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Un nouveau passionnant travail ravélien du chef anglais John Wilson et son orchestre Sinfonia of London : la Suite d’orchestre « Le Tombeau de Couperin », associé au « Divertimento » Op. 18 (de 1943) de Lennox Berkeley, et la « Symphony n°3″ (de 2021) d’Adam Pounds ; ou d’un certain héritage orchestral ravélien et de l’éthique musicale de la lisibilité…

20avr

Suite aux CDs Chandos « Ravel – Ma Mère l’Oye – Bolero – première recording of original Ballets«  _ Chandos CHSA 5280, enregistré à Londres le 9 janvier 2020 et du 30 août au 1er septembre 2020 _

et « Ravel – Daphnis et Chloé – Complete Ballet«  _ Chandos CHSA 5327, enregistré à Londres du 7 au 9 décembre 2022 _,

auxquels j’ai consacré mes articles « « 

et « « 

des 1er septembre 2022 et 4 avril 2024,

voici que je viens de recevoir le CD « Ravel – Berkeley – Pounds – Orchestral Works » _ Chandos CHSA 5324, enregistré à Londres du 22 au 24 novembre 2022, soit à peine quinze jours avant le CD « Daphnis et Chloé » CHSA 5327…  _ de John Wilson et son orchestre Sinfonia of London _ regarder ici cette brève mais éloquente vidéo (de 1’41) d’un extrait du superbe Rigaudon de la Suite d’orchestre composée par Ravel zn 1919 d’après son Tombeau de Couperin pour piano, une pièce dédiée aux frères Pierre et Pascal Gaudin (nés à Saint-Jean-de-Luz respectivement le 7 février 1878 et le 31 janvier 1883), décédés ensemble au champ d’honneur le 12 novembre 1914, frères de la très chère amie luzienne de Maurice Ravel, Marie Gaudin ;

sur les liens y compris familiaux entre Maurice Ravel avec les Gaudin et Courteault de Saint-Jean-de Luz, cf par exemple mes articles « «  et « «  des 17 et 18 août 2022…  _,

un CD que je m’étais empressé de commander à mon disquaire préféré, suite à ma lecture, le 19 mars dernier, de l’article de Pierre-Jean Tribot « Ravel en miroirs anglais, entre mentors et disciples« , que voici _ avec mes farcissures _ :

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Ravel en miroirs anglais entre mentors et disciples

LE 19 MARS 2024 par Pierre Jean Tribot

Ravel en miroirs anglais

..;

Maurice Ravel(1875-1937) : Le Tombeau de Couperin, M 68a ;

Sir Lennox Berkeley (1903-1989) : Divertimento en si bémol majeur pour orchestre ;

Adam Pounds (né en 1954) : Symphony n°3.

Sinfonia of London, direction : John Wilson. 2022.

Livret en allemand, anglais et allemand. 65’50’’. CHSA 5324.

Cet album propose une filiation musicale _ en l’occurrence ravélienne _ sur plusieurs générations. En ouverture, on y retrouve Maurice Ravel dont la musique séduisit le compositeur anglais Lennox Berkeley qui ambitionna d’étudier avec le compositeur français (ce qui ne se fit pas, mais Berkeley accepta d’aller suivre l’enseignement de Nadia Boulanger suivant le conseil _ diligenté _ de Ravel), Lennox Berkeley et Adam Pounds, lui-même élève  de Lennox Berkeley à la Royal Academy of Music. Pour des continentaux comme nous, les univers de Berkeley et Pounds nous sont _ certes ! _ très peu familiers, et on se plaît _ tout à fait ! _ à découvrir des mondes musicaux inspirés _ voilà, par la musique française.

L’interprétation du Tombeau de Couperin (1919) par John Wilson _ surprenante à la toute première écoute, comme tout renouvellement… _ est absolument exemplaire _ mais oui ! _ et elle réussit à allier l’énergie musicale _ oui _ avec une finesse du trait _ oui : voilà qui est excellemment dit : énergie musicale et finesse du trait. Les lignes mélodiques sont d’une parfaite lisibilité _ comme c’est indispensable pour tout ce qui touche au goût français, la lisibilité y est fondamentale ! _ et John Wilson soigne les nuances et les couleurs _ voilà. Saluons aussi la justesse des tempis _ oui _ qui permettent à la baguette du chef de mettre en avant la beauté _ hédoniste ! _ de l’orchestration ravelienne _ somptueuse… Cette interprétation, telle un diamant ciselé et scintillant _ et j’adhère tout à fait à cette métaphore… _, est l’une des plus belles de la discographie _ voilà ! _ par sa fraîcheur et ses lumières _ oui. John Wilson s’affirme _ oui _ comme l’un des plus grands ravéliens du moment _ rien moins !

Le Divertimento de Lennox Berkeley (1943) est dédié à Nadia Boulanger _ voilà. En quatre mouvements, il est à peine plus long que la partition de Ravel. On découvre une orchestration fine et racée _ oui _ qui témoigne d’une influence française par sa plastique aérée et mobile _ oui : d’une superbe fluidité ! _ mais avec un sens de l’orchestration brillant _ à la Ravel _ dans ses choix instrumentaux. C’est une musique narrative et riche en saveurs. Le livret nous apprend que la partition a été chorégraphiée en ballet, c’est une suite logique pour une musique illustrative et gorgée d’émotions suggérées _ et qui conforte la cohérence dans le suivi des choix d’œuvres à servir de John Wilson en sa discographie.

Adam Pounds fut l’élève de Berkeley et en tant que chef d’orchestre, il a dirigé le Divertimento de son professeur. La Symphonie n°3, d’une durée d’une demi-heure, a été composée pendant les confinements de la récente pandémie _ en 2021. La partition est dédiée à John Wilson et au SInfonia of London _ voilà. Le ton est plus sombre et dramatique dès les premières mesures de cette partition dense. La maîtrise de l’écriture en impose avec quatre mouvements bigarrés qui rendent hommage à Chostakovitch (valse tragique du second mouvement) ou à Bruckner (« Elegy » du second mouvement). La partition se caractérise par une motorique qui sert une énergie interne saillante _ oui _ alors que l’orchestration dévoile des timbres d’une grande subtilité en particuliers dans les pupitres des bois. Indéniablement cette symphonie est une grande œuvre de notre temps par son ton qui nous place en miroir des angoisses de notre époque _ voilà, voilà.

Tout au long de ce disque, il faut saluer l’engagement des pupitres _ voilà : et j’y suis très sensible, moi aussi : voir cette vidéo ! _ de l’excellent _ oui ! _ Sinfonia of London sous la baguette experte de John Wilson. Le son “qualité Chandos” _ et c’est tout à fait juste _ rend tous les aspects de ces musiques d’orchestre passionnantes et admirables _ oui, oui, oui. 

Son : 10 – Livret : 10 – Répertoire : 9 – Interprétation : 10

Pierre-Jean Tribot

Dans la vidéo de l’extrait du Rigaudon du Tombeau de Couperin que j’ai citée plus haut,

je remarque tout particulièrement la jeunesse et la vitalité _ l’engagement, dit Pierre-Jean Tribot… _ des membres du Sinfonia of London que dirige John Wilson…

Et la musique de Ravel mérite assurément cette vitalité.

Enfin, il me faut signaler que c’est tout spécialement sur le site du magazine belge Crescendo que j’ai rencontré cette curiosité et cette appréciation très laudative portées aux prestations du chef britannique John Wilson et son orchestre Sinfonia of London ; mes autres sites favoris demeurant, quant à eux, beaucoup plus discrets…

Au delà de l’intérêt de l’apport d’interprétations de très grande qualité, servies au disque par une très confortable, voire hédoniste, prise de son _ « qualité Chandos«  : dans ces divers excellents CDs Ravel du Sinfonia of London de John Wilson, je note que l’ingénieur du son est chaque fois Ralph Couzens… _,

élargir sa connaissance du répertoire de la musique est une vraie richesse pour le mélomane passionné et un tantinet curieux…

En tout cas, John Wilson _ né à Gateshead on Tyneside en 1972, il a aujourd’hui 52 ans _ est bien un chef à suivre.

Et le charme subtil et délié, intense et profond, de Ravel lui sied idéalement

Ce samedi 20 avril 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Ecouter La Valse de Ravel dans l’interprétation purissime de Sakari Oramo est un régal de roi…

18juin

Le CD « La Valse » de Maurice Ravel, du label Bis SACD 2438, est un régal de très grand choix,

nonobstant la fine bouche faite par pas mal de critiques, probablemement désarçonnés par la marveilleuse finesse _ on ne peut plus ravélienne _ de l’interprétation délicatissime et nette, dénuée d’esbroufe, de Sakari Oramo, à la tête du très sensible Royal Stockholm Philharmonic Orchestra.

Et je dois ajouter encore les parfaites précisions et parfaits commentaires sur les adaptations par Ravel lui-même des autres œuvres de ce CD _ « Le Tombeau de Couperin« , « Alborada del gracioso« , « Une barque sur l’océan« , « Pavane pour une infante défunte » et « Menuet antique« , orchestrées par Ravel respectivement en 1919, 1918, 1906, 1910 et 1929 _, initialement conçues, à la différence de « La Valse« , pour le piano seul, par l’excellent livrettiste de ce CD Bis, Jean-Pascal Vachon _ ainsi que François Monnard…

Alors que ce CD Bis « La Valse » n’a guère été distribué par les disquaires _ pour des raisons que j’ignore ! et me dépassent : il m’a fallu expressément le commander… _,

c’est la très fine oreille de Jean-Charles Hoffelé qui m’a incité à m’y intéresser,

en un très juste article _ en date du 19 mars dernier, déjà… _ très justement intitulé « Lumière« …

LUMIÈRE

Le Prélude du Tombeau de Couperin fuse de pupitres en pupitres, le geste de Sakari Oramo, élégant, léger, modelant les timbres jusqu’au trait de la harpe et au dernier trille qui s’évapore, teinte d’un tendre mystère _ voilà, avec douceur _ cette échappée belle.

Que de poésie dans cet orchestre, quelle lumière _ oui _ un peu fauréenne, captés avec un art invisible par l’équipe de Take 5, au point qu’on a le sentiment d’être devant les musiciens sans aucun filtre, quelle fête _ oui ! _ pour Ravel, pour son imaginaire si subtil _ oui _ que la plume de Kenneth Hesketh, orchestrant la Fugue et la Toccata, laissées de côté par le compositeur passant du piano à l’orchestre, ne trahit pas. L’enchaînement avec la Forlane est évident, et pour la Toccata l’incroyable mobilité de cette plume rappelle qu’Hesketh fut l’élève de Dutilleux, cela s’entend, ne fait pas hiatus, et donne envie d’en savoir plus sur ses propres œuvres.

Tout le disque est à chérir _ absolument ! _, Pavane émouvante à force de pudeur, Barque emplie de sortilèges (c’est l’une des plus belles réussites d’orchestre de Ravel, l’entendre aussi pleinement comprise est rare), Menuet antique stylisé, seule l’Alborada manque un peu de pointe sèche. Mais La Valse extralucide, dont chaque rumeur, chaque coup de griffe, chaque feulement s’entendent, est simplement inouïe dans son éclairage de nuit américaine.

Disque qui frôle le génie _ c’est dit ! _, j’espère que Sakari Oramo et son orchestre de Stockholm (qu’il vient de quitter), auront gravé les autres œuvres d’orchestre, à commencer par _ cet absolu sommet ravélien qu’est _  Daphnis et Chloé, je l’entends déjà, aérien et coupant, net et évocateur, inondé de cette même lumière _  et tout est dit ici…

..;

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)


Le Tombeau de Couperin, M. 68a (Fugue et Toccata, orch. Kenneth Hesketh)
Alborada del gracioso,
M. 43/4

Une barque sur l’océan,
M. 43/3

Pavane pour une infante défunte, M. 19 (version orchestrale)
Menuet antique, M. 7 (version orchestrale)
La Valse, M. 72

Royal Stockholm Philharmonic Orchestra
Sakari Oramo, direction

Un album du label BIS Records 2438

Photo à la une : le chef d’orchestre Sakari Oramo – Photo : © Benjamin Ealovega

Un CD SACD indispensable pour écouter le plus pur de Ravel !

Ce samedi 18 juin 2022, Titus Curiosus – Francis Lippa

 

Trois nouvelles merveilles musicales, encore, de « style français », en CD : des oeuvres de Gottlieb Muffat, Jean-Philippe Rameau et Gabriel Fauré

09mai

Trois nouvelles merveilles de musique (ainsi que d’interprétations) d’œuvres de goût et style français, proposées ces derniers jours au disque (en 4 CDs) :

_ le double album des « Componimenti Musicali per il Cembalo«  (à Vienne, vers 1736) de Gottlieb Muffat (Passau, 1690 – Vienne, 1770), par la claveciniste Mitzi Meyerson :

soient les CDs Glossa GCD 921804 ;

_ les « Concerts mis en simphonie » qu’Hugo Reyne nous propose des « Concerts de Pièces de Clavecin, avec un Violon et une Viole, ou un 2e Violon ; par Mr. Rameau. 1741 » ;

ainsi que de la « Gavotte et ses doubles » (de la « Suite en la« ) qui concluent le « Troisième Livre » des « Pièces de clavecin » (en 1728) de ce même Jean-Philippe Rameau (Dijon, 1683 – Paris, 1764),

par La Simphonie du Marais, que dirige Hugo Reyne :

soit le CD Musiques à la Chabotterie 605006 ;

_ et le récital « Gabriel Fauré : violon, violoncelle, flûte, piano & orchestre« , soit un choix de 7 « œuvres concertantes : miscellanées«  (ainsi que le formule la livrettiste du CD, Hanna Krooz) de Gabriel Fauré (Pamiers, 1845 – Paris, 1924) :

en l’occurrence, la « Ballade » pour piano & orchestre opus 19 (de 1879-1881) ; la « Berceuse » pour violon & orchestre opus 16 (de 1878-1880) ; l' »Élégie » pour violoncelle & orchestre opus 24 (de 1883-1897) ; le « Concerto » pour violon & orchestre opus 14 (de 1878-1879) ; la « Romance » pour violoncelle & orchestre opus 69 (de 1894) ; la « Fantaisie » pour flûte & orchestre opus 79 (de 1898) ; et la « Fantaisie » pour piano & orchestre opus 111 (de 1918),

par Jean-Marc Phillips-Varjabédian, violon, Henri Demarquette, violoncelle, Juliette Hurel, flûte, Jérôme Ducros, piano, et l’Orchestre de Bretagne que dirige Moshe Atzmon :

soit le CD Timpani 1C1172.

« Merveilles », tant pour ce qu’il en est des œuvres que pour les interprétations, et à des titres divers, ainsi qu’on va le découvrir :

Pour Rameau, l’œuvre _ « Concerts de Pièces de Clavecin, avec un Violon et une Viole, ou un 2e Violon« , en 1741 _ est déjà bien connue ;

mais c’est ici une « mise en symphonie » de ces cinq « Concerts » que nous propose, avec une particulièrement magnifique intelligence du processus de ce qu’est la « concertation« , à partir d’un « Avis aux Concertans » (sic) du compositeur lui-même, sur la partition de 1741, Hugo Reyne,

prenant, le premier, recul sur l’habitude incrustée et fossilisée jusqu’ici, car pas assez réfléchie (re-visitée ; et donc « à re-penser » !) d’interprètes précédents (Daniel Cuillier, en 1992 ; Christophe Rousset, en 2000) ; qui se fiaient trop littéralement à la lettre d’un « arrangement« , postérieur (en 1768) de quatre ans à la mort du compositeur (survenue le 12 septembre 1764) de ces « Concerts de Pièces de Clavecin, avec un Violon et une Viole, ou un 2e Violon » ; et conservé à la Bibliothèque nationale de France :

cet « arrangement » de 1768 « est constitué _ je cite ici l’excellente présentation de son travail par Hugo Reyne à la page 4 du livret du CD _ de 5 parties séparées manuscrites pour 3 violons, alto et basses« . Mais, précise on ne peut plus justement Hugo Reyne, « les faiblesses de l’arrangeur sont de reprendre à l’identique certaines formules idiomatiques du clavier alors qu’il _ le transcripteur _ passe d’un instrument harmonique (le clavecin) à des instruments mélodiques (les violons).« 

Hugo Reyne précisant : « Par exemple, les arpèges de clavecin sont retranscrits _ paresseusement _ tels quels, passant maladroitement d’un instrument à un autre. Cette transcription attribue la main droite du clavecin au 1er violon, la main gauche aux basses, et le violon originel à un 2nd violon, ce qui est logique. Par contre, autre faiblesse, la viole (ou le 2nd violon) est distribuée à un 3ème violon qui se retrouve souvent à l’octave des basses ou à l’unisson de l’alto ; tandis que ce dernier se nourrit des notes du milieu du clavier et fonctionne _ oh le vilain processus en « musique baroque«  : rien ne devant jamais simplement « mécaniquement«  y « fonctionner«  !!! _ fréquemment à l’octave du 2nd violon. La partie des basses se divisant en 2 voix par moments ; et l’expression romantique « en sextuor » a été ajoutée par Saint-Saëns en 1896, lors de la publication des œuvres de Rameau sous sa direction » _ c’est en 1895 que Charles de Bordes, Vincent d’Indy et Camille Saint-Saëns avaient entrepris une édition des « Œuvres Complètes » de Jean-Philippe Rameau, à paraître aux Éditions Durand ; les publications s’échelonnèrent de 1895 à 1918, mais l’entreprise demeura inachevée : seulement 18 volumes ayant paru…

Hugo Reyne situe ainsi son travail ici par rapport à une tradition d’interprétation trop ankylosée depuis le revival de la fin du XIXème siècle, sous l’impulsion de l’équipe de la Schola Cantorum (inaugurée le 15 octobre 1896, autour des mêmes Charles de Bordes, Vincent d’Indy, etc.) :

« Cette édition des « Six Concerts en sextuor«  (le manuscrit _ de 1768 _ ajoutait effectivement un 6ème Concert, arrangé, lui, d’après des « Pièces de clavecin » _ de ce même Jean-Philippe Rameau) fit néanmoins les beaux jours de Rameau au 33 tours : les chefs Maurice Hewitt (dès 1952), puis Louis de Froment, Louis Auriacombe, Jean-François Paillard, Marcel Couraud, Jean-Pierre Dautel, etc. l’enregistreront avec leurs orchestres à cordes, perpétuant ainsi une tradition monochrome (cordes seules), oubliant malheureusement à quel point Rameau _ et cela, on ne le soulignera jamais assez !!! _ était un coloriste de l’orchestre. Les deux seules versions enregistrées à ce jour sur instruments anciens (Daniel Cuillier, en 1992, et Christophe Rousset, en 2000) proposent également cette version. »

Ce qui permet à Hugo Reyne de situer sa présente extrêmement bienvenue (et réussie !) « re-création » :

« Notre propos en enregistrant les « Concerts » est donc, un peu comme pour un tableau noirci, de retrouver _ en les ravivant _ ses couleurs d’origine (flûte, hautbois, basson). La comparaison va même plus loin, car les titres de chacune des pièces nous renvoient à l’univers pictural de ce milieu du XVIIIème siècle _ dont le livret offre de précieuses images (…) Nous avions à l’esprit l’image d’un petit orchestre de chambre entretenu par M. de La Pouplinière _ orchestre que dirigea Rameau lui-même vingt-deux ans durant ! de 1731 à 1753… _ ; et avons arrêté le nombre de musiciens-interprètes à treize : 3 violons I, 2 violons II, 1 alto, 2 violoncelles, 1 contrebasse, 1 flûte, 1 hautbois, 1 basson et un chef (nous-même, prenant la flûte pour « Les Tambourins« , « La Cupis » et « La Marais« ). »

« En ce qui concerne notre travail d’orchestration _ = de « mise en simphonie » ! ainsi que l’indique le titre même de ce CD : « Concerts mis en simphonie«  _, nous nous sommes référés à la phrase de l’« Avis aux concertans » de Rameau :

« le Quatuor y règne le plus souvent »

_ on appréciera la délicatesse du « jeu » ouvert par Rameau lui-même : en 1741, nous sommes encore dans l’ère (dite commodément par nous) « baroque » de l’interprétation…

Nous avons donc distribué notre partition en 4 parties : violon I (main droite du clavecin), violon II (violon originel), alto (viole ou 2nd violon) et basses (main gauche du clavecin et basses de la viole). La flûte et le hautbois venant _ très heureusement ! _ colorer les violons I ou II, le basson se mêler aux basses, et pour certaines pièces assurant des solos. (…)  Nous avons donc adapté les arpèges brisés du clavecin pour les approprier à la flûte. D’autres solos de bois sont confirmés _ et comment brillamment ! _ par Rameau dans ses opéras (les 2 flûtes de « La Cupis » _ dans un « Air tendre pour les Muses » du « Temple de la gloire« , en 1745 _, les petites flûtes du 1er « Tambourin » _ qui, provenant de l’ouverture de « Castor et Pollux« , en 1737, rejoindra le second « Tambourin » dans « Dardanus« , lors d’une reprise de ce dernier, en 1744 _, le hautbois et le basson du « 2nd menuet » _ dans « Les Fêtes de Polymnie« , en 1745 _, etc.) _ et c’est un point majeur, sinon crucial même, pour la compréhension de la musicalité propre de ces œuvres ! et donc leur plus juste interprétation ! Cependant, pour « La Livri« , nous avons préféré _ avis d’expert tout spécialement « musical«  _ renoncer à la version de « Zoroastre » _ la première de la « tragédie lyrique«  a lieu le 5 décembre 1749 à l’Académie royale de Musique _ afin de rester plus proche de l’écriture originelle de 1741, en donnant spécialement au basson la belle contrepartie de la viole ; et à l’alto l’arpègement syncopé de la main droite. Notre arrangement contient d’autres réjouissances encore, comme certains contrechants de flûte et hautbois dans « La Rameau » ou bien dans « La Marais » ; ou encore quelques ornements « à la Michel Legrand » _ why not ? si cette forme d’humour ou légèreté-là convient… _ dans « La Cupis« … »


« Enfin, nous devons signaler ici _ précise encore Hugo Reyne, à la page 5 du livret de ce CD _ l’existence d’un arrangement manuscrit contemporain de Rameau (conservé à la Bibliothèque nationale de Hongrie à Budapest) très mal réalisé, et qui n’a pas pu être joué tel quel à l’époque, qui a _ cependant _ l’avantage _ très significatif pour ce qu’il en était des interprétations de transcriptions ! _ de proposer, en plus des cordes, des parties de « flauto », « oboe » et « fagotto », ce qui nous a conforté _ si besoin en était encore !.. _ dans notre idée d’instrumentation. »

« Pour conclure cet enregistrement, nous avons, suivant l’exemple d’Otto Klemperer, qui, en 1968 revisitait _ voilà ce que doit être une « re-création » de musique ! _ la « Gavotte et ses doubles«  pour orchestre symphonique _ pas moins : et c’est sans doute trop !.. _ décidé de nous approprier aussi _ le résultat est une merveille ! _ ces sublimes _ en effet ! c’est un final somptueux !!! _ variations en les adaptant à notre façon _ comme toute interprétation vivante de cet art du « Baroque » : au sens le plus large _ Rameau en étant probablement le dernier grand (voire « sublime« …) représentant, jusqu’en ses sublimissimes « Boréades » de 1764, dont les représentations (sur la scène de l’Académie royale de Musique) furent hélas annulées par la disparition brutale du maître, le 12 septembre 1764…Vers ce moment, en effet, voilà que le siècle change d’« époque«  (et de « style« ) : on quitte le « Baroque«  pour, bientôt, le « Classicisme«  : approche l’heure qui vient de Haydn et Mozart, après le moment Gluck ; ainsi que le moment-charnière où les dernières (avant longtemps !) représentations des opéras de Rameau sont (ainsi, d’ailleurs que celles des indéboulonnables opéras de Lully), « adaptées«  au goût nouveau par un Pierre Montan-Berton…

Pour les deux autres CDs,

la « neuveté » des éclairages qu’apportent ces tout nouveaux enregistrements

est différente…

D’abord, nous découvrons enfin (si je puis me permettre cette expression), sous les doigts merveilleusement inspirés (et dansants) de Mitzi Meyerson, l’œuvre de Gottlieb Muffat

(Passau, 1690 – Vienne, 1770 : Gottlieb est le huitième des neuf enfants du magnifique Georg Muffat _ né, lui, le 1er juin 1653 à Megève, en Savoie, et mort le 23 février 1704 à Passau, en Bavière : un des plus somptueux musiciens de l’ère baroque ! et un de ceux (avec Johann-Sigismund Kusser et Johann-Kaspar-Ferdinand Fischer : dignes, eux aussi, de la plus haute délectation !) qui a diffusé _ combien brillamment ! _ et fait resplendir le « style » musical « français« , appris en sa jeunesse auprès de rien moins que Lully, à Paris, entre 1663 et 1669, en toute l’Europe baroque) :

Or, ce qui paraît vers 1736 à Vienne, et sous un titre de recueil en italien, « Componimenti Musicali per il Cembalo« , n’est rien moins que le « chant du cygne » (de toute beauté !) de la « Suite » de « goût français« , qui avait (possiblement) vu le jour sur les bords de la Seine autour de 1648 (au moment de la paix du « Traité de Westphalie« ), avec pour (peut-être, sinon probables) parrains les incomparables maîtres Johann-Jakob Froberger, Louis Couperin et autre Jacques Champion de Chambonnières ; ainsi que le luthiste Monsieur de Blanc Rocher, qui perdit la vie en chutant dans un escalier, un soir de fête…

Qu’on écoute les sept « Suites » de ce double album de Mitzi Meyerson ; de l' »Ouverture«  (à la française : lullyste !) de la « Suite V »  ouvrant le premier disque ; à la « Chaconne » de la « Suite VII«  qui conclut le second… La musique du fils, Gottlieb, à la cour impériale de Vienne, via la leçon, à la cour d’un prince-évêque bavarois, à Passau, du père Georg (disparu il y avait trente-deux ans en 1736), a toute la fraîcheur, la vivacité, l’élégance et la délicatesse qui font le charme d’éclat tout de discrétion, simplicité et beauté, de la « Suite » de « goût français« , en tout son parcours…

Et pour Gabriel Fauré,

pour terminer cette promenade musicale si délicieuse de charme,

nous prêtons (enfin ! un peu) mieux l’oreille à un aspect un peu négligé de son œuvre : son versant orchestral concertant, justement.

Si les deux sommets de ce CD « concertant » de Gabriel Fauré, sont, peut-être, la « Ballade » et la « Fantaisie » pour piano & orchestre (les deux !), le mérite de ces interprétations _ de pièces « libres » ! _ est d’abord celui des interprètes, magnifiques, tous et chacun, de charme, d’élégance, de fraîcheur, de vivacité : de beauté discrète et intense ; de vie.


Mais dans ces deux cas encore, après celui de l’occurrence-Rameau, c’est à la spécificité du style (musical) français que nous avons combien magnifiquement affaire :

au secret (issu de la danse) de sa légèreté libre et rayonnante de plénitude…

Titus Curiosus, ce 9 mai 2009,

se souvenant de Francine Lancelot

de sa personne, son sourire ;

et de son action en faveur de « La Belle dance« …

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