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La merveille How Montague Rendall, baryton d’exception, en un phénoménal CD carte-de-visite « Contemplation »…

26oct

Le 20 septembre dernier,

l’article de Jean-Charles Hoffelé, sur son excellent site Discophilia, intitulé « Le chant pur« , m’avait alerté sur la qualité en quelque sorte exceptionnelle, et donc absolument marquante, du CD Erato 5021732363787 « HUW Montague Rendall – Contemplation« , d’un jeune baryton _ de 30 ans _, Huw Montague Rendall, pour sa toute première apparition discographique ;

mais nulle part, un peu étrangement, n’était en vue cet objet à se procurer sur quelque table… 

Voici donc, tout d’abord, ce bel article très appelant :

LE CHANT PUR

Ceux qui auront vu son Mercutio qui crevait la scène (comme on crève l’écran) du Roméo et Juliette _ de Gounod _ selon Thomas Jolly auront gardé dans l’œil sa silhouette athlétique, mais surtout le souvenir _ considérablement marquant _ de sa voix : ce baryton sombre et clair à la fois, aux mots mordants _ voilà ! _, à la ligne impeccable _ et magnifiquement fluide… _, à la justesse stellaire _ wow !!! sans le moindre défaut… _, avec dans le timbre même _ aussi, et même surtout, et c’est bien sûr absolument décisif ! _ comme le rappel d’un âge d’or perdu du chant français, celui des Endrèze, des Blanc _ mazette ! rien que cet âge d’or-là ! _, c’est Huw Montague Rendall dont parait ici le premier album.

Bon sang ne saurait mentir, le jeune homme a hérité de son père David Rendall, fabuleux ténor mozartien _ voilà _, la ligne de chant instrumentale, et de sa mère _ soprano _, Diana Montague, les mots et les affects _ incarnés _ du théâtre.

Ce Pelléas majeur – quel dommage que rien de son rôle phare ne figure sur l’album – sera-t-il un jour Golaud ? Son formidable Hamlet _ d’Ambroise Thomas _, par quoi s’ouvre l’album, semble l’annoncer, car cette voix de mots si clairs sait s’assombrir pour le Prince du Danemark dont il renouvelle la psyché depuis l’exemple laissé par Thomas Hampson _ wow!

Le panorama _ parcouru et pleinement, à la perfection, accompli en cet album magistral _ est vaste _ oui oui _ ; comme Thomas Hampson, décidément modèle probable, il se risque aux Lieder eines fahrenden Gesellen _ de Mahler _, en saisissant toute la poésie _ mais oui _ que partagent dans les inflexions de son chant les Rouennais _ de l’Opéra Orchestre Normandie Rouen _ si idéalement conduits par Ben Glassberg qui aura porté l’opéra normand à un niveau international en trois saisons.

Il ose le Tanzlied des Pierrot de Die tote Stadt _ de Korngold _ où s’évoquent les tendresses du chant _ rien moins… _ d’un Hermann Prey, il envole le scherzo de Mab _ du Roméo et Juliette de Gounod _ évidemment, fait un impeccable Valentin _ du Faust de Gounod _, exalte les nostalgies de Chanson triste (comme j’aurai préféré L’Invitation au voyage, La vie antérieure…) _ des mélodies de Duparc _ et sait charmer sans sucre chez Messager _ de Monsieur Beaucaire _ ou Hammerstein _ en son Carousel _, surtout il sera troublant au possible en Billy Budd _ de Britten _ avec le piccolo de Kouchyar Shahroudi.

Et Mozart ? Comte _ Almaviva _ des Nozze déjà fabuleux (et qui prouve que vocalement Golaud est dans ses cordes), Don Giovanni en charmes sulfureux, surtout un épatant Papageno face à la Papagena mutine d’Elisabeth Boudreault et aux boys du Trinity College _ pour Die Zauberflöte.

Mais le dernier mot _ du merveilleux programme de 17 airs de ce CD, en forme de brilllantissime sublime carte-de-visite  _ sera pour Mahler, l’esseulement du solitaire retranché du monde, cet Ich bin der Welt abhanden gekommen chanté comme du Schubert qui semble lui destiner _ que de rapides promesses pour ce jeune chanteur à ce point déjà si idéalement accompli ! et avec quelle envergure !.. _ pour demain Winterreise.

LE DISQUE DU JOUR

Contemplation

Œuvres de Ambroise Thomas (Hamlet), Charles Gounod (Faust, Roméo et Juliette), Erich Wolfgang Korngold (Die tote Stadt), Gustav Mahler (Lieder eines fahrenden Gesellen, Ich bin der Welt abhanden gekommen), Benjamin Britten (Billy Budd), Henri Duparc (Chanson triste), Wolfgang Amadeus Mozart (Le nozze di Figaro, Don Giovanni, Die Zauberflöte), André Messager (Monsieur Beaucaire), Richard Rodgers (Carousel)

Huw Montague Rendall, baryton

Elisabeth Boudreault, soprano (Mozart, Zauberflöte)


Oliver Bartow, Sam Jackman, Benjamin Gilbert,
sopranos garçons (Mozart, Zauberflöte)

Opéra Orchestre Rouen Normandie
Ben Glassberg, direction

Un album du label Erato 5021732363787
Acheter l’album sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Photo à la une : le baryton Huw Montague Rendall – Photo : © Anthony Dehodencq

Et une fois découvert le CD, et puis avec ravissement écouté,

l’exclamation aussitôt arrachée 

Chapeau l’artiste !!!

Et maintenant, à votre tour,

écoutez tout simplement ici ce phénoménal CD de 75′ 30 de ce chanteur baryton d’exception

qui a décidément tout pour lui !..

Ce samedi 26 octobre 2024, Titus Curiosus-Francis Lippa

Le bonheur d’un magistral Francesco Corti en un resplendissant magique CD Arcana « Domenico Scarlatti – A Man of Genius » : un éblouissement du plaisir d’imageance folâtre du compositeur !

01oct

Domenico Scarlatti (Naples, 26 octobre 1685 – Madrid, 23 juillet 1757) est un compositeur au génie musical unique ; et Francesco Corti (Arezzo, 1984) est un claveciniste magistral !

Nulle surprise, par conséquent, et paradoxalement !, en l’éblouissement confondant _ waou !!! _ de ce resplendissant absolument magique CD Arcana A 568 « Domenico Scarlatti – A Man of Genius – Sonatas 1752-1753 » _ regardez cette toute récente brève vidéo de présentation du CD (de 3′ 47) par le flamboyant Francesco Corti lui-même, à Royaumont ; ainsi que cette autre d’un bref extrait (de 1’11, seulement…) de son interprétation, toujours à Royaumont, de la Sonate K. 242, Vivo… _,

enregistré du 4 au 6 décembre 2023 à l’Abbaye de Royaumont, sur un clavecin du cher Philippe Humeau de 2002 _ à Barbaste _, d’après des modèles italiens, prété pour cette occasion par l’ami Bertrand Cuiller,

et pour un choix-florilège de 16 Sonates totes conservées sur des manuscrits _ de quelle(s) main(s) ?… _ datés de 1752 et 1753 conservés à la Bibliothèque Marciana de Venise et à la Bibliothèque Palatine de Parme.

Et qui semblent, ainsi intentionnellement transcrites couplées deux par deux, faire partie d’une période de somptueuse maturité (1742 – 1752) de l’œuvre pour clavier _ de possiblement 555 Sonates… _ du compositeur, Domenico Scarlatti,

dont l’historique de la publication de l’œuvre continue de faire question pour les musicologues, ainsi que le rapporte en son très détaillé article de présentation de ce choix de 16 Sonates couplées deux par deux _ K. 208 et K. 209, K. 213 et K. 214, K. 215 et K. 216, K. 217 et K.218, K.219 et K. 220, K. 242 et K. 243, K.244 et K. 245, K. 248 et K. 249, dans le catalogue Kirkpatrick… _, « Scarlatti, l’accord des contrastes », Marco Moraighi, aux pages 10 à 14 du très intéressant livret de ce splendide CD Arcana A 568…

Le second article du livret de ce CD, intitulé « Un homme de génie » _ à partir d’un qualificatif, en 1773, de Charles Burney _, aux pages 15 à 17, est tout aussi passionnant sur l’idiosyncrasie très remarquable et tellement évidente du mode d’invention débridé, hors normes, de la composition de ses Sonates par Domenico Scarlatti ; et il est de la plume de Francesco Corti lui-même :

« Excellent maître des jeux, Scarlatti, la plupart du temps, nous étonne et nous amuse _ et même nous enchante et  passionne ! _ avec une inventivité _ absolument libre et radieusement joyeuse… _ qui semble infinie « ,

car « rompant les schémas classiques  des attentes galantes _ un peu trop formelles et convenues, elles _ du baroque mûr, Scarlatti joue magistralement avec le matériel musical _ dont il s’amuse à plaisir : royalement… On le voit construire des architectures éphémères et instables, établir chez l’auditeur des attentes qui seront immanquablement (et délicieusement _ voilà ! avec tellement d’humour… _) déçues. Dans ce petit jeu de subtiles évocations, de surprises et d’expectatives, se trouve le genius _ dont a qualifié Scarlatti, à Londres en 1773, en son célèbre « Voyage musical dans l’Europe des Lumières« , le fameux Charles Burney... Scarlatti est parmi les premiers à inaugurer la saison de l’exploration systématique _ mais déconstruite, ouverte, ludique _ des possibilités formelles : le classicisme. Son choix de mettre en pratique cette recherche personnelle en se concentrant de manière obsessionnelle _ en totale liberté d’invention _ sur une unique forme musicale durant toutes les années de sa maturité, rend l’expérience véritablement unique » _ voilà ; et géniale….

Francesco Corti qui poursuit sa présentation ainsi :

« Pour cet enregistrement, j’ai décidé de me limiter à un groupe de sonates copiées (parfois décomposées) dans un laps de temps bref : la pleine maturité de Scarlatti _ celle des années 1742-1752… _, mais loin de ses expériences tardives _ plus étranges encore en l’exploration aventureuse et inépuisable de ce que je me permets de nommer l’admirable « imageance » scarlatienne ; et sur ce Scarlatti tardif, écouter le grand et génial lui aussi Pierre Hantaï… Dans sa très vaste production, il m’a paru intéressant de réduire le spectre de ma recherche à une unique période, plutôt que de concevoir un programme « à la carte » _ aux variables et combinatoires effectivement infinies. J’ai aussi décidé de respecter de manière rigide leur regroupement par paires. Cette organisation est systématique dans les volumes conservés à Parme et à Venise, et elle est à mon avis significative musicalement » _ ce qui constitue un point tout à fait décisif, en effet !

Et il conclut :

« En fouillant dans la mémoire de ses auditeurs comme de ses interprètes, Scarlatti ne peut que stimuler des réponses _ ouvertes _ personnelles. Les approches possibles de sa musique seront donc aussi nombreuses _ oui _ que le seront les musiciens _ interprètes, au disque comme au concert, ou même chez eux et pour eux... _ qui décideront de redonner vie _ bondissante et toujours surprenante, pour le pur plaisir de folâtrer ! _ à ces merveilleux chefs d’œuvre » _ c’est là parfaitement vu et dit.

Voici donc, en cette performance-ci du décidément chaque fois magnifique Francesco Corti, des interprétations magistrales de pur plaisir, à nulle autre pareilles _ et pourtant… _, vraiment !

En un CD enthousiasmant et à la joie irradiante, qui fait date !

Un bonheur donc à partager !

Ce mardi 1er octobre 2024, Titus Curiosus – Francis Lippa

Francesco Piemontesi une fois encore au sommet : en un magistral double album Pentatone « Liszt Transcendantal Etudes & Piano Sonata » _ ou la perfection de l’interprétation la plus subtilement incarnée d’un immense compositeur…

19sept

Le merveilleux pianiste Francesco Piemontesi _ né à Locarno le 7 juillet 1983  _ nous conduit à nouveau au sommet en un magique magistral double album Pentatone PTC 5187 052 « Liszt Transcendantal Etudes & Piano Sonata« , enregistré à Lugano en avril-mai 2021,

et tout juste paru le 1er septembre dernier…

Les titres de mes 6 précédents articles sur le génie _ mais oui ! _ d’interprétation de Francesco Piemontesi témoignent de ma constante superlative admiration pour son piano, dans Mozart, Schubert, comme Liszt _ et aussi Debussy _ :

_ le 26 décembre 2018 : «  » ;

_ Le 6 juin 2019 : «  » ;

_ le 27 juin 2019 : «  » ;

_ le 25 septembre 2019 : «  » ;

_ le 29 octobre 2019 : «  » ;

_ et le 24 octobre 2020 : «  » ;

C’est l’article de Jean Lacroix, très justement intitulé « Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source« , paru avant-hier 17 septembre, sur le site de Crescendo, qui m’a appris l’existence _ ignorée jusqu’alors ! _ de ce double CD publié par l’excellent label Pentatone ; et m’a fait me précipiter chez mon disquaire préféré  pour me le procurer _ ce double CD « Liszt – Transcendantal Etudes & Piano Sonata – Francesco Piemontesi«  du label Pentatone, d’ailleurs, ne se trouvait pas sur la table des nouveautés, mais était tout simplement rangé, et en tête, sur une étagère au rayon « Liszt«  ; je n’ai donc pas eu de peine à le dénicher…

Voici donc cet article efficace et très juste, « Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source« , de Jean Lacroix :

Franz Liszt et Francesco Piemontesi : des affinités qui coulent de source

LE 17 SEPTEMBRE 2023 par Jean Lacroix

Franz Liszt (1811-1886) :

Études d’exécution transcendante S. 139 ; Sonate pour piano en si mineur S. 178.

Francesco Piemontesi, piano. 2021.

Notice en anglais et en allemand.

96.00.

Un album de deux CD Pentatone PTC 5187 052.

Depuis sa troisième place au Concours Reine Elisabeth 2007, remporté cette année-là par Anna Vinnitskaya, le pianiste suisse Francesco Piemontesi (°1983) a fait son chemin, ô combien ! Né à Locarno, il a étudié à Hanovre avec Arie Vardi, mais a aussi pu travailler avec Alfred Brendel, Murray Perahia ou Alexis Weissenberg. Crescendo a suivi son parcours de façon régulière (lire l’entretien avec Pierre-Jean Tribot du 21 octobre 2020 _ publié sous le titre « Francesco Piemontesi, pianiste réflexif et discophile« … _). Piemontesi a enregistré pour plusieurs labels (Avanti, Naïve, Claves), notamment des pages de Mozart, Debussy, Dvořak ou Schumann. Pour Pentatone, il a gravé des œuvres de Schubert, un « Bach Nostalghia », ou un programme qui regroupait Schoenberg, Messiaen et Ravel. Avec ce dernier label, il prolonge son exploration du répertoire de Liszt, entamée avec brio pour Orfeo en 2017 _ cf mes propres articles des 26 décembre 2018 et 6 et 27 juin 2019 auxquels je viens de donner ci-dessus les liens… _ par les deux premières Années de pèlerinage et Deux Légendes, deux albums élégants agrémentés par des DVD, dont un documentaire aux superbes images, signé par Bruno Monsaingeon. Le nouveau programme Pentatone est non seulement alléchant, il est aussi audacieux.

La genèse des Études d’exécution transcendante s’étend sur près de vingt-cinq ans, cinq lustres au cours desquels, au fil du temps, Liszt a creusé la technique, fait des choix et insisté sur le développement. La vision aboutit en 1851 à un résultat fascinant : ces douze pages sont devenues un redoutable exercice de virtuosité, nourri du bagage littéraire et poétique que le génie hongrois du piano a accumulé. Tout ici est de haut vol _ et pas seulementent l’exécution qu’a en donner l’interprète… _, des frénétiques et mystérieux Feux follets (n° 5), à une valeureuse Chasse sauvage (n° 8) aux rythmes syncopés, ou encore, aux Harmonies du soir (n° 11). C’est l’étude la plus célèbre du recueil, une véritable incarnation poétique remplie de paix, de bonheur spirituel, de cohérence contemplative qui fait penser à la plénitude lamartinienne ; une musique d’une grande pureté _ voilà. On n’oubliera pas non plus la quatrième étude, Mazeppa, dédicacée à Victor Hugo, magistrale _ oui _ évocation d’un poème des Orientales ; très dramatique, c’est la substance du futur poème symphonique du même titre, et d’une version pour deux pianos et à quatre mains. Avant la découverte de l’ensemble sous les doigts de Piemontesi, il faut aller en plage 11 du premier disque et s’enivrer de ces Harmonies du soir pour se persuader que le pianiste suisse, technicien impeccable, possède le sens de la couleur, la fluidité des accents habités, l’élégance généreuse et la capacité expressive, le tout mêlé à une concentration de jeu phénoménale _ tout cela est de la plus haute justesse.

En 1964, lorsqu’il écrivait sa biographie sur Liszt pour les éditions Seghers (n° 5 de la collection « Musiciens de tous les temps »), Alfred Leroy avait souligné à quel point les Études d’exécution transcendante sont redoutables pour ceux qui s’affrontent à ce monument d’une durée dépassant l’heure : Elles doivent être exécutées avec un art fait de sensibilité, de nuances, de demi-teintes habilement ménagées, de grandioses orchestrations et de colorations délicates. Point d’acrobaties spectaculaires et vaines, point d’inutiles et fausses apparences, mais une pénétration de tout ce que ces Études enclosent de raffinement et de subtilité _ oui. À cette ligne directrice, qui convient tout à fait _ parfaitement _ à la vision de Piemontesi, le musicologue aurait pu ajouter, s’il avait connu le Suisse, des qualités qui sont les siennes : l’art des contrastes qui apparaît dès le Prélude et le Molto vivace qui suit, le dépouillement tendre ou rêveur _ c’est là un trait de jeu très présent chez ce subtil et magistral interprète _ qui parcourt le Paysage (n° 3) ou la Vision (n° 6), l’atmosphère entre ombre et lumières, proche de l’improvisation _ oui _, qui saupoudre la Ricordanza (n° 9). Piemontesi invite l’auditeur à un parcours exaltant, avec un piano très présent, capté à Lugano au printemps 2021 dans l’Auditorium Stelio Molo de la Radio Suisse Italienne (RSI). Lorsque le voyage s’achève sur le Chasse-neige, ce tableau d’un lyrisme si parfait qui marque la fin d’une aventure vécue intensément avec un artiste à la sensibilité épanouie _ oui ! _, on éprouve une vraie tristesse à le quitter… On n’oublie pas les versions déjà historiques de Claudio Arrau, Lazar Berman, Alfred Brendel ou György Cziffra, pour ne citer qu’elles, ni des signatures plus récentes, celles de Bertrand Chamayou, Marie-Claire Le Guay, Vesselin Stanev ou Gabriel Stern. Mais la vision de Francesco Piemontesi ne peut que susciter d’absolus éloges _ parfaitement ! Notre plaisir d’écoute est de cette hauteur d’intimité et grandeur à la fois…

Autre monument, autre réussite, la Sonate en si mineur, achevée à Weimar le 2 février 1853, qui occupe seule le deuxième disque _ écouter et regarder aussi cette superbe prise vidéo (d’une durée de 29′ 35) de Francesco Piemontesi interprétant cette célèbre Sonate en si mineur en concert à Prague le 1er novembre 2020, au magnifique Rudolfinum ; le double CD Pentatone, lui, a été enregistré, 6 mois plus tard, à l’Auditorio Stelio Molo de la Radiotelevisione Svizzera (RSI) à Lugano en avril et mai 2021… La dimension introvertie _ assez stupéfiante ! _ avec laquelle Piemontesi entame _ et l’oreille et le goût doivent aussitôt s’y adapter !.. _ ce long propos met en place une architecture qui va peu à peu _ oui _ installer un climat où la virtuosité, la véhémence, la dynamique et la netteté _ elle est très importante, et m’enchante dans le jeu d’interprète ultra-exigeant envers le respect le plus grand de la partition qui est celui de Francesco Piemontesi… _ vont s’imposer. Cette musique à couper le souffle _ en effet _ prend sous les doigts du pianiste suisse un caractère qui allie la sidérante beauté plastique _ voilà _ imaginée par le génie lisztien à une tension qui ne se relâche pas _ voilà. Ce piano peut se nimber d’une grande pudeur _ oui, et tendresse _, comme se réclamer d’un appel à une dimension grandiose _ vers le sublime _ au sein de laquelle la démesure _ aussi _ se laisse libre cours. Mais Piemontesi n’oublie jamais, et c’est en cela qu’il nous séduit, de veiller à conserver une sonorité qui sait combiner le murmure (Andante sostenuto) à une intense réflexion _ oui. Il manie les plans sonores avec une habile science des contrastes _ jamais artificielle ni poussée _ et une noble sensibilité _ c’est essentiel ! _, qui va conclure la sonate comme si elle s’effaçait, à la manière d’un baisser de rideau.

Ici aussi, la discographie est riche. On chérit les grandes réussites d’Argerich, Arrau, Brendel, Cziffra, Horowitz et ses sorcelleries, Pogorelich, Pollini, Richter, Rubinstein trop oublié, Zimerman… Mais on s’attarde aussi à de plus proches de nous : Colom _ cet immense pianiste catalan que j’apprécie énormément (c’est lui qui, en 1995, m’a fait découvrir et adorer la merveilleuse musique à nulle autre pareille de Manuel Blasco de Nebra ; et écouter un Mompou aussi beau qu’interprété par Federico Mompou lui-même : cf notamment mon article « «  du 23 avril 2022…) _, Dalberto, Grosvenor, Hamelin, Hough ou Yundi Li. Francesco Piemontesi rejoint cette pléiade qualitative en servant _ voilà ! _ Liszt avec toute la passion et la grandeur qu’il mérite. Pour la petite histoire, on signalera que la notice de ce superbe _ oui, oui, oui _ double album est signée par Nike Wagner, arrière-arrière-petite-fille de Liszt et fille de Wieland Wagner _ en effet.

Son : 9  Notice : 7  Répertoire : 10  Interprétation : 10

Jean Lacroix

À nouveau,

une merveilleuse et indispensable réalisation discographique du décidément parfait, chaque fois, Francesco Piemontesi.

Ce mardi 19 septembre 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

La première de deux révélations majeures dans le stupéfiant CD de « L’heure espagnole » de Maurice Ravel par François-Xavier Roth et Les Siècles : l’éclatantissime talent du ténor Julien Behr…

20juin

Dans mon article d’avant-hier 18 juin « « ,

je m’empressais de donner un lien à la magique vidéo (d’une durée de 3′ 21), captée lors de l’enregistrement du CD de cette « Heure espagnole » de Maurice Ravel et Franc-Nohain, sous la direction de François-Xavier Roth, dans le quintette vocal final de la dernière scène,

magistralement servie aussi par cinq chanteurs d’un exceptionnel talent : la  mezzo-soprano Isabelle Druet (Concepcion : l’épouse coquette de l’horloger Torquemada), le ténor Julien Behr (Gonzalve : le bachelier poète), le ténor Loïc Félix (Torquemada : le mari horloger), le baryton Thomas Dolié (Ramiro : le muletier) et la basse Jean Teitgen (Don Inigo Gomez : le banquier) ;

et sous la direction, aussi, du chef de chant Mathieu Pordoy

_ à comparer, et c’est bien intéressant, avec le podcast (d’une durée, cette fois, de 3′ 06) de l’interprétation, considérée jusqu’ici comme de référence, sous la direction de Lorin Maazel, en 1965, et avec les chanteurs Jane Berbié (Concepcion), Michel Sénéchal (Gonzalve), Jean Giraudeau (Torquemada), Gabriel Bacquier (Ramiro) et José Van Dam (Don Inigo Gomez) : excusez du peu !.. Il leur a seulement probablement manqué, ce jour-là, le petit plus, un rien, mais qui fait toute la différence, de la patte d’un chef de chant aussi génial, oui, que Mathieu Pordoy… Et ce peut bien être à pareille aune-là qu’on peut mesurer par ici (Roth) et par  (Maazel) le degré de qualité, poétique et proprement magique, oui, de  l’exceptionnel talent de Mathieu Pordoy…

Ma première révélation, pour ce jour, concerne le ténor Julien Behr,

dont j’apprécie le talent superlatif, tant de comédien que de chanteur, dans le rôle du bachelier poète Gonzalve ;

ansi que cela éclate merveilleusement en la superbe vidéo de ce magistral bouquet final…

Une miraculeuse leçon d’esprit _ français _ et d’intelligence _ la plus purement ravelienne… _ de comédie et de chant !

Il n’est que de comparer la prestation donnée en ce CD-ci, avec la qualité formidable de clarté et de vie _ elles sont exceptionnelles ! _avec les précédentes interprétations proposées, le plus souvent hélas bien confuses, et parfois même scolaires _ sans direction assez intelligente, ni fidèle à l’esprit si fin, et de Franc-Nohain, et de Maurice Ravel… _, jusqu’ici en la discographie ;

du moins celles qui figurent en ma discothèque personnelle :

_ celle dirigée par Manuel Rosenthal, en 1944 _ en un CD Ina Mémoire vive _ ;

_ celle dirigée par André Cluytens, en 1952 en un coffret Erato  _ ;

_ celle dirigée par Lorin Maazel, en 1965 _ en un double CD Warner _  ;

_ celle dirigée par Armin Jordan, en 1985 _ en un coffret Warner _  ;

_ et celle dirigée par Stéphane Denève en 2014 _ en un CD SWD Music.

Ce qui m’a incité à désirer très vivement approfondir ma connaissance des précédentes réalisations discographiques de cet excellentissime Julien Behr ;

comme, par exemple, son incarnation de Pelléas dans le « Pelléas et Mélisande » de Claude Debussy, sous la direction, déjà, de François-Xavier Roth, et avec Les S!ècles _ soit le triple CD Harmonia Mundi HMM 935352.54…

Mais aussi dans un récital d’airs français intitulé « Confidence« , soit le CD Alpha 401, paru en 2018 ;

que je suis allé, illico presto, commander à mon disquaire préféré…

Surtout quand je me suis aperçu qu’y figurait, tout au final de ce récital, une sublime interprétation _ l’écouter ici  ; ou bien la regarder _ de la chanson de Charles Trénet, en 1936, « Vous qui passez sans me voir« …

La chanson préférée de ma mère (11 février 1918 – 27 octobre 2018)…

Et demain, je développerai ma seconde révélation majeure, et cruciale !, d’après cette sublime vidéo du quintette vocal final de cette « Heure espagnole« , si magnifiquement dirigée en ee magistral CD…

Ce mardi 20 juin 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

Une interprétation magistrale et bouleversante de tendresse de 4 chefs d’oeuvre de Schubert par l’immense Lars Vogt et Tanja et Christian Tetzlaff : un trésor pour l’île déserte…

29avr

C’est un double CD absolument exceptionnel _ Ondine ODE 1394 _ qu’Ondine aujourd’hui nous donne _ qu’on écoute pour commencer déjà rien que ces fabuleux courts extraits-ci Qui y résisterait ??? _

avec l’interprétation magistrale bouleversante de tendresse vraie, irremplaçable, et surtout qui nous donne, quasi miraculeusement, à recevoir, à l’écoute, comme absolue, enfin, les œuvres ainsi interprétées en leur essence schubertienne même,

que viennent ainsi nous offrir avec une intensité et une justesse de sens jamais atteinte jusqu’ici à un tel degré de vérité aussi pure _ écoutez jusqu’aux silences de leurs respirations musicales !.. _,

l’immense _ et infiniment regretté et pleuré de tous ; cf mon article du 6 septembre 2022 : « « , qui comporte aussi un commode récapitulatif des articles que je lui avais consacrés (depuis le 17 octobre 2009) à la date de son décès le 5 septembre 2022 _ Lars Vogt (Düren, 8 septembre 1970 – Erlangen, 5 septembre 2022), au piano,

et ses amis, si proches, les magnifiques, eux aussi, Tanja Tetzlaff (Hambourg, 1973), au violoncelle, et son frère Christian Tetzlaff (Hambourg, 29 avril 1966), au violon,

dans, surtout, quatre des chefs d’œuvre absolus, miraculeux, de Franz Schubert (Lichtental, 31 juillet 1797 – Vienne, 19 novembre 1828),

que sont les deux Trios avec piano,

le premier, en si bémol majeur, Op. 99 (D. 898) _ créé chez Joseph von Spaun le 28 janvier 1828 _

et le second, en mi bémol majeur, Op. 100 (D. 929) _ créé au Musikverein de Vienne le 28 décembre 1827 _,

le fragment de Trio dit Notturno, en mi bémol majeur, Op. 148 (D. 897) _ de 1827 : probablement un mouvement non retenu du Trio Op. 100, et sublime lui aussi… _,

et la Sonate Arpeggione (D. 821) _ composée à Vienne en novembre 1824 pour son ami Vincenz Schuster.

Et c’est absolument exceptionnel !!!

Nos larmes coulent en abondance et de peine et de joie…

Sur ce double CD miraculeux,

cf aussi le bien bel article de Patrice Imbaud intitulé « Lars Vogt, Tanja et Christian Tetzlaff, bouleversants dans le dernier Schubert« , paru le 25 avril dernier, sur le site de ResMusica :

Lars Vogt, Tanja et Christian Tetzlaff bouleversants dans le dernier Schubert

Véritable chant du cygne, ce dernier enregistrement de Lars Vogt accompagné de Tanja et Christian Tetzlaff, constitue une nouvelle poignante et douloureuse référence dans les Trios avec piano de Schubert. In memoriam.

Cet album prend bien évidemment une dimension particulière lorsque l’on sait que le pianiste , décédé le 5 septembre 2022, a débuté cet enregistrement des deux Trios avec piano op. 99 et op. 100, du Nocturne op. 148, du Rondo pour violon et piano et de la Sonate « Arpeggione », contre avis médical, alors qu’il était déjà sous traitement _ voilà _ et se savait probablement condamné… Il n’est pas hasardeux non plus de penser que c’est délibérément _ oui _ que le pianiste allemand a choisi ces dernières œuvres de Schubert où la mort rôde… Composés fin 1827-1828, juste avant la mort du compositeur _ le 19 novembre 1828 _ et probablement _ oui _ l’un à la suite de l’autre, les deux grands _ tout simplement merveilleux, l’un et l’autre _  Trios avec piano opus 99 et opus 100, sont tout à la fois le même, par ce mélange typiquement schubertien de joie et de tristesse, et l’autre, par leur climat dissemblable, plus lumineux et lyrique pour l’opus 99, plus sombre pour l’opus 100.

Lars Vogt et ses amis nous en livrent une interprétation mémorable _ et comment !!! _ comme suspendue _ écoutez la ferveur des respirations et silences musicaux… _ entre ciel et terre, faite d’équilibre _ oui, avec une parfaite et justissime humilité _ , de subtilité _ oui _, de couleurs et de superbes nuances, portée par une écoute complice _ de toujours _ et une expressivité dont l’éloquence donne forme à l’indicible _ voilà ! _ et force _ absolument ! _  l’admiration. On admire sans réserve l’allegro lyrique et contrasté du Trio n° 1, son andante mélancolique et rêveur, son scherzo malicieux et bondissant, autant que son rondo final jubilatoire et résolu. Et on souscrit aussi totalement à l’ambiguïté palpable du Trio n°2 hésitant entre révolte et plainte déchirante dans l’allegro, bientôt suivi de la mélodie hypnotique et élégiaque de l’andante, précédant elle-même un scherzo dansant d’où sourd une fragrance de résignation, avant un final aux parfums de fête forcée, hanté par la résurgence du lugubre thème de l’andante, chanté par le violoncelle, comme une menace _ de bien belles analyses…

Contemporain des deux trios, le Nocturne op. 148 (1827) conclut cette progression dramatique dans une interprétation à vous tirer les larmes _ oui ! _ où la désolation acceptée cède progressivement le pas, après quelques sursauts, à une apaisante quiétude.

Deux œuvres en duo complètent _ généreusement _ ce copieux double album : le Rondo D 895 (1826) pour violon et piano _ avec Christian Tetzlaff _ et la _ si belleSonate « Arpeggione » (1824) pour violoncelle et piano _ avec Tanya Tetzlaff : tous deux amis très proches, et vieux complices musicaux (cf les merveilleux concerts et CDs du Festival Spannungen de Heimach, qu’avait créé et dirigeait Lars Vogt) de Lars Vogt… De sublimes CDs à thésauriser !!! Le premier donne libre cours à la virtuosité et à la complicité de et de Lars Vogt. La seconde, plus consistante _ quel chef d’œuvre, elle aussi !.. _, permet de gouter l’impressionnante digitalité de et à la belle sonorité de son violoncelle Giovanni Baptista Guadagnini de 1776 dans une lecture à la fois lyrique et tendue d’un charme envoûtant _ oui, oui : absolument !

Rien d’hagiographique, ni de pathétique _ surtout pas, en effet… _ dans cette élogieuse chronique, mais simplement _ oui _  un _ tout simple _ constat _ de fait, oui ! _ fait par Lars Vogt lui-même à la fin de l’enregistrement : « J’ai un peu l’impression que tout dans ma vie s’est développé vers cet opus 100… s’il ne reste pas beaucoup de temps, alors c’est un adieu digne » et sans doute beaucoup plus que ça… un legs _ absolument _ magistral !

Franz Schubert (1797-1828) :

Trio pour piano et cordes n° 1 en si bémol majeur D 898 op. 99 ;

Trio pour piano et cordes n° 2 en mi bémol majeur D 929 op. 100 ;

Nocturne pour trio avec piano D 897 op. 148 ;

Rondo pour violon et piano D 895 op. 70 ;

Sonate « Arpeggione » en la mineur D 821.

Lars Vogt, piano ; Tanja Tetzlaff, violoncelle ; Christian Tetzlaff, violon.

2 CD Ondine.

Enregistrés du 21 au 25 février et du 10 au 11 juin 2021 _ pour le Trio Op. 99 _ à la Sendesaal de Brême.

Notice bilingue : anglais-allemand. Durée totale : 136:45

 

 

Un double CD pour l’île déserte.

Ce samedi 29 avril 2023, Titus Curiosus – Francis Lippa

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