y Danzas, Charmes et autres Paisajes, que le silence chez Mompou est la manifestation de la _ plus haute, sublime _ spiritualité.

Un peu plus d’un quart de siècle séparent les deux albums, c’est peu dire que Stephen Hough aura pris le temps de se perdre et de se trouver dans ces effleurements de notes, dans cet hypnotique labyrinthe de songes éveillés.

Il se garde bien comme tant d’autres d’en réduire jusqu’à l’abstraction, jusqu’à la blancheur ces presque-riens où s’impose le souvenir des Préludes les plus murmurés de Debussy.

Son piano prône le plein _ oui : de sens… _ jusque dans le quasi silence, la profondeur dans l’immatériel, et joue des timbres comme de ceux d’un gamelan lointain. Fascinant, et si différent _ en effet : une lecture très singulière, mais parfaitement juste, elle aussi (après Mompou lui-même, ainsi que cet autre catalan qu’est Josep Colom), en sa singularité… _ de tout ce qu’on y aura tenté, peut–être l’un de ses plus grands disques, écoutez seulement _ très judicieux conseil !

LE DISQUE DU JOUR

Federico Mompou
(1893-1987)


Música callada (Intégrale)

Stephen Hough, piano

Un album du label Hypérion CDA68362

Photo à la une : le pianiste Stephen Hough – Photo : © Andrew Crowley

Revenir donc à l’écoute de cette superbissime interprétation par le pianiste anglais de ce chef d’œuvre absolu du catalan Mompou…

Ce mardi 4 juillet 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

A nouveau à propos de la « Musica callada » de Federico Mompou par Stephen Hough, un très détaillé et judicieux point de vue pour une splendide réussite discographique, et un CD nécessaire, après et avec ceux de Federico Mompou lui-même et la magnifique Josep Colom (le re-découvreur-interprète de l’extraordinaire Manuel Blasco de Nebra)…

21mar

À nouveau à propos de la sublime « Musica callada » de Federico Mompou interprétée ici par Stephen Hough _ soit le récent CD Hyperion CDA68362 _,

et suite à mes deux articles des 11 février «  » et 15 février derniers, 2023, « « ,

voici ce jour un très détaillé et judicieux point de vue de Jean Lacroix, paru hier lundi 20 mars sur le site de Crescendo, intitulé « Les sonorités de l’évaporation pour la Musica callada » :

Les sonorités de l’évaporation pour la Música callada 

LE 20 MARS 2023 par Jean Lacroix

Federico Mompou (1893-1987) : Música callada. Stephen Hough, piano. 2020. Notice en anglais, en français et en allemand. 68.40. Hyperion CDA68362.

Il est assez difficile de traduire et d’exprimer le vrai sens de Música Callada dans une langue autre que l’espagnol. Le grand poète mystique, san Juan de la Cruz, chante dans une de ses plus belles poésies : la música callada, la soledad sonora, cherchant à exprimer ainsi l’idée d’une musique qui serait la voix même du silence _ voilà. La musique gardant pour soi sa voix callada, c’est-à-dire qui « se tait » _ tue _ pendant que la solitude se fait musique. Ces propos de Federico Mompou _ i Dencausse (c’est là le nom de sa mère), Barcelone, 16 avril 1893 – Barcelone, 30 juin 1987 _ sont cités par Jérôme Bastianelli dans la biographie qu’il consacre au compositeur barcelonais (Actes Sud, 2021, p. 129 – nous avons présenté ce livre le 4 mai 2021). Ces quatre cahiers pour piano, dont la composition s’étend de 1951 à 1967, inspirés donc par les écrits de saint Jean de la Croix, sont une expérience esthétique à la fois spirituelle, pour ne pas dire métaphysique, mais surtout destinée, toujours selon les dires de leur créateur, à pénétrer les grandes profondeurs de notre âme. C’est en tout cas un motif de fascination, un modèle de simplicité austère _ sobre, minimale _ et chaleureuse en même temps, qui plonge l’auditeur dans un univers où l’économie de moyens est d’une rare efficacité.

Les interprètes qui se sont penchés sur la partition ont bien compris la portée de ces miniatures, dont la durée ne dépasse jamais les quatre minutes, la plus courte, la huitième du premier « cuaderno », Semplice, se contentant même de quarante-cinq secondes. Si la dédicataire du quatrième cahier, Alicia de Larrocha, n’a laissé que ce témoignage partiel pour Decca, si Arcadi Volodos _ un interprète qui ne m’agrée pas : ni sobre, ni chaleureux… _ n’a gravé que des extraits de l’ensemble (Sony, 2018), d’autres se sont lancés dans l’intégrale, souvent avec bonheur. C’est le cas de Remei Cortes Ayats (Pavane, 2002), Jordi Masó (Naxos, 2002), Josep Colom (Mandala, 2002) _ parfait ! Et c’est Josep Colom qui m’a fait découvrir (et largement partager !) cet extraordinaire compositeur qu’est Manuel Blasco de Nebra (Séville, 2 mai 1750 – Séville, 12 septembre 1784) avec son prodigieux CD Mandala 4847 : écoutez ici ! ; cf mon article du 10 avril 2020 : « «  _, Martin Jones (Nimbus, 2004), Steffen Schleiermacher (MDG, 2013) ou Lily Gregorian (Orchid Classics, 2021). Récemment, notre compatriote Thérèse Malengreau (Soupir, 2022) a prouvé son affinité profonde avec Mompou. Jean-François Heisser en a fait un audio-livre pour Actes Sud en 2013, d’une superbe tenue. Quant au compositeur _ LA référence, forcément : magnifique !.. _, il a lui-même enregistré sa version en 1974, dans un style librement contemplatif et proche de l’improvisation _ comme cela doit être toujours, et sans nulle exception, jamais, le cas…. On la retrouve dans un _ indispensable _ coffret Brilliant de 4 CD (2009) qui contient, sous ses doigts, ses œuvres complètes pour piano.

Le pianiste britannique Stephen Hough (°1961) a déjà enregistré un album de Mompou, salué par la critique, contenant une variété de petites pièces. C’était en 1997 ; près de vingt-cinq ans plus tard, à Londres, du 22 au 24 octobre 2020, il s’est penché sur les quatre cahiers de Música callada. On connaît les qualités stylistiques de ce défricheur de pages peu fréquentées, son souci de clarté _ oui _ et sa capacité à créer des univers adaptés aux spécificités _ voilà, les idiosyncrasies… _ des compositeurs qu’il aborde. Dans la notice signée par le critique musical Philip Clark, ce dernier rappelle que Stephen Hough a, un jour, évoqué les sonorités de Mompou comme représentant « la musique de l’évaporation », jolie formule qui définit bien l’essence créative de cet univers ibérique _ catalan, en fait ! lui dont la mère était bigourdane, sur l’autre versant des Pyrénées… _ très original, qui amène aussi à se poser la question suivante : comment devons-nous écouter une musique qui cherche désespérément à ne pas être là ? Le virtuose y répond de manière sensible, sans pathos, sans introspection déplacée _ comme de nécessaire ! _, sans écarter la part d’atmosphère mystique que l’on peut y déceler, mais avec pudeur et franche simplicité _ voilà, voilà ! _, dans un son souvent cristallin qui apporte de la lumière nuancée et du raffinement _ à la Cantico, ce chef d’œuvre (1936, 1944, 1951) du poète Jorge Guillen (Valladolid, 18 janvier 1893 – Malaga, 6 février 1984) ; rappelons que les 4 livres de Musica callada sont, eux, de 1959, 1962, 1965 et 1967 : Mompou (1893 – 1987) et Guillen (1893 – 1984) sont de très exacts contemporains… _, même dans les pages les plus émaciées.

Il faut s’imprégner des vingt-huit pièces de Música callada et de leur lecture par le guide à la fois secret et ouvert qu’est Stephen Hough. Il n’oublie pas qu’en ce qui concerne Mompou, on peut évoquer des réminiscences de Chopin, mais aussi le situer entre les univers d’Erik Satie et de John Cage _ ce que sait très discrètement faire Stephen Hough. Car le souci de la concision, qui va jusqu’à ce qui est inexprimé derrière la musique, ouvre les portes du silence qui est à l’intérieur même des notes. Il faudrait disséquer chaque feuillet de ce magnifique panorama pour saisir toute la richesse magnétique que Stephen Hough met en évidence _ oui. Citons en tout cas le premier, Angelico, qui installe le mystère, le troisième, Placide, où pointe une forme de gaieté, le cinquième, avec ses rappels des cloches de l’enfance, le septième, un Lento mélancolique ou le onzième, un Allegretto appuyé. Mais encore le quinzième, Lento. Plaintif, où Chopin est invité en filigrane, le dix-huitième, Luminoso, qui porte bien son nom, le vingt-deuxième, Molto lento e tranquillo, infiniment douloureux, ou le vingt-huitième, ce Lento qui clôt ces inclassables cahiers par une lumineuse percée d’espoir.

Stephen Hough signe une approche à la fois dense et épurée _ oui, moderne _, que chacun pourra appréhender selon sa propre sensibilité. C’est sans doute ce qui fait la qualité intrinsèque d’une interprétation qui se révèle pleine de questions en raison de la vie intérieure qui s’en dégage. Comme le dit Philip Clark, la musique n’a aucune emprise sur vous. À la place, elle force les auditeurs à réfléchir à leurs propres relations avec les sons, à la manière dont le son peut affecter leur propre solitude. Mais aussi, ajoutons-le, la part de secret et d’intimité qui est essentielle à chacun d’entre nous. Cet album, à marquer d’une pierre blanche _ oui : il a touché le mélomane fidèle que je suis et à Josep Colom, et à Federico Mompou lui-même… _, vient se placer tout en haut d’une riche discographie.

Son : 10  Notice : 10  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

Un CD nécessaire.

Ce mardi 21 mars 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Après Federico Mompou lui-même, et puis Josep Colom, tous deux catalans, écouter la sublime « Musica callada » de Mompou par l’excellent anglais Stephen Hough : quand le miracle du silence de la musique rencontre celui du silence vibratoire le plus subtil du poème…

11fév

Après Federico Mompou lui-même (Barcelone, 16 avril 1893 – Barcelone, 30 juin 1987)  _ dans le coffret Brilliant 5 029365 651523, en un sublime enregistrement à Barcelone en 1974 pour le label Ensayo ; cf aussi mon article du 11 avril 2020 : «  «  _,

et puis Josep Colom (Barcelone, 11 janvier 1947) _ d’abord dans le coffret Mandala 5021/24, en un enregistrement de décembre 1991 et février, mars et juin 1992 ; puis en un nouvel enregistrement Eudora EUD-SACD 2101, à Saragosse les 16 et 17 avril 2019 ; cf mon article enthousiaste du 23 avril 2022 : « «  (ainsi que cette brève vidéo (de 2′ 32) du « Moderato«  par lui…) ; ainsi que l’article du lendemain, le 24 avril 2022, avec accès à la vidéo (de 85′) d’un concert donné par lui en 2018 à la Fundacion Juan March à Madrid : « « , mais sans rien de Mompou cette fois-là….. _,

tous deux catalans,

écouter la sublime « Musica callada » (1959, 1962, 1965 et 1967) de Mompou

 maintenant par l’excellent anglais Stephen Hough (Heswall, 22 novembre 1961) en un enregistrement Hyperion CDA 68362, à Londres, les 22, 23 et 24 octobre 2020 :

un magnifique CD qui vient tout juste de paraître…

À écouter avec la plus complète sérénité _ pour intituler les 28 pièces de cette sublime « Musica callada« , Mompou emploie trois fois le mot « tranquillo » et quatre fois le mot « calme« … _ que demande cette œuvre sans pareille…

Préparez-vous à accueillir vous aussi ainsi ces moments humbles et si rares d’extase, dans lesquels la qualité même du silence à recevoir a une intense part ; et rappelle le merveilleux « Canticò » de Jorge Guillén (Valladolid, 18 janvier 1893 – Malaga, 6 février 1984), de 1928, ainsi que je l’évoquais déjà en mon article «  » du 11 avril 2020…

Ou l’évidence heureuse de la très grande proximité des plus subtilement intenses sereines vibratoires musique et poésie au plus près du plus beau de la vie…

Ce samedi 11 février 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Et puis regarder-écouter Josep Colom en un concert de « Moments musicaux », à la Fondation Juan March, à Madrid, le 10 octobre 2018

24avr

Et pour découvrir encore le trop méconnu Josep Colom,

cette fois en concert, en un programme de « Moments musicaux« ,

sans pièces de Frederic Mompou et Manuel Blasco de Nebra, mais de Schubert (4), Schœnberg (4), Beethoven (2), Bach (1), Chopin (1) et Brahms (1) :

Arnold Schœnberg : Klavierstuck Op. 19 nº 3 ;

Ludwig van Beethoven : Andante, de la Sonate nº 13 en Mi bémol majeur Op. 27 nº 1, “Quasi una fantasia” ;

Franz Schubert : Impromptu D 899 nº 3 ;

Frédéric Chopin : Étude en La bémol majeur Op. 25 nº 1 ;

Arnold Schœnberg : Klavierstuck Op. 19 nº 1 ;

Johann-Sebastian Bach : Prélude en Do mineur BWV 871, du Clavier bien tempéré ;

Franz Schubert :  Moment musical D 780 nº 4 ;

Arnold Schœnberg : Klavierstuck Op. 19 nº 4 ;

Franz Schubert : Moment musical D 780 nº 5 ;

Johannes Brahms :  Rhapsodie Op. 119 nº 4 ;

Ludwig van Beethoven :  Allegretto, de la Sonate nº 6 en Fa majeur Op. 10 nº 2 ; 

Franz Schubert : Moment musical D 780 nº 6 ;

Arnold Schœnberg : Klavierstuck Op. 19 nº 6 ;

voici de quoi se réjouir musicalement avec cette superbe vidéo de 85′

de Josep Colom en ce très beau concert donné le 10 octobre 2018 à la Fondation Juan March à Madrid _ Josep Colom a ici 71 ans…

Ce dimanche 24 avril 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

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