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Un très juste retour à la ravelienne « L’Heure espagnole » des Siècles et François-Xavier Roth…

13sept

Ce jour,

un remarquable très juste article de Jean-Luc Clairet sur le site de ResMusica, intitulé « Une heure en Espagne avec François-Xavier Roth et Isabelle Druet« …

Une heure en Espagne avec François-Xavier Roth et Isabelle Druet

Le chef des Siècles poursuit son exploration de l’univers ravélien. Pour L’Heure espagnole, il invite Isabelle Druet à remettre sa Concepción sur le métier discographique. Il fait de même avec le Boléro, qu’il enregistre cette fois dans une instrumentation tout à fait inhabituelle.

En 2016, Isabelle Druet avait déjà gravé avec Leonard Slatkin (CD Naxos) le premier des deux opéras de Maurice Ravel. Pour paraphraser un célèbre critique (il fut rédacteur en chef du seul magazine d’opéra français), elle a exactement « la voix du rôle ».Comme son actuelle consœur Stéphanie D’Oustrac, comme leur aînée à toutes deux : Jane Berbié. La voix qui convient à cette surprenante pantalonnade, qualifiée en son temps de « vaudeville pornographique », aujourd’hui encore toujours désarçonnante pour qui la découvre, mais, à y réfléchir, finalement pas plus inconséquente que la moindre pièce de Feydeau. Ce succès théâtral de Maurice Étienne Legrand (alias Franc-Nohain) avait séduit le compositeur : d’avril à octobre 1907, il en réalisa la preste version musicale piano-chant, et, en 1909, le complet achèvement orchestral. Composée en même temps que la Rhapsodie espagnole, L’Heure espagnole est, comme ce chef-d’œuvre pour orchestre, l’occasion pour Ravel de mettre en note subtiles les fragrances hispanisantes échappées jusqu’à Saint-Jean de Luz, sa villégiature estivale à deux pas de Ciboure, commune où il avait vu le jour. Une miniature (moins de cinquante minutes de musique) mais un grand orchestre pour un scénario souriant qui professe qu’en amour, le tour de chacun arrive tôt ou tard _ voilà ! _, de quelque milieu social que l’on soit : une philosophie de vie qui méritait assurément son opéra.

Entre ses deux soupirants (Don Iñigo Gomez, banquier pesant ; Gonzalve, poète autocentré) et un déménageur dévoué _ Ramiro _ qu’elle fait cavaler entre boutique et chambre, Concepción est une femme qui a fort à faire lorsque son horloger de mari s’absente une heure par semaine. L’héroïne de L’Heure espagnole est une femme entourée d’hommes. De même Isabelle Druet est une cantatrice entourée de la fine fleur virile de l’actuel chant français _ voilà _ : en Don Iñigo Gomez, un Jean Teitgen imposant autant que ravi de s’adonner à l’auto-dérision ; en Gonzalve, un Julien Behr élégant et ivre de sa prose ; en Torquemada, un Loïc Félix mercantile et lucide, tous coiffés au poteau par le Ramiro juvénile de Thomas Dolié, suprême en ravi de la crèche. Les Siècles huilent avec virtuosité les ressorts de cette brève heure d’ horloge que Ravel, dix ans plus tard, complétera par son second opéra _ sur un livret de ColetteL’Enfant et les sortilèges, les deux œuvres, génialement différentes _ oui _, formant un diptyque idéal dont l’on comprend mal qu’ils soient si rarement donnés dans sa globalité à la scène _ en effet.

Si L’Heure espagnole, introduite par une merveilleuse volière de tic-tacs _ oui _, voit son lyrisme systématiquement empêché, inféodé qu’il est au rythme de la conversation _ qui va bon train, oui _, il en va tout autrement pour le Boléro composé vingt ans plus tard : « sans musique », dixit François-Xavier Roth (deux mélodies majeur/mineur et un seul rythme), il n’est que transe hypnotique immortalisant son auteur en charmeur de serpent musical _ oui. Le voici proposé dans une nouvelle édition critique qui réintroduit, à la place de la caisse claire, le tambour (et même deux : initiative qui ferait retrouver le sourire à Jacques Villeret, génial interprète du Batteur du Boléro de Patrice Leconte) : le sarrussophone à la place du contrebasson, et même les castagnettes d’origine, « tous instruments précis pour lesquels Ravel a composé », spécifie encore Roth. Les Siècles rutilent bien évidemment _ oui ! _ dans cette redécouverte….

Maurice Ravel (1875-1937) :

L’Heure espagnole. Loïc Félix, ténor (Torquemada) ; Isabelle Druet, mezzo-soprano (Concepción) ; Julien Behr, ténor (Gonzalve) ; Thomas Dolié, baryton (Ramiro) ; Jean Teitgen, basse (Don Iñigo Gomez) ;

Les Siècles, direction : François-Xavier Roth.

1 CD Harmonia Mundi.

Enregistré à La Seine Musicale, Boulogne-Billancourt les 23 et 24 mars 2021.

Notice de présentation trilingue (français, anglais, allemand).

Durée : 64:36

Un très lucide article, pour un chef d’œuvre de CD.

Ce mercredi 13 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Absolument stupéfiant : le « Bolero » parfait de sensualité en sa plus stricte scrupuleuse justesse, et vie, de François-Xavier Roth et Les Siècles…

17juin

En la série superbe de ses enregistrements raveliens,

François Xavier Roth et son ensemble Les Siècles, viennent de nous offrir _ avec « L’Heure espagnole«  _ un « Boléro » de Ravel absolument parfait ! _ en écouter ici les sublimissimes 15′ 16 du podcast !!!

À un point tout simplement stupéfiant…

Soit l’album Harmonia Mundi HMM 905361.

Voici ce que de l’ensemble de cet album _ et surtout, d’ailleurs, de « L’Heure espagnole«  _, sur son site Discophilia,

et sous l’excellent intitulé « Fantaisie française« ,

en dit l’excellent Jean-Charles Hoffelé :

FANTAISIE FRANÇAISE

Qu’on ne s’y trompe pas, l’Espagne de fantaisie _ tout à fait ! _ qu’illustre Maurice Ravel dans son orchestre épicé (et pas seulement horloger), est un pur prétexte _ voilà… _ à l’Esprit français de _ finesse de _ la conversation _ clarissime _ qu’illustre avec un brio canaille _ mais dénué de la moindre vulgarité… _ le formidable livret de Franc-Nohain.

Il y faut mettre une prononciation vive et subtile _ oui _, infiniment mouvante _ voilà _ à l’égal d’un orchestre pensé en partenaire de chambre, ce que Les Siècles font entendre mieux qu’aucune autre formation _ voilà ! c’est là on ne peut plus excellemment dit. À ce jour, le disque n’aura capturé que des formations dont le format sonore était souvent trop opulent, seulement idéalement apparié avec le quintette final _ soit la sublime scène XXI (voir ici la vidéo) de cette « Heure espagnole« -ci…

Les timbres des instruments français peu ou prou de l’époque de Ravel _ et c’est un formidable plus ! _ rétablissent un _ magnifique, époustouflant... _ équilibre _ idéal ! _ entre la finesse _ subtilissime de cocasse… _ des parties vocales et l’art tour à tour évocateur (écoutez comment les instruments « frisent » autour de l’entrée de Gonzalve, qui chante d’abord sous le balcon), ou impétueux, de l’habillage orchestral _ somptueux, idéal, de ce sublime orchestrateur qu’était Ravel… Quelle cambrure dans l’air de Concepcion et quel caractère chez Isabelle Druet. Aurait-elle entendu Fanny Heldy, amoureuse avec cravache ? C’est possible, elle n’en est pas à sa première horlogère, y compris au disque, mais elle a encore raffiné son personnage depuis son enregistrement lyonnais pour Leonard Slatkin.

Subtilités dans la restitution des fantaisies _ oui _ de Franc-Nohain, exactitude absolue _ oui _ pour les notes et la prosodie de Ravel, surtout aucune caricature _ en effet _, ce que l’œuvre risque souvent à force de grossissement des personnages.

Merveilleux Loïc Félix dont on sent la tendresse pour son épouse infidèle, formidable Jean Teitgen dans un Don Inigo Gomez plus amoureux que potentat – sa petite aria avant d’entrer dans l’horloge est délicieuse –, déménageur certes amateur mais surtout bon garçon et jamais benêt selon Thomas Dolié. La palme revient surtout au Gonzalve, juste lunaire comme il faut, de Julien Behr qui varie son personnage : on le comparera à lui-même en réécoutant la version d’Asher Fisch (voir ici) _ tout cela rendant parfaite justice à ces si savoureux et intelligents chanteurs.

François-Xavier Roth et Les Siècles ajoutent en _ plus que luxueuse… _ coda le Boléro, hypnotique _ oui, oui, oui _ revue de détail de la machine orchestrale qui rayonne _ à la perfection !!! _ de timbres épicés et de rythmes brillants. Magnifique, et au tempo giusto _ voilà. La perfection !

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)


L’Heure espagnole, M. 52
Boléro, M. 81

Isabelle Druet, mezzo-soprano (Concepcion)
Julien Behr, ténor (Gonzalve)
Loïc Félix, ténor (Torquemada)
Thomas Dolié, baryton (Ramiro)
Jean Teitgen, basse (Don Inigo Gomez)

Les Siècles
François-Xavier Roth, direction

Un album du label harmonia mundi HMM905361

Photo à la une : le chef d’orchestre François-Xavier Roth – Photo : © Holger Talinski

Et voici aussi

ce que,

impatient, lui aussi, comme moi, d’entendre en toute priorité le « Bolero » de Ravel de François-Xavier Roth et ses Siècles en ce tout nouvel album de sa magnifique Intégrale Ravel en cours,

dit de cet extraordinaire « Bolero« -ci de François-Xavier Roth à la tête des Siècles,

Bertrand Balmitgere, sur l’excellent site de Crescendo, en un article intitulé, lui, « François-Xavier Roth en Hispanie : l’Intégrale Ravel à l’heure de Bolero » :

François-Xavier Roth en Hispanie : l’intégrale Ravel à l’heure de Bolero

LE 17 JUIN 2023 par Bertrand Balmitger

Maurice Ravel (1875-1937) :

L’Heure espagnole, M.52 ; Bolero, M.81 (Version originale Ballet 1928).

Isabelle Druet, mezzo-soprano ; Julien Behr, ténor ; Lotte Félix, ténor ; Thomas Dolié, baryton ; Jean Teitgen, basse.

Les Siècle, direction : François-Xavier Roth. 2021.

Livret en : français, anglais et allemand.

Texte chanté en français, traduction en anglais.

64’36.

Harmonia Mundi. HMM905361.

Nous l’attendions avec ferveur _ oui _ depuis de longues semaines… le voici enfin ! _ voilà ! Le nouvel opus de ce qui est sûrement le cycle le plus excitant du moment _ oui : quelle interprétation de pareille sublime musique ! _, à savoir les tribulations de François-Xavier Roth au sein de l’œuvre de Maurice Ravel. Ce dernier vole de succès en succès _ oui ! _ pour le plus grand bonheur de nos cœurs et de nos oreilles. Alors forcément quand s’annoncent l’Heure Espagnole et le Bolero, on ne tient plus en place !  _ mais on se précipite sur l’objet disque…

A tout seigneur tout honneur. Commençons donc par le totem de la musique orchestrale hexagonale. « Un ballet à caractère espagnol », tel est le Bolero de Maurice Ravel, interprété ici dans la version originale ballet 1928 (avec, entre autres, des castagnettes) restaurée par la RAVEL EDITION _ voilà. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la lecture que nous en donnent François-Xavier Roth et son Orchestre des Siècles ne manque pas de caractère et d’identité. C’est un véritable diorama du Piel de Toro. La réussite est totale _ oui ! _ et ne trouve d’équivalent que chez John Wilson (Chandos) ou Igor Markevitch (RTVE/Decca), c’est dire ! _ avec, en plus, la merveille des instruments choisis, et idéalement servis par une somptueuse prise de son de Jiri Heger et Alice Ragon.

Le résultat est à la hauteur de nos espérances et de notre attente _ c’est dit. Clarté, lucidité et intelligence _ oui : au service le plus humble de la plus scrupuleuse sensualité ravelienne ! Comme, bien sûr, cela se doit ; sans le moindre pathos, ni écart à l’égard du texte musical extrêmement précis de Maurice Ravel, l’horloger suisse… _, Roth est encore et toujours au sommet de son art _ oui ! tout simplement, oui ! La rigueur et la minutie _ voilà ! _ qui caractérisent sa direction n’empêchent en rien _ et surtout pas _ la vie, les couleurs chatoyantes et une petite dose subtile de folie _ tout cela est, voilà, parfaitement senti et dit ici…

Ces mêmes qualités sont indispensables dans la seconde œuvre de cet opus, L’Heure Espagnole. En effet, si on en exagère trop les traits, c’est très rapidement le dérapage, la faute de goût ou, pire, le grotesque _ exactement. Ravel est de la famille musicale de François Couperin ; et exige le plus parfait tact de la plus parfaite justesse et délicatesse, à vif mais sans pathos, ni écart de goût… Cette comédie est poétique _ oui _, un petit trésor de subtilité _ oui ! ; Ravel est toujours de la plus fine subtilité, dans le plus parfait sentiment naturel d’évidence…  _ et non un vaudeville. Elle requiert donc à sa tête un alchimiste capable d’allier _ voilà _ les sourires _ nets, mais jamais gros, ni encore moins grossiers, du texte _ et l’émotion _ profonde, en son extrême discrétion et politesse (très française)… _ qui naît de la musique. Nous savons pouvoir compter sur François-Xavier Roth pour préserver l’esprit ravélien _ si singulier _ dans toutes ses dimensions _ voilà : feuilletées, en effet, et oxymoriques, sans jamais le moindre chichi, ni préciosité incongrue, mal venue… Saluons bien évidemment la performance de haute volée de l’ensemble de la distribution vocale : Isabelle Druet, Julien Behr, Loïc Félix, Thomas Dolié, Jean Teitgen et Mathieu Pordoy _ chef de chant.

Vous l’avez compris c’est encore un total succès _ oui ! _, un de plus dans ce qui apparaît de plus en plus comme un parcours quasi sans faute.

Son : 10 – Livret : 10 –  Répertoire : 10 – Interprétation : 10

Bertrand Balmitgère

Une réussite incomparable, donc, que ce stupéfiant « Bolero« -là de Maurice Ravel par François-Xavier Roth…

Et j’ai préféré, pour ma part, réserver à demain, l’écoute-désouverte de cette « Heure espagnole« -ci de François-Xavier Roth et ses Siècles.

À demain dimanche, donc…

Ce samedi 17 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Les « faramineux Ravel » d’Eduard Van Beinum : un sommet de l’indispensable coffret des « Complete Recordings on Decca & Philips » que, pour notre enchantement, Decca republie ce mois de janvier 2023

30jan

Deux articles de l’excellent Jean-Charles Hoffelé,

« Le Mage d’Amsterdam« , en date du 15 janvier dernier _ pour la sortie, alors, du déjà magique album « Franck – Ravel : Orchestral Works » Decca Eloquence 482 5491 : je le possède aussi… _,

et « Valse mortelle« , en date du 29 juillet 2018 _ pour la présente sortie du somptueux coffret de 44 CDs « Eduard Van Beinum Complete Recordings on Decca & Philips » Decca 485 1387, que je me suis emprssé d’acquérir au plus vite… Pour mon immense joie… _,

viendraient, tous deux, si besoin, bien sûr, en était, confirmer mon absolu enthousiasme musical pour ces publications, en 2018 et maintenant en 2023, de ces transcendantes réalisations discographiques du chef Eduard Van Beinum (Arnhem, 3 septembre 1900 – Amsterdam, 13 avril 1959) pour les labels Decca et Philips…

Et tout spécialement pour ces (= ses) Ravel,

la « Rapsodie espagnole« , « La Valse« , et, au-dessus de tout, pour moi, le plus vertigineux « Boléro » :

écoutez ici ces podcasts !..

Voici donc ces deux excellents articles de Jean-Charles Hoffelé :


LE MAGE D’AMSTERDAM

Premier instrument, la contrebasse. Ce n’est pas si commun. Ajoutez dans l’arbre généalogique pour seule figure tutélaire côté musique un grand père chef d’harmonie militaire. Heureusement, Eduard van Beinum avait un frère, Co, violoniste de talent, il l’accompagnera, se mettant au piano, alors que le plus clair du temps il empoignait sa contrebasse, musicien du rang dans l’orchestre d’Arnhem : d’autres horizons s’ouvrent.

Mais enfin, une vie avec sa contrebasse risquait de manquer de sel, et au Conservatoire d’Amsterdam Eduard deviendra vite celui qu’on ira chercher pour conduire les concerts de l’orchestre des étudiants : battue claire, geste minimal _ oui _, mais cet œil déjà, qui infuse dans la mathématique des partitions des tendresses, des élans, une poésie _ voilà ! _ ; il sera chef d’orchestre, et, dès les quatre saisons de son magister à la tête de l’orchestre d’Haarlem, imposera un répertoire allant de Bach à Debussy.



Mengelberg
remarque son métier très sûr, s’enquiert de sa modestie _ essentielle : face à la musique… _, il lui faut un second, mais efficace, et puis une jeunesse qui ne pense pas à s’imposer. Il l’invite pour un concert avec son Concertgebouw en 1929. Le fluide passe entre cette baguette suggestive et l’orchestre ; Mengelberg, étonné, en fera deux ans plus tard son second, puis en 1938, le comité de l’orchestre préconise que la direction musicale soit partagée avec le jeune homme. La guerre et l’Occupation feront le reste, Mengelberg se perdant dans une collaboration passive qui lui vaudra de devenir un exilé de l’intérieur la Libération venue. Les musiciens du Concertgebouw savaient-ils qu’avec Van Beinum ils changeaient de siècle ?

Mieux, ils le voulurent, et de toute façon, le seul réel rival de leur poulain, Paul van Kempen, était lui aussi entaché de brun. Le style nouveau – balance parfaite, clarté des lignes, archets réglés, tempos stricts mais mesure libre _ et tout cela est bien sûr capital ! _ – qu’il avait infusé puis imposé face aux gestes démiurgiques de Mengelberg – va permettre au « son Concertgebouw » d’atteindre à ce rayonnement hédoniste que l’expressionisme du geste autocratique de Mengelberg avait relégué au second plan.

Le violoniste Bronislaw Huberman, à droite, en échange avec Eduard van Beinum à sa gauche – Photo : © Nationaal Archief

 

 

 

 

 

 

Van Beinum instrumentiste d’abord, savait les beautés capiteuses venues d’un autre âge qui déjà avaient fait la réputation de l’orchestre au temps de son fondateur Willem Kes. En quelques saisons il impose son style, élégant et troublant à la fois _ les deux : à la française, en quelque sorte… _ , où la rigueur de ses lectures qui veulent faire oublier les scories du postromantisme, passent inaperçues sous le foisonnement des timbres, la poétique des phrasés _ oui.

Le disque s’en mêla assez tôt, Siemens lui demandant dès 1943 quelques gravures (Variations Mozart de Max Reger, Variations symphoniques de Franck avec Géza Anda) qui furent publiées par Deutsche Grammophon, mais ce sera dans cette frontière encore imprécise où se côtoyaient les ultimes pressages 78 tours et le microsillon que le nouveau style du duo Van BeinumConcertgebouws’imposera. Decca leur fera signer un contrat, dotant les enregistrements de son nouveau système de captation, le « Full Frequency Range Recording » qui captura pour partie les soies et les velours de ce qui était alors le plus bel orchestre d’Europe.

Une grande session d’enregistrements en janvier 1946 devait ajouter au contrat une close supplémentaire. Après que Van Beinum eut enthousiasmé le public du Royal Albert Hall, remplaçant au pied levé Albert Coates à la tête du London Philharmonic, John Culshaw insista pour qu’ensemble ils gravent la Troisième Symphonie de Brahms, amorce de l’autre part de la discographie du chef neérlandais, bien plus rarement rééditée jusqu’à nos jours. À Londres, le discours de Van Beinum sera toujours plus serré, plus fusant, comme si l’absence des beautés hédonistes de la phalange néerlandaise ardait son style.

Philips succédera à Decca, captant enfin la magie sonore d’une formation dont l’acoustique d’un Concertgebouw vide avait toujours dérouté les preneurs de son du label britannique. Toute sa discographie officielle, y compris les nombreuses redites entre Londres et Amsterdam, entre le 78 tours, la monophonie et la stéréophonie, est enfin réunie _ voilà ! _ dans cette grande boîte magnifiquement ouvragée, deux textes éclairant l’art du chef, une iconographie abondante, la reproduction des attrayantes (et si inventives) pochettes d’origine, pour mieux accompagner l’auditeur dans ce voyage magique _ oui, oui…

Classiques parfaits, Bruckner ténébreux (il abordera Mahler avec plus de parcimonie, voir de distance), Schubert et Brahms plus tendres qu’épiques, Debussy et Ravel de pure magie _ absolument ! _, Sibelius fascinant, mais par où commencer vraiment ? Par les sortilèges de sa Shéhérazade, gravure oubliée, où se révèle tout l’art de ce conteur d’orchestre.

LE DISQUE DU JOUR

Eduard van Beinum
Complete Recordings on Decca and Philips

Œuvres de Johann Sebastian Bach, Georg Friedrich Haendel, Johann Christian Bach, Johannes Brahms, Wolfgang Amadeus Mozart, Gustav Mahler, Anton Bruckner, Jean Sibelius, Igor Stravinsky, Franz Schubert, Max Reger, Hector Berlioz, Claude Debussy, Maurice Ravel, Joseph Haydn, Ludwig van Beethoven, Felix Mendelssohn-Bartholdy, Nikolai Rimski-Korsakov, César Franck, etc.

London Philharmonic Orchestra
Concertgebouw Orchestra
Eduard van Beinum, direction

Un coffret de 44 CD du label Decca 4851387

Photo à la une : le chef d’orchestre Eduard van Beinum, à l’aéroport de Schiphol – Photo : © DR…

 

Et celui de 2018 :

VALSE MORTELLE

Il y a un tropisme français chez Eduard van Beinum _ on ne saurait mieux dire ! _ ses Debussy, ses Berlioz, ses Ravel dévoilent une poétique orchestrale _ voilà _ qui aura modifié la nature sonore du Concertgebouw telle qu’il l’avait héritée de Willem Mengelberg.

Ce mélange détonant d’élégance et de cruauté _ oui ! _ éclate dans une Valse vampirique, d’une suavité vénéneuse _ voilà ! _, étrange course à l’abîme _ bien sûr ! _ dont les envoûtements _ oui _ fascinent : cet orchestre si mobile, qui mord à la vitesse d’un aspic, sait être d’une seconde à l’autre sec puis voluptueux _ c’est cela ! _ ; c’est celui de Ravel-même _ absolument !!! _ , ce qu’illustre au même degré de perfection _ oui _ une Rapsodie espagnole moite, inquiétante, pleine de rumeurs et d’ombres dont les gitaneries n’auront jamais été aussi cante jondo. Mais le Boléro lui-même _ nous y voici ! _ , somptueusement étouffant _ parfaitement ! _, participe de la même _ fascinante et éblouissante tout à la fois _ saturation de l’espace.

Ce triplé Ravel est faramineux _ c’est le mot !!! _, après lui (ou avant dans l’ordre du disque), les Franck distillent une toute autre lumière. Psyché rêvé, très tendrement composé dans les soieries d’un orchestre décidément faramineux, est cent coudées au-dessus de ce que tous les orchestre français pouvaient alors y faire, et les Variations symphoniques, où le jeune Géza Anda dissipe le brouillard en phrasant tout, sont un modèle de style prenant le contrepied de l’estampe incarnée par Walter Gieseking et Landon Ronald, autre version majeure du 78 tours. Mais c’est à ce Ravel parfaitement délétère que vous irez d’abord _ en effet ! Et en boucle…

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)


Rapsodie espagnole, M. 54
La Valse, M. 72
Boléro, M. 81


César Franck (1822-1890)


Psyché, FWV 47
Variations symphoniques pour piano et orchestre, FWV 46

Géza Anda, piano
Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam
Eduard van Beinum, direction

Un album du label Decca 4825491 (Collection « Eloquence Australia »)

Photo à la une : © DR

 

Merci de ces fabuleuses rééditions d’un chef aussi juste…

Ce lundi 30 janvier 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

L’énigme à élucider du déni de cousinage effectif d’Edmond Gaudin (1903 – 1988) avec Maurice Ravel (1875 – 1937) : une énigme qui demeure à résoudre…

10oct

Pour répondre à une question précise d’Eric Rouyer

concernant mes recherches sur le cousinage luzien de Maurice Ravel avec les Hiriart et les Gaudin,

et leurs descendants…

L’énigme du déni de cousinage effectif d’Edmond Gaudin (1903 – 1988) avec Maurice Ravel (1875 – 1937) : c’est bien là une question cruciale.
 
La question de ce cousinage au 2d degré de Dominique Hiriart (1849 – 1926) avec Marie Delouart (1840 – 1917)
puis, au 3e degré, de leurs enfants respectifs Magdeleine Hiriart – Gaudin (1875 – 1968) et Maurice Ravel (1875 – 1937)
_ cousinage reconnu par leurs lettres de condoléances des 8 octobre 1910 (pour le décès de Charles Gaudin, survenu le 12 septembre 1910),
et 24 novembre 1914 (pour les décès, sur le front, des frères Pierre et Pascal Gaudin, survenus le 12 novembre 1914) _,
ne s’est vraisemblablement posée, aux deux enfants d’Edmond Gaudin (1903 – 1988), Charles-Paul Gaudin (1938 – 2006) et sa sœur Maylen Gaudin – Lenoir (1942),
que quand ils ont eu sous les yeux _ j’ignore si c’est avant ou après le décès de Magdeleine Hiriart – Gaudin, survenu le 19 juin 1968 : probablement après… _
ces deux lettres (de condoléances) de 1910 (« Ma chère cousine… Maurice Ravel ») et 1914 (« Mon cher Maurice… votre cousine, Madeleine »),
la première qui a été conservée par Magdeleine,
et la seconde, par Maurice…
Possiblement à l’occasion d’un travail préparatoire à une exposition commémorative en l’honneur de Maurice Ravel : vraisemblablement pour l’anniversaire du centenaire de la naissance du compositeur, en 1975…
Et quand ont été sollicités des témoignages de proches ayant connu de près le compositeur…
 
Il me semble que si Magdeleine Hiriart – Gaudin avait été encore vivante en 1975,
elle aurait parlé, elle, sans détours, et pour ces commémorations, de son cousin Maurice Ravel, et de leur parenté effective…
 
Par leurs témoignages, les belles-sœurs de Magdeleine, Jane Gaudin – Courteault (1880 – 1979) et surtout Marie Gaudin (1879 – 1976)
ont collaboré, elles, surtout la généreuse Marie _ un peu moins Jane… _, à ces commémorations de Maurice Ravel en 1975 ;
mais j’ignore dans quelle mesure celles-ci, Marie comme Jane, avaient conscience de l’effectivité de ce cousinage entre le filleul de leur ancienne domestique et gouvernante Gachucha Billac (1824 – 1902) qu’était leur ami Maurice Ravel,
et leur belle-sœur Magdeleine Hiriart – Gaudin, fille de Dominique Hiriart (1849 – 1926), leur voisin (et notable) ayant pignon sur rue, lui aussi, rue Gambetta…
Maurice devait être _ et demeurer _ davantage pour elles le petit-neveu et filleul de leur chère Gachucha Billac (décédée le 17 décembre 1902),
que le cousin au 3e degré de leur belle-sœur (depuis le 28 septembre 1901) Magdeleine…
 
Je me demande aussi quels liens ont existé, après 1918, entre Magdeleine Hiriart – Gaudin et Maurice Ravel ? D’autres lettres ont-elles été échangées entre eux deux, comme entre Maurice Ravel et sa vieille et très chère amie Marie Gaudin (1879 – 1976) ?
Et si oui, que sont devenues ces lettres après le décès de Magdeleine ???
 
Et si Maurice Ravel a abondamment parlé de son amitié avec le jeune Edmond Gaudin, avec lequel il arpentait, en voiture, le pays basque, lors de ses séjours à Saint-Jean-de-Luz,
en aucune lettre connue à ce jour, Maurice Ravel ne mentionne après 1914 le nom de sa cousine Magdeleine Hiriart -Gaudin…
 
Très aimablement, Madame Maylen Gaudin – Lenoir (née en 1942) m’a rapporté certains récits seulement oraux transmis dans la famille Gaudin concernant la venue et les séjours du petit Maurice, enfant, chez les Gaudin, rue Gambetta à Saint-Jean-de-Luz : c’était au petit Maurice, par exemple, qu’à table, on réservait les assiettes ébréchées _ un détail assez significatif…
De cette période de l’enfance de Maurice Ravel, et de ses séjours à Ciboure ou à Saint-Jean-de-Luz, nulle lettre n’est hélas connue de nous jusqu’ici…
 
De plus, toute sa vie, Maurice Ravel a été d’un tempérament très discret, voire secret, et parfaitement humble,
se consacrant passionnément et avec la plus grande rigueur, à son travail de composition, et à la plus grande excellence possible de ses œuvres : Ravel était perfectionniste !
Et même sa corrrespondance (surtout par de brèves cartes postales) était plutôt elliptique, et toujours avec pas mal de retard : il n’avait pas de temps à y consacrer…
 
Alors que la célébrité allait _ et va toujours _ en priorité aux artistes se faisant acclamer sur la scène ;
par exemple, le violoniste Jacques Thibaud, ou le chanteur Fédor Chaliapine, se sont fait construire de splendides villas à Saint-Jean-de-Luz ;
pas Maurice Ravel ;
dont l’immense célébrité (et fortune !), grâce au « Boléro », n’a été que posthume…
 
Certes Ravel a pu, après la Victoire de 1918, se produire un peu comme pianiste et un peu plus comme chef d’orchestre,
mais sans en retirer _ ni encore moins y rechercher _ beaucoup de gloire (ni d’argent), par exemple en France : ce fut surtout lors de tournées orchestrales aux Etats-Unis, en Espagne, en Autriche, etc.
Mais là n’était pas, et même loin de là, l’essentiel pour lui…
 
Et sa célébrité, puis gloire, de compositeur, s’est surtout révélée au grand public après sa mort en 1937, et après la Libération de 1945…
Pas mal aussi avec le développement et immense succès de l’industrie discographique…
 
 
Alors, comment comprendre ce déni de parenté effective avec Maurice Ravel de la part de son petit cousin Edmond Gaudin,
qui, très proche de lui, lui a servi de chauffeur dans ses virées de par tout le pays basque, en Espagne, comme en France, à l’occasion de ses séjours à Saint-Jean-de-Luz,
à la fin des années 20 et au début des années 30 ?..
Edmond Gaudin a alors été un témoin vraiment très proche de la vie quotidienne de Maurice Ravel…
 
Edmond Gaudin a dit aussi à sa fille Maylen qu’il n’appréciait guère la musique de Ravel, m’a-t-elle confié…
 
Il y a là en effet un mystère,
qu’il serait bien intéressant d’élucider davantage…
 
Bien sûr, depuis le 15 mars 2020, la pandémie ne m’a pas permis de retourner souvent à Saint-Jean-de-Luz, non plus _ pas une seule fois ! _ qu’aux archives municipales de Ciboure _ devenues non accessibles au public _,
non plus que de rencontrer à nouveau Madame Gaudin – Lenoir, pour échanger plus longuement avec elle,
tant autour de ses souvenirs personnels, que des archives familiales qu’a conservées son frère Charles-Paul Gaudin ;
ou encore ses cousins Courteault…
 
À suivre, 
 
Ce dimanche 10 octobre 2021, Titus Curiosus – Francis Lippa

Musiques de joie : le Bolero idéalement endiablé de Katia et Marielle Labèque dans leur CD basque Amoria, avec les percussions traditionnelles basques du groupe Hegiak de Thierry Biscary

21avr

J’apprécie particulièrement le jeu

à jamais juvénile _ libre, affranchi de bien des orthodoxies… _ et tout simplement enchanteur

des sœurs Katia et Marielle Labèque

_ filles du Dr Pierre Labèque, pédiatre (1917 – 2007) et de la pianiste Ada Cecchi (Viareggio, 18 juillet 1918 – Bayonne, 9 mars 1997) :

Katia est née à Bayonne le 11 mars 1950 ; et Marielle, à Bayonne le 6 mars 1952 ;

et leur frère aîné, Jean-Louis, le 16 novembre 1946, à Bayonne lui aussi _ ;

et tout spécialement, ici, dans leur interprétation, en 2018,

en un passionnant album intitulé, en basque, Amoria _ soit le CD Deutsche Grammophon / KML 481 7245 ;

enregistré en divers Studios :

KML, à Rome,

Elkar Estudioa, à Donostia (Saint-Sébastien),

LFO, à Sempere (Saint-Pé-sur-Nivelle)

et Santa Cruz Auzoa, à Azkoitia _

d’une transcription pour deux pianos, réalisée par Maurice Ravel lui-même,

de son célébrissime _ un peu à son corps défendant ! _ hypnotique Boléro

avec, aussi _ et c’est très important ! _, une adaptation pour des percussions traditionnelles basques

_ txalaparta, txepetxa, tombera, xilintxak, danborrak, panderoak, atabala… _

de Thierry Biscary,

superbement réalisée _ quelles magiques sonorités : c’est tout simplement diabolique ! _ par le groupe Hegiak, composé de Thierry Biscary lui-même, et Eñaut Elorrieta, Harkaitz Martinez de San Vicente, Mikel Ugarte et Ander Zulaika…

Le résultat est proprement enthousiasmant !

Ce Boléro, diaboliquement hypnotique,

étant tout à la fois parfaitement _ comme il se doit, et c’est rédhibitoire ! _ tenu,

en même temps que, et surtout, idéalement _ voire orgastiquement… _ survolté !

Et comme tout ce qui résulte d’une part de génie,

la chose est nécessairement oxymorique...

Il n’est que de le comparer avec une précédente interprétation _ un peu moins survoltée… _, en 2006,

des sœurs Labèque

_ avec Thierry Biscary, déjà, et Gustavo Gimeno : le second aux percussions, et le premier aux « percussions basques«  _

dans le CD _ KML 1111 _ intitulé tout simplement Ravel  

_ et c’était là le tout premier CD produit directement par Katia et Marielle Labèque _,

de cette même transcription par Ravel lui-même de son Boléro, « pour deux pianos quatre mains » (indiquait alors la notice)

avec _ déjà ! _ une adaptation pour percussions,

 

réalisée, cette fois précédente-là, en 2006 donc, par Katia et Marielle Labèque elles-mêmes :

« les percussions étaient jouées par Gustavo Gimeno, et les percussions basques traditionnelles par Thierry Biscary _ précisait plus succinctement la notice…

Ce Boléro-ci avait été enregistré à la Gustav Mahler Musiksaal du Grand Hôtel de Toblach, à l’acoustique réputée…

Les sœurs Katia et Marielle Labèque possèdent,

en leurs interprétations,

cette part enthousiasmante magique de génie…

Cette interprétation-ci, de ce CD Amoria, est tout simplement nécessaire !

Mais à défaut d’accéder à l’interprétation magique du Boléro

à la fois orgasmique et splendidement tenu

de ce CD Amoria de 2018,

voici une vidéo de 4′ 44

_ seulement ! Et non équivalente, hélas, au bonheur absolu de la prise de son du CD Amoria _

prise lors d’un concert donné à Marciac le 28 juillet 2017… 

Ce mardi 21 avril 2020, Titus Curiosus – Francis Lippa

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